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20/06/2023 | FRANCE | N°21VE02861

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 20 juin 2023, 21VE02861


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles, d'une part, d'annuler l'arrêté du 28 avril 2020 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office, et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un titre de séjour, ou à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de trois mois s

uivant la notification du jugement et de lui délivrer une autorisation provisoire d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles, d'une part, d'annuler l'arrêté du 28 avril 2020 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office, et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un titre de séjour, ou à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de trois mois suivant la notification du jugement et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail durant cet examen.

Par un jugement n° 2003150 du 12 juillet 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 octobre 2021, M. A... B..., représenté par Me Kabore, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 28 avril 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer le titre de séjour demandé ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans un délai de trois mois à compter du présent arrêt et, dans cette attente, de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que les juges ont retenu que les soins dont il a besoin sont disponibles en République démocratique du Congo, dès lors qu'il est originaire de la République du Congo, pays où les soins qui lui sont nécessaires ne sont pas disponibles, ce dont il apporte la preuve ;

- l'arrêté en litige porte atteinte à son droit au respect de la vie privée et familiale, en l'absence de toute attache dans son pays d'origine et alors que deux de ses enfants vivent en France ; il est arrivé en France à l'âge de 54 ans et non de 59 ans comme l'a jugé par erreur le tribunal administratif.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 décembre 2021, le préfet de l'Essonne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 février 2022 du bureau d'aide juridictionnelle du Tribunal judiciaire de Versailles.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Bonfils a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant congolais né le 26 mai 1962, est entré sur le territoire français le 16 décembre 2017 sous couvert d'un visa de court séjour. Par un arrêté du 28 avril 2020, le préfet de l'Essonne a refusé de délivrer le titre de séjour demandé par M. B... le 19 juillet 2019 sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et d'une décision fixant le pays à destination duquel le demandeur pourrait être reconduit d'office. M. B... relève appel du jugement du 12 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".

3. D'une part, il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins mentionné à cet article, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé du demandeur, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait y bénéficier effectivement d'un traitement approprié de l'affection en cause.

4. D'autre part, la partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

5. Pour rejeter la demande de titre de séjour que M. B... a présentée sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de l'Essonne s'est notamment fondé sur l'avis du collège des médecins de l'OFII, en date du 9 mars 2020, dont il ressort que si l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé, dont l'état de santé lui permet de voyager, peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans ce pays. Pour contester l'appréciation portée par le préfet sur sa situation médicale, le requérant produit des certificats et ordonnances médicaux, rédigés à sa demande le 15 septembre 2021, établissant qu'il souffre d'un diabète de type II, d'hypertension artérielle et de crises de gouttes. L'intéressé produit en outre, pour la première fois en cause d'appel, un certificat médical établi le 13 mai 2020, soit postérieurement à l'arrêté en litige et antérieurement au jugement du tribunal administratif, par le médecin congolais qui atteste l'avoir suivi médicalement pour du diabète et de l'hypertension artérielle. Si ce certificat indique en des termes généraux des problèmes concernant l'accessibilité à l'insuline et la régularité des auto-contrôles glycémiques en l'absence de couverture sociale efficiente, il en ressort également que M. B... a bénéficié d'une prise en charge médicale et d'un traitement médicamenteux entre 2004 et 2017. En outre, le requérant ne produit aucun document ou avis médical circonstancié permettant d'établir que les médicaments qui lui ont été prescrits en dernier lieu ne seraient pas accessibles en République du Congo ou ne pourraient pas être remplacés par des antidiabétiques ou molécules équivalents disponibles dans ce pays. Ainsi, l'intéressé ne remet pas en cause l'appréciation selon laquelle il pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans ce pays. Par suite, nonobstant l'erreur matérielle figurant au point 6 du jugement, la décision en litige n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En second lieu, si le tribunal administratif a indiqué à tort que M. B... a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de 59 ans, alors qu'il est constant que le requérant est né en mai 1962 et est entré en France en décembre 2017, soit à l'âge de 55 ans, cette erreur est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de la décision en litige, laquelle indique bien que l'intéressé est entré en France à l'âge de 55 ans. Le requérant ne conteste pas que son épouse, qui est de la même nationalité que lui et arrivée en France en même temps que lui, se trouve en situation irrégulière. En dépit de la présence en France de deux de leurs enfants, dont leur fille de nationalité française, et du décès des parents de M. B..., l'intéressé n'établit pas être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine et ne justifie aucunement de l'intensité des liens avec ses enfants en France, où il ne bénéficie par ailleurs d'aucune insertion particulière. Dans ces conditions, l'arrêté en litige ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale du requérant.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté ses conclusions tendant à demander l'annulation de l'arrêté du 28 avril 2020. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Essonne.

Délibéré après l'audience du 16 mai 2023, à laquelle siégeaient :

M. Brotons, président,

Mme Le Gars, présidente assesseure,

Mme Bonfils, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023.

La rapporteure,

M-G. BONFILS

Le président,

S. BROTONS

La greffière,

V. MALAGOLI

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 21VE02861


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE02861
Date de la décision : 20/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Marie-Gaëlle BONFILS
Rapporteur public ?: Mme VISEUR-FERRÉ
Avocat(s) : KABORE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-06-20;21ve02861 ?
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