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26/10/2023 | FRANCE | N°22VE00537

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 26 octobre 2023, 22VE00537


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Rassemblement pour l'Etude de la Nature et l'Aménagement de Roissy-en-Brie et son District (RENARD) a demandé au tribunal administratif de Versailles l'annulation de l'arrêté du 17 septembre 2018 par lequel le maire de Draveil ne s'est pas opposé à la déclaration préalable n° DP 0912011810204 déposée par la commune de Draveil en vue de la coupe et l'abattage d'arbres avenue Marcellin Berthelot à Draveil.

Par un jugement n° 2000056 du 10 janvier 2022, le tribunal administratif de Ve

rsailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Rassemblement pour l'Etude de la Nature et l'Aménagement de Roissy-en-Brie et son District (RENARD) a demandé au tribunal administratif de Versailles l'annulation de l'arrêté du 17 septembre 2018 par lequel le maire de Draveil ne s'est pas opposé à la déclaration préalable n° DP 0912011810204 déposée par la commune de Draveil en vue de la coupe et l'abattage d'arbres avenue Marcellin Berthelot à Draveil.

Par un jugement n° 2000056 du 10 janvier 2022, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 8 mars et 28 septembre 2022, l'association RENARD, représentée par Me Vernerey, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Draveil la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

S'agissant de la régularité du jugement :

- le tribunal n'a pas pris en compte tous les éléments du dossier et n'a pas fait application de ses pouvoirs d'instruction malgré la demande présentée en ce sens par l'association pour obtenir la communication des annexes à l'étude phytosanitaire de 2018 ;

- le jugement est insuffisamment motivé en ce qu'il ne détaille pas pour quels motifs les éléments produits dans le cadre de son rapport sur l'intérêt naturaliste de l'alignement des tilleuls, datant du 4 septembre 2019, sont " peu concluants " ;

S'agissant du bien-fondé du jugement :

- le dossier de déclaration était insuffisant dès lors que le CERFA ne mentionne pas que le projet est situé dans une ZAC ; la commune ne mentionne pas davantage que l'abattage des arbres s'inscrit dans un projet d'aménagement comprenant notamment, la réalisation de places de stationnement en surface ouvertes au public, des travaux d'affouillement pour les réseaux d'eau à réhabiliter, la réalisation de travaux modifiant l'aménagement d'espaces non bâtis autour d'un monument historique situé dans un site patrimonial remarquable (SPR) ; la commune n'a pas trouvé utile de mentionner l'ajout de mobilier urbain et la modification des voies et des espaces publics, travaux concomitants à l'abattage des arbres ; le dossier ne comprend aucun plan de situation ; le descriptif du projet se limite à un planning prévisionnel de l'abattage des arbres et de leur replantation ; aucun plan des abattages au fur et à mesure du planning n'est donné ; le dossier se fonde par ailleurs sur deux études phytosanitaires de 2010 et 2018, pourtant valables qu'un an ; le maître d'œuvre ou l'assistant au maître d'ouvrage n'est pas désigné alors même que les mesures de compensation sont à la charge de ce dernier ; rien n'est prévu au titre de la compensation financière obligatoire prévue à l'article L. 350-3 du code de l'environnement et l'arrêté ne prévoit pas la mise en œuvre de la dérogation prévue à l'article L. 350-3 du code de l'environnement ;

- l'arrêté ne prévoit pas les mesures compensatoires, pourtant obligatoires, en méconnaissance de l'article L. 350-3 du code de l'environnement ;

- l'arrêté méconnaît l'article L. 411-1 du code de l'environnement et l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales dès lors que le maire n'a pas fait procéder aux études préalables de recensement d'espèces potentiellement protégées ;

- l'arrêté, qui autorise l'abattage des arbres des quatre alignements, méconnaît les dispositions de l'article L. 350-3 du code de l'environnement alors que la dernière étude indique que 113 arbres avaient une espérance de vie supérieure à dix ans ;

- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'AVAP, devenu site patrimonial remarquable (SPR), applicables à la commune de Draveil ;

- l'arrêté est entaché d'un détournement de procédure ; la commune aurait dû solliciter une demande globale de travaux de réhabilitation incluant l'abattage de certains arbres soit en raison de leur état sanitaire ou mécanique ou en raison des opérations-mêmes de travaux.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 16 septembre et 27 octobre 2022, la commune de Draveil, représentée par Me Bluteau, conclut au rejet de la requête d'appel et demande à la cour que soit mise à la charge de l'association RENARD la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens invoqués par l'association sont infondés.

Par une ordonnance du 2 novembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 novembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florent,

- les conclusions de Mme Villette, rapporteure publique,

- et les observations de Me Robert, pour l'association RENARD et de Me Zadeh, substituant Me Bluteau, pour la commune de Draveil.

Considérant ce qui suit :

1. Par la présente requête, l'association RENARD relève appel du jugement du 10 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 septembre 2018 par laquelle le maire de Draveil ne s'est pas opposé à la déclaration préalable n° DP 0912011810204 déposée par la commune de Draveil en vue de la coupe et l'abattage de 366 arbres avenue Marcellin Berthelot à Draveil.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. L'association RENARD ne peut donc utilement soutenir que les premiers juges n'auraient pas pris en compte tous les éléments du dossier pour demander l'annulation du jugement attaqué dès lors qu'une telle critique tend en réalité à remettre en cause le bien-fondé du jugement. L'association ne saurait pas ailleurs soutenir que les premiers juges ont méconnu leur office en s'abstenant de procéder à une mesure d'instruction afin d'obtenir la communication des annexes à l'étude phytosanitaire de 2018, malgré la demande présentée en ce sens par l'association, dès lors que les pièces produites à l'instance permettaient aux premiers juges d'avoir une vision éclairée du litige et qu'une telle pièce ne commandait pas la réponse aux moyens de la requête.

3. Enfin, si l'association RENARD soutient que le jugement est insuffisamment motivé en ce qu'il ne détaille pas pour quels motifs les éléments produits dans le cadre de son rapport du 4 septembre 2019 sur l'intérêt naturaliste de l'alignement des tilleuls sont " peu concluants ", le jugement précise toutefois que ce rapport " échoue à démontrer la présence d'un seul habitat de pipistrelle ou d'oiseau protégé dans les arbres à abattre ". Par suite, le moyen doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

S'agissant du caractère insuffisant du dossier de déclaration préalable :

4. En vertu des dispositions de l'article L. 421-4 du code de l'urbanisme, sont soumis à déclaration préalable, sauf exception prévue par décret, les coupes et abattages d'arbres dans les bois, forêts ou parcs situés sur le territoire de communes où l'établissement d'un plan local d'urbanisme a été prescrit ainsi que dans tout espace boisé identifié en application des articles L. 113-1, L. 151-19 ou L. 151-23 ou classé en application de l'article L. 113-1.

5. Aux termes de l'article R. 441-9 du code de l'urbanisme, dans rédaction applicable au présent litige : " La déclaration préalable précise : / a) L'identité du ou des déclarants, qui comprend son numéro SIRET lorsqu'il s'agit d'une personne morale en bénéficiant et sa date de naissance lorsqu'il s'agit d'une personne physique ; / b) La localisation et la superficie du ou des terrains ; / c) La nature des travaux ou la description du projet de division ; / d) S'il y a lieu, que les travaux portent sur une installation, un ouvrage, des travaux ou une activité soumis à déclaration en application de la section 1 du chapitre IV du titre Ier du livre II du code de l'environnement ; / e) S'il y a lieu, que les travaux portent sur un projet soumis à autorisation environnementale en application de l'article L. 181-1 du code de l'environnement ; / f) S'il y a lieu, que les travaux doivent faire l'objet d'une dérogation au titre du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. / La déclaration comporte également l'attestation du ou des déclarants qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R*423-1 pour déposer une déclaration préalable. (...) " Aux termes de l'article R. 441-10 du même code : " Le dossier joint à la déclaration comprend : / a) Un plan permettant de connaître la situation du terrain à l'intérieur de la commune ; / b) Un plan sommaire des lieux indiquant les bâtiments de toute nature existant sur le terrain ; / c) Un croquis et un plan coté dans les trois dimensions de l'aménagement faisant apparaître, s'il y a lieu, la ou les divisions projetées. / Il est complété, s'il y a lieu, par les documents mentionnés à l'article R. 441-4-1, au a de l'article R. 441-6, aux articles R. 441-6-1 à R. 441-8-1 et au b de l'article R. 442-21. " Enfin, l'article R. 441-10-1 du même code précise que : " Aucune autre information ou pièce ne peut être exigée par l'autorité compétente. "

6. En premier lieu, si l'association RENARD fait valoir que le dossier de déclaration ne mentionne pas qu'une partie du projet se situait dans une zone d'aménagement concertée et ne détaille pas le phasage des travaux de coupe et d'abattages, il ressort des pièces du dossier que le dossier d'autorisation joint à la déclaration préalable mentionne une étape de " restauration de l'avenue au niveau de la ZAC " et permet également de connaître les étapes de l'abattage en précisant les alignements concernés. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient l'association requérante, le dossier d'autorisation comporte un plan permettant de connaître la situation de l'avenue sur le territoire de la commune, précise que l'abattage d'arbres s'inscrit dans un projet d'aménagement plus large de l'avenue et que le site est classé en site patrimonial remarquable. En troisième lieu, si l'association RENARD affirme que le dossier de déclaration produit par la commune s'est fondé sur deux études phytosanitaires réalisées en 2010 et 2018 qui n'étaient plus valables, la dernière étude a toutefois été réalisée en mars 2018, soit quelques mois avant le dépôt de la déclaration préalable litigieuse et la décision de non-opposition attaquée. En quatrième lieu, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au déclarant de produire un plan de financement des travaux, ni de préciser l'identité du maître d'œuvre ou de l'assistant à maîtrise d'ouvrage. En dernier lieu, si l'association RENARD fait valoir que le dossier ne mentionne pas les mesures de compensation prévues à l'article L. 350-3 du code de l'environnement, le dossier prévoit toutefois des travaux de replantation des arbres abattus au premier trimestre 2021 au titre du projet de réaménagement et prévoient que 60 000 euros seront consacrés à l'entretien et à la garantie des plantations, de sorte que les mesures compensatoires ont bien été prévues. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'insuffisance du dossier de déclaration préalable doit être écarté.

S'agissant de la méconnaissance des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement :

7. Aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'environnement : " I. - Lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits : (...) 3° La destruction, l'altération ou la dégradation de ces habitats naturels ou de ces habitats d'espèces ; (...) " Aux termes de l'article L. 411-2 du même code : " I. - Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles sont fixées : 1° La liste limitative des habitats naturels, des espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées ainsi que des sites d'intérêt géologique, y compris des types de cavités souterraines, ainsi protégés ; / 2° La durée et les modalités de mise en œuvre des interdictions prises en application du I de l'article L. 411-1 ; / 3° La partie du territoire sur laquelle elles s'appliquent, qui peut comprendre le domaine public maritime, les eaux intérieures la mer territoriale, la zone économique exclusive et le plateau continental ; / 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1 , à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pouvant être évaluée par une tierce expertise menée, à la demande de l'autorité compétente, par un organisme extérieur choisi en accord avec elle, aux frais du pétitionnaire, et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle (...) "

8. Aux termes de l'article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est chargé, sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, de la police municipale, de la police rurale et de l'exécution des actes de l'Etat qui y sont relatifs. " Aux termes de l'article L. 2212-2 du même code : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques "

9. Aux termes de l'article L. 425-15 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet porte sur des travaux devant faire l'objet d'une dérogation au titre du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, le permis ou la décision de non-opposition à déclaration préalable ne peut pas être mis en œuvre avant la délivrance de cette dérogation ".

10. La société RENARD fait grief au maire de Draveil de ne pas avoir fait réaliser des études de recensement d'espèces potentiellement protégées au titre de ses pouvoirs de police générale avant de solliciter, en fonction du résultat de ces études et en l'absence de solution plus satisfaisante, l'obtention de la dérogation prévue au 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. Toutefois, la liste limitative des pièces exigibles à l'appui d'une déclaration préalable énumérées au point 5 exclut la possibilité pour le maire d'user des pouvoirs de police qu'il tient des articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales pour exiger et conditionner la délivrance de l'autorisation d'urbanisme à la réalisation d'études non prévues par ces dispositions. Or il ne ressort pas des dispositions citées au point 5 que l'autorisation d'abattage en litige était conditionnée à une étude d'impact. Par ailleurs, il résulte des termes de l'article L. 425-15 du code de l'urbanisme que l'autorisation d'urbanisme n'est pas subordonnée à l'obtention préalable de la dérogation délivrée en application de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. L'absence d'une telle dérogation est par suite sans incidence sur la légalité de la décision de non-opposition à déclaration préalable et le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement, tel qu'il est formulé, ne peut qu'être écarté. En tout état de cause, les relevés effectués par l'association RENARD sont insuffisants pour établir que la présence sur les terrains concernés par l'opération de site de reproduction ou d'aires de repos d'espèce protégées.

S'agissant de la méconnaissance de l'article L. 350-3 du code de l'environnement :

11. Aux termes de l'article L. 350-3 du code de l'environnement, dans sa version applicable à la date de l'arrêté attaqué : " (...) Le fait d'abattre, de porter atteinte à l'arbre, de compromettre la conservation ou de modifier radicalement l'aspect d'un ou de plusieurs arbres d'une allée ou d'un alignement d'arbres est interdit, sauf lorsqu'il est démontré que l'état sanitaire ou mécanique des arbres présente un danger pour la sécurité des personnes et des biens ou un danger sanitaire pour les autres arbres ou bien lorsque l'esthétique de la composition ne peut plus être assurée et que la préservation de la biodiversité peut être obtenue par d'autres mesures. / Des dérogations peuvent être accordées par l'autorité administrative compétente pour les besoins de projets de construction. / Le fait d'abattre ou de porter atteinte à l'arbre, de compromettre la conservation ou de modifier radicalement l'aspect d'un ou de plusieurs arbres d'une allée ou d'un alignement d'arbres donne lieu, y compris en cas d'autorisation ou de dérogation, à des mesures compensatoires locales, comprenant un volet en nature (plantations) et un volet financier destiné à assurer l'entretien ultérieur. "

12. Il résulte de l'article L. 350-3 du code de l'environnement que le fait d'abattre ou de porter atteinte à un ou à plusieurs des arbres qui composent une allée ou un alignement d'arbres le long des voies de communication est interdit, sauf si l'abattage ou l'atteinte est nécessaire pour des motifs sanitaires, mécaniques ou esthétiques ou s'il a été autorisé, à titre dérogatoire, pour la réalisation d'un projet de construction. L'abattage ou l'atteinte portée à un ou plusieurs arbres composant une allée ou un alignement doit donner lieu à des mesures compensatoires locales.

13. En l'espèce, pour prendre la décision contestée, le maire de Draveil s'est appuyé notamment sur les conclusions de deux expertises, réalisées, respectivement le 13 avril 2010, puis en mars 2018. La première étude réalisée par M. A..., ingénieur agronome, expert en horticulture près la Cour d'appel de Versailles a conclu à la nécessité d'une " rénovation " à court terme qu'il a jugée inéluctable, de nombreux arbres devenant dangereux et des accidents étant à craindre. Son étude qui a porté sur l'intégralité des 384 tilleuls présents sur le site à cette date, constate que " les arbres diagnostiqués présentent essentiellement des " défauts de solidité " et relève des " défauts non remédiables " (p.23). Cette étude souligne la nécessité d'abattre, pour des raisons de sécurité, un total de 243 tilleuls de l'avenue d'ici 10 ans (58 en urgence en 2010, 12 entre 2010 et 2013, 97 entre 2013 et 2015 et 76 entre 2015 et 2020), les 141 autres cas n'ayant pas pu donner lieu à une espérance de maintien déterminée (p.17). Prévoyant qu'à terme de 10 années, près de 68 % des emplacements des arbres du quadruple alignement seront vacants, elle préconise également le changement complet par sections des arbres de l'avenue (p. 23), solution identifiée la plus adaptée. La seconde étude, réalisée par la société " l'arbre dans le paysage " en mars 2018, qui recense à cette date 366 arbres sur l'avenue, conforte les conclusions de la précédente étude quant à la dangerosité des tilleuls de l'avenue, en soulignant que 155 tilleuls sur le site sont dangereux, 94 sujets ont une tenue mécanique médiocre (cavités sur tronc et charpentières entrainant des défauts mécaniques importants). Elle précise que 81 tilleuls doivent être abattus en urgence en 2018 et 86 autres en 2019, l'espérance de maintien étant inférieure à 5 ans pour 61 unités, et à 10 ans pour 25 unités, alors que restent en maintien au-delà de 10 ans seuls 113 sujets. Elle indique qu'au vu de l'espérance de maintien des arbres de l'avenue Marcellin Berthelot, il subsisterait après abattage des arbres avec une espérance de maintien inférieure à 1, 2 et 5 ans, 138 sujets au total, soit 37,5 % des arbres existants, les arbres restants étant dispersés sur toute la longueur de chaque alignement (37 sujets pour l'alignement I, 22 sujets pour l'alignement II, 40 sujets pour l'alignement III et 39 sujets pour l'alignement IV) et en conclut, comme l'avait fait la première étude, qu'une " rénovation totale de l'avenue Marcellin Berthelot est indispensable ", privilégiant également la solution du changement complet par section, la solution consistant à replanter sujet par sujet mise en œuvre jusqu'en 2018 étant vouée à l'échec compte tenu notamment de l'ombrage excessif que subissent les jeunes arbres de la part des plus anciens et de la fragilisation de ceux-ci.

14. De sorte que s'il n'apparaît pas que l'état sanitaire ou mécanique de l'ensemble des quelques 366 arbres constituant le quadruple alignement de tilleuls présente un danger pour la sécurité des personnes et des biens ou un danger sanitaire pour les autres arbres, c'est à tout le moins, l'état sanitaire ou mécanique de deux tiers des tilleuls (soit près de 228 sujets), qui présente ce caractère de dangerosité, ainsi qu'il ressort des deux études phytosanitaires, et justifie que ceux-ci soient abattus, le tiers restant devant être remplacé afin d'assurer une croissance homogène et d'ensemble des nouveaux alignements, " l'esthétique de la composition ne pouvant plus être assurée " autrement.

15. Il s'ensuit que la décision de non-opposition à la déclaration de travaux en litige, fondée sur des motifs sanitaires, mécaniques et esthétiques, ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 350-3 du code de l'environnement. Eu égard par ailleurs aux motifs sur lesquels elle se fonde, cette décision n'octroie aucune dérogation pour la réalisation d'un projet de construction prévue par le troisième alinéa de l'article L. 350-3 du code de l'environnement et n'avait donc en tout état de cause pas à en faire mention. Enfin et ainsi qu'il a déjà été dit au point 6, le dossier d'autorisation précise que l'abattage des arbres contesté doit être suivi d'une replantation ainsi que le plan de financement pour l'entretien des arbres. L'autorisation accordée étant conditionnée au respect des mesures compensatoires prévues par le dossier de déclaration, l'absence de mention des mesures compensatoires obligatoires dans l'arrêté lui-même est sans incidence sur sa légalité.

S'agissant de la méconnaissance du règlement de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine :

16. Si l'association RENARD soutient que les travaux de replantation ne sont pas conformes au règlement de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine (AVAP) qui prévoit que " l'espacement existant entre les arbres permettant une bonne densité devra être conservé en cas de plantation ", la décision attaquée se borne toutefois à autoriser la coupe et l'abattage des 366 arbres de l'avenue Marcelin Berthelot et n'a pas pour objet de régir les travaux futurs de replantation. Le moyen tiré de ce que ces travaux de replantation ne seraient pas conformes au règlement de l'AVAP doit donc être écarté comme inopérant.

S'agissant du détournement de procédure :

17. En dernier lieu, l'association requérante soutient que la commune aurait dû présenter une demande globale de travaux de réhabilitation incluant l'abattage de certains arbres, soit en raison de leur état sanitaire ou mécanique ou en raison des opérations-mêmes de travaux et que la procédure de déclaration préalable a pour objet de permettre l'abattage de l'intégralité des arbres et non uniquement de ceux dont la coupe est rendue nécessaire par les travaux de réhabilitation du quartier. Ainsi qu'il a été dit au point 14 toutefois, l'état sanitaire ou mécanique des deux tiers des tilleuls concernés par l'autorisation présente un danger. Par suite, le détournement de procédure allégué n'est pas établi.

18. Il résulte de tout ce qui précède que l'association RENARD n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 septembre 2018.

Sur les frais relatifs à l'instance d'appel :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Draveil, qui n'est pas la partie perdante dans le cadre de la présente instance, la somme que l'association RENARD sollicite au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu par ailleurs de mettre à la charge de l'association requérante la somme que sollicite la commune de Draveil au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l'association RENARD est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Draveil sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Rassemblement pour l'Etude de la Nature et l'Aménagement de Roissy-en-Brie et son District et à la commune de Draveil.

Délibéré après l'audience du 5 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Albertini, président,

- M. Pilven, président assesseur,

- Mme Florent, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 octobre 2023.

La rapporteure,

J. FLORENTLe président,

P-L ALBERTINI

La greffière,

F. PETIT-GALLAND

La République mande et ordonne au préfet de l'Essonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 22VE00537


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22VE00537
Date de la décision : 26/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-042-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Autorisations d`utilisation des sols diverses. - Autorisations relatives aux espaces boisés. - Autorisation de coupe et d'abattage d'arbres.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: Mme Julie FLORENT
Rapporteur public ?: Mme VILLETTE
Avocat(s) : BLUTEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-10-26;22ve00537 ?
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