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15/12/2022 | FRANCE | N°21VE00406

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 15 décembre 2022, 21VE00406


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 11 août 2020 par lequel le préfet de l'Essonne l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2005384 du 30 décembre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 février 2021, M. A...

, représenté par Me Ouled, avocate, demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide jur...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 11 août 2020 par lequel le préfet de l'Essonne l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2005384 du 30 décembre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 février 2021, M. A..., représenté par Me Ouled, avocate, demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement ;

3°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 11 août 2020 ;

4°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne, à titre principal, de réexaminer sa situation, ou à titre subsidiaire, de lui transmettre une demande d'asile à adresser à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, dans un délai de 48 heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 800 euros à verser à son conseil au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- il mentionne que la décision attaquée porte transfert aux autorités italiennes alors qu'elle porte obligation de quitter le territoire français ;

l'arrêté préfectoral contesté révèle un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 février 2021, le préfet de l'Essonne a conclu au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République sénégalaise relatif à la gestion concertée des flux migratoires, signé le 23 septembre 2006, et l'avenant à cet accord, signé le 25 février 2008, et notamment son annexe IV dressant la liste des métiers ouverts aux ressortissants sénégalais sans opposition de la situation de l'emploi ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020 -1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant sénégalais né le 30 novembre 1986 à Tambacounda, (Sénégal), qui a déclaré être entré en France en février 2015, a été interpellé le 11 août 2020 en possession de faux papiers, a déclaré n'avoir effectué aucune démarche administrative pour régulariser sa situation et s'est maintenu sur le territoire français sans être titulaire d'un titre de séjour. Par l'arrêté contesté du 11 août 2020, le préfet de l'Essonne l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de destination. M. A... fait appel du jugement du 30 décembre 2020 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire :

2. Selon l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique susvisée : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée (...) par la juridiction compétente ou son président. ". Aux termes de l'article 61 du décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 : " L'admission provisoire peut être accordée dans une situation d'urgence, (...). L'admission provisoire est accordée par (...) le président de la juridiction saisie, soit sur une demande présentée sans forme par l'intéressé, soit d'office si celui-ci a présenté une demande d'aide juridictionnelle ou d'aide à l'intervention de l'avocat sur laquelle il n'a pas encore été statué. ".

3. En l'absence de situation d'urgence, le requérant ne peut être admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire. Ses conclusions en ce sens doivent donc être rejetées.

Sur la régularité du jugement attaqué :

4. En premier lieu, il ressort des visas du jugement attaqué que le tribunal administratif a analysé ses conclusions de première instance comme étant dirigées contre l'arrêté du 11 août 2020 portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours et fixant le pays de destination. La circonstance qu'il ait, au point 1 du jugement attaqué, mentionné que l'arrêté du 11 août 2020 portait transfert aux autorités italiennes constitue une simple erreur de plume sans incidence sur la régularité du jugement dès lors qu'il ressort des visas susmentionnés comme des points 2 et 4 du jugement que les premiers juges ont bien analysés les moyens comme dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français. Le requérant n'est donc pas fondé à soutenir que les premiers juges se seraient mépris sur la portée de ses conclusions d'annulation.

5. En second lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". Le juge doit se prononcer, par une motivation suffisante au regard de la teneur de l'argumentation qui lui est soumise, sur tous les moyens expressément soulevés par les parties, à l'exception de ceux qui, quel que soit leur bien-fondé, seraient insusceptibles de conduire à l'adoption d'une solution différente de celle qu'il retient. En l'espèce, le jugement attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui, eu égard à la teneur de l'argumentation développée, répond suffisamment aux moyens invoqués.

Sur la légalité de l'arrêté :

6. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des termes de l'arrêté contesté, qu'avant de le prendre le préfet de l'Essonne n'aurait pas procédé à un examen particulier et suffisamment approfondi de la situation de l'intéressé, ni que ce dernier aurait fait valoir des difficultés de santé que le préfet n'aurait pas prises en compte.

7. En deuxième lieu, si le requérant a entendu se prévaloir des stipulations de l'article 4.2 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République sénégalaise relatif à la gestion concertée des flux migratoires, signé le 23 septembre 2006, ainsi que des dispositions des articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne constituent pas des catégories de délivrance de plein droit d'un titre de séjour de nature à faire obstacle à un éloignement, ces moyens sont inopérants à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire attaquée.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

9. M. A... soutient qu'il réside en France depuis cinq années et y a travaillé huit mois sur les deux dernières années, qu'il y est parfaitement intégré et que ses amis, son cousin et son frère y résident. Toutefois, et quand bien même il résiderait habituellement sur le territoire français depuis février 2015, il ressort des pièces du dossier qu'il est célibataire, sans charge de famille sur le territoire français où il n'a jamais cherché à régulariser son séjour. Il n'établit par ailleurs pas son lien de filiation avec les personnes qu'il présente comme son frère et son cousin résidant régulièrement en France, ni l'intensité de son intégration en France, et il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où réside toujours sa mère, selon ses propres déclarations lors de son audition par les services de police, et où il a vécu selon ses allégations jusqu'à l'âge de 29 ans. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée aurait porté une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise et violé en cela les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

10. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en prenant une obligation de quitter le territoire français à l'encontre de M. A..., le préfet de l'Essonne aurait fait une appréciation manifestement erronée des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. B... A..., et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Essonne.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Even, président de chambre,

Mme Bruno-Salel, présidente assesseure,

Mme Houllier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2022.

La rapporteure,

C. C...

Le président,

B. EVEN

La greffière,

C. RICHARD

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme,

La greffière,

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N° 21VE00406


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE00406
Date de la décision : 15/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Catherine BRUNO-SALEL
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : OULED

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-12-15;21ve00406 ?
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