La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/03/2023 | FRANCE | N°21VE01292

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 14 mars 2023, 21VE01292


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par six requêtes enregistrées les 12 juin 2018, 3 août 2018, 30 janvier 2019, 7 août 2019, 28 janvier 2020 et 17 juillet 2020, M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler les décisions des 27 septembre 2018, 8 avril 2019, 24 juin 2019, 4 février 2020 et 3 juin 2020 par lesquelles la ministre des armées a rejeté ses recours administratifs préalables obligatoires formés respectivement les 10 octobre 2017, 1er août 2018, 1er mars 2019, 3 septembre 2019 et 2 mars 2020 devant

la commission des recours des militaires à l'encontre des décisions de la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par six requêtes enregistrées les 12 juin 2018, 3 août 2018, 30 janvier 2019, 7 août 2019, 28 janvier 2020 et 17 juillet 2020, M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler les décisions des 27 septembre 2018, 8 avril 2019, 24 juin 2019, 4 février 2020 et 3 juin 2020 par lesquelles la ministre des armées a rejeté ses recours administratifs préalables obligatoires formés respectivement les 10 octobre 2017, 1er août 2018, 1er mars 2019, 3 septembre 2019 et 2 mars 2020 devant la commission des recours des militaires à l'encontre des décisions de la ministre des armées des 12 septembre 2017 lui accordant un congé de longue durée, puis des décisions des 17 janvier 2018, 10 juillet 2018, 14 janvier 2019, et 8 août 2019 et 6 février 2020 renouvelant son congé de longue durée, en tant qu'elle refuse par ces décisions de reconnaître l'imputabilité au service de son affection.

Par un jugement nos 1805594, 1807921, 1901187, 1910098, 2001077 et 2006773 du 16 mars 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 mai 2021 et 28 mars 2022, M. C..., représenté par Me Maumont, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement attaqué ;

2°) d'annuler les décisions contestées ;

3°) d'enjoindre au ministre des armées de prendre une décision d'attribution d'un congé de longue durée pour maladie en lien avec le service dans un délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de reconstituer sa carrière, sans délai et sous astreinte de 500 euros par jour de retard.

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que c'est à tort que les premiers juges n'ont pas tenu compte du contexte dans lequel il évoluait pour ne retenir aucun dysfonctionnement du service de nature à attester de l'existence d'un lien direct entre son affection et ses fonctions ; les avis médicaux datés des 10 mai 2017, 20 octobre 2017 et 2 avril 2020, faisaient expressément état d'un lien entre son affection et ses fonctions, alors au demeurant qu'aucune autre cause n'est avancée pour expliquer cette affection ; il y a lieu de retenir comme dysfonctionnements du service de nature à attester de l'existence d'un lien direct entre son affection et ses fonctions les circonstances que la formation qu'il avait suivie n'était pas adaptée aux fonctions qu'il exerçait et que le poste auquel il a été affecté était vacant depuis un an et demie, alors que sa hiérarchie n'a pas évalué les besoins réels humains et matériels nécessaires pour accomplir sa mission, ainsi que sa charge de travail importante.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 janvier 2022, la ministre des armées conclut au rejet de la requête de M. C....

Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 30 mars 2022, l'instruction a été close au 15 avril 2022, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de Mme Bobko, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., commandant de l'armée de terre, affecté depuis septembre 2016 sur un poste de conservateur des musées des matériels et du train au sein des écoles militaires de Bourges, a été placé en congé de maladie à compter du 20 janvier 2017, puis en congé de longue durée à compter du 24 juillet 2017. Par une décision du 12 septembre 2017, la ministre des armées a accordé à M. C... ce congé de longue durée pour maladie pour une période de six mois en précisant que l'affection ouvrant droit à ce congé n'était pas survenue du fait ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions. Ce congé de longue durée a, par la suite, été renouvelé pour cinq périodes de six mois par décisions des 17 janvier 2018, 10 juillet 2018, 14 janvier 2019, 8 août 2019 et 6 février 2020. M. C... a formé un recours administratif préalable obligatoire devant la commission des recours des militaires à l'encontre de chacune de ces décisions en tant qu'elles refusent de reconnaître l'imputabilité au service de son affection. M. C... relève appel du jugement du 16 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation des différentes décisions par laquelle la ministre des armées a rejeté ses recours. M. C... soutient que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, il existerait un lien direct entre sa pathologie et l'exercice de ses fonctions.

2. Aux termes de l'article L. 4138-12 du code de la défense : " Le congé de longue durée pour maladie est attribué, après épuisement des droits de congé de maladie (...) pour les affections dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat./ Lorsque l'affection survient du fait ou à l'occasion de l'exercice des fonctions ou à la suite de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, ce congé est d'une durée maximale de huit ans. Le militaire perçoit, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, sa rémunération pendant cinq ans, puis une rémunération réduite de moitié les deux années qui suivent (...) ". Aux termes de l'article R. 4138-47 du même code, dans sa version applicable : " Le congé de longue durée pour maladie est la situation du militaire, qui est placé, au terme de ses droits à congé de maladie (...) dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions pour l'une des affections suivantes : (...) / 3° Troubles mentaux et de comportement présentant une évolution prolongée et dont le retentissement professionnel ainsi que le traitement sont incompatibles avec le service. ". Aux termes de l'article R. 4138-48 de ce code : " Le congé de longue durée pour maladie est attribué, sur demande ou d'office, dans les conditions fixées à l'article L. 4138-12, par décision du ministre de la défense (...) ". Aux termes de l'article R. 4138-49 de ce code : " La décision mentionnée à l'article R. 4138-48 précise si l'affection ouvrant droit à congé de longue durée pour maladie est survenue ou non du fait ou à l'occasion de l'exercice des fonctions (...) ".

3. Une maladie contractée par un militaire, ou son aggravation, doit être regardée comme survenue ou non du fait ou à l'occasion de l'exercice des fonctions si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

4. Pour soutenir que le syndrome dépressif qui a justifié son placement en congé de maladie le 20 janvier 2017 puis en congé de longue durée pour maladie pour six périodes de six mois à partir du 24 juillet 2017, est survenu du fait ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, M. C... impute cette affection à des dysfonctionnements du service constitués par les circonstances que la formation qu'il avait suivie n'était pas adaptée aux fonctions qu'il exerçait et que le poste auquel il a été affecté était vacant depuis un an et demie, alors que sa hiérarchie n'a pas évalué les besoins réels humains et matériels nécessaires pour accomplir sa mission, donnant lieu à une charge de travail excessive. Par ailleurs, il relève qu'aucun autre facteur explicatif de son affection n'est présenté par la ministre et qu'il n'avait aucun antécédent psychiatrique. Il ressort des pièces du dossier que deux avis de médecins militaires du 10 mai 2017 et du 20 octobre 2017 ainsi qu'un avis du 2 avril 2020 d'un médecin civil constatent l'existence d'un syndrome dépressif et font état de difficultés au travail, tandis qu'aucun autre facteur explicatif de ce syndrome dépressif ne ressort des pièces du dossier. Toutefois, à supposer même que la formation d'une année à l'école du Louvre dont il a bénéficié avant sa prise de poste ait été moins adaptée qu'une formation délivrée par l'Institut national du patrimoine, M. C... a bénéficié de conditions de reclassement dans la filière patrimoine correspondant tant à son grade qu'à ses aspirations. S'il n'est pas contesté que le poste de conservateur des musées des matériels et du train était vacant depuis un an et demie lors de sa prise de fonctions et que, depuis son départ, son service ait été remanié et ses effectifs renforcés, d'autres pièces du dossier font état d'une petite équipe soudée et les éléments produits ne permettent pas de caractériser de difficultés particulières. M. C... soutient aussi qu'il devait répondre aux injonctions nombreuses et contradictoires d'une pluralité de supérieurs hiérarchiques, poursuivant des priorités différentes. Cependant, il n'apporte aucun élément qui permettrait d'établir ses allégations sur cette multiplicité des missions qui lui étaient confiées. Il ressort, certes, d'un compte-rendu du groupe de travail sur les risques psychosociaux de février 2017 que la délégation du patrimoine est le principal interlocuteur du titulaire du poste mais que les généraux, pères des armes du train et du matériel peuvent également intervenir ; toutefois, ce compte-rendu précise également que les demandes des généraux ne sont pas incompatibles avec les objectifs de la délégation du patrimoine. En outre, l'appelant reconnaît lui-même dans ses écritures que la charge de travail est in fine conforme à la fiche de poste et inhérente au poste lui-même. Quant au manque de moyens, il n'est pas étayé. Enfin, si son évaluation millésime 2017 contient des appréciations restrictives sur sa manière de servir et que ses relations avec sa hiérarchie s'étaient dégradées, ces circonstances ne caractérisent pas un acharnement de sa hiérarchie à son encontre. Les recours formés par l'intéressé contre cette notation ont d'ailleurs été, pour l'essentiel rejetés. Dans ces conditions, alors même qu'aucun autre facteur explicatif du syndrome dépressif de M. C... ne ressort des pièces du dossier, les conditions de travail de celui-ci ne peuvent être regardées comme étant directement à l'origine de la maladie dont la reconnaissance comme étant survenue du fait ou à l'occasion de l'exercice des fonctions est demandée. Il s'ensuit que M. C... n'est pas fondé à soutenir que sont entachées d'illégalité les décisions par lesquelles la ministre des armées a rejeté ses recours préalables contre les décisions qui l'ont placé en congé de longue durée pour une affection qui n'est pas survenue du fait ou à l'occasion de l'exercice des fonctions.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner l'exception de non-lieu à statuer opposée en première instance par le ministre de la défense, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses demandes. Sa requête doit par suite être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 28 février 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Dorion, présidente,

M. Tar, premier conseiller

Mme Pham, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 mars 2023.

Le rapporteur,

G. A...La présidente,

O. DORION La greffière,

A. GAUTHIER

La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour exécution conforme,

La greffière,

2

N° 21VE01292


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21VE01292
Date de la décision : 14/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Armées et défense - Personnels militaires et civils de la défense - Questions communes à l'ensemble des personnels militaires - Positions.

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Congés - Congés de longue durée.


Composition du Tribunal
Président : Mme DORION
Rapporteur ?: M. Gabriel TAR
Rapporteur public ?: Mme BOBKO
Avocat(s) : SELARL MDMH

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-03-14;21ve01292 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award