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06/12/2022 | FRANCE | N°21VE01983

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 06 décembre 2022, 21VE01983


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 13 mars 2020 par lequel la préfète d'Indre-et-Loire a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

Par un jugement n° 2001815 du 24 juillet 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, un

mémoire complémentaire et un mémoire enregistrés le 2 juillet 2021, le 7 avril 2022 et le 30 septemb...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 13 mars 2020 par lequel la préfète d'Indre-et-Loire a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

Par un jugement n° 2001815 du 24 juillet 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, un mémoire complémentaire et un mémoire enregistrés le 2 juillet 2021, le 7 avril 2022 et le 30 septembre 2022, M. C..., représenté par Me Itela, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement attaqué ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre à la préfète d'Indre-et-Loire de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai de trente jours, ou à défaut de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de deux jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant refus de séjour est insuffisamment motivée ; il n'a pas été procédé à un examen particulier de sa situation ; cette décision aurait dû tenir compte de la nouvelle demande d'autorisation de travail présentée en sa faveur par la SARL Impect Bat Plus ;

- il n'a pas pu faire valoir ses observations, en méconnaissance du droit d'être entendu reconnu par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- il appartenait à la Direccte de prendre une décision sur la demande d'autorisation de travail présentée en sa faveur par la société La Patrona ;

- la préfète d'Indre-et-Loire a fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les lignes directrices de la circulaire du 28 novembre 2012 ont été méconnues ;

- le refus de séjour qui lui est opposé porte une atteinte excessive à sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ; il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire, délai de départ volontaire et fixation du pays de destination, sont illégales par voie de conséquence de l'illégalité du refus de séjour.

La requête a été communiquée au préfet d'Indre-et-Loire qui n'a pas produit de mémoire.

Par ordonnance du 13 septembre 2022, l'instruction a été close au 30 septembre 2022, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 décembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du travail ;

- la loi n° 91-647 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience en application des dispositions de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant congolais (RDC) né le 29 septembre 1995 à Kinshasa, entré en France le 10 février 2011 à l'âge de 16 ans avec son frère Yannick, et confié à l'aide sociale à l'enfance du Haut-Rhin, a présenté une demande d'asile en 2012 rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 30 avril 2013, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'aile le 17 décembre 2013 et par suite fait l'objet d'un refus de titre de séjour et d'une obligation de quitter le territoire le 14 avril 2014. A sa majorité, il a sollicité un titre de séjour qui lui a été refusé par un arrêté du 18 novembre 2016, assorti d'une obligation de quitter le territoire. Le recours contre cet arrêté a été rejeté par le tribunal administratif d'Orléans le 2 février 2017 et le 26 juin 2017 par la cour administrative d'appel de Nantes. En dernier lieu, il a présenté le 16 octobre 2019 une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié, en se prévalant de la demande d'autorisation de travail présentée en sa faveur par la société La Patrona avec laquelle il avait conclu un contrat à durée indéterminée pour occuper un emploi de cuisinier. Cette société ayant été placée en liquidation judiciaire le 30 janvier 2020, la préfète d'Indre-Loire a rejeté sa demande par un arrêté du 13 mars 2020 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours et fixation du pays de destination. M. C... relève appel du jugement du 24 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions.

2. En premier lieu, si M. C... se prévaut d'une promesse d'embauche et d'une demande d'autorisation de travail présentées en sa faveur le 19 février 2021 par la société SARL Impect Bat Plus, ces circonstances postérieures à l'arrêté contesté sont sans incidence sur sa légalité. Il s'ensuit que les moyens tirés de l'insuffisance de motivation du refus de titre contesté et de ce qu'il n'aurait pas été procédé à un examen particulier de la situation de M. C... au motif qu'il n'a pas été tenu compte de cette nouvelle promesse d'embauche ne peuvent qu'être écartés.

3. En deuxième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu doit également être écarté, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, dans le cadre de l'instruction de sa demande de titre de séjour, le requérant aurait été privé de la possibilité de présenter des observations, écrites ou orales, en complément de sa demande.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa codification applicable à la date de l'arrêté contesté : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : / 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention "salarié". (...) ". Aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail. ".

5. A supposer que les services de la main d'œuvre étrangère aient été saisis d'une demande d'autorisation de travail par la société La Patrona, et que le préfet n'ait pas statué sur cette demande, celle-ci a en tout état de cause fait l'objet d'une décision implicite de rejet, à l'expiration d'un délai de deux mois, en vertu du décret n° 2014-1292 du 23 octobre 2014 relatif aux exceptions à l'application du principe " silence vaut acceptation ". En outre, cette demande était devenue sans objet dès lors que la société La Patrona avait été placée en liquidation judiciaire le 30 janvier 2020. M. C... n'est dès lors pas fondé à soutenir que la préfète ne pouvait rejeter sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans avoir préalablement statué sur la demande d'autorisation de travail présentée par la société La Patrona.

6. Dès lors que, placée en liquidation judiciaire, la société La Patrona n'était plus susceptible d'employer M. C..., la préfète d'Indre-et-Loire a pu, sans entacher sa décision d'erreur de droit, rejeter la demande de titre de séjour mention " salarié " présentée par le requérant, au motif qu'il ne justifiait pas être en possession d'un contrat de travail. Est sans incidence à cet égard la circonstance qu'il a bénéficié, postérieurement à l'arrêté contesté, d'une autre promesse d'embauche pour occuper un emploi de menuisier.

7. En quatrième lieu, M. C... ne se prévaut pas utilement de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière, qui ne comporte que des orientations générales adressées par le ministre de l'intérieur aux préfets pour les éclairer dans la mise en œuvre de leur pouvoir de régularisation et n'est, par suite, pas opposable.

8. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) ".

9. Il ressort des pièces du dossier que M. C..., célibataire sans enfant et qui ne revendique aucune attache familiale en France, y est entré irrégulièrement le 10 février 2011 à l'âge de 16 ans et qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance jusqu'à sa majorité. Scolarisé jusqu'en 2017/2018, il a obtenu un certificat d'aptitude professionnelle (CAP) d'agent polyvalent de restauration en juin 2014, puis a poursuivi ses études par une formation en CAP menuisier fabriquant qu'il n'a pas validé. S'il a effectué plusieurs stages durant sa scolarité, il ne justifie d'aucune insertion professionnelle, ni de ressources. De plus, l'intéressé a fait l'objet de deux mesures d'éloignement le 14 avril 2014 et le 18 novembre 2016, qui n'ont pas été exécutées. Dans ces conditions, en dépit de la durée du séjour de M. C... en France, et de ce qu'il serait isolé en cas de retour en RDC, le refus de séjour opposé à M. C... n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive au regard des buts poursuivis.

10. Enfin, M. C... demandant l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire, délai de départ volontaire et fixation du pays de destination par voie de conséquence de l'illégalité du refus de séjour, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées dès lors qu'aucun des moyens dirigés contre la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour ne sont de nature à emporter son annulation.

11. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté contesté. Sa requête doit par suite être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et ses conclusions tendant à ce qu'il soit fait application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée pour information à la préfète d'Indre-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 22 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Beaujard, président de chambre,

Mme Dorion, présidente assesseure,

Mme Pham, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 décembre 2022.

La rapporteure,

O. B... Le président,

P. BEAUJARDLa greffière,

A. GAUTHIER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour exécution conforme

La greffière,

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N° 21VE01983


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21VE01983
Date de la décision : 06/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Odile DORION
Rapporteur public ?: Mme BOBKO
Avocat(s) : ITELA

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-12-06;21ve01983 ?
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