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03/10/2023 | FRANCE | N°21VE02005

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 03 octobre 2023, 21VE02005


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 22 novembre 2018 par laquelle la commission ferroviaire d'aptitudes a maintenu le certificat du médecin agréé du 9 octobre 2018 le déclarant inapte physiquement à l'exercice des tâches essentielles pour la sécurité ferroviaire autres que la conduite de trains, ainsi que ce certificat d'inaptitude.

Par un jugement n° 1905821 du 10 juin 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.<

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Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 juillet 2021, M. A...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 22 novembre 2018 par laquelle la commission ferroviaire d'aptitudes a maintenu le certificat du médecin agréé du 9 octobre 2018 le déclarant inapte physiquement à l'exercice des tâches essentielles pour la sécurité ferroviaire autres que la conduite de trains, ainsi que ce certificat d'inaptitude.

Par un jugement n° 1905821 du 10 juin 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 juillet 2021, M. A..., représenté par la S.E.L.A.F.A. cabinet Cassel, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 22 novembre 2018 de la commission ferroviaire d'aptitudes et le certificat d'inaptitude du 9 octobre 2018 ;

3°) d'enjoindre au ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports, de réexaminer son dossier sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens de l'instance.

Il soutient que :

- le certificat d'inaptitude du 9 octobre 2018 est entaché d'erreur de droit en ce qu'il est motivé par son seul strabisme et non une affection recensée dans l'arrêté du 7 mai 2015 ;

- la motivation de la décision de la commission ferroviaire d'aptitudes attaquée contredit celle du certificat d'inaptitude du 9 octobre 2018 ;

- les décisions attaquées sont entachées d'erreur d'appréciation, dès lors que le strabisme dont il souffre ne l'a pas empêché d'exercer des fonctions qui nécessitaient également un certificat d'aptitude et que le port de verres correcteurs n'a pas été pris en compte.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2021, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 9 juin 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 29 juin 2023, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions à fin d'annulation dirigées contre le certificat d'aptitude du 9 octobre 2018, auquel s'est substituée la décision de la commission ferroviaire d'aptitudes du 22 novembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des transports ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le décret n° 2017-527 du 12 avril 2017 ;

- le décret n° 2010-708 du 29 juin 2010 ;

- le décret n° 2006-1279 du 19 octobre 2006 ;

- l'arrêté du 7 mai 2015 modifié relatif aux tâches essentielles pour la sécurité ferroviaire autres que la conduite des trains, pris en application des articles 6 et 26 du décret n° 2006-1279 du 19 octobre 2006 modifié relatif à la sécurité des circulations ferroviaires et à l'interopérabilité du système ferroviaire ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Pham, première conseillère,

- et les conclusions de Mme Viseur-Ferré, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Dans la perspective d'un reclassement sur un poste de contrôleur à bord des trains, M. A..., alors vendeur pour SNCF TER Proximité Occitanie, a été soumis à une visite médicale d'aptitude. Par un certificat du 9 octobre 2018, le médecin agréé de la SNCF a déclaré M. A... inapte physiquement à l'exercice des tâches essentielles pour la sécurité ferroviaire autres que la conduite de trains. M. A... a formé un recours à l'encontre de ce certificat, qui a été rejeté par une décision du 22 novembre 2018 de la commission ferroviaire d'aptitudes. Il relève appel du jugement du 10 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation du certificat d'inaptitude du 9 octobre 2018 et de la décision de la commission ferroviaire d'aptitudes du 22 novembre 2018.

Sur la recevabilité des conclusions à fin d'annulation dirigées contre le certificat d'inaptitude du 9 octobre 2018 :

2. Aux termes de l'article L. 2221-7-1 du code des transports : " Les personnels exerçant, sur le réseau ferré national, lorsqu'il est offert une capacité d'infrastructure, les tâches essentielles pour la sécurité ferroviaire énumérées par un arrêté du ministre chargé des transports sont soumis à une vérification de leur aptitude dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / Le recours à l'encontre des décisions d'inaptitude s'effectue dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 2221-8 (...) ". Aux termes de l'article L. 2221-8 du même code : " (...). Un recours devant une commission ferroviaire d'aptitudes peut être formé à l'encontre d'une décision du médecin (...) ". Aux termes de l'article 8 du décret du 12 avril 2017 relatif aux conditions d'aptitude physique et psychologique des personnels habilités aux tâches essentielles de sécurité ferroviaire autres que la conduite de trains : " Les recours portant sur l'aptitude physique et psychologique des personnels mentionnés à l'article L. 2221-7-1 du code des transports sont présentés devant la commission ferroviaire d'aptitudes dans les conditions prévues au 6° du II de l'article 10 du décret du 29 juin 2010 susvisé ". Aux termes de l'article 10 du décret du 29 juin 2010 relatif à la certification des conducteurs de trains : " (...) II. ' La commission est chargée : (...) 6° De se prononcer sur le recours de toute partie intéressée portant sur l'aptitude physique et psychologique d'un conducteur de trains et d'un membre du personnel mentionné à l'article L. 2221-7-1 du code des transports. Ce recours est exercé dans un délai de deux mois suivant la date de délivrance du certificat d'aptitude ou d'inaptitude. La commission peut exiger du demandeur qu'il produise une expertise complémentaire réalisée dans les conditions des II et III de l'article 4. Elle peut demander l'avis d'un médecin spécialiste dans l'affection faisant l'objet du recours. Elle peut également demander l'avis d'un expert spécialisé dans la conduite de trains et dans les tâches essentielles pour la sécurité ferroviaire. La décision de la commission s'impose à la partie intéressée. Elle est susceptible de recours devant le juge administratif. (...) ".

3. L'institution par les dispositions précitées d'un recours administratif, préalable obligatoire à la saisine du juge, a pour effet de laisser à l'autorité compétente pour en connaître le soin d'arrêter définitivement la position de l'administration. Il s'ensuit que la décision de la commission ferroviaire d'aptitudes du 22 novembre 2018 s'est substituée au certificat d'inaptitude du 9 octobre 2018 et est seule susceptible d'être déférée au juge de la légalité. Par suite, les conclusions de M. A... tendant à l'annulation du certificat d'inaptitude physique du 9 octobre 2018 sont irrecevables et doivent, pour ce motif, être rejetées.

Sur le surplus des conclusions à fin d'annulation :

4. Aux termes de l'article 6 du décret du 19 octobre 2006 relatif à la sécurité des circulations ferroviaires et à l'interopérabilité du système ferroviaire : " V. - Les personnels mentionnés à l'article L. 2221-7-1 du code des transports sont habilités, par leur employeur, à exercer des tâches essentielles pour la sécurité ferroviaire lorsque : (...) 2° Ils détiennent les certificats, en cours de validité, d'aptitude physique et psychologique prévus par le décret n° 2017-527 du 12 avril 2017 relatif aux conditions d'aptitude physique et psychologique des personnels habilités aux tâches essentielles de sécurité ferroviaire autres que la conduite de trains (...) ". Aux termes de l'article 3 du décret du 12 avril 2017 relatif aux conditions d'aptitude physique et psychologique des personnels habilités aux tâches essentielles de sécurité ferroviaire autres que la conduite de trains : " I. - L'aptitude physique des personnels mentionnés à l'article L. 2221-7-1 du code des transports est constatée, après un examen, par un médecin agréé, le cas échéant au vu des examens complémentaires qu'il a prescrits. Cet examen donne lieu à la délivrance d'un certificat d'aptitude physique (...) ". Aux termes de l'article 16 de l'arrêté du 7 mai 2015 susvisé : " Le personnel habilité aux tâches essentielles de sécurité ferroviaire autres que la conduite de trains ne doit être sujet à aucune pathologie susceptible de causer : /- une perte soudaine de conscience ; /- une baisse d'attention ou de concentration ; / - une incapacité soudaine ; - une perte d'équilibre ou de coordination ; / - une limitation significative de mobilité. / Le personnel ne doit suivre aucun traitement médical ni prendre de médicaments ou substances susceptibles d'entrainer les mêmes effets (...) ". Aux termes de l'article 16 sexies de cet arrêté : " L'examen d'aptitude physique prévu à l'article 3 du décret n° 2017-527 du 12 avril 2017 relatif aux conditions d'aptitude physique et psychologique des personnels habilités aux tâches essentielles de sécurité ferroviaire autres que la conduite de trains comporte : (...) b) Des examens des fonctions sensorielles (vision, audition, perception des couleurs) ; (...) L'annexe V précise les critères d'aptitude physique ". Aux termes de l'annexe V de ce même arrêté relative aux conditions de réalisation des examens d'aptitude physique : " (...) a) Vision et aptitude ophtalmologique / Les exigences suivantes en matière de vision doivent être respectées : / - acuité visuelle de loin, avec ou sans correction mesurée séparément : au minimum de 0,8 pour l'œil le plus performant ; au minimum de 0,3 pour l'œil le moins bon ; / - verres correcteurs maximaux : hypermétropie + 5/ myopie-8. Le médecin peut admettre des valeurs situées en dehors de cette plage dans des cas exceptionnels et après avis d'un spécialiste de l'œil ; / - vision à moyenne distance et de près : suffisante, qu'elle soit corrigée ou non ; / - les lentilles de contact sont autorisées ; / - vision des couleurs normale : utilisation d'un test reconnu, tel que l'Ishihara, complété par un autre test reconnu en cas de besoin ; / - champ visuel : complet ; / - vision pour les deux yeux : effective / - vision binoculaire : effective (...) / - absence de maladie ophtalmique évolutive : opacités cornéennes, aphakies unies ou bilatérales, glaucomes chroniques, lésions dégénératives de la rétine susceptibles de provoquer un décollement, paralysies oculaires même parcellaires, strabisme divergent ou convergent (sauf avis spécialisé), interventions de chirurgie réfractive (sauf avis spécialisé), kératocône (...) Que la correction soit obtenue par des verres ou par des lentilles, le personnel doit se munir d'une paire de lunettes de secours. ".

5. Il ressort des pièces du dossier que le médecin agréé de la SNCF a déclaré M. A... inapte physiquement à l'exercice des tâches essentielles pour la sécurité ferroviaire autres que la conduite de trains en raison d'un strabisme divergent de l'enfance. La commission ferroviaire d'aptitudes a, par décision du 22 novembre 2018, confirmé cette inaptitude physique au motif d'une vision binoculaire ineffective.

6. En premier lieu, la circonstance, invoquée par M. A..., que le certificat d'inaptitude du 9 octobre 2018 soit motivé par son strabisme et non par une affection recensée dans l'annexe V de l'arrêté du 7 mai 2015 est sans incidence sur la légalité de la décision du 22 novembre 2018, qui s'est substituée au certificat d'aptitude avec un motif différent. A cet égard, cette différence de motivation n'est pas de nature à entacher d'illégalité la décision du 22 novembre 2018.

7. En deuxième lieu, sont sans incidence la circonstance que M. A... a déjà exercé des fonctions similaires ou nécessitant l'octroi d'un certificat d'aptitude, ainsi que le fait que le CHSCT a sollicité, par courrier du 17 octobre 2018, le réexamen de sa situation.

8. En troisième lieu, M. A... ne produit aucun élément de nature à démontrer qu'il ne souffre pas d'une vision binoculaire ineffective. S'il fait valoir qu'il possède des correcteurs de vue, il ne produit aucun document établissant qu'une correction adéquate serait susceptible de rétablir la " vision binoculaire effective " requise par les dispositions précitées. En outre il ressort des termes du certificat d'aptitude du 9 octobre 2018, qui indique l'acuité visuelle de M. A... avec ou sans correction et qui comporte une rubrique non cochée " apte sous réserve du port de verres / lentilles de correction ", que l'existence de verres correcteurs a bien été prise en compte lors de son examen.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Le requérant ne justifiant pas avoir, au cours de l'instance, exposé de dépens, au sens et pour l'application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les conclusions présentées à ce titre doivent également être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Délibéré après l'audience du 19 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Le Gars, présidente,

Mme Pham, première conseillère,

Mme Florent, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 octobre 2023.

La rapporteure,

C. PHAM La présidente,

A.C. LE GARS

La greffière,

S. de SOUSA

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 21VE02005


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE02005
Date de la décision : 03/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme LE GARS
Rapporteur ?: Mme Christine PHAM
Rapporteur public ?: Mme VISEUR-FERRÉ
Avocat(s) : SELAFA CABINET CASSEL

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-10-03;21ve02005 ?
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