Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012, 2013, 2014 et 2015, et des pénalités et intérêts de retard correspondants.
Par un jugement n° 1813197 et 1813199 du 18 décembre 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 18 février et 20 juillet 2021, M. A..., représenté par Me Brindel, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement attaqué ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la proposition de rectification qui lui a été adressée faisant référence à la vérification de comptabilité de la SARL ABCT 95, il entend reprendre à son compte l'ensemble des moyens soulevés par cette société dans le mémoire annexé, déposé devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise le 24 août 2020 ;
- la procédure d'imposition est irrégulière en ce que l'administration fiscale n'a pas donné suite à sa demande d'interlocution départementale ; le principe d'indépendance des procédures ne s'applique pas lorsque l'administration renonce à la rectification de la société distributrice ;
- le service ne l'a pas informé de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus de tiers, concernant la réponse de la société MG Services et le droit de communication exercé auprès des régies des tribunaux, en méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;
- son activité d'expertise n'était pas occulte puisqu'il l'a exercée par l'intermédiaire de la SARL ABCT 95, en vertu d'une convention du 24 juin 2011 renouvelée le 30 juin 2014 ; cette convention ne pouvait être écartée au seul motif que, n'ayant pas été enregistrée, elle n'avait pas date certaine ; la SARL ABCT 95 a respecté ses obligations déclaratives et supporté la TVA sur ces opérations, ainsi qu'il ressort de ses livres comptables ; les prétendus revenus occultes ont été reversés à la société qui pouvait seule faire l'objet des rectifications.
Par un mémoire en défense enregistré le 24 juin 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête de M. A....
Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 6 septembre 2022, l'instruction a été close au 6 octobre 2022, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de Mme Bobko, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... est le gérant et unique associé de la société à responsabilité limitée (SARL) Auto Bilan Contrôle Technique (ABCT) 95, inscrite au RCS depuis le 22 février 2010 et cédée le 22 septembre 2016, qui exerce une activité de contrôle technique automobile. Cette société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er juillet 2012 au 30 juin 2015, étendue au 31 mai 2016 en matière de TVA, à l'issue de laquelle le service a réintégré au résultat de l'exercice clos en 2014 une somme de 131 656 euros inscrite au compte courant d'associé de M. A..., que le service a regardée comme un passif injustifié sur le fondement de l'article 38 du code général des impôts. Parallèlement, M. A... a fait l'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle portant sur les années 2013 et 2014, au cours duquel le service s'est avisé qu'il exerçait une activité non déclarée d'expert en automobile. Le délai de reprise étant étendu en cas de découverte d'une activité occulte, cette activité a fait l'objet d'une vérification portant sur la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2015. A défaut de comptabilité, le service a reconstitué selon la procédure de taxation d'office les recettes tirées de cette activité à partir des comptes bancaires de M. A... et lui a notifié des rectifications en matière de bénéfices non commerciaux et de taxe sur la valeur ajoutée. Les impositions supplémentaires correspondantes ont été mises en recouvrement en ce qui concerne les années 2012 à 2015. M. A... relève appel du jugement du 18 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande de décharge de ces impositions.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
En ce qui concerne les moyens tirés de l'irrégularité de la procédure d'imposition de la SARL ABCT 95 :
2. Lorsqu'à la suite d'une vérification de comptabilité d'une société passible de l'impôt sur les sociétés, des revenus réintégrés au résultat imposable de la société sont regardés comme distribués entre les mains d'un tiers bénéficiaire, les irrégularités qui entacheraient la procédure de rectification de la société distributrice sont sans incidence sur la régularité de la procédure à l'issue de laquelle des suppléments d'imposition sont mis à la charge du bénéficiaire des distributions. Il s'ensuit que les moyens tirés de ce qu'il n'a pas été donné suite à la demande d'interlocution départementale de la SARL ABCT 95 et de ce que l'origine des renseignements obtenus auprès de la société MG Services n'aurait pas été communiquée à cette société en méconnaissance des dispositions de l'article L 76 B du livre des procédures fiscales, sont inopérants dans la présente instance. Il en est de même des autres moyens de procédure soulevés par référence au mémoire adressé au tribunal le 24 août 2020 par la SARL ABCT 95 dans le litige relatif à la contestation de ses propres impositions.
En ce qui concerne le défaut d'information sur l'origine et la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers :
3. En vertu de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, d'informer le contribuable, avec une précision suffisante, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition, afin de permettre à l'intéressé, notamment, de discuter utilement leur provenance ou de demander que les documents qui, le cas échéant, contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent.
4. M. A... reproche au service de ne pas l'avoir informé de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus de tiers, concernant la réponse de la société MG Services et le droit de communication exercé auprès des régies des tribunaux. Toutefois, s'agissant de la société MG Services, fournisseur du matériel qui aurait été acquis en 2009 par M. A..., le service a indiqué, dans la proposition de rectification adressée à la SARL ABCT 95 le 29 mai 2017, annexée à la proposition de rectification adressée à M. A... le même jour, avoir interrogé la SARL MG Services sur l'origine de la facture et le règlement par M. A... d'un achat de matériel et avoir reçu pour réponse qu'il s'agissait bien d'achat de matériels par M. A..., dont ni celui-ci, ni la société MG Services ne pouvaient démontrer le paiement effectif. Le service vérificateur a ainsi suffisamment renseigné le contribuable sur le renseignement obtenu de ce tiers. Il en est de même s'agissant de l'exercice de son droit de communication auprès des tribunaux, les renseignements obtenus n'ayant en tout état de cause pas servi à fonder les rectifications établies exclusivement à partir des comptes bancaires de M. A....
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne les bénéfices non commerciaux :
5. Aux termes de l'article L. 193 du même livre : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ". L'article R. 193-1 du livre précité dispose que : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré. ". M. A..., dont les impositions ont été évaluées d'office, supporte la charge de la preuve de l'exagération des impositions.
6. Il résulte de l'instruction que M. A... a, au cours des années en litige, été désigné en qualité d'expert en automobile par les tribunaux et des compagnies, activité qu'il a indiqué au service vérificateur exercer depuis 2007 sans tenir de comptabilité, que les factures mentionnant de la TVA établies pour obtenir paiement de ses prestations étaient établies à son nom, et que les rémunérations de ces prestations de service ont été versées sur ses comptes bancaires personnels par chèques et virements. Il résulte de ces constatations que M. A... a exercé à titre personnel une activité d'expert dont les produits sont imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux.
7. Pour contester les rectifications mises à sa charge au titre des années 2012 à 2015, M. A... fait valoir que cette activité a en réalité été exercée par la SARL ABCT 95, en vertu d'une convention du 24 juin 2011 renouvelée le 30 juin 2014. Toutefois, il est constant que c'est M. A..., personne physique, qui a été désigné en qualité d'expert par les tribunaux et compagnies d'assurance qui l'ont missionné, qu'il a personnellement réalisé ces missions et facturé ses prestations, et qu'il a perçu les rémunérations correspondantes. Il était par suite seul redevable de l'impôt afférent à ces revenus. Est sans incidence à cet égard la circonstance que, disposant librement de ces sommes, il les a reversées à la SARL ABCT 95 qui les aurait à tort déclarées comme des produits de son activité. C'est par suite à bon droit que, pour déterminer le revenu imposable résultant de l'exercice de son activité d'expert, le service a reconstitué les produits à partir des chèques et virements correspondants aux honoraires perçus par M. A... sur ses comptes bancaires, et déduit les charges effectivement supportées par celui-ci, à l'exclusion des charges supportées pour son compte par la société ABCT 95. En outre, en tout état de cause, en se bornant à produire la convention conclue avec la SARL dont il est l'unique associé et gérant et son avenant, tous deux dépourvus de date certaine faute d'enregistrement, et à insérer dans le corps de sa requête des copies d'extraits des grands livres de la SARL ABCT 95, alors qu'il ressort des constatations faites par le service au cours de la vérification de comptabilité de cette société que les produits et charges de l'activité d'expert en automobile de M. A... comptabilisés par la SARL ABCT 95 au cours des exercices clos en 2013 et 2014, avaient fait l'objet le 30 juin 2014 au journal des opérations diverses d'une écriture d'annulation de l'ensemble des produits et de la TVA collectée relatifs à cette activité, tandis qu'aucun produit ni charge n'avait été enregistré à compter du 1er juillet 2015, le requérant n'établit pas que tout ou partie du résultat de cette activité ou de la TVA collectée a déjà été imposé entre les mains de la SARL ABCT 95.
En ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers :
8. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices (...) ". Les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés sont, sauf preuve contraire, à la disposition de cet associé, et ont donc le caractère de revenus distribués, imposables entre les mains de cet associé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en vertu du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. Pour que l'associé échappe à cette imposition, il lui incombe de démontrer, le cas échéant, qu'il n'a pas pu avoir la disposition de ces sommes ou que ces sommes ne correspondent pas à la mise à disposition d'un revenu.
9. En premier lieu, la décision de dégrèvement prise par l'administration dans un litige relatif à l'imposition d'une société à l'impôt sur les sociétés est, par elle-même, sans influence sur l'imposition du dirigeant ou de l'associé de cette société à l'impôt sur le revenu, alors même qu'il s'agit d'un excédent de distribution révélé par la rectification des bases de l'impôt sur les sociétés que l'administration entend imposer à l'impôt sur le revenu entre les mains du bénéficiaire de la distribution. Il suit de là que M. A... n'est pas fondé à se prévaloir du dégrèvement obtenu par la SARL ABCT 95 pour obtenir la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti.
10. En second lieu, au cours de la vérification de comptabilité dont la SARL ABCT 95 a fait l'objet, le service a constaté l'inscription au compte courant d'associé de M. A... d'une somme de 131 655,68 euros qu'il a regardée comme un passif injustifié distribué à M. A.... Celui-ci soutient qu'il a commandé et payé en 2009, pour le compte de la SARL ABCT 95 alors en cours de constitution, le matériel nécessaire à l'exercice de son activité de contrôle technique, ainsi qu'il résulte de la convention du 24 juin 2011 relative à son activité d'expertise, de la facture du fournisseur MS Services et de la réponse du gérant de cette société à l'administration fiscale. Toutefois, ni la facture émise par la société MG Services qui comporte la mention " à payer ", ni la réponse de la société MG Services selon laquelle cette facture a été " payée par chèque et qu'elle était destinée à M. A... ", n'établissent que M. A... l'a effectivement acquittée. Dans ces circonstances, le requérant n'apporte pas la preuve qui lui incombe de ce que l'inscription au crédit de son compte courant d'associé de la somme de 131 656 euros ne correspondait pas à la mise à disposition d'un revenu.
11. Il résulte de ce tout qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. La requête doit par suite être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 16 décembre 2022, à laquelle siégeaient :
M. Beaujard, président de chambre,
Mme Dorion, présidente assesseure,
Mme Pham, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 janvier 2023.
La rapporteure,
O. B... Le président,
P. BEAUJARDLa greffière,
A. GAUTHIER
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 21VE00527