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04/07/2023 | FRANCE | N°21VE02862

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 04 juillet 2023, 21VE02862


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 3 août 2021 par lequel le préfet de l'Essonne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.

Par un jugement n° 2106862 du 30 septembre 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enre

gistrée le 21 octobre 2021, M. D... B..., représenté par Me Mouberi, avocat, doit être regardé comme ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 3 août 2021 par lequel le préfet de l'Essonne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.

Par un jugement n° 2106862 du 30 septembre 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 octobre 2021, M. D... B..., représenté par Me Mouberi, avocat, doit être regardé comme demandant à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Essonne du 3 août 2021 ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté en litige est insuffisamment motivé ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 3-1 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation ;

- la décision portant fixation du pays de destination est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 décembre 2021, le préfet de l'Essonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Bonfils a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... B..., ressortissant tunisien né le 15 décembre 1984 à Msaken (Tunisie), est entré sur le territoire français le 27 mars 2019 sous couvert d'un visa court séjour. A la suite de son interpellation par les services de la gendarmerie d'Evry-Courcouronnes, le 3 août 2021, le préfet de l'Essonne a, par un arrêté du même jour, obligé M. B... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office. M. B... relève appel du jugement du 30 septembre 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 août 2021.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. (...) ". De plus, l'article L. 211-5 du même code précise : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

3. M. B... soutient que l'arrêté en litige comporte une motivation trop générale et imprécise, notamment quant à sa situation familiale et professionnelle. Toutefois, outre qu'elle mentionne les textes dont elle fait application, cette décision indique que M. B... déclare résider avec sa femme et son enfant à Corbeil-Essonnes sans justifier de la régularité du séjour de sa compagne ni établir de manière suffisante son lien de paternité avec l'enfant, et que ses parents, ses deux frères et ses deux sœurs résident toujours dans son pays d'origine. Par ailleurs, elle mentionne le fait que l'intéressé se maintient en situation irrégulière sur le territoire depuis plus de deux ans sans avoir cherché à régulariser sa situation, et qu'il travaille de manière illégale sous contrat à durée indéterminée en qualité de chef d'équipe peinture pour le compte de la société " SM Peinture " depuis le mois de septembre 2020. Ainsi, cette décision énonce de manière suffisamment précise les motifs de fait et de droit sur lesquels elle se fonde. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

4. En deuxième lieu, il ne ressort pas des termes de l'arrêté en litige, rappelés au point précédent, que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation familiale de M. B.... Par suite, ce moyen doit également être écarté.

5. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux retenus à bon droit par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Versailles au point 2 de son jugement.

6. En quatrième lieu, aux termes des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article 9 de cette même convention : " 1. Les États parties veillent à ce que l'enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré, à moins que les autorités compétentes ne décident, sous réserve de révision judiciaire et conformément aux lois et procédures applicables, que cette séparation est nécessaire dans l'intérêt supérieur de l'enfant. (...) ".

7. D'une part, M. B... ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors que celles-ci créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés.

8. D'autre part, à supposer même établie la paternité de M. B... à l'égard de l'enfant nommée Alée Ghazal, il ressort des pièces du dossier que cette enfant, scolarisée seulement en classe de maternelle, est également de nationalité tunisienne, de même que, selon les dires du requérant, Mme C... B..., présentée par l'intéressé comme sa compagne et la mère de cette enfant, et dont la régularité du séjour sur le territoire français n'est pas davantage justifiée que celle de M. B.... Dans ces conditions, en l'absence d'obstacle à ce que la cellule familiale puisse se reconstituer hors de France, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

9. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

10. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a été interpellé par les services de gendarmerie d'Evry-Courcouronnes le 3 août 2021 alors qu'il se trouvait en situation irrégulière sur le territoire français depuis l'expiration de son visa court séjour, le 5 août 2019. En outre, il a déclaré à deux reprises, lors de ses auditions du 3 août 2021, n'avoir entrepris aucune démarche pour régulariser sa situation. Il ressort également du compte-rendu de l'audition du 3 août 2021 à 16 heures 10 que l'intéressé a déclaré avoir obtenu un contrat à durée indéterminée au sein de la société " SM Peinture " en faisant usage de faux papier d'identité et qu'il a exprimé la volonté de se soustraire à une mesure d'éloignement. Par ailleurs, il résulte de ce qui a été dit au point 8 de l'arrêt que la cellule familiale de M. B... peut se reconstituer dans son pays d'origine, où vivent par ailleurs ses parents et ses frères et sœurs et où l'intéressé a vécu lui-même jusqu'à l'âge de 34 ans. Dans ces conditions, et alors que le requérant ne justifie d'aucune insertion particulière au sein de la société française, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A... au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

11. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point précédent, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision portant obligation de quitter le territoire français sur la situation de M. A... doit également être écarté.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision fixant le pays de destination :

12. En l'absence d'illégalité établie de la décision préfectorale du 3 août 2021 portant obligation de quitter le territoire, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision distincte fixant le pays de destination serait privée de base légale.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Essonne.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2023, à laquelle siégeaient :

M. Brotons, président de chambre,

Mme Le Gars, présidente assesseure,

Mme Bonfils, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juillet 2023.

La rapporteure,

M.-G. BONFILS

Le président,

S. BROTONS

La greffière,

S. de SOUSA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 21VE02862


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE02862
Date de la décision : 04/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Marie-Gaëlle BONFILS
Rapporteur public ?: Mme VISEUR-FERRÉ
Avocat(s) : MOUBERI

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-07-04;21ve02862 ?
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