Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 29 mai 2020 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé l'Algérie comme pays de destination, et d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation et de le munir d'une autorisation provisoire de séjour dans cette attente, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de cent euros par jour de retard, et enfin de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2006332 du 5 février 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a fait droit à la demande de M. C....
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 8 mars et 25 mars 2021, le préfet des Hauts-de-Seine demande à la cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande de première instance de M. C....
Il soutient que :
- les premiers juges ont entaché leur jugement d'irrégularité en ce qu'ils ont écarté sa fin de non-recevoir tiré de la tardiveté de la requête en considérant à tort que le délai de recours de trente jours applicable était un délai franc ;
- à titre subsidiaire et sur le fond, le moyen retenu par les premiers juges, tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, comme les autres moyens invoqués par le requérant, ne sont pas fondés.
La requête a été communiquée à M. C... qui n'a pas produit d'observations en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants étrangers et de leurs familles,
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- le code des relations entre le public et l'administration,
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant algérien, né en 1971 à Boghni (Algérie), déclare être entré en France le 14 novembre 1991 sous couvert d'un visa court séjour de trente jours. Il a sollicité le 11 décembre 2019 son admission au séjour en invoquant le bénéfice des stipulations énoncées par l'article 6-1 de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants étrangers et de leurs familles. Le préfet des Hauts-de-Seine a, par un arrêté du 29 mai 2020, rejeté cette demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 5 février 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté attaqué. Le préfet des Hauts-de-Seine fait appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Sauf texte contraire, les délais de recours devant les juridictions administratives sont, en principe, des délais francs, leur premier jour étant le lendemain du jour de leur déclenchement et leur dernier jour étant le lendemain du jour de leur échéance, et les recours doivent être enregistrés au greffe de la juridiction avant l'expiration du délai.
3. Par suite, et alors que les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne s'y opposent pas, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté la fin de non-recevoir opposée en défense tirée de la tardiveté de la demande en considérant que le délai de recours de quinze jours qu'elles prévoient présentait le caractère d'un délai franc et qu'en conséquence, la requête de M. C..., enregistrée le 9 juillet 2020, alors que l'arrêté préfectoral contesté lui avait été notifié le 8 juin précédent, n'était pas tardive.
Sur la légalité de l'arrêté litigieux :
En ce qui concerne les motifs d'annulation retenus par le tribunal administratif :
4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans (...) ".
5. Les premiers juges ont annulé la décision de refus de séjour attaquée au motif que le préfet des Hauts-de-Seine avait méconnu les stipulations de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
6. En premier lieu, s'il est constant que le requérant justifie d'une entrée régulière sur le territoire français, le 14 novembre 1991, sous couvert d'un visa court séjour de trente jours et de sa présence habituelle sur ce territoire depuis l'année 2019, il ne justifie pas en revanche de sa présence antérieurement et depuis plus de dix ans en se bornant à produire pour l'année 2018 une carte de membre à l'Union de la communauté algérienne, une ordonnance médicale et un titre de recette du Trésor public, pour l'année 2017 une carte de membre à l'Union de la communauté algérienne et une ordonnance médicale, pour les années 2014 à 2016 sa seule carte de membre à l'Union de la communauté algérienne, pour 2013 cette même carte et une promesse d'embauche, pour 2012 une lettre qu'il n'établit pas avoir envoyée à la sous-préfecture du Raincy et pour 2010 sa carte de membre à l'Union de la communauté algérienne et une photographie, l'ensemble assorti de quelques attestations peu circonstanciées établies pour les besoins de la cause. Par suite, le préfet n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié.
7. En second lieu, le requérant, qui est célibataire et sans charge de famille, n'établit ni son lien de parenté avec le frère qui vivrait, selon lui, en France sous couvert d'une carte de résident, ni être dépourvu d'attaches dans son pays où résident, selon les mentions non contestées portées par le préfet dans la décision attaquée, ses parents ainsi que cinq frères et cinq sœurs, sans qu'il n'apporte aucun élément de nature à établir la rupture du lien avec eux qu'il allègue, et où il a lui-même vécu jusqu'en 2018. Dans ces conditions, le préfet n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
8. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur la méconnaissance des stipulations de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler l'arrêté du 29 mai 2020.
9. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par le requérant devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
En ce qui concerne ces autres moyens :
10. En premier lieu, l'arrêté contesté a été signé par M. D... B..., sous-préfet d'Antony et de Boulogne-Billancourt, qui bénéficiait, en vertu de l'arrêté n° 2020-14 du 5 mars 2020 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture des Hauts-de-Seine, d'une délégation à l'effet de signer les refus de délivrance de titre de jour, les obligations de quitter le territoire français, assorties ou non d'un délai de départ volontaire et les décisions fixant le pays de destination. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait été signé par une autorité incompétente manque en fait et doit être écarté.
11. En deuxième lieu, contrairement à ce qui est soutenu, la décision de refus de titre de séjour comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Ainsi, et alors même que ses motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation du requérant, elle est suffisamment motivée au regard des exigences des articles L. 211-2 et suivants du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit être écarté.
12. En troisième lieu, si le requérant soutient que le préfet a méconnu les stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, ce moyen ne peut être utilement invoqué dès lors que l'intéressé n'a pas invoqué ce fondement à l'appui de sa demande de titre de séjour et que le préfet ne s'est pas spontanément prononcé sur son droit au séjour au regard de ces stipulations. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations est inopérant et ne peut qu'être écarté.
13. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7 du présent arrêt, et alors que le requérant n'établit pas que des considérations humanitaires liées à son état de santé nécessiteraient que le préfet mette en œuvre son pouvoir discrétionnaire de régularisation, il n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
14. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet des Hauts-de-Seine est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 29 mai 2020 rejetant la demande de titre de séjour de M. C..., lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 2006332 du 5 février 2021 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet des Hauts-de-Seine.
Délibéré après l'audience du 24 novembre 2022, à laquelle siégeaient :
M. Even, président de chambre,
Mme Bruno-Salel, présidente-assesseure,
Mme Houllier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 décembre 2022.
La rapporteure,
C. E...
Le président,
B. EVEN
La greffière,
C. RICHARD
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
2
N° 21VE00723