Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 2 décembre 2022 par lequel le préfet des Yvelines l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.
Par une ordonnance n° 2209091 du 16 décembre 2022, la présidente du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, un mémoire complémentaire et une pièce enregistrés le 21 décembre 2022, le 6 avril 2023, et le 23 mai 2023, M. B..., représenté par Me Zekri, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance attaquée ;
2°) d'annuler l'arrêté contesté ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a rejeté sa demande au motif qu'elle était tardive et par suite irrecevable, alors que sa requête de première instance a été présentée dans le délai de quarante-huit heures prévu par l'article L. 732-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il entend reprendre tous les moyens soulevés devant le tribunal, tenant à l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté, à la méconnaissance de son droit d'être entendu, au défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle, au défaut de base légale dès lors que la Cour d'appel de Versailles a infirmé le jugement du 23 mai 2022 qui avait prononcé à son encontre une interdiction définitive du territoire et à l'erreur de droit dans l'application des dispositions de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que l'autorité administrative avait tout loisir de procéder aux diligences nécessaires à son éloignement durant sa période de détention.
La requête a été communiquée au préfet du Val-d'Oise qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code d'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience en application des dispositions de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dorion ;
- les observations de Me Zekri pour M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B... relève appel de l'ordonnance du 16 décembre 2022 par laquelle la présidente du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 2 décembre 2022 du préfet des Yvelines prononçant son assignation à résidence durant quarante-cinq jours, au motif que sa requête était tardive et par suite irrecevable.
2. Aux termes de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants : (...) / 7° L'étranger doit être éloigné en exécution d'une peine d'interdiction judiciaire du territoire prononcée en application du deuxième alinéa de l'article 131-30 du code pénal ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 732-8 du même code : " La décision d'assignation à résidence prise en application des 1°, 2°, 3°, 4° ou 5° de l'article L. 731-1 peut être contestée devant le président du tribunal administratif dans le délai de quarante-huit heures suivant sa notification. / (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté d'assignation à résidence contesté a été pris par le préfet des Yvelines en exécution du jugement correctionnel prononcé à l'encontre de M. B... le 23 mai 2022 par le tribunal judiciaire de Versailles, le condamnant à un an de prison assorti d'une interdiction judiciaire de territoire français définitive. Cette assignation à résidence, prononcée sur le fondement du 7° de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'est pas soumise au délai de recours de quarante-huit heures prévu par l'article L. 732-8 du même code. En tout état de cause, la requête de première instance présentée pour M. B... a été enregistrée le 5 décembre 2022 à 00H23, avant l'expiration du délai de quarante-huit heures ouvert par la notification de l'arrêté contesté faite à l'intéressé le 3 décembre à 8H14. La circonstance que la décision attaquée a été communiquée le même jour à 17H21 est sans incidence sur la recevabilité de la demande, dès lors que le défaut de production de l'acte attaqué constitue un motif d'irrecevabilité qui peut être régularisé après l'expiration du délai de recours. M. B... est par suite fondé à soutenir que sa demande de première instance était recevable et que l'ordonnance du 16 décembre 2022 de la présidente du tribunal administratif de Versailles doit être annulée.
4. Il y a lieu pour la cour de se prononcer, par la voie de l'évocation, sur la demande de M. B... tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 2 décembre 2022.
5. Il ressort des pièces du dossier que, par un arrêt du 10 août 2022, la cour d'appel de Versailles a infirmé le jugement correctionnel du 23 mai 2022 du tribunal judiciaire de Versailles, ramené la condamnation pénale de M. B... à dix mois de prison et supprimé l'interdiction judiciaire du territoire français prononcée par le tribunal. Dans ces conditions, M. B... est fondé à soutenir que, l'interdiction judiciaire du territoire français dont il a fait l'objet ayant été annulée par une décision juridictionnelle ayant un effet rétroactif, l'assignation à résidence dont il demande l'annulation n'est pas légalement justifiée.
6. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, la présidente du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 2 décembre 2022 du préfet des Yvelines. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance du 16 décembre 2022 de la présidente du tribunal administratif de Versailles et l'arrêté du 2 décembre 2022 du préfet des Yvelines sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à M. B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet des Yvelines.
Délibéré après l'audience du 6 juin 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Dorion, présidente,
M. Tar, premier conseiller,
Mme Pham, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 juin 2023.
L'assesseur le plus ancien,
G. TAR La présidente-rapporteure,
O. DORION
La greffière,
A. GAUTHIER
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour exécution conforme
La greffière,
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N° 22VE02874