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18/04/2023 | FRANCE | N°21VE01356

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 18 avril 2023, 21VE01356


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I. Par une demande enregistrée sous le numéro 1901932, l'Union des entreprises de sécurité privée (UESP) a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 24 septembre 2018 par laquelle la commission locale d'agrément et de contrôle Ile-de-France Ouest a délivré à la société Diebold Nixdorf une autorisation d'exercer une activité de transport de fonds, ainsi que la décision implicite et la décision du 29 mars 2019, par lesquelles la commission nationale d'agrément et de c

ontrôle du Conseil national des activités privées de sécurité a rejeté son recou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I. Par une demande enregistrée sous le numéro 1901932, l'Union des entreprises de sécurité privée (UESP) a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 24 septembre 2018 par laquelle la commission locale d'agrément et de contrôle Ile-de-France Ouest a délivré à la société Diebold Nixdorf une autorisation d'exercer une activité de transport de fonds, ainsi que la décision implicite et la décision du 29 mars 2019, par lesquelles la commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité a rejeté son recours administratif préalable obligatoire.

II. Par une demande enregistrée sous le numéro 1904099, l'Union des entreprises de sécurité privée (UESP) a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 29 mars 2019, par laquelle la commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité a rejeté son recours administratif préalable obligatoire formé à l'encontre de la décision 24 septembre 2018 par laquelle la commission locale d'agrément et de contrôle Ile-de-France Ouest a délivré à la société Diebold Nixdorf une autorisation d'exercer une activité de transport de fonds.

Par un jugement n° 1901932 et 1904099 du 12 avril 2021, le tribunal administratif de Versailles a, d'une part, annulé la décision du 29 mars 2019 par laquelle la commission nationale du conseil national des activités privées de sécurité a rejeté le recours préalable de l'UESP présenté à l'encontre de la décision du 24 septembre 2018 de la commission locale Ile-de-France autorisant la société Diebold Nixdorf à exercer une activité de transport de fonds, et, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions des demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 mai 2021, la société Diebold Nixdorf, représentée par Me Vanbremeersch, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter les demandes ;

3°) de condamner l'Union des entreprises de sécurité privée à lui verser la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision explicite née hors du délai de naissance de la décision implicite n'est pas susceptible de recours ;

- son activité de maintenance des distributeurs automatiques de billets (DAB) ne relève pas du champ d'application des dispositions de l'article L. 612-9 du code de la sécurité intérieure dès lors qu'elle ne constitue pas une activité de transport de fonds au sens des dispositions du 2° de l'article L. 611-1 du même code, laquelle ne se confond pas avec la manipulation ou le traitement de fonds exclusivement dans des lieux privés ; le CNAPS reconnait deux certificats de qualification professionnelle distincts pour les activités de transport de fonds et de maintenance des DAB ;

- cette autorisation n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 612-2 du code de la sécurité intérieure, lesquelles n'imposent pas que l'activité de transport de fonds soit l'activité principalement exercée mais pose seulement la condition d'existence d'un lien entre les deux activités exercées par le demandeur de l'autorisation ;

- toute restriction à la liberté d'entreprendre doit s'interpréter de manière stricte ;

- l'autorisation existante n'a pas causé de préjudice à l'Union des entreprises de sécurité privée (UESP) ;

- l'absence de communication du recours préalable formé par l'UESP ne lui a pas préjudicié et a été sans incidence sur le sens de la décision intervenue ;

- la décision en litige est suffisamment motivée ;

- elle ne méconnaît pas le principe d'égalité dans l'application des dispositions des articles du livre VI du code de la sécurité intérieure et de l'article 1609 quintricies du code général des impôts.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 septembre 2021, l'Union des entreprises de sécurité privée (UESP) conclut au rejet de la requête et à ce que la société Diebold Nixdorf soit condamnée à lui verser la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- l'activité de la requérante relève de celle du transport de fonds au sens du 2° de l'article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure ;

- l'activité de la requérante méconnaît le principe de spécialité prévu à l'article L. 612-2 du code de la sécurité intérieure dès lors que l'activité de sécurité privée ne constitue pas son activité principale ;

- en tout état de cause, il n'existe pas de lien, au sens de l'article L. 612-2 du code de la sécurité intérieure, entre les différentes activités exercées par la société requérante ;

- elle reprend en appel les moyens développés en première instance.

Par un mémoire en intervention volontaire, enregistré le 15 mars 2023, la Fédération des Entreprises de la Sécurité Fiduciaire (FEDESFI) conclut à l'annulation du jugement et à ce que l'Union des entreprises de sécurité privée soit condamnée à lui verser la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- son intervention est recevable au regard de son intérêt à obtenir l'annulation du jugement attaqué et de l'autorisation en litige ;

- l'autorisation délivrée méconnaît les dispositions du 2° de l'article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure, l'activité de la société Diebold Nixdorf ne relevant pas du transport de fond ;

- le tribunal ne pouvait opposer le non-respect du principe de spécialité, dont la sanction appartient au Conseil national des activités privées de sécurité, lequel ne l'a pas opposé à la société Diebold Nixdorf.

Deux mémoires en intervention volontaire ont été enregistrés le 20 mars 2023 pour la Fédération des Entreprises de la Sécurité Fiduciaire (FEDESFI), postérieurement à la clôture automatique de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de Mme Viseur-Ferré, rapporteure publique,

- et les observations de Me Scanvic, pour la société Diebold Nixdorf.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 24 septembre 2018, la commission locale d'agrément et de contrôle d'Ile-de-France Ouest du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) a renouvelé l'autorisation accordée à la société Diebold Nixdorf d'exercer une activité de transport de fonds. Par un courrier du 6 novembre 2018, l'Union des entreprises de sécurité privée (UESP) pôle " Valeurs ", structure syndicale représentant les entreprises de transport de fonds, a formé un recours administratif préalable à l'encontre de cette décision, devant la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS. Par une décision du 29 mars 2019, la commission nationale a rejeté le recours administratif préalable de l'UESP. La société Diebold Nixdorf fait appel du jugement du 12 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a, d'une part, annulé la décision du 29 mars 2019 par laquelle la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS a rejeté le recours préalable de l'UESP présenté à l'encontre de la décision du 24 septembre 2018 de la commission locale Ile-de-France Ouest autorisant la société Diebold Nixdorf à exercer une activité de transport de fonds, et, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions des demandes.

Sur la recevabilité de l'intervention volontaire :

2. Toute personne qui justifie d'un intérêt suffisant, eu égard à la nature et à l'objet du litige, est recevable à former une intervention. La Fédération des Entreprises de la Sécurité Fiduciaire (FEDESFI) a pour objet " le respect de la réglementation applicable au secteur professionnel des activités de logistique de valeurs et activités connexes ", dont la gestion des automates bancaires. Ainsi, eu égard à son objet statutaire, la FEDESFI justifie d'un intérêt suffisant pour intervenir au présent litige, lequel porte sur la réglementation applicable aux sociétés de maintenance des distributeurs automatiques de billets.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal :

3. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure : " Sont soumises aux dispositions du présent titre, dès lors qu'elles ne sont pas exercées par un service public administratif, les activités qui consistent : / (...) 2° A transporter et à surveiller, jusqu'à leur livraison effective, des bijoux représentant une valeur d'au moins 100 000 euros, des fonds, sauf, pour les employés de La Poste ou des établissements de crédit habilités par leur employeur, lorsque leur montant est inférieur à 5 335 euros, ou des métaux précieux ainsi qu'à assurer le traitement des fonds transportés ; (...) ". L'article L. 612-9 du même code dispose : " L'exercice d'une activité mentionnée à l'article L. 611-1 est subordonné à une autorisation distincte pour l'établissement principal et pour chaque établissement secondaire. (...) ". L'article R. 613-24 de ce code, dans sa version applicable, précise : " Sont soumis aux dispositions de la présente section les activités mentionnées au 2° de l'article L. 611-1 qui consistent à transporter sur la voie publique et à surveiller, jusqu'à leur livraison effective : / 1° Des fonds ou des métaux précieux représentant une valeur d'au moins 30 000 euros ; (...) ".

4. Pour considérer que la société Diebold Nixdorf relevait du champ d'application de l'article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure et était tenue de solliciter la délivrance d'une autorisation d'exercice en application des dispositions de l'article L. 612-9 de ce même code, la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS a considéré que cette société réalisait des prestations de maintenance des installations bancaires et que, dans le cadre de cette mission, ses agents pouvaient être amenés occasionnellement à manipuler des fonds dans des automates, notamment lorsque des billets contenus dans ces derniers se trouvaient bloqués dans le circuit de distribution. Au vu de cette dernière intervention, elle a considéré que la nécessaire manipulation des fonds devait faire relever l'activité de la société des dispositions du livre VI du code de la sécurité intérieure. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la société Diebold Nixdorf exerce une activité qui consiste en l'installation et la maintenance de distributeurs automatiques de billets, laquelle, si elle implique de manière occasionnelle la manipulation de fonds pour les nécessités du dépannage de tels appareils, s'effectue exclusivement au sein d'une enceinte technique privée sécurisée et ne conduit à aucun transport des fonds d'une valeur d'au moins 30 000 euros sur la voie publique. Dans ces conditions, la société Diebold Nixdorf ne peut être regardée comme exerçant une activité de transport de fonds ou de traitement des fonds transportés au sens des dispositions de l'article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure précité. Par suite, pour ce seul motif et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, la société Diebold Nixdorf et la FEDESFI ne sont pas fondées à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Versailles a annulé la décision de la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS du 29 mars 2019 et rejeté le surplus de la demande de l'UEPS.

Sur les frais liés à l'instance :

5. D'une part, il n'apparaît pas inéquitable, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à la charge de chacune des parties les frais exposés par elle dans la présente instance et non compris dans les dépens. D'autre part, les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par la FEDESFI ne peuvent qu'être rejetées dès lors qu'en tant qu'intervenante elle ne peut présenter utilement des conclusions à ce titre.

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention de la FEDESFI est admise.

Article 2 : La requête présentée par la société Diebold Nixdorf est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par l'UESP au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions présentées par la FEDESFI au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Diebold Nixdorf, à l'Union des entreprises de sécurité privée (UESP) et au Conseil national des activités privées de sécurité.

Copie en sera transmise à la Fédération des Entreprises de la Sécurité Fiduciaire (FEDESFI).

Délibéré après l'audience du 21 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Brotons, président,

Mme Le Gars, présidente assesseure,

Mme Bonfils, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 avril 2023.

La rapporteure,

M-G. A...Le président,

S. BROTONSLa greffière,

S. de SOUSA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE01356
Date de la décision : 18/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Marie-Gaëlle BONFILS
Rapporteur public ?: Mme VISEUR-FERRÉ
Avocat(s) : SOCIETE BORE-SALVE DE BRUNETON-MEGRET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-04-18;21ve01356 ?
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