La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/05/2023 | FRANCE | N°21VE00239

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 16 mai 2023, 21VE00239


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler le titre de recettes du 6 mars 2018 par lequel le centre hospitalier Jacques Cœur a mis à sa charge la somme de 10 657,77 euros et de le décharger du paiement de cette somme.

Par un jugement n° 1802807 du 15 décembre 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête sommaire, un mémoire ampliatif, un mémoire et des pièces, enregistrés les 26 janvier, 9

février et 12 mai 2021 et le 30 mars 2023, M. A... C..., représenté par Me Bigot, avocate, dem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler le titre de recettes du 6 mars 2018 par lequel le centre hospitalier Jacques Cœur a mis à sa charge la somme de 10 657,77 euros et de le décharger du paiement de cette somme.

Par un jugement n° 1802807 du 15 décembre 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête sommaire, un mémoire ampliatif, un mémoire et des pièces, enregistrés les 26 janvier, 9 février et 12 mai 2021 et le 30 mars 2023, M. A... C..., représenté par Me Bigot, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler le titre de recettes émis par le centre hospitalier Jacques Cœur le 6 mars 2018 ;

3°) de condamner le centre hospitalier Jacques Cœur à lui verser la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens.

Il soutient que :

- il est recevable à invoquer des vices entachant la légalité externe du titre exécutoire émis le 6 mars 2018 ;

- le titre contesté est entaché d'un vice de procédure dès lors qu'il n'a pas été destinataire d'un courrier préalablement à son émission et qu'il ne respecte pas le principe de séparation des ordonnateurs et des comptables ;

- ce titre est entaché d'une insuffisance de motivation quant à la nature de la recette à recouvrer, les motifs de la créance et l'identité du débiteur ;

- il est également entaché d'un vice de forme dès lors qu'il n'est pas revêtu de la mention des voies et délais de recours en méconnaissance des dispositions de l'article

R. 421-5 du code de justice administrative ;

- le titre exécutoire est dépourvu à la fois de base légale, dès lors que les dispositions de l'article R. 6152-37 du code de la santé publique ne sont pas applicables à sa situation, laquelle relève d'un accident du travail régi par l'article R. 6152-41 du même code, et de tout fondement, en l'absence de libéralité ou d'erreur de liquidation ; en effet, dès lors que le jugement du Tribunal des affaires de sécurité sociale de Bourges du 16 mai 2014, qui a déclaré inopposable à son employeur le caractère professionnel de l'accident qu'il a subi et la prise en charge de ce dernier, et celui du tribunal administratif d'Orléans du 13 mars 2018, auquel il n'était pas davantage partie, ne lui sont pas opposables et n'ont aucun effet sur les droits qu'il détient à l'égard de son employeur à ce titre en application des dispositions de l'article R. 6152-41 du code de la sécurité sociale et du principe d'autonomie des législations ; il n'est donc pas tenu de rembourser au centre hospitalier Jacques Cœur les émoluments qu'il a perçus, sans avoir à rapporter une preuve supplémentaire du caractère professionnel de son accident, lequel n'a pas été remis en cause par le jugement du Tribunal des affaires de sécurité sociale ;

- à la date de son accident, il était administrativement rattaché au centre hospitalier Jacques Cœur ;

- le montant du trop-perçu dont le remboursement est recherché est erroné.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 9 avril 2021 et 3 juin 2022, le centre hospitalier Jacques Cœur, représenté par Me Adeline-Delvolvé, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce que M. C... soit condamné à lui verser une somme de 4 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les dépens, dont 13 euros de droits de plaidoirie par audience.

Il fait valoir que :

- la requête est irrecevable en tant qu'elle ne satisfait pas aux exigences de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

- les moyens de légalité externe soulevés à l'encontre du titre exécutoire sont irrecevables ;

- aucun des moyens soulevés n'est fondé ;

- il est tenu de recouvrer les sommes indument versées au regard des dispositions de l'article R. 6152-37 du code de la santé publique ;

- le titre émis est justifié tant dans son principe que dans son montant.

Un mémoire, enregistré le 17 avril 2023, a été présenté par M. C..., postérieurement à la clôture automatique de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de Mme Viseur-Ferré, rapporteure publique,

- et les observations de Me Soularue pour le centre hospitalier Jacques Coeur.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... C..., praticien hospitalier au centre hospitalier Jacques Cœur, a été victime d'un accident de trajet le 26 décembre 2012, dont le caractère professionnel a été reconnu par une décision du 12 août 2013 de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Cher. Par un jugement du 16 mai 2014, le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Bourges a déclaré inopposable au centre hospitalier Jacques Cœur cette décision. M. C... ayant de nouveau été placé en congé de maladie du 15 mars 2016 au 27 octobre 2016 à la suite d'une rechute de son état de santé, reconnue imputable à l'accident de trajet initial par des décisions de la CPAM du Cher des 9 septembre et 26 octobre 2016, le centre hospitalier Jacques Cœur a refusé de maintenir la totalité des émoluments de l'intéressé au-delà de trois mois au motif de l'inopposabilité du caractère professionnel de l'accident initial. Considérant que M. C... avait bénéficié à tort de la totalité de ses émoluments pour la période comprise entre le 1er juillet et le 1er octobre 2016 à la suite de l'erreur commise par la CPAM, alors qu'il aurait dû percevoir la moitié de ses émoluments au cours de cette période, le centre hospitalier Jacques Cœur a émis à l'encontre de M. C... un titre de perception rendu exécutoire tendant au remboursement par l'intéressé d'une somme de 10 657,77 euros. M. C... relève appel du jugement du 15 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce titre de perception et à la décharge du paiement de cette somme.

Sur la régularité du titre exécutoire :

2. En premier lieu, après l'expiration du délai de recours contre un acte administratif, sont irrecevables, sauf s'ils sont d'ordre public, les moyens soulevés par le demandeur qui relèvent d'une cause juridique différente de celle à laquelle se rattachent les moyens invoqués dans sa demande avant l'expiration de ce délai. Il en va de même s'agissant des moyens soulevés pour la première fois en appel et relevant d'une cause juridique différente de celle à laquelle se rattachent les moyens invoqués avant l'expiration du délai de recours devant le tribunal administratif.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux premiers juges qu'aucun moyen de régularité du titre exécutoire en litige n'a été présenté par M. C... à l'appui de sa demande introductive d'instance enregistrée au greffe du tribunal administratif d'Orléans le 27 juillet 2018, l'irrégularité de ce titre n'ayant été soulevée que dans le mémoire en réplique du demandeur, enregistré le 11 octobre 2019, soit après l'expiration du délai de recours contentieux contre cet acte. Par suite, et ainsi que le fait valoir en défense le centre hospitalier Jacques Cœur, les moyens de régularité présentés devant la cour, qui ne sont pas d'ordre public, sont irrecevables et ne peuvent, par suite, qu'être écartés.

4. En second lieu, la lettre d'accompagnement de l'avis des sommes à payer est signée par la directrice de l'établissement, en sa qualité d'ordonnateur. Dès lors, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le titre exécutoire en litige serait entaché d'incompétence.

Sur le bien-fondé du titre exécutoire :

5. D'une part, aux termes de l'article R. 6152-37 du code de la santé publique : " En cas de maladie dûment constatée et attestée par un certificat médical mettant un praticien dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, celui-ci est de droit mis en congé par décision du directeur de l'établissement. / Le praticien en congé de maladie conserve la totalité des émoluments prévus au 1° de l'article R. 6152-23, pendant une durée de trois mois ; ces émoluments sont réduits à la moitié pendant les neuf mois suivants. (...) ". D'autre part, l'article R. 6152-41 du même code dispose : " En cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle, le praticien hospitalier est placé en congé pour une durée maximale de cinq ans, pendant lequel il perçoit les émoluments mentionnés au 1° de l'article

R. 6152-23. ".

6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le titre exécutoire émis le 6 mars 2018 est fondé sur le jugement du Tribunal des affaires de sécurité sociale de Bourges du 16 mai 2014, lequel a déclaré inopposable au centre hospitalier Jacques Cœur la décision de la CPAM du Cher en date du 12 août 2013 de prise en charge de l'accident de trajet dont a été victime le docteur C... le 26 décembre 2012, motif pris que cette décision ne respecte pas les exigences de motivation posées par l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale, dès lors qu'eu égard aux éléments portés à sa connaissance par le centre hospitalier, un examen plus approfondi par la CPAM paraissait se justifier. Ainsi que le soutient M. C..., ce jugement n'est pas opposable à l'intéressé, lequel a d'ailleurs formé opposition à l'encontre de la décision du Tribunal des affaires de sécurité sociale de Bourges, pas plus au demeurant que le jugement du 13 mars 2018 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a déchargé la CPAM de l'obligation de payer la somme procédant d'un titre exécutoire émis le 12 septembre 2017 par le centre hospitalier Jacques Cœur. Toutefois, le requérant ne peut pour autant légalement se prévaloir à l'égard du centre hospitalier employeur de la reconnaissance par la CPAM de l'imputabilité au service de la rechute de son état dès lors que cette prise en charge est devenue inopposable à l'employeur. Par suite, ce dernier pouvait légalement, en se fondant sur l'inopposabilité à son égard du caractère professionnel de l'accident de trajet résultant de ce jugement, requalifier l'ensemble des congés pris à compter du 15 mars 2016 en congés de maladie ordinaire, et, en conséquence de cette requalification, nonobstant les décision rendues par la CPAM des 9 septembre et 26 octobre 2016 imputant les rechutes à l'accident initial, réclamer à l'agent le remboursement des émoluments et indemnités indûment perçus au-delà du troisième mois d'arrêt de travail. Dans ces conditions, M. C..., qui ne conteste pas son rattachement administratif au centre hospitalier Jacques Cœur à la date de son accident, n'est pas fondé à soutenir que la créance de ce dernier méconnaîtrait les dispositions de l'article R. 6152-41 du code de la santé publique ou ne serait pas fondée dans son principe. Dès lors, les moyens tirés du défaut de base légale et de l'absence de fondement de l'avis des sommes à payer en litige doivent être écartés.

7. En second lieu, il résulte de l'instruction que le montant du titre de recettes contesté correspond à la moitié des émoluments versés au docteur C... pour la période du 16 juin au 27 octobre 2016, et non à compter du 15 mars 2016 ainsi que le soutient le requérant. Par suite, le moyen tiré de ce que le montant du titre exécutoire en litige serait erroné manque en fait et doit être écarté.

8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le centre hospitalier Jacques Cœur, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, soit condamné à verser la somme demandée par M. C... au titre des frais exposés par ce dernier et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C... une somme de 1 500 euros à verser au centre hospitalier Jacques Cœur sur le même fondement. En revanche, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par les parties au titre des dispositions de l'article R. 761-1 du même code, en l'absence de dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par M. C... est rejetée.

Article 2 : M. C... versera au centre hospitalier Jacques Cœur la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par le centre hospitalier Jacques Cœur est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au centre hospitalier Jacques Cœur.

Délibéré après l'audience du 18 avril 2023, à laquelle siégeaient :

M. Brotons, président,

Mme Le Gars, présidente assesseure,

Mme Bonfils, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mai 2023.

La rapporteure

M-G. B...Le président,

S. BROTONS

La greffière,

V. MALAGOLI

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N° 21VE00239 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE00239
Date de la décision : 16/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Marie-Gaëlle BONFILS
Rapporteur public ?: Mme VISEUR-FERRÉ
Avocat(s) : SELAS ADMINIS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-05-16;21ve00239 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award