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12/09/2023 | FRANCE | N°21VE00366

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 12 septembre 2023, 21VE00366


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Mecaplast France a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler la décision du 26 septembre 2016 notifiée le 14 octobre 2016 par laquelle la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France a mis à sa charge la pénalité financière prévue à l'article L. 2242-9 du code du travail au taux de 0,5 %, et, d'autre part, d'annuler la décision du 13 février 2017 du ministre du travail rejetant son reco

urs hiérarchique.

Par un jugement n° 1703494 du 8 décembre 2020, le tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Mecaplast France a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler la décision du 26 septembre 2016 notifiée le 14 octobre 2016 par laquelle la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France a mis à sa charge la pénalité financière prévue à l'article L. 2242-9 du code du travail au taux de 0,5 %, et, d'autre part, d'annuler la décision du 13 février 2017 du ministre du travail rejetant son recours hiérarchique.

Par un jugement n° 1703494 du 8 décembre 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 février 2021, la SAS Novares France, anciennement dénommée société Mecaplast France, représentée par Me Broud, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 12 octobre 2016 par laquelle la directrice régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France lui a notifié la pénalité financière prévue à l'article L. 2242-9 du code du travail ;

3°) d'annuler la décision du 13 février 2017 par laquelle le ministre chargé du travail a rejeté son recours hiérarchique dirigé contre la décision du 12 octobre 2016 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son recours pour excès de pouvoir, qui vise l'annulation d'une décision pécuniaire, est recevable ;

- la décision du 12 octobre 2016 est entachée d'incompétence temporelle, son auteur n'ayant pas exercé sa compétence dans le délai qui lui était imparti par les dispositions de l'article R. 2242-8 du code du travail ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article R. 2242-6 du code du travail relatives aux modalités de fixation de la pénalité prévue à l'article L. 2242-9 du code du travail, dès lors qu'un plan unilatéral d'action a été déposé le 23 août 2016 et qu'elle est de bonne foi ;

- la décision du 13 février 2017 est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article R. 2242-8 du code du travail ;

- elle méconnaît également les dispositions de l'article R. 2242-6 du code du travail.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 octobre 2022, le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- à titre principal, la requête est irrecevable dès lors que la décision ne peut être contestée par la voie du recours pour excès de pouvoir alors que la requérante ne sollicite que l'annulation de la décision sans solliciter l'application d'une loi nouvelle ni la réformation de la décision de pénalité en litige ; par suite, la requête ne remplit pas les conditions de recevabilité propres au contentieux de pleine juridiction dont relèvent les sanctions administratives ;

- à titre subsidiaire, les autres moyens soulevés par la SAS Novares France ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonfils,

- et les conclusions de Mme Viseur-Ferré, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société Mecaplast France a déposé auprès de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) le 29 juillet 2015, un procès-verbal daté du 4 mai 2015 relatif à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes constatant l'absence d'accord collectif en son sein sur ce point. A la suite de deux courriers des 20 août et 3 décembre 2015 par lesquels la directrice adjointe du travail de l'unité territoriale des Hauts-de-Seine de la DIRECCTE a rappelé à la société Mecaplast France ses obligations en la matière, cette dernière a fait l'objet, par un courrier du 25 février 2016, notifié le 26 février suivant, d'une mise en demeure de déposer un accord ou plan d'action sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes avant le 26 août 2016. Le 21 avril 2016, la société Mecaplast France a déposé un plan unilatéral d'action daté du 4 mai 2015. A la suite de nouvelles observations formulées par l'inspecteur du travail de l'unité territoriale des Hauts-de-Seine le 11 mai 2016, la société Mecaplast France a, le 23 août 2016, déposé un nouveau plan d'action, daté du 16 août 2016. Estimant que ce plan n'était pas conforme aux obligations prévues par le 2° de l'article L. 2242-8 du code du travail, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Ile-de-France a, par une décision datée du 26 septembre 2016, envoyée le 12 octobre suivant et notifiée le 14 octobre 2016, infligé à la société Mecaplast France la pénalité prévue par les dispositions de l'article L. 2242-8 du code du travail, dont il a fixé le taux à 0,5 %. Par une décision du 13 février 2017, le ministre chargé du travail a rejeté le recours hiérarchique formé par la société Mecaplast France le 14 décembre 2016 contre cette sanction. La SAS Novares France, anciennement dénommée société Mecaplast France, relève appel du jugement du 8 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions.

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre chargé du travail :

2. Le ministre chargé du travail fait valoir que la requête est irrecevable dès lors que la décision ne peut être contestée par la voie du recours pour excès de pouvoir alors que la requérante ne sollicite que l'annulation de la décision sans solliciter l'application d'une loi nouvelle ni la réformation de la décision de pénalité en litige. Toutefois, il appartenait au juge saisi de telles conclusions de statuer comme juge de plein contentieux quelle que soit la présentation que la société demanderesse fait de sa contestation. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de la requête de la société Mecaplast France doit être écartée.

Sur la demande de la société SAS Novares France :

3. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 2242-8 du code du travail, dans sa version applicable à la date de la sanction : " Le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi adresse à l'employeur qui n'a pas rempli les obligations en matière d'égalité professionnelle et salariale entre les femmes et les hommes définies à l'article L. 2242-9, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, une notification motivée du taux de la pénalité qui lui est appliqué, dans le délai d'un mois à compter de la date d'expiration de la mise en demeure prévue à l'article R. 2242-3, et lui demande de communiquer en retour le montant des gains et rémunérations servant de base au calcul de la pénalité conformément à l'article R. 2242-7 dans le délai d'un mois. A défaut, la pénalité est calculée sur la base de deux fois la valeur du plafond mensuel de la sécurité sociale par mois compris dans la période mentionnée à l'article R. 2242-7 (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article R. 2242-3 du même code, dans sa version applicable à la même date : " Lorsque l'inspecteur ou le contrôleur du travail constate qu'une entreprise n'est pas couverte par l'accord collectif ou, à défaut, le plan d'action prévu au 2° de l'article L. 2242-8, il met en demeure l'employeur, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, de remédier à cette situation dans un délai de six mois ".

4. Il résulte de l'instruction qu'une mise en demeure pour inexistence d'accord ou de plan d'action relatif à l'égalité professionnelle a été envoyée par la DIRECCTE à la société Mecaplast France, par un courrier recommandé du 25 février 2016, notifié à la société le 26 février suivant. Ainsi, le délai de six mois fixé par l'article R. 2242-3 du code du travail précité expirait le 27 août 2016, de sorte qu'en application des dispositions de l'article R. 2242-8 du code du travail précité, la DIRECCTE avait jusqu'au 28 septembre 2016 pour notifier à la société Mecaplast France une décision motivant le taux de pénalité qu'elle entendait appliquer à cette dernière. Il est constant que, si la décision de notification de la pénalité prise par la DIRECCTE est datée du 26 septembre 2016, le courrier de notification adressé à la société Mecaplast France est quant à lui daté du 12 octobre 2016. Ce courrier a été adressé à la société le lendemain, et reçu par cette dernière le 14 octobre 2016, soit au-delà de l'expiration du délai d'un mois conféré par l'article R. 2242-8 du code du travail. Dans ces conditions, la DIRECCTE n'a pu régulièrement adresser à l'employeur la notification motivée du taux de la pénalité qu'elle décidait de lui appliquer. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement et les autres moyens de la requête, la SAS Novares France est fondée à soutenir que la DIRECCTE a méconnu les dispositions de l'article R. 2242-8 du code du travail, et, pour ce motif, à obtenir l'annulation de la pénalité prévue par l'article L. 2242-9 du même code, qui lui a été appliquée au taux de 0,5 %.

Sur les frais liés à l'instance :

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à la SAS Novares France en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1703494 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 8 décembre 2020 est annulé.

Article 2 : La SAS Novares France est déchargée de la pénalité au taux de 0,5 % mise à sa charge par les décisions des 12 octobre 2016 et 13 février 2017.

Article 3 : L'Etat versera à la SAS Novares France la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Novares France anciennement dénommée Mecaplast France et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.

Copie en sera adressée à la direction régionale interdépartementale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DRIEETS) d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 4 juillet 2023, à laquelle siégeaient :

M. Brotons, président,

Mme Le Gars, présidente assesseure,

Mme Bonfils, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 septembre 2023.

La rapporteure,

M-G. BONFILS

Le président,

S. BROTONS

La greffière,

V. MALAGOLI

La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 21VE00366


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE00366
Date de la décision : 12/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-03 Travail et emploi. - Conditions de travail.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Marie-Gaëlle BONFILS
Rapporteur public ?: Mme VISEUR-FERRÉ
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS RACINE

Origine de la décision
Date de l'import : 17/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-09-12;21ve00366 ?
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