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12/09/2023 | FRANCE | N°21VE02298

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 12 septembre 2023, 21VE02298


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles, d'une part, d'annuler la décision par laquelle le centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie a rejeté de manière implicite sa demande du 28 décembre 2018, tendant au versement de l'indemnité d'engagement de service public exclusif à compter du 1er janvier 2014 et à la conclusion d'un engagement de service public exclusif à compter du 19 octobre 2018, et, d'autre part, de condamner le centre hospitalier François Quesnay de Mante

s-la-Jolie à lui verser la somme de 24 905,79 euros à parfaire, au titre ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles, d'une part, d'annuler la décision par laquelle le centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie a rejeté de manière implicite sa demande du 28 décembre 2018, tendant au versement de l'indemnité d'engagement de service public exclusif à compter du 1er janvier 2014 et à la conclusion d'un engagement de service public exclusif à compter du 19 octobre 2018, et, d'autre part, de condamner le centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie à lui verser la somme de 24 905,79 euros à parfaire, au titre des indemnités d'engagement de service public non perçues entre le 1er janvier 2014 et le 1er avril 2018, augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'enregistrement de la requête, soit le 29 avril 2019 et de la capitalisation de ces intérêts à compter du 29 avril 2020.

Par un jugement n° 1903270 du 1er juin 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 2 août 2021 et le 28 juin 2023, Mme B... A..., représentée par Me Arvis, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie a rejeté sa demande du 28 décembre 2018 tendant au versement de l'indemnité d'engagement de service public exclusif à compter du 1er janvier 2014 et à la conclusion d'un engagement de service public exclusif à compter du 19 octobre 2018 ;

3°) de condamner le centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie à lui verser la somme de 24 905,76 euros, assortie des intérêts à compter de la date de sa demande préalable et capitalisation de ces intérêts ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors qu'il ne s'est pas prononcé sur le moyen tiré de l'illégalité du refus du centre hospitalier de faire droit à sa demande de conclusion d'un engagement de service public exclusif à compter du 19 octobre 2018 ;

- son contrat d'engagement de service public exclusif, conclu en 2006, a été renouvelé de plein droit et de manière tacite ;

- la décision rejetant sa demande de conclusion d'un contrat d'engagement de service public effectif est illégale dès lors que l'administration se trouvait en situation de compétence liée pour accepter sa demande ;

- la mesure de suspension qui lui a été infligée en 2013 ne constitue pas une cessation de fonctions au sens des dispositions de l'article R. 6152-96 et suivants du code de la santé publique et n'a donc pas pu mettre fin à son contrat d'engagement de service public exclusif ;

- elle n'a pas refusé de signer le contrat que le centre hospitalier lui aurait proposé dès le mois de mars 2013, date à laquelle elle n'avait pas été réintégrée dans ses fonctions, son contrat de 2006 n'ayant au demeurant jamais pris fin et seul un avenant lui ayant été proposé en octobre 2013 qu'elle n'a jamais refusé de signer ;

- dès lors que la mesure de suspension de fonctions dont elle a fait l'objet par arrêté du 11 décembre 2013 a été annulée, cette circonstance ne peut être opposée à sa demande de versement de l'indemnité d'exercice de service public exclusif au titre de la période du 1er janvier 2014 au 1er avril 2018, soit la somme de 24 905,79 euros, sans méconnaître l'autorité de la chose jugée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 décembre 2021, le centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie, représenté par Me Brecq-Coutant, avocate, conclut au rejet de la requête et à ce que Mme A... soit condamnée à lui verser une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, conformément aux dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de relever d'office le moyen tiré du non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite par laquelle le centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie a rejeté la demande du 28 décembre 2018 du docteur A... tendant à la conclusion d'un engagement de service public exclusif à compter du 19 octobre 2018, dès lors qu'un tel engagement a été conclu le 22 août 2019, avec effet rétroactif au 1er avril 2018.

Par son mémoire du 28 juin 2023, Mme A... a présenté ses observations en réponse à ce moyen.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- l'arrêté du 8 juin 2000 relatif à l'indemnité d'engagement de service public exclusif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonfils,

- et les conclusions de Mme Viseur-Ferré, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A... a été recrutée à compter du 2 janvier 2004, comme praticien hospitalier spécialisé en cardiologie au centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie, puis titularisée en octobre 2005. Le 22 février 2006, Mme A... a conclu avec le centre hospitalier François Quesnay un contrat d'engagement de service public exclusif. En octobre 2007, Mme A... a été suspendue de ses fonctions à titre conservatoire par une décision du directeur de cet établissement, avant d'être placée en recherche d'affectation à compter du 1er mai 2011 par un arrêté du 12 avril 2011 de la directrice du centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière. A la suite de l'annulation de cet arrêté par un jugement du tribunal administratif de Paris du 11 mars 2013, Mme A... a été réintégrée au sein du centre hospitalier François Quesnay puis a de nouveau été suspendue de ses fonctions par une décision du 11 décembre 2013, laquelle a, à son tour, été annulée par un jugement du tribunal administratif de Versailles du 17 avril 2018, conduisant à la réintégration juridique de Mme A... dans ses fonctions à compter du 1er avril 2018. Par un courrier du 28 décembre 2018, Mme A... a demandé à son employeur le versement de l'indemnité d'engagement de service public exclusif rétroactivement depuis le 1er janvier 2014, ainsi que la conclusion d'une nouvelle convention d'engagement de service public exclusif. Le silence gardé sur cette demande a fait naître une décision implicite de rejet. Mme A... relève appel du jugement du 1er juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision, ainsi qu'à la condamnation du centre hospitalier François Quesnay à lui verser l'indemnité réclamée, soit la somme de 24 905,79 euros assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ceux-ci.

Sur la régularité du jugement :

2. Si Mme A... soutient que les premiers juges ont omis de se prononcer sur le moyen tiré de l'illégalité du refus du centre hospitalier de faire droit à sa demande de conclusion d'un engagement de service public exclusif à compter du 19 octobre 2018, il ne ressort pas des écritures de première instance que la demanderesse, qui a certes présenté des conclusions à fin d'annulation de la décision par laquelle le centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie a rejeté de manière implicite sa demande du 28 décembre 2018 tendant notamment à la conclusion d'un engagement de service public exclusif à compter du 19 octobre 2018, aurait soulevé un moyen spécifique au soutien de ces conclusions, lequel n'aurait pas été examiné par le tribunal administratif. Au surplus, ce dernier a statué sur les conclusions à fin d'annulation qui lui étaient soumises. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite rejetant la demande de conclusion d'un engagement de service public exclusif à compter du 19 octobre 2018 :

3. Il ressort des pièces du dossier que le docteur A... a conclu avec le centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie un nouveau contrat d'engagement de service public exclusif le 22 août 2019, comportant un effet rétroactif à compter du 1er avril 2018. Dans ses dernières écritures, le docteur A... confirme avoir perçu les sommes qui lui étaient dues en application de la conclusion de ce nouveau contrat d'engagement. Dès lors, les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite de rejet qui a été opposée par son employeur à sa demande du 28 décembre 2018 tendant à la conclusion d'un tel engagement à compter du 19 octobre 2018 sont sans objet et il n'y a pas lieu d'y statuer.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Aux termes de l'article R. 6152-23 du code de la santé publique : " Les praticiens perçoivent, après service fait, attesté par le tableau mensuel de service réalisé, validé par le chef de service, ou, à défaut, par le responsable d'une autre structure interne : / 1° Des émoluments mensuels variant selon l'échelon des intéressés, au prorata des obligations de service hebdomadaires. Ces émoluments sont fixés par arrêté des ministres chargés du budget, de la santé et de la sécurité sociale. Ils suivent l'évolution des traitements de la fonction publique, constatée par le ministre chargé de la santé ; / 2° Des indemnités et allocations dont la liste est fixée par décret. ". L'article D. 6152-23-1 du même code dispose : " Les indemnités et allocations mentionnées au 2° de l'article R. 6152-23 sont : / (...) 6° Une indemnité d'engagement de service public exclusif versée aux praticiens qui s'engagent, pour une période de trois ans renouvelable, à ne pas exercer une activité libérale telle que prévue à l'article L. 6154-1 et à exercer exclusivement en établissement public de santé ou dans un établissement public mentionné au I de l'article L. 313-12 du code de l'action sociale et des familles. Le montant de cette indemnité est fixé au prorata des obligations de service. Son versement est maintenu durant les congés et jours de récupération mentionnés aux 1°, 2°, 3° et 5° de l'article R. 6152-35. Pour les praticiens placés en congé de maladie au titre des articles R. 6152-37 à R. 6152-39, le versement de cette indemnité est maintenu pendant une période qui ne peut excéder trois mois par contrat d'engagement de service public exclusif. La durée de cette période est portée à six mois en cas de congé de maladie accordé au titre de l'article R. 6152-41. / (...) Le montant, conditions d'attribution et les modalités de versement des indemnités et allocations mentionnées au présent article font fixés par arrêté des ministres chargés du budget et de la santé. ". L'arrêté du 8 juin 2000 précise, au premier alinéa de son article 3 : " Cette indemnité est accordée aux praticiens hospitaliers, sans préjudice des activités exercées en application des articles L. 6152-4 (1°, 2° et 4°) et R. 6152-30 du code de la santé publique ainsi que de celles de l'article 9 du décret n° 91-966 du 20 septembre 1991 relatif aux personnels associés des centres hospitaliers et universitaires dans les disciplines médicales et odontologiques, qui s'engagent, par contrat passé avec le directeur de l'établissement dans lequel ils sont nommés, à ne pas exercer l'activité libérale mentionnée à l'article L. 6154-1 du code de la santé publique et à exercer exclusivement en établissement public de santé pendant une durée de trois ans. Ce contrat doit être transmis au directeur général de l'agence régionale de santé et peut être renouvelé dans les mêmes conditions. ".

5. Il résulte de l'instruction qu'un contrat d'engagement de service public exclusif a été signé entre Mme A... et le centre hospitalier François Quesnay le 22 février 2006, pour une durée de trois ans. Ainsi, ce contrat est arrivé à échéance le 22 février 2009. Si, comme le soutient Mme A..., l'administration est tenue d'accepter l'engagement déclaré par un praticien à n'exercer aucune activité libérale au sein de l'établissement où il a été nommé, il résulte des dispositions citées au point précédent qu'un tel engagement est exprimé pour une durée limitée à trois ans au terme de laquelle le praticien doit manifester sa volonté de souscrire à nouveau cet engagement pour une nouvelle durée de trois ans. Ainsi, la requérante ne peut se prévaloir du renouvellement tacite de ce premier contrat. Si l'intéressée fait valoir n'avoir jamais refusé de signer le contrat que le centre hospitalier lui aurait proposé dès le mois de mars 2013, date à laquelle elle soutient d'ailleurs n'avoir pas réintégré ses fonctions, pas plus que l'avenant à son contrat qui lui a été proposé en octobre 2013, il ressort d'un courrier du 30 décembre 2013 produit en défense que Mme A... a été invitée à signer un avenant à son contrat d'engagement de service public exclusif ce qu'elle a refusé de faire. Il est seulement établi par les pièces du dossier qu'un nouveau contrat d'engagement de service public exclusif a été conclu entre le docteur A... et son employeur le 22 août 2019, avec effet au 1er avril 2018. Dans ces conditions, nonobstant tant la mesure de suspension infligée au docteur A... en 2013 que l'annulation de celle-ci, et alors même que le centre hospitalier François Quesnay aurait maintenu le versement de l'indemnité d'engagement de service public exclusif au-delà du terme du premier contrat et n'aurait proposé à Mme A... une régularisation de sa situation que par avenant, en l'absence de preuve d'une manifestation de volonté de la part de la requérante de s'engager à n'exercer aucune activité libérale au sein de l'établissement, le centre hospitalier François Quesnay était fondé à mettre fin au versement de l'indemnité d'engagement de service public exclusif à compter du 1er janvier 2014. Par suite, le moyen tiré de l'illégalité de la décision implicite par laquelle le centre hospitalier François Quesnay a rejeté la demande du 28 décembre 2018 tendant au versement de l'indemnité d'engagement de service public exclusif à compter du 1er janvier 2014, pris en ses différentes branches, doit être écarté. Les conclusions présentées par Mme A... à fin d'annulation ne peuvent ainsi qu'être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, celles présentées à fin d'indemnisation.

6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du centre hospitalier François Quesnay, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... le versement au centre hospitalier François Quesnay d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite rejetant la demande de conclusion d'un engagement de service public exclusif à compter du 19 octobre 2018.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par Mme A... est rejetée.

Article 3 : Mme A... versera au centre hospitalier François Quesnay la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au centre hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie.

Délibéré après l'audience du 4 juillet 2023, à laquelle siégeaient :

M. Brotons, président,

Mme Le Gars, présidente assesseure,

Mme Bonfils, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 septembre 2023.

La rapporteure,

M-G. BONFILSLe président,

S. BROTONS

La greffière,

V. MALAGOLI

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N° 21VE02298 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE02298
Date de la décision : 12/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Dispositions propres aux personnels hospitaliers - Personnel médical - Praticiens à temps plein.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Marie-Gaëlle BONFILS
Rapporteur public ?: Mme VISEUR-FERRÉ
Avocat(s) : BRECQ-COUTANT

Origine de la décision
Date de l'import : 17/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-09-12;21ve02298 ?
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