Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le syndicat CFDT Interco des Yvelines a demandé au tribunal administratif de Versailles, avant dire-droit, premièrement d'ordonner à la commune de Houilles de produire le courrier, le bordereau d'envoi ou le courriel du procès-verbal rectifié, qu'elle indique avoir adressé à la préfecture, l'accusé de réception de la préfecture, son courriel de réponse et une copie du bulletin de vote " Interco CFDT " tel que proposé aux électeurs, deuxièmement d'annuler le refus de la commune de Houilles, révélé par le courrier du 11 janvier 2019, de faire application du procès-verbal rectificatif du 7 décembre 2018 pour la répartition des sièges au sein du comité technique de la ville, ainsi que la décision du 13 février 2019 portant rejet de son recours gracieux tendant à l'application de ce procès-verbal et enfin d'enjoindre au maire de la commune de Houilles de prendre toute mesure afin d'exécuter la proclamation des résultats électoraux dressés au procès-verbal rectificatif du 7 décembre 2018.
Par un jugement n° 1902925 du 2 mars 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté cette requête ainsi que les conclusions présentées par la commune de Houilles sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 30 avril 2021, le syndicat CFDT Interco des Yvelines, représenté par Me Cochereau, avocate, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler le courrier du 11 janvier 2019 par lequel le maire de la commune de Houilles l'a informé de la prise en compte du procès-verbal du 6 décembre 2018 et du refus de prendre en compte le procès-verbal rectificatif pour la répartition des sièges au sein du comité technique de la ville, ainsi que la décision du 13 février 2019 portant rejet de son recours gracieux tendant à la prise en compte du procès-verbal du 7 décembre 2018 ;
3°) d'enjoindre au maire de la commune de Houilles de prendre toute mesure afin d'exécuter la proclamation des résultats électoraux figurant au procès-verbal rectificatif du 7 décembre 2018 ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Houilles la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Le syndicat CFDT Interco des Yvelines soutient que :
- le tribunal administratif a dénaturé, en leur donnant une interprétation erronée, les conclusions qu'il avait présentées et qui tendaient à l'annulation des décisions refusant de prendre en compte les résultats électoraux proclamés à la suite de son recours administratif et non à la contestation de la validité des opérations électorales ;
- le tribunal administratif a méconnu les dispositions de l'article 21 du décret du 30 mai 1985 relatif aux comités techniques des collectivités territoriales et de leurs établissements publics en retenant que le président du bureau de vote central pouvait soit prendre une décision expresse de rejet, soit une décision implicite de rejet alors qu'il est tenu de prendre une décision dans un délai de 48 heures à compter de la protestation électorale ;
- le tribunal administratif a méconnu les faits dès lors qu'à la suite de la protestation électorale qu'il a formée le 7 décembre 2018, un procès-verbal rectificatif a été établi le même jour par le président du bureau de vote central, valant proclamation de nouveaux résultats électoraux, transmis en préfecture le jour même ; ainsi, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, sa protestation du 7 décembre 2018 a donné lieu à une décision du président du bureau de vote central.
La requête a été communiquée à la commune de Houilles qui n'a produit aucune observation.
Par ordonnance du 10 février 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 15 mars 2023 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n° 85-565 du 30 mai 1985 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pilven,
- les conclusions de Mme Villette, rapporteure publique,
- et les observations de Me Cochereau pour le syndicat CFDT Interco des Yvelines.
Considérant ce qui suit :
1. Les élections pour le renouvellement des représentants du personnel du comité technique de la commune de Houilles ont été organisées le 6 décembre 2018. La liste présentée par le syndicat CFDT Interco a obtenu 63 voix et un siège et la liste présentée par le syndicat SAPT-VH, 164 voix et cinq sièges. Ces résultats ont donné lieu à l'établissement d'un procès-verbal signé le jour même à 18 heures, à une proclamation des résultats et à leur transmission en préfecture. A la suite d'une protestation émise le 7 décembre 2018 par le syndicat requérant, un second procès-verbal a été établi le même jour à 18h00 et transmis en préfecture, au terme duquel le syndicat requérant se voyait désormais attribuer deux sièges. Le syndicat CFDT Interco a toutefois été informé par une lettre de l'adjointe au maire de la commune de Houilles, le 11 janvier 2019, que seul le premier procès-verbal établi le 6 décembre 2018 avait été pris en compte avec pour effet de n'attribuer qu'un siège au syndicat requérant. Ce dernier a formé un recours gracieux le 23 janvier 2019 auprès du maire de la commune qui l'a rejeté par lettre du 13 février 2019. Le syndicat CFDT Interco a demandé l'annulation de la décision révélée par la lettre du 11 janvier 2019 et de celle du 13 février 2019 au tribunal administratif de Versailles qui, par jugement du 2 mars 2021 dont le syndicat requérant relève appel, a rejeté cette requête. Le syndicat demande l'annulation de ces deux décisions et qu'il soit enjoint à la commune de Houilles de prendre en compte le procès-verbal rectificatif du 7 décembre 2018.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Le syndicat CFDT Interco des Yvelines soutient que le tribunal administratif a dénaturé, en leur donnant une interprétation erronée, les conclusions qu'il avait présentées, et qui tendaient à l'annulation des décisions refusant de prendre en compte les résultats électoraux proclamés à la suite de son recours administratif et non à la contestation de la validité des opérations électorales. Le syndicat requérant, en demandant l'annulation de la décision, révélée par le courrier du 11 janvier 2019, par laquelle la commune de Houilles a refusé de faire application du procès-verbal rectificatif du 7 décembre 2018, ainsi que de la décision du 13 février 2019 portant rejet de son recours gracieux, ne peut être regardé comme contestant la validité des opérations électorales. Il demande l'annulation de la décision du maire de la commune de ne lui attribuer qu'un siège et la prise en compte du procès-verbal rectificatif du 7 décembre 2018 par lequel la présidente du bureau de vote centralisateur a modifié le résultat des élections à la suite de la protestation qu'il avait émise le même jour. Ces décisions prises par le maire de la commune d'Houilles les 11 janvier 2019 et 13 février 2019 avaient de surcroît le caractère de décisions faisant grief. Par suite, le syndicat requérant est fondé à soutenir que le tribunal administratif de Versailles s'est mépris sur la portée des conclusions dont il était saisi, et a par suite entaché son jugement d'irrégularité.
3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par le syndicat CFDT Interco des Yvelines.
Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune en première instance :
4. Aux termes de l'article 21 du décret du 30 mai 1985 relatif aux comités techniques des collectivités territoriales et de leurs établissements publics : " I.- Le bureau central de vote, après avoir procédé au récolement des opérations de chaque bureau, établit le procès-verbal récapitulatif de l'ensemble des opérations électorales et procède immédiatement à la proclamation des résultats. (...) / Un exemplaire du procès-verbal est immédiatement adressé au préfet du département ainsi qu'aux délégués de liste.(...)/ II.- Sans préjudice des dispositions du dernier alinéa du I de l'article 9 bis de la loi du 13 juillet 1983 susvisée, les contestations sur la validité des opérations électorales sont portées dans un délai de cinq jours francs à compter de la proclamation des résultats devant le président du bureau central de vote puis, le cas échéant, devant la juridiction administrative. Le président du bureau central statue dans les quarante-huit heures. Il motive sa décision. Il en adresse immédiatement copie au préfet (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article R. 421-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet. Toutefois, lorsqu'une décision explicite de rejet intervient avant l'expiration de cette période, elle fait à nouveau courir le délai de recours. /La date du dépôt de la demande à l'administration, constatée par tous moyens, doit être établie à l'appui de la requête (...). ". Enfin, aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. ".
5. Le courrier du maire de la commune de Houilles en date du 11 janvier 2019 a été notifié au syndicat requérant le 21 janvier 2019. Toutefois, ce courrier ne comportait aucune mention des voies et délais de recours prévue par l'article R. 421-5 du code de justice administrative de sorte que la requête enregistrée au tribunal administratif de Versailles le 16 avril 2019 ne peut être regardée comme ayant été introduite tardivement.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
6. Le syndicat requérant soutient que le maire était tenu de prendre en compte les résultats électoraux mentionnés dans le procès-verbal rectificatif du 7 décembre 2018, signé par le président du bureau de vote et transmis en préfecture. Il ressort des termes de l'article 21 du décret du 30 mai 1985 que seul le président du bureau de vote était compétent pour statuer sur la contestation relative à la validité des opérations électorales, qu'il a statué sur la protestation électorale du syndicat en rédigeant un procès-verbal rectificatif, attribuant deux sièges à ce dernier, qu'il a signé ce procès-verbal et l'a adressé en préfecture. La circonstance que ce procès-verbal n'ait pas reçu la signature de l'intégralité des membres du bureau de vote est sans incidence sur sa légalité. Par suite, en prenant la décision contestée du 11 janvier 2019 de ne pas tenir compte du procès-verbal rectificatif du 7 décembre 2018, le maire de la commune de Houilles a entaché sa décision d'illégalité.
7. Il résulte de ce qui précède que le syndicat CFDT Interco des Yvelines est fondé à demander l'annulation des décisions révélées par les lettres du maire de la commune de Houilles en date des 11 janvier et 13 février 2019.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / (...). ". L'article L. 911-2 de ce code dispose de son côté que : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. / (...) ".
9. L'annulation prononcée par le présent arrêt implique nécessairement, eu égard aux motifs retenus, que le maire de la commune de Houilles prenne toute mesure de nature à exécuter le procès-verbal rectificatif du 7 décembre 2018 relatif aux opérations électorales du comité technique de la commune.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre la somme de 2 000 euros à la charge de la commune de Houilles à verser au syndicat CFDT Interco des Yvelines, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1902925 du tribunal administratif de Versailles du 2 mars 2021 est annulé.
Article 2 : Les décisions prises par le maire de la commune de Houilles les 11 janvier et 13 février 2019 sont annulées.
Article 3 : Il est enjoint au maire de la commune de Houilles de prendre toute mesure de nature à assurer l'exécution du procès-verbal rectificatif du 7 décembre 2018 relatif aux opérations électorales du comité technique de la commune.
Article 4 : La commune de Houilles versera la somme de 2 000 euros au syndicat CFDT Interco des Yvelines en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat CFDT Interco des Yvelines et à la commune de Houilles.
Délibéré après l'audience du 7 septembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Olson, président de la cour,
M. Pilven, président assesseur,
Mme Florent, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2023.
Le rapporteur,
J-E. PILVENLe président,
T. OLSONLa greffière,
S. DIABOUGA
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
N° 21VE01229 2