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16/05/2023 | FRANCE | N°21VE00144

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 16 mai 2023, 21VE00144


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif d'Orléans, à titre principal, en premier lieu, d'ordonner la reprise des relations contractuelles entre la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Loiret, l'agence régionale de santé (ARS) Centre-Val de Loire et lui-même, à compter de la date de résiliation du contrat d'aide à l'installation des médecins auquel il avait adhéré le 22 janvier 2018, en second lieu, de juger qu'il peut conserver la somme de 25 000 euros correspondant aux 50 % de l'aide

qu'il a déjà perçue lors de la signature de ce contrat et d'enjoindre à la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif d'Orléans, à titre principal, en premier lieu, d'ordonner la reprise des relations contractuelles entre la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Loiret, l'agence régionale de santé (ARS) Centre-Val de Loire et lui-même, à compter de la date de résiliation du contrat d'aide à l'installation des médecins auquel il avait adhéré le 22 janvier 2018, en second lieu, de juger qu'il peut conserver la somme de 25 000 euros correspondant aux 50 % de l'aide qu'il a déjà perçue lors de la signature de ce contrat et d'enjoindre à la CPAM du Loiret et à l'ARS Centre-Val de Loire de lui verser la somme de 25 000 euros correspondant à la seconde partie de l'aide à l'installation devant être versée à la date anniversaire de la signature du même contrat, augmentée des intérêts de retard au taux légal, à titre subsidiaire, de condamner solidairement la CPAM du Loiret et l'ARS Centre-Val de Loire à lui verser la somme de 25 000 euros correspondant aux 50 % de l'aide qu'il ne percevra pas du fait de la résiliation de ce contrat, et, en tout état de cause, de condamner ces deux autorités à lui verser la somme de 3 000 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de la résiliation irrégulière et injustifiée dudit contrat et de mettre à leur charge une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1902755 du 18 novembre 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire récapitulatif, enregistrés le 18 janvier 2021 et le 11 février 2023, M. C... B..., représenté par Mes Choley et Vidal, avocats, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) à titre principal :

- d'annuler ce jugement ;

- d'annuler la décision du 28 mai 2019 par laquelle le directeur de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Loiret et le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) Centre-Val de Loire ont résilié le contrat d'accès aux soins conclu avec lui le 22 janvier 2018 ;

- d'ordonner la reprise de ses relations contractuelles avec la CPAM du Loiret et l'ARS Centre-Val de Loire, à compter de la date de résiliation du contrat d'aide à l'installation des médecins auquel il avait adhéré le 22 janvier 2018 ;

- de constater qu'il peut conserver la somme de 25 000 euros correspondant aux 50 % de l'aide qu'il a d'ores et déjà perçue lors de la signature du contrat conclu ;

- d'enjoindre à la CPAM du Loiret et l'ARS Centre-Val de Loire de lui verser la somme de 25 000 euros correspondant à la seconde partie de l'aide à l'installation devant être versée à la date d'anniversaire de la signature de ce contrat, augmentée des intérêts de retard au taux légal ;

2°) à titre subsidiaire :

- de condamner solidairement la CPAM du Loiret et l'ARS Centre-Val de Loire à lui verser la somme de 25 000 euros correspondant aux 50 % de l'aide qu'il ne percevra pas eu égard à la résiliation du contrat qui les liait ;

3°) en tout état de cause :

- de condamner solidairement la CPAM du Loiret et l'ARS Centre-Val de Loire à lui verser la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral résultant de la résiliation irrégulière et injustifiée dudit contrat ;

- de mettre à la charge de la CPAM du Loiret et de l'ARS Centre-Val de Loire la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité au regard des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- la décision du 28 mai 2019 portant résiliation du contrat a été prise au terme d'une procédure qui méconnaît le principe du contradictoire et le principe des droits de la défense ;

- elle est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne fait aucune référence précise aux dispositions contractuelles ou réglementaires qu'il aurait méconnues, ni ne précise la période et ne cite les circonstances de fait permettant de regarder cette inexécution du contrat comme matériellement établie ; en outre, elle ne précise pas la date à laquelle la résiliation prendra effet ;

- elle n'est pas fondée dès lors que, d'une part, il a effectivement participé à la permanence des soins ambulatoires, et, d'autre part, il a été dispensé de participer à la permanence de soins par le conseil départemental de l'ordre des médecins, conformément à l'article 2.1 du contrat d'aide à l'installation, dès lors qu'il avait conclu un autre contrat avec la clinique de Montargis l'obligeant à effectuer de nombreuses astreintes dans cet établissement ;

- la sanction prononcée est disproportionnée car la participation à la permanence des soins ambulatoires n'est pas une obligation essentielle et il peut y être dérogé en cas de dérogation accordée par le conseil de l'ordre des médecins ;

- la décision de résiliation étant irrégulière, infondée et disproportionnée, il a droit à ce que la reprise des relations contractuelles soit ordonnée et, en tout état de cause, à l'indemnisation de ses préjudices.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 avril 2021, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Loiret et l'agence régionale de santé (ARS) Centre-Val de Loire, représentées par Me Maury, avocate, concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. B... d'une somme de 1 500 euros à verser à chacune d'entre elles au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- s'agissant de l'ordre de juridiction matériellement compétent pour connaître de la requête, elles s'en rapportent à l'appréciation de la cour ;

- les conclusions aux fins d'injonction, de constat et de condamnation solidaire de la CPAM du Loiret et de l'ARS Centre-Val de Loire sont irrecevables ;

- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions à fin d'annulation de la décision de résiliation du contrat.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'arrêté n° 2016-OSMS-0065 du 1er juillet 2016 portant fixation du cahier des charges relatif à l'organisation de la permanence des soins en médecine générale en région Centre-Val de Loire ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de Mme Viseur-Ferré, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Le docteur C... B..., médecin généraliste exerçant en libéral à son cabinet situé dans une maison de santé sise à Montargis, a conclu le 22 janvier 2018 avec la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret, ci-après dénommée CPAM du Loiret, représentée par son directeur, et l'agence régionale de santé Centre-Val de Loire, ci-après dénommée ARS Centre-Val de Loire, représentée par son directeur général, un contrat d'aide à l'installation des médecins (CAIM) en zone caractérisée par une insuffisance de l'offre de soins et des difficultés d'accès aux soins. En contrepartie de divers engagements du médecin, au titre desquels figure la participation à un dispositif de permanence des soins ambulatoires, le contrat prévoit un avantage financier en provenance de crédits de l'assurance-maladie, à hauteur, pour une activité minimale de quatre jours par semaine, d'un montant de 50 000 euros dont 50 % sont versés à la signature du contrat et 50 % versés à la date du premier anniversaire. Ainsi, le docteur B... a perçu la somme de 25 000 euros fin mars 2018. Par une lettre du 21 mars 2019, le directeur de la CPAM du Loiret et le directeur général de l'ARS Centre-Val de Loire ont informé leur cocontractant qu'il n'avait pas respecté son engagement portant sur la participation au dispositif de la permanence des soins ambulatoires sur le territoire, ce qui l'exposait, sauf observations de sa part dans un délai d'un mois, à une décision de résiliation de son CAIM. Par une décision du 28 mai 2019, ces mêmes autorités ont notifié au docteur B... le prononcé de la résiliation unilatérale de ce contrat aux torts exclusifs de ce dernier en application des stipulations de son article 4.2, en lui précisant que " les sommes indûment versées au titre de l'aide à l'installation seront récupérées au prorata de la durée restant à courir dans le contrat au moment de sa résiliation ". M. B... relève appel du jugement du 18 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses demandes tendant, à titre principal, à ordonner la reprise de ses relations contractuelles avec la CPAM du Loiret et l'ARS Centre-Val de Loire à compter de la date de résiliation du CAIM auquel il avait adhéré le 22 janvier 2018, à ce qu'il conserve la somme de 25 000 euros correspondant aux 50 % de l'aide d'ores et déjà perçue lors de la signature de ce contrat et, enfin, à enjoindre à la CPAM du Loiret et à l'ARS Centre-Val de Loire de lui verser la somme de 25 000 euros correspondant à la seconde partie de l'aide à l'installation devant être payée à la date anniversaire de la signature du contrat, augmentée des intérêts de retard au taux légal.

Sur la fin de non-recevoir opposée en défense aux conclusions tendant à faire constater le droit à conservation de la somme de 25 000 euros :

2. M. B... présente une nouvelle fois en appel des conclusions tendant au prononcé de la conservation de la somme de 25 000 euros qu'il a perçue à la date de signature de son CAIM. Toutefois, pas plus qu'en première instance, il ne produit de décision relative au reversement de cette somme. Dès lors, de telles conclusions, qui relèvent d'un litige futur et distinct, doivent en tout état de cause être rejetées en tant qu'elles sont irrecevables faute d'objet.

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision de résiliation du marché du 28 mai 2019 :

3. Dès lors que les parties à un contrat administratif ne peuvent pas, en principe, demander au juge l'annulation d'une mesure d'exécution de ce contrat, les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de la mesure de résiliation du CAIM conclu le 22 janvier 2018 avec la CPAM du Loiret et à l'ARS Centre-Val de Loire sont en tant que telles irrecevables et doivent, par suite, être rejetées.

Sur la régularité du jugement :

4. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs (...), la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".

5. Il ressort des pièces du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué a bien été signée par la présidente de la formation de jugement, la rapporteure de l'affaire et la greffière d'audience, conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 précité du code de justice administrative. Dès lors, la circonstance que l'ampliation du jugement notifiée à M. B... ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté en tant qu'il manque en fait.

Sur la validité de la mesure de résiliation et la demande de reprise des relations contractuelles :

6. Le juge du contrat, saisi par une partie d'un litige relatif à une mesure d'exécution d'un contrat, peut seulement, en principe, rechercher si cette mesure est intervenue dans des conditions de nature à ouvrir droit à indemnité. Toutefois, une partie à un contrat administratif peut, eu égard à la portée d'une telle mesure d'exécution, former devant le juge du contrat un recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation de ce contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles. Il incombe alors au juge du contrat, lorsqu'il constate que cette mesure est entachée de vices relatifs à sa régularité ou à son bien-fondé, de déterminer s'il y a lieu de faire droit, dans la mesure où elle n'est pas sans objet, à la demande de reprise des relations contractuelles, à compter d'une date qu'il fixe, ou de rejeter le recours, en jugeant que les vices constatés sont seulement susceptibles d'ouvrir, au profit du requérant, un droit à indemnité. Pour déterminer s'il y a lieu de faire droit à la demande de reprise des relations contractuelles, il incombe au juge du contrat d'apprécier, eu égard à la gravité des vices constatés et, le cas échéant, à celle des manquements du requérant à ses obligations contractuelles, ainsi qu'aux motifs de la résiliation, si une telle reprise n'est pas de nature à porter une atteinte excessive à l'intérêt général et, eu égard à la nature du contrat en cause, aux droits du titulaire d'un nouveau contrat dont la conclusion aurait été rendue nécessaire par la résiliation litigieuse.

En ce qui concerne la régularité de la procédure de résiliation :

7. D'une part, aux termes de l'article L. 1434-4 du code de la santé publique, dans sa version applicable au litige : " Le directeur général de l'agence régionale de santé détermine par arrêté, après concertation avec les représentants des professionnels de santé concernés : / 1° Les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l'accès aux soins ; / (...) / Dans les zones mentionnées aux 1° (...) du présent article, sont mises en œuvre les mesures destinées à réduire les inégalités en matière de santé et à favoriser une meilleure répartition géographique des professionnels de santé, des maisons de santé, des pôles de santé et des centres de santé prévues notamment aux articles L. 1435-4-2 et L. 1435-5-1 à L. 1435-5-4 du présent code (...) ". Aux termes de l'article L. 6314-1 du même code : " La mission de service public de permanence des soins est assurée, en collaboration avec les établissements de santé, par les médecins mentionnés à l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale, dans le cadre de leur activité libérale, et aux articles L. 162-5-10 et L. 162-32-1 du même code, dans les conditions définies à l'article L. 1435-5 du présent code. / (...) / Pour l'accomplissement de la mission de service public de permanence des soins, des modalités particulières de prescription sont fixées par voie réglementaire. ".

8. Aux termes de l'article R. 6315-1 du code de la santé publique : " La mission de permanence des soins prévue à l'article L. 6314-1 a pour objet de répondre aux besoins de soins non programmés : / 1° Tous les jours de 20 heures à 8 heures ; / 2° Les dimanches et jours fériés de 8 heures à 20 heures ; / 3° En fonction des besoins de la population évalués à partir de l'activité médicale constatée et de l'offre de soins existante : le samedi à partir de midi, le lundi lorsqu'il précède un jour férié, le vendredi et le samedi lorsqu'ils suivent un jour férié. / A cette fin, la région est divisée en territoires de permanence des soins dont les limites sont arrêtées par le directeur général de l'agence régionale de santé, selon les principes d'organisation définis dans le cahier des charges régional mentionné à l'article R. 6315-6. / La permanence des soins est assurée par les médecins exerçant dans les cabinets médicaux, maisons de santé, pôles de santé et centres de santé, ainsi que par les médecins exerçant dans les associations de permanence des soins. (...) ". L'article suivant du même code dispose : " I. ' Dans chaque territoire de permanence des soins, les médecins mentionnés à l'article R. 6315-1 qui sont volontaires pour participer à cette permanence et les associations de permanence des soins établissent le tableau de garde pour une durée minimale de trois mois. / Ce tableau précise le nom, la modalité et le lieu de dispensation des actes de chaque médecin. Il est transmis, au plus tard quarante-cinq jours avant sa mise en œuvre, au conseil départemental de l'ordre des médecins concerné. Le conseil départemental de l'ordre des médecins vérifie que les intéressés sont en situation régulière d'exercice et, le cas échéant, constate l'absence ou l'insuffisance de médecins volontaires. / (...) / II. ' Si le médecin intervient dans le cadre d'une association de permanence de soins, celle-ci communique au conseil départemental et met à jour régulièrement la liste nominative des médecins susceptibles de participer à cette permanence au titre de l'association. Dans un délai maximal d'un mois suivant la fin de la mise en œuvre du tableau de garde, l'association transmet au conseil départemental la liste nominative, par tranche horaire, des médecins qui ont effectivement assuré la permanence des soins sur le territoire. / Dix jours au moins avant sa mise en œuvre, le tableau est transmis par le conseil départemental au directeur général de l'agence régionale de santé (...). ". Aux termes de l'article R. 6315-4 de ce même code : " Les médecins participent à la permanence des soins et à l'activité de régulation sur la base du volontariat. / (...) / Il peut être accordé par le conseil départemental de l'ordre des médecins des exemptions de permanence pour tenir compte de l'âge, de l'état de santé et, éventuellement, des conditions d'exercice de certains médecins. La liste des médecins exemptés est transmise au directeur général de l'agence régionale de santé par le conseil départemental qui la communique au préfet de département ou, à Paris, au préfet de police. (...) ". Enfin, l'article R. 6315-6 du même code, dans sa version applicable au litige, ajoute : " Les principes d'organisation de la permanence des soins font l'objet d'un cahier des charges régional arrêté par le directeur général de l'agence régionale de santé dans le respect des objectifs fixés par le schéma régional de santé. (...) ".

9. D'autre part, aux termes de l'article 2.1 du contrat d'aide à l'installation des médecins signé par M. B... : " Le médecin s'engage : - à exercer en libéral son activité au sein d'un groupe, d'une communauté professionnelle territoriale de santé, d'une équipe de soins, au sein de la zone définie à l'article 1 du contrat pendant une durée de cinq années consécutives à compter de la date d'adhésion au contrat, / - à proposer aux patients du territoire une offre de soins d'au moins deux jours et demi par semaine au titre de son activité libérale dans la zone, / - à participer au dispositif de permanence des soins ambulatoire, tel qu'il est organisé sur le territoire, sauf dérogation accordée par le Conseil de l'Ordre des médecins. / Engagement optionnel / Le médecin s'engage à réaliser une partie de son activité libérale au sein des hôpitaux de proximité définis à l'article L. 6111-3-1 du code de la santé publique dans les conditions prévues à l'article L. 6146-2 du code de la santé publique ". Aux termes de l'article 4.2 de ce même contrat : " Dans le cas où le médecin ne respecte pas ses engagements contractuels (départ de la zone ou médecin ne répondant plus aux critères d'éligibilité au contrat définis à l'article 1.2 du contrat), la caisse l'en informe par lettre recommandée avec accusé de réception lui détaillant les éléments constatés et le détail des étapes de la procédure définie ci-après. / Le médecin dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception du courrier pour faire connaître ses observations écrites à la caisse. / A l'issue de ce délai, la caisse peut notifier au médecin la fin de son adhésion au contrat par lettre recommandée avec accusé de réception. / Dans ce cas, l'assurance maladie procède à la récupération des sommes indûment versées au titre de l'aide à l'installation et de la majoration pour l'activité au sein des hôpitaux de proximité, le cas échéant, au prorata de la durée restant à courir dans le contrat au moment de la résiliation notifiée par la caisse. ".

10. En premier lieu, il résulte de l'instruction que, par une lettre du 21 mars 2019, le directeur de la CPAM du Loiret et le directeur général de l'ARS Centre-Val de Loire, d'une part, ont informé le docteur B... de la méconnaissance de son engagement contractuel relatif à la participation au dispositif de permanence des soins ambulatoires, et, d'autre part, l'ont invité à produire ses observations écrites dans un délai d'un mois, au risque de s'exposer à une résiliation de contrat et à la réclamation de la somme de 25 000 euros qu'il a déjà perçue. Si M. B... soutient que cette décision devait mentionner la zone et la période au titre desquelles il n'avait pas respecté son engagement contractuel, la CPAM du Loiret et le directeur général de l'ARS Centre-Val de Loire ont bien notifié à leur cocontractant l'élément leur permettant de constater le critère d'éligibilité défini par le contrat que l'intéressé ne remplissait pas, conformément aux stipulations de l'article 4.2 du contrat d'aide à l'installation. Dans ces conditions, nonobstant l'absence de précisions dans le courrier du 21 mars 2019 quant à la zone concernée, dont au surplus M. B... avait nécessairement connaissance dès lors que la zone figurait dans le contrat qu'il avait signé le 22 janvier 2018 par référence à l'arrêté de la directrice générale de l'ARS Centre-Val de Loire du 7 décembre 2017 relatif à la détermination des zones caractérisées par une offre insuffisante ou par des difficultés dans l'accès aux soins concernant la profession de médecin, et à la période visée, laquelle portait nécessairement sur celle courant depuis la signature du contrat, l'intéressé a été mis en mesure de présenter utilement ses observations sur le manquement reproché, ce qu'il a d'ailleurs fait par courrier dès le 30 mars 2019, soit dans le délai qui lui avait été indiqué, en apportant des explications sur sa contribution aux astreintes au titre de l'année 2018. Par suite, le caractère contradictoire de la procédure n'a pas été méconnu et ce moyen, ainsi que celui tiré de l'atteinte aux droits de la défense, doivent être écartés.

11. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 2° Infligent une sanction ; (...). ".

12. Il ressort des termes de la décision du 28 mai 2019 que celle-ci énonce les considérations de droit et de fait qui la fondent, notamment la nature du contrat, la date de sa signature, son objet, la lettre du 21 mars 2019 portant mise en demeure ainsi que la stipulation contractuelle prévoyant la résiliation. Elle fait également état du motif de résiliation retenu, à savoir la méconnaissance de l'engagement à participer au dispositif de la permanence des soins ambulatoires sur le territoire, outre la référence aux éléments transmis par le docteur B... dans ses deux messages des 30 mars et 25 mai 2019, dont il est précisé qu'ils ne sont pas de nature à justifier l'absence de respect de l'engagement pris, et dont il ne ressort pas que leur auteur aurait demandé à connaître les éléments qu'il estimait être manquants. Il se déduit des termes mêmes de cette décision que la résiliation prend effet à la date de réception du courrier. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision du 28 mai 2019 ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne le bien-fondé de la décision de résiliation :

13. En premier lieu, il ressort de l'arrêté n° 2016-OSMS-0065 du 1er juillet 2016 portant fixation du cahier des charges relatif à l'organisation de la permanence des soins en médecine générale en région Centre-Val de Loire, pris en application des dispositions précitées de l'article R. 6315-6 du code de la santé publique et régulièrement publié au recueil des actes administratif spécial de la préfecture de région Centre-Val de Loire le 5 juillet 2016, notamment du point 3 de la première partie, que la permanence de soins ambulatoires est organisée sur la base du volontariat des médecins qui y participent, selon un tableau de garde établi par le conseil départemental de l'ordre des médecins qui le transmet à l'ARS. L'ARS est chargée de valider ce tableau au regard du cahier des charges applicable à chaque département. La troisième partie de ce document précise que le contrôle du " service fait " par les médecins est effectué au vu du tableau de garde et de la demande individuelle de paiement des forfaits transmis par le médecin.

14. Pour contester la validité de la décision de résiliation de son contrat d'aide à l'installation, M. B... soutient, d'une part, avoir participé à la permanence des soins ambulatoires (PDSA) les samedis, dimanches et jours fériés en 2018 et 2019, ainsi qu'en attesterait le contrat de bail qu'il a conclu avec la communauté d'agglomération de Montargis pour domicilier son cabinet au sein d'une maison de santé pluridisciplinaire, et, d'autre part, qu'il aurait été dispensé d'une participation plus importante par le conseil départemental de l'ordre des médecins au vu des astreintes qu'il a contractualisées, avec l'accord de ce dernier, avec la clinique de Montargis. Sur le premier point, il résulte de l'instruction, notamment des tableaux de garde établis par le conseil départemental de l'ordre des médecins du Loiret au titre de la PDSA, laquelle constitue une mission de service public, pour la période de février 2018 à mai 2019, que le docteur B... n'apparaît pas sur ces programmes de permanences. A cet égard, si les relevés produits par le requérant attestent que ce dernier a procédé à des consultations à l'occasion de trois jours fériés au cours de l'année 2018, soit les 2 avril, 14 juillet et 1er novembre, puis plus régulièrement à compter du 1er mai 2019, ces documents ne permettent pas, en revanche, d'établir que le docteur B... aurait lui-même assuré d'autres consultations au cours de l'année en cause en réponse à des besoins de soins non programmés durant les périodes relevant de la permanence, en l'absence notamment du nom de l'intéressé sur les relevés produits, ni, en tout état de cause, qu'il l'aurait fait dans le cadre de l'organisation de la PDSA. D'ailleurs, l'intéressé ne produit aucune demande d'indemnisation au titre de la PDSA qu'il aurait adressée à la CPAM. Par ailleurs, la seule mention, dans le bail relatif au cabinet médical, de la possibilité d'accès à ce dernier en dehors des horaires d'ouverture du centre commercial où se trouve ce cabinet, afin d'assurer la permanence des soins comme le prévoit le cahier des charges de l'ARS, n'est pas de nature à établir une participation effective à ce système de permanences. S'agissant du second point, il ne ressort d'aucune des pièces produites que le conseil départemental de l'ordre des médecins, qui n'a fait qu'enregistrer un contrat d'exercice conclu le 17 mai 2018 entre l'intéressé et la clinique de Montargis en précisant qu'il ne soulève pas d'objection d'ordre déontologique, aurait dispensé M. B... d'une participation à la PDSA, alors que les dispositions précitées de l'article 2.1 du CAIM signé par ce praticien prévoient seulement qu'un engagement au sein d'un hôpital de proximité est optionnel au regard de ce contrat. Par suite, le moyen tiré du caractère infondé de la décision du 28 mai 2019 doit être écarté.

15. En second lieu, il ressort des termes mêmes de l'article 4.2 du CAIM que la CPAM du Loiret et l'ARS Centre-Val de Loire peuvent rompre leur adhésion au contrat dès lors que le praticien ne respecte pas ses engagements contractuels, notamment s'il ne répond plus aux critères d'éligibilité au contrat définis à l'article 1.2 de ce contrat, au titre desquels figure, à titre de condition cumulative, l'engagement à participer au dispositif de permanence de soins ambulatoires, tel qu'il est organisé sur le territoire, sauf dérogation accordée par le conseil de l'ordre des médecins. Ainsi qu'il a été dit au point précédent, il n'est pas justifié d'une telle dérogation au bénéfice du docteur B.... Dans ces conditions, l'engagement précité, qui participe à la réalisation de l'objet du contrat tendant à favoriser non seulement l'installation, mais également le maintien des médecins en zones caractérisées par une insuffisance de l'offre de soins et d'accès à ceux-ci, tel qu'il était connu du requérant, constitue une condition essentielle de l'exécution du CAIM, dont la méconnaissance justifie la résiliation de celui-ci aux torts du praticien. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision de résiliation devrait être invalidée en tant qu'elle serait disproportionnée au regard de l'objet du contrat doit être écarté.

En ce qui concerne les conclusions tendant à la reprise des relations contractuelles :

16. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision du 28 mai 2019 par laquelle la CPAM du Loiret et l'ARS Centre-Val de Loire ont prononcé la résiliation du contrat du 22 janvier 2018 n'est pas entachée de vices relatifs à sa régularité ou à son bien-fondé. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée sur ce point, les conclusions tendant à la reprise des relations contractuelles liant ces autorités à M. B... doivent être rejetées.

Sur les conclusions indemnitaires :

17. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, la décision de résiliation n'est pas intervenue dans des conditions de nature à ouvrir droit à indemnité. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée sur ce point, les conclusions présentées à ce titre par M. B... et tendant, d'une part, au versement de la somme de 25 000 euros correspondant à la moitié de l'aide à l'installation qui ne lui a pas été versée du fait de la résiliation du contrat, et, d'autre part, à l'indemnisation d'un préjudice moral résultant de cette même mesure, ne peuvent qu'également être rejetées.

18. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la dernière fin de non-recevoir opposée par la CPAM du Loiret et l'ARS Centre-Val de Loire, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté l'ensemble de ses demandes.

Sur les frais liés à l'instance :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la CPAM du Loiret et de l'ARS Centre-Val de Loire, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme de 1 000 euros à verser à la CPAM du Loiret et une somme de 1 000 euros à verser à l'ARS Centre-Val de Loire.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : M. B... versera à la CPAM du Loiret la somme de 1 000 euros et à l'ARS Centre-Val de Loire la somme de 1 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Loiret et à l'agence régionale de santé (ARS) Centre-Val de Loire.

Délibéré après l'audience du 18 avril 2023, à laquelle siégeaient :

M. Brotons, président,

Mme Le Gars, présidente assesseure,

Mme Bonfils, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mai 2023.

La rapporteure,

M-G. A...

Le président,

S. BROTONS

La greffière,

V. MALAGOLI

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 21VE00144


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE00144
Date de la décision : 16/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

62-02-01-01 Sécurité sociale. - Relations avec les professions et les établissements sanitaires. - Relations avec les professions de santé. - Médecins.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Marie-Gaëlle BONFILS
Rapporteur public ?: Mme VISEUR-FERRÉ
Avocat(s) : MAURY

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-05-16;21ve00144 ?
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