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31/05/2023 | FRANCE | N°21VE01585

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 31 mai 2023, 21VE01585


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1503008 du 6 juin 2017, le tribunal administratif Cergy-Pontoise a prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions à concurrence des dégrèvements accordés en cours d'instance à hauteur des somme

s de 271 euros et 19 167 euros respectivement au titre des années 2010 et 2011, et a re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1503008 du 6 juin 2017, le tribunal administratif Cergy-Pontoise a prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions à concurrence des dégrèvements accordés en cours d'instance à hauteur des sommes de 271 euros et 19 167 euros respectivement au titre des années 2010 et 2011, et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Par un arrêt n° 17VE02608 du 25 juin 2019, la cour administrative d'appel de Versailles a déchargé M. C... des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il avait été assujetti au titre de l'année 2010 (article 1er), fixé le montant des revenus de capitaux mobiliers imposables entre ses mains au titre de l'année 2011 à 309 062 euros (article 2), déchargé le contribuable des suppléments d'impôt sur le revenu correspondants (article 3), réformé le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise dans cette mesure (article 4) et, enfin, rejeté le surplus des conclusions de la requête (article 6).

Par une décision n° 433878 du 26 mai 2021, le Conseil d'État statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par le ministre de l'économie, des finances et de la relance, a annulé les articles 2 à 4 de cet arrêt et renvoyé, dans cette mesure, l'affaire devant la cour, où elle a été enregistrée le 30 mai 2021, sous le n° 21VE01585.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 août 2017 et le 25 juillet 2018, M. C..., représenté par Me Michaud et Me Swiatkowski, avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1503008 du 6 juin 2017 du tribunal administratif

Cergy-Pontoise en tant qu'il rejette le surplus des conclusions de sa demande ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions supplémentaires maintenues à sa charge au titre de l'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux au titre des année 2010 et 2011 à raison de revenus réputés distribués par la SARL Ates ;

3°) de mettre à la charge de l'État au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, les sommes de 1 500 euros pour la procédure de première instance et 3 500 euros au titre de la procédure d'appel.

Il soutient que :

- la proposition de rectification du 20 décembre 2012 est insuffisamment motivée, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

- le montant des bénéfices réputés distribués entre ses mains est exagéré et ne saurait excéder 52 245,75 euros au titre de l'année 2011 ; la méthode de reconstitution de la comptabilité de la SARL Ates est radicalement viciée dès lors que les recettes ont été reconstituées en fonction des encaissements et non des factures ; le vérificateur a limité les charges déductibles aux dépenses justifiées par des factures et n'a pas extourné des encaissements bancaires les remboursements clients et les chèques impayés ; c'est à tort que le service a refusé d'admettre en charges des dépenses d'acquisition d'immobilisations ; l'administration n'a pas fait application de la cascade prévue à l'article L. 77 du livre des procédures fiscales ; c'est à tort que l'administration a inclus les rappels de taxe sur la valeur ajoutée dans le montant des revenus prétendument distribués ;

- le service n'a pas apporté la preuve lui incombant qu'il disposait du pouvoir exclusif de gestion sur la société et qu'il constituait donc l'unique maître de l'affaire ; une partie des distributions litigieuses a été encaissée par des tiers ;

- l'administration n'établit pas le caractère délibéré des manquements qui lui sont imputés et ne pouvait, dès lors, lui infliger l'amende prévue au a de l'article 1729 du code général des impôts.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 28 mai 2018, et, après cassation, le 17 janvier 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut, dans le dernier état de ses écritures, au non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements accordés le 12 juillet 2019, en exécution de l'arrêt de la cour du 29 juin 2021 et au rejet du surplus de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Danielian,

- et les conclusions de Mme Deroc, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de la vérification de comptabilité de la SARL Ates, dont M. C... est gérant, et du contrôle sur pièces dont ce dernier a fait l'objet, l'administration lui a notifié, selon la procédure contradictoire et par une proposition de rectification en date du 20 décembre 2012, des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2010 et 2011, à raison de revenus réputés distribués sur le fondement du 1° et du 2° du 1. de l'article 109, et du c de l'article 111 du code général des impôts et résultant de bénéfices reconstitués. Par un jugement du 6 juin 2017, le tribunal administratif Cergy-Pontoise a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence des dégrèvements prononcés en cours d'instance, et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande de décharge des impositions mises à sa charge. Par un arrêt n° 17VE02608 du 25 juin 2019, la cour administrative d'appel de Versailles a déchargé M. C... des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il avait été assujetti au titre de l'année 2010 (article 1er), fixé le montant des revenus de capitaux mobiliers imposables entre ses mains au titre de l'année 2011 à 309 062 euros (article 2), déchargé le contribuable des suppléments d'impôt sur le revenu correspondants (article 3), réformé le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise dans cette mesure (article 4) et, enfin, rejeté le surplus des conclusions de la requête (article 6). Le Conseil d'État statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par le ministre de l'économie, des finances et de la relance, a, par une décision du 26 mai 2021, annulé les articles 2 à 4 de cet arrêt et renvoyé, dans cette mesure l'affaire devant la cour, où elle a été enregistrée le 30 mai 2021 sous le n° 21VE01585. Eu égard à la portée de ce renvoi, seuls demeurent en litige les suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels M. C... reste assujetti au titre de la seule année 2011.

Sur l'exception de non-lieu à statuer opposée par le ministre :

2. La circonstance que l'administration fiscale a, en exécution de l'arrêt 25 juin 2019 de la cour administrative d'appel de Versailles, prononcé le 12 juillet 2019 un dégrèvement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2011, pour la part excédant celle correspondant à un montant de revenus distribués de 309 062 euros, ne rend pas sans objet le présent litige, dès lors que cet arrêt a été annulé, à la demande du ministre, par le Conseil d'Etat statuant au contentieux dans une décision du 26 mai 2021 et que cette même demande avait été préalablement rejetée sur ce point par un jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 6 juin 2017. L'exception de non-lieu à statuer doit, dès lors, être écartée.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. / (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés, ainsi que les années d'imposition concernées. Hormis le cas où elle se réfère à un document qu'elle joint à la proposition de rectification ou à la réponse aux observations du contribuable, l'administration peut satisfaire cette obligation en se bornant à se référer aux motifs retenus dans une proposition de rectification, ou une réponse à ses observations, consécutive à un précédent contrôle et qui lui a été régulièrement notifiée, à la condition qu'elle identifie précisément la proposition ou la réponse en cause et que celle-ci soit elle-même suffisamment motivée.

4. La proposition de rectification du 20 décembre 2012, énonce les textes dont elle fait application, précise la nature des impositions et les années concernées, et désigne M. C... comme étant le bénéficiaire des sommes détaillées dans la proposition de rectification du 18 décembre 2012 adressée à la SARL Ates, laquelle était jointe et précisait les motifs pour lesquels l'administration a considéré que ces sommes étaient des revenus distribués appréhendés par M. C... et que ce dernier devait être considéré comme le seul maître de l'affaire de la société. Ainsi, la proposition de rectification, en réponse à laquelle le requérant a d'ailleurs présenté des observations, est suffisamment motivée.

Sur le bien-fondé des impositions :

5. En premier lieu, aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...). ". Aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes (...). ". En cas de refus des rehaussements par le contribuable qu'elle entend imposer comme bénéficiaire des sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve tant de l'existence et du montant des distributions que de leur appréhension par le contribuable.

Sur l'existence et le montant des distributions :

6. Il résulte de l'instruction que les revenus distribués ont été déterminés à partir du bénéfice industriel et commercial non déclaré de la SARL Ates reconstitué à partir des encaissements bancaires. Le vérificateur a ensuite majoré ces recettes d'un profit sur le trésor correspondant aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée puis a déduit, au titre des charges, les sommes pour lesquelles la société a produit au cours de la vérification de comptabilité des factures ouvrant droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée. Au stade de la réponse aux observations du contribuable, le service a tenu compte non seulement de nouvelles charges justifiées par la société mais également de la désignation du père du requérant comme bénéficiaire d'une partie des distributions litigieuses, à hauteur de 71 200 euros pour 2011.

7. Pour contester l'existence et le montant des distributions, et soutenir que le montant des bénéfices réputés distribués entre ses mains est exagéré et ne saurait excéder 52 245,75 euros au titre de l'année 2011, M. C... fait valoir, en premier lieu, que la méthode de reconstitution de la comptabilité de la SARL Ates serait radicalement viciée dès lors que les recettes ont été reconstituées en fonction des encaissements et non des factures. Toutefois, si le 2 de l'article 38 du code général des impôts dispose que " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ", il résulte de l'instruction que la SARL Ates n'avait pas été en mesure de présenter, lors de la procédure de vérification de sa comptabilité, les documents comptables correspondant à son activité ni les pièces justificatives du détail de ses recettes, mettant ainsi le vérificateur dans l'impossibilité de procéder, eu égard à l'activité de l'entreprise vérifiée, à des ajustements extracomptables permettant de se rapprocher des règles fixées au 2 de l'article 38 du code général des impôts. Il s'ensuit que le premier grief tiré de ce que les recettes ont été reconstituées en fonction des encaissements et non des factures doit être écarté.

8. M. C... fait valoir, en second lieu, que, pour déterminer le revenu taxable, le vérificateur a limité les charges déductibles aux dépenses justifiées par des factures. Toutefois, l'administration ayant reconstitué les ventes sans facture de l'exercice, elle ne pouvait se refuser à en déduire le prix d'achat, également sans facture, des marchandises ainsi vendues. A défaut de facture, il lui appartenait d'évaluer, à l'aide de tous les éléments dont elle pouvait disposer, le montant de ces achats. M. C... invoque plusieurs postes de charges avec les montants correspondants et produit les relevés bancaires de la société au cours de la période litigieuse ainsi que les comptes de trois sociétés ayant une activité comparable ainsi qu'une analyse financière des entreprises du BTP réalisée par BTP Banque qui indique notamment que le ratio net/chiffre d'affaires des entreprises de ce secteur s'établissait à environ 2 % pour les exercices litigieux. L'administration fiscale, qui supporte la charge de la preuve du montant des distributions litigieuses ne conteste pas sérieusement ces éléments en se bornant à retenir le montant inscrit au crédit du compte bancaire de la société et à opposer au requérant les conditions de déductions des charges du résultat de la société distributrice. Dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation forfaitaire du taux de charge supporté par la SARL Ates en le fixant à 50 % des recettes de l'exercice 2011 restant en litige. Il s'ensuit que le montant des distributions imposables au titre de cette année doit être fixé à 386 562 euros, soit 50 % des 580 347 euros d'encaissements majorés du profit sur le trésor de 96 389 euros, duquel il faut déduire la somme 71 200 euros dont l'administration fiscale a admis qu'elle avait été distribuée à son père, M. D... C.... Par suite, le montant des distributions attribuées à M. C... pour 2011 s'élève à 315 362 euros.

9. Si M. C... soutient en troisième lieu, que c'est à tort que l'administration a refusé de prendre en compte, dans les charges, divers achats constituant selon elle des immobilisations, il ne conteste pas toutefois que ces derniers visaient un élément d'actif immobilisé. De telles dépenses, qui n'entraînent au demeurant aucun désinvestissement au profit de tiers contrairement à ce qui est soutenu, et qui ont pour effet l'acquisition ou l'augmentation de la valeur d'un élément de l'actif ne sauraient être comptabilisées en charges ni être prises en compte en tant que telles.

10. M. C... ne saurait, utilement, en quatrième lieu, se prévaloir, de ce que l'administration n'a pas appliqué les dispositions du 1er alinéa de l'article L. 77 du livre des procédures fiscales aux termes desquelles : " En cas de vérification simultanée des taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées, de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, le supplément de taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées afférent à un exercice donné est déduit, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, des résultats du même exercice ", dès lors qu'il n'a pas fait l'objet d'une vérification au titre des taxes sur le chiffre d'affaires, ni d'ailleurs au titre de l'impôt sur le revenu, mais seulement d'un contrôle sur pièces.

11. Le requérant soutient, en dernier lieu, que c'est à tort que l'administration a inclus les rappels de taxe sur la valeur ajoutée dans le montant des revenus prétendument distribués. Lorsque, pour procéder au rehaussement des bénéfices imposables d'une société, l'administration procède à la réintégration de la somme correspondant au montant hors taxes de recettes omises puis ajoute à ces bénéfices la somme correspondant au montant de la TVA due sur ces recettes calculées hors taxes, cette décomposition ne saurait avoir pour effet de remettre en cause le caractère de revenu distribué de la totalité des recettes. Par suite, l'administration est fondée à regarder comme distribuées les sommes correspondant, d'une part, au montant hors taxes des recettes omises et, d'autre part, au montant de la TVA due sur les recettes calculées hors taxes.

12. Il en résulte que l'administration apporte la preuve de l'existence et du montant des revenus distribués, à hauteur, ainsi qu'il a été dit au point 7, d'une somme de seulement 315 362 euros.

Sur l'appréhension des revenus distribués :

13. Pour contester avoir appréhendé les distributions litigieuses M. C... fait valoir que le service n'apporte pas la preuve qui lui incombe de ce qu'il disposait du pouvoir exclusif de gestion sur la société et qu'il constituait ainsi l'unique maître de l'affaire.

14. En premier lieu, pour l'application des dispositions du 1 du 1 de l'article 109 du code général des impôts, le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle.

15. Pour établir que M. C... était le seul maître de l'affaire, le service a retenu que l'intéressé, gérant et détenteur de 20 % des parts sociales, disposait du pouvoir exclusif de gestion dès lors qu'il avait seul procuration sur l'unique compte bancaire de la société et avait endossé la majorité des chèques remis en banque, qu'aucune assemblée générale des associés n'avait été tenue sur la période en cause, et qu'il assurait, selon ses propres déclarations, le suivi des travaux sur les chantiers des clients et gérait les achats auprès des fournisseurs de la société. Pour sa part, M. C... se borne à affirmer qu'il ne disposait pas du pouvoir exclusif de gestion du fait de sa participation minoritaire ainsi que, par voie de conséquence, de la précarité de son statut de gérant lequel pouvait être remis en cause à chaque assemblée générale par les autres associés. Il se prévaut en outre, d'une part, n'avoir signé que la moitié des chèques encaissés, les autres l'ayant été par son père ou le comptable et que la grande majorité des chèques émis sont des chèques de banque non signés par lui, et, d'autre part, ne pas disposer des compétences techniques nécessaires pour assurer les missions essentielles de l'entreprise, lesquelles étaient assurées par son père, titulaire d'un diplôme d'ingénieur et chargé de la gestion technico-commerciale des chantiers, du contact avec les clients, de la négociation du budget et du recrutement des salariés compétents, l'implication de celui-ci dans la gestion de l'entreprise faisant obstacle à ce qu'il soit regardé comme étant le seul maître de l'affaire. Toutefois, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, les procès-verbaux d'assemblées générales produits en cours d'instance se trouvent dépourvus de valeur probante dès lors que M. C... n'a produit aucun registre d'assemblée générale pendant le contrôle et a admis que les assemblées d'actionnaires n'étaient pas tenues. En outre, le requérant n'établit pas que son père aurait été impliqué dans le fonctionnement de l'entreprise au-delà de ce qui était attendu de lui dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail alors que le rôle actif de M. C... dans les relations avec les clients et les fournisseurs résultent des propres déclarations de ce dernier lors des opérations de contrôle. Enfin, M. C... ne conteste pas avoir disposé seul de la procuration sur l'unique compte bancaire de la société, avoir endossé plus de la moitié des chèques remis à la banque et avoir donné ordre à la banque, en vertu de son mandat, d'émettre la totalité des chèques de banques sur la période en litige. Dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe que M. C... était le seul maître de l'affaire de la SARL Ates et qu'il était présumé avoir appréhendé les bénéfices reconstitués de la SARL à l'exclusion de ceux appréhendés par son père.

16. Pour renverser cette présomption, M. C... fait toutefois valoir qu'une partie des distributions litigieuses a été encaissée par des tiers et notamment par un des autres associés, M. A..., en particulier pour deux encaissements de chèques de banque les 17 mars 2011 et 21 septembre 2011 pour respectivement 300 euros et 6 255 euros, et un virement du 14 décembre 2011 pour 6 300 euros, soit un total de 12 855 euros. Au soutien de ses allégations, il produit les relevés bancaires de la société dont les mentions sont dénuées de toute ambiguïté s'agissant du virement ainsi que la copie des chèques de banque mentionnant M. A... en qualité de bénéficiaire. Dans ces conditions, et alors que l'administration se borne à faire valoir, sans en justifier, que ces sommes seraient nécessairement comprises dans le montant des salaires comptabilisés au nom de M. A... et déjà admises en charges, M. C..., qui doit être regardé comme établissant que ces sommes d'un montant total de 12 855 euros n'ont pas été appréhendées par lui, est fondé à demander la réduction des revenus de capitaux mobiliers au titre de l'année 2011 à due concurrence. Il s'ensuit que le montant des distributions imposables à son profit doit être fixé pour l'année 2011 et sur le fondement du 1 du 1° de l'article 109 du code général des impôts à 302 507 euros.

17. En deuxième lieu, pour soumettre à l'impôt sur le revenu des revenus distribués sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, il incombe à l'administration d'établir qu'ils ont été mis à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts. La circonstance que le contribuable que l'administration entend imposer soit le maître de l'affaire est à cet égard sans incidence.

18. En défense, l'administration fiscale indique avoir imposé les distributions, à hauteur de 25 189 euros au titre de l'année 2011, sur le fondement du 2° de l'article 109 du code général des impôts, somme qu'elle distingue, sans explication, du surplus de 373 644 euros imposés sur le fondement de 1° et 2° du 1 de l'article 109 du même code. Toutefois, en se bornant à se prévaloir de la qualité de maître de l'affaire de M. C..., l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'appréhension effective de cette somme par l'intéressé. Par suite, il y a lieu de prononcer une réduction des bases d'imposition à hauteur de ce montant.

19. Il résulte de ce qui précède que le montant des distributions imposables au profit de M. C... doit être fixé pour l'année 2011 à 277 318 euros et que ce dernier est fondé à solliciter la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales correspondant à cette réduction en base.

Sur les pénalités :

20. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". Aux termes de l'article 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, (...) la preuve de la mauvaise foi (...) incombe à l'administration ".

21. Les pénalités pour manquement délibéré appliquées doivent être déchargées en conséquence de la décharge en base prononcée au point 19.

22. Pour le surplus, l'administration justifie l'application de la pénalité pour manquement délibéré par l'importance des montants rectifiés, soit 515 % des sommes déclarées, lesquels demeurent substantiels y compris après la diminution des bases prononcée, ainsi que par les fonctions de gérant de la SARL Ates exercées par M. C..., maître de l'affaire, lequel ne pouvait pas ignorer les carences de la société s'agissant de ses obligations comptables et déclaratives, ni avoir appréhendé ces sommes, lesquelles avaient le caractère d'un revenu imposable. Dès lors, et pour ces seuls motifs, le ministre doit être regardé comme apportant la preuve, qui lui incombe, du caractère délibéré des manquements déclaratifs ainsi relevés. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a pu assortir les impositions litigieuses de l'année 2011 de la majoration de 40 % prévue par ces dispositions.

23. Il résulte de ce qui précède que M. C... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ne lui a pas accordé la réduction, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2011 à raison d'un montant de distribution fixé à 277 318 euros.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

24. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat les sommes demandées par M. C... en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative au titre de la première instance et de l'appel.

DÉCIDE :

Article 1er : Les revenus de M. C... imposables au titre de l'année 2011 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sont fixés à 277 318 euros.

Article 2 : M. C... est déchargé, en droits et pénalités, des suppléments d'impôts sur le revenus et de contributions sociales mis à sa charge au titre de l'année 2011 à hauteur de la réduction en base prononcée à l'article 1er.

Article 3 : Le jugement n° 1503008 du 6 juin 2017 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 9 mai 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Besson-Ledey, présidente de chambre,

Mme Danielian, présidente assesseure,

Mme Liogier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2023.

La rapporteure,

I. DanielianLa présidente,

L. Besson-LedeyLa greffière,

C. Fourteau

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

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N° 21VE01585


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