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14/02/2023 | FRANCE | N°22VE00184

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 14 février 2023, 22VE00184


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2021 D... lequel le préfet de l'Essonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans.

D... un jugement n° 2110219 du 30 décembre 2021, le magistrat désigné D... le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.

Procédure

devant la cour :

D... une requête, enregistrée le 27 janvier 2022, M. A..., représenté D....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2021 D... lequel le préfet de l'Essonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans.

D... un jugement n° 2110219 du 30 décembre 2021, le magistrat désigné D... le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

D... une requête, enregistrée le 27 janvier 2022, M. A..., représenté D... Me Garcia, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 50 euros D... jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens.

Il soutient que :

- il a droit à la communication des pièces sur la base desquelles le préfet a fondé son arrêté, en application des dispositions de l'article L. 614-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté en litige a été pris au terme d'une procédure irrégulière, dans la mesure où son droit à être entendu et le principe du contradictoire, garantis D... les articles 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, ont été méconnus puisqu'il n'a pas été auditionné sur son droit au séjour ;

- il n'a pas bénéficié de l'assistance d'un avocat lors de son audition ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle et familiale ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces stipulations ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation sur ce point ;

- la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire méconnaît les dispositions de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

D... un mémoire en défense, enregistré le 18 mars 2022, le préfet de l'Essonne conclut au rejet de la requête.

Il se réfère à ses écritures de première instance et fait valoir qu'aucun des moyens n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant algérien né le 3 novembre 1998, est entré irrégulièrement sur le territoire français en 2019, selon ses dernières déclarations. D... un jugement du 25 mai 2021, le tribunal correctionnel de Melun l'a condamné à un an d'emprisonnement pour vol D... ruse, effraction ou escalade dans un local d'habitation ou un lieu d'entrepôt, aggravé D... une autre circonstance. M. A... a été incarcéré à la prison de Fleury-Mérogis du 24 mai 2021 au 3 mars 2022. D... un arrêté du 18 novembre 2021, notifié le 21 novembre suivant, le préfet de l'Essonne a fait à M. A... obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel ce dernier pourrait être reconduit d'office et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans. M. A... fait appel du jugement du 30 décembre 2021 D... lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la demande de communication des pièces de la procédure administrative :

2. Aux termes de l'article L. 614-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français prise en application des 1°, 2° ou 4° de l'article L. 611-1 est assortie d'un délai de départ volontaire, le président du tribunal administratif peut être saisi dans le délai de quinze jours suivant la notification de la décision. / (...) L'étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné à cette fin le concours d'un interprète et la communication du dossier contenant les pièces sur la base desquelles la décision contestée a été prise ". Aux termes de l'article L. 614-6 du même code : " Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas assortie d'un délai de départ volontaire, le président du tribunal administratif peut être saisi dans le délai de quarante-huit heures suivant la notification de la mesure. / Il est statué sur ce recours selon la procédure et dans les délais prévus, selon le fondement de la décision portant obligation de quitter le territoire français, aux articles L. 614-4 ou L. 614-5 ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le procès-verbal d'audition ainsi que la fiche pénale faisant état de l'incarcération de M. A... ont bien été produits D... le préfet en première instance et communiqués à l'intéressé D... le tribunal administratif le 24 décembre 2021. D... suite, et en l'absence de toute précision quant aux pièces du dossier qui n'aurait pas été communiquées au requérant et auraient servi de base à l'arrêté en litige, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de communication du dossier formée D... M. A....

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté pris dans son ensemble :

4. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable D... les institutions, organes et organismes de l'Union. / 2. Ce droit comporte notamment : / a) le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) ". L'article 51 de la même charte énonce que : " 1. Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux États membres uniquement lorsqu'ils mettent en œuvre le droit de l'Union. (...) ".

5. Si les dispositions de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ne sont pas en elles-mêmes invocables D... un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement telle qu'une obligation de quitter le territoire français, celui-ci peut néanmoins utilement faire valoir que le principe général du droit de l'Union européenne, relatif au respect des droits de la défense, imposait qu'il soit préalablement entendu et mis à même de présenter toute observation utile sur la mesure d'éloignement envisagée. Toutefois, une atteinte à ce droit n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle la décision défavorable est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision, ce qu'il lui revient, le cas échéant, d'établir devant la juridiction saisie.

6. D'autre part, l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration dispose : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable. ".

7. Il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal de l'audition de M. A... D... les services de police le 7 octobre 2021, que l'intéressé a été mis à même de présenter de manière effective ses observations sur plusieurs points, notamment sa situation administrative, sa situation personnelle, financière et familiale, son pays d'origine ainsi que sur la perspective de l'adoption d'une mesure d'éloignement à son encontre au sujet de laquelle il a pu exprimer les raisons de son souhait de rester sur le territoire français. En outre, l'arrêté en litige a été pris le 18 novembre 2021, de sorte que M. A... a été mis en mesure de présenter toute observation utile et pertinente qu'il aurait souhaité faire valoir en complément à son audition, dont il ne précise toutefois pas la teneur devant la cour, et qui aurait été de nature à faire obstacle à l'édiction de la mesure contestée, laquelle n'a pas été prise en réponse à une demande de délivrance de titre de séjour déposée D... l'intéressé. Dans ces conditions, la procédure suivie D... le préfet de l'Essonne n'a pas porté atteinte au droit d'être entendu, ni au principe du contradictoire garanti D... l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration.

8. En second lieu, ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a jugé dans ses arrêts C-166/13 et C-249/13 des 5 novembre et 11 décembre 2014, le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour, s'il implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour, ainsi que cela a été dit au point 5, n'impose pas que l'intéressé soit assisté d'un avocat lors de cette audition ou même informé de la possibilité d'être ainsi assisté. Dès lors, M. A... ne peut utilement soutenir que le préfet de l'Essonne aurait méconnu son droit d'être assisté d'un conseil préalablement à l'édiction de la mesure d'éloignement. Ainsi, le moyen tiré du vice de procédure, pris en ses différentes branches, est infondé et doit, D... suite, être écarté.

En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent (...) ". L'article L. 211-5 de ce code ajoute : " La motivation exigée D... le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

10. La décision attaquée vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment ses articles L. 611-1, L. 612-2, L. 612-6. Elle mentionne également la condamnation de M. A... D... le tribunal correctionnel de Melun le 25 mai 2021 et les différents signalements dont il a fait l'objet entre 2019 et 2021. Elle précise également les éléments relatifs à la situation personnelle et familiale de l'intéressé, en particulier qu'il est sans charge de famille et qu'il allègue être en couple sans justifier de l'état civil ou de la régularité du séjour de sa compagne. Ainsi, cette décision, qui comporte les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée au regard des exigences posées D... les dispositions précitées des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. D... suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

11. En deuxième lieu, M. A... a indiqué, lors de son audition D... les services de police le 7 octobre 2021, la présence en France de sa mère et de ses deux frère et sœur, et a également déclaré vivre en couple, sans enfant, et que son père vit en Algérie. Si la décision en litige ne fait pas mention de la présence de la mère et de la fratrie de l'intéressé en France, circonstance au demeurant non établie dès lors que les pièces du dossier ne justifient pas du lien familial allégué, elle retient que M. A... n'établit pas la communauté de vie dont il se prévaut et conserve des attaches familiales dans son pays d'origine. Une telle motivation ne traduit pas un défaut d'examen particulier de la situation personnelle et familiale de M. A... qui entacherait la décision portant obligation de quitter le territoire. D... suite, ce moyen doit être écarté.

12. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ".

13. Il ressort des pièces du dossier, notamment de l'audition préalable du 7 octobre 2021, que M. A... était dépourvu de visa lors de sa dernière entrée sur le territoire français et était dépourvu de titre de séjour en cours de validité à la date de l'arrêté attaqué. D... ailleurs, il est constant que M. A... a été condamné à une peine d'un an de prison D... le tribunal correctionnel de Melun, qu'il a fait l'objet de plusieurs signalements pour diverses infractions et qu'il a utilisé différents alias pour dissimuler son identité. Dès lors, c'est sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que le préfet de l'Essonne a pu considérer que le comportement de M. A... constitue une menace pour l'ordre public.

14. En quatrième lieu, aux termes de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les ressortissants algériens visés à l'article 7 peuvent obtenir un certificat de résidence de dix ans s'ils justifient d'une résidence ininterrompue en France de trois années. / Il est statué sur leur demande en tenant compte des moyens d'existence dont ils peuvent faire état, parmi lesquels les conditions de leur activité professionnelle et, le cas échéant, des justifications qu'ils peuvent invoquer à l'appui de leur demande. ".

15. Pour soutenir que le préfet de l'Essonne a méconnu les stipulations précitées de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien et commis une erreur d'appréciation en refusant de l'admettre au séjour, M. A... se contente de soutenir qu'il justifie d'une résidence stable en France depuis près de quatre ans et qu'il bénéficiait d'une situation professionnelle stable jusqu'à son incarcération. Toutefois, il ressort des propres déclarations et écritures de l'intéressé, au demeurant contradictoires, qu'il est entré en France pour la dernière fois en 2019. En outre, il ne justifie aucunement de la moindre insertion professionnelle antérieure à son incarcération. D... suite, le moyen doit, en tout état de cause, être écarté.

16. En cinquième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 5) Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue D... la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

17. M. A... soutient qu'il vit en France depuis 2016 auprès de sa mère, de sa sœur et de son frère, lesquels s'y trouvent en situation régulière. Il ressort toutefois des pièces du dossier, notamment du rapport de consultation décadactylaire produit en première instance, que sa parenté à l'égard de ces trois personnes, dont le patronyme diffère du sien et de celui de sa mère, ne peut être tenue pour établie, alors que l'intéressé n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où vit notamment son père et où il a lui-même vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt ans. En outre, la preuve du concubinage dont il se prévaut n'est pas davantage rapportée D... la simple attestation rédigée D... une ressortissante française. Le requérant ne dispose pas d'un emploi et ne justifie d'aucune insertion particulière dans la société française alors, ainsi qu'il a été dit au point 13, qu'il a été condamné à une peine d'emprisonnement. Dans ces conditions, la décision en litige n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Pour les mêmes motifs, elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne le refus d'accorder un délai de départ volontaire :

18. En premier lieu, il résulte clairement des dispositions de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, notamment de son article 6, que celle-ci n'est applicable qu'aux décisions de retour qui sont prises D... les Etats membres au motif que les étrangers sont en situation de séjour irrégulier. En revanche, la directive n'a pas vocation à régir les procédures d'éloignement qui reposent sur des motifs distincts, notamment la menace à l'ordre public ou la méconnaissance d'autres normes de portée générale, telle que l'obligation de détenir une autorisation de travail pour exercer une activité professionnelle. D... suite, il résulte de ce qui a été dit au point 13 que M. A... ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008.

19. En second lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " D... dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; (...) / 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ".

20. Il est constant que M. A... a utilisé plusieurs alias pour dissimuler son identité, qu'il est dépourvu de titre d'identité et s'est maintenu en situation irrégulière sur le territoire français. Dès lors, contrairement à ce que soutient le requérant, c'est sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que le préfet de l'Essonne a pu considérer que M. A... ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes et, pour ce motif, refuser de lui accorder un délai de départ volontaire.

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :

21. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

22. Si M. A... fait grief à la décision en litige d'indiquer qu'il " n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne des droits de l'homme en cas de retour dans son pays d'origine ", il n'assortit ce moyen d'aucun élément permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé alors qu'il ressort D... ailleurs de la fiche " AGDREF " associée au requérant, établie le 23 décembre 2021, que ce dernier n'a pas déposé de demande d'asile. D... suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

23. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... n'établit pas que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait entachée d'illégalité. D... suite, il n'est pas fondé à demander, D... la voie de l'exception, l'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français à raison de cette prétendue illégalité.

24. En deuxième lieu, outre ce qui a été dit au point 10 de l'arrêt, la décision en litige a été prise notamment au visa des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et fait état de la condamnation de M. A... D... le tribunal correctionnel de Melun, des signalements dont l'intéressé a fait l'objet pour plusieurs infractions ainsi que de la dissimulation répétée de sa véritable identité. Elle fait également état de l'absence de charge de famille et du manque de justification relative à sa relation de concubinage. D... suite, elle énonce les considérations de droit et de fait nécessaires à son fondement, aussi bien en son principe que pour sa durée. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans doit, D... suite, être écarté en tant qu'il manque en fait.

25. En troisième lieu, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 17 de l'arrêt.

26. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. (...) ". L'article L. 612-10 du même code dispose : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11. ".

27. Il résulte des dispositions des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que lorsque le préfet prend, à l'encontre d'un étranger, une décision portant obligation de quitter le territoire français ne comportant aucun délai de départ volontaire, il lui appartient d'assortir sa décision d'une interdiction de retour sur le territoire français, sauf dans le cas où des circonstances humanitaires y feraient obstacle. Seule la durée de cette interdiction de retour doit être appréciée au regard des quatre critères énumérés à l'article L. 612-10 précité.

28. M. A... a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français qui n'était assortie d'aucun délai de départ volontaire. Ainsi qu'il a été dit précédemment, le requérant n'établit pas l'existence de circonstances humanitaires faisant obstacle au prononcé d'une décision d'interdiction de retour sur le territoire français à son endroit. S'il soutient qu'il est intégré professionnellement en France et y possède ses attaches familiales et personnelles, aucune de ces circonstances n'est établie alors qu'il s'est maintenu en situation irrégulière sur le territoire français sans chercher à régulariser sa situation et, comme il a été dit au point 13, que sa présence en France constitue une menace pour l'ordre public. Dans ces conditions, en prononçant une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans, le préfet de l'Essonne n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.

29. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, D... le jugement attaqué, le magistrat désigné D... le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. D... voie de conséquence, doivent également être rejetées ses conclusions aux fins d'injonction, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, en tout état de cause, celles tendant au remboursement des dépens, en l'absence de tels frais.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Essonne.

Délibéré après l'audience du 17 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

M. Brotons, président de chambre,

Mme Le Gars, présidente assesseure,

Mme Bonfils, première conseillère.

Rendu public D... mise à disposition au greffe le 14 février 2023.

La rapporteure,

M.-G. C...

Le président,

S. BROTONS

La greffière,

S. de SOUSA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 22VE00184


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22VE00184
Date de la décision : 14/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Marie-Gaëlle BONFILS
Rapporteur public ?: Mme VISEUR-FERRÉ
Avocat(s) : SELARL GARCIA ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-02-14;22ve00184 ?
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