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22/09/2022 | FRANCE | N°21VE00727

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 22 septembre 2022, 21VE00727


Vu les procédures suivantes :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Besoco a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine n° 2017-2015 du 26 septembre 2017 portant liquidation partielle d'une astreinte d'un montant de 7 860 euros, qui lui a été imposée par l'arrêté préfectoral n° 2016-165 du 21 septembre 2016, pour non-respect de l'arrêté n° 2014-232 du 15 octobre 2014 la mettant en demeure de remédier à huit non-conformités à l'arrêté du 31 août 2009 au

titre de l'installation classée qu'elle exploite 14, rue Salomon à Vaucresson, et de met...

Vu les procédures suivantes :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Besoco a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine n° 2017-2015 du 26 septembre 2017 portant liquidation partielle d'une astreinte d'un montant de 7 860 euros, qui lui a été imposée par l'arrêté préfectoral n° 2016-165 du 21 septembre 2016, pour non-respect de l'arrêté n° 2014-232 du 15 octobre 2014 la mettant en demeure de remédier à huit non-conformités à l'arrêté du 31 août 2009 au titre de l'installation classée qu'elle exploite 14, rue Salomon à Vaucresson, et de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1803068 du 8 janvier 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 10 mars 2021 et le 18 juin 2021, la SARL Besoco, représentée par Me Pasquier de Solan, avocate, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 septembre 2017 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner aux entiers dépens.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors qu'il n'est pas suffisamment motivé ;

- le préfet des Hauts-de-Seine n'a pas accusé réception de son recours gracieux en méconnaissance de l'article R. 112-3 du code des relations entre le public et l'administration, et la décision de rejet du 24 janvier 2018 ne comporte pas la mention des voies et délais de recours, en méconnaissance de l'article R. 112-5 du même code ;

- si le ministre de la transition écologique a accusé réception de son recours hiérarchique, cet accusé de réception ne comporte pas la mention des voies et délais de recours en méconnaissance de l'article R. 112-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 171-8 du code de l'environnement, la sanction lui étant infligée étant disproportionnée eu égard à l'impossibilité de procéder aux travaux de remédiation en raison d'une cause extérieure à sa volonté, au retard de l'organisme chargé de procéder au contrôle périodique de l'installation, à l'incidence limitée des non-conformités constatées sur l'environnement et aux incidences de cet arrêté sur sa situation économique ;

- cet arrêté se fondant sur des textes visant principalement à encadrer l'utilisation du solvant perchloroéthylène est entaché d'une erreur de droit et de fait dès lors qu'elle a cessé d'utiliser ce solvant ;

- il entraîne une rupture d'égalité devant les charges publiques.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 mai 2022, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens d'appel invoqués ne sont pas fondés et qu'elle se rapporte aux écritures de première instance du préfet des Hauts-de-Seine.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'arrêté du 31 août 2009 modifié relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées pour la protection de l'environnement soumises à déclaration sous la rubrique n° 2345 relative à l'utilisation de solvants pour le nettoyage à sec et le traitement des textiles ou des vêtements ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de de M. A...,

- et les conclusions de Mme Margerit, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Le préfet des Hauts-de-Seine a par un arrêté du 15 octobre 2014, mis en demeure la société à responsabilité limitée (SARL) Besoco (Teinturerie de l'Etoile) de remédier dans un délai de trois mois à huit non-conformités à l'arrêté du 31 août 2009 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées pour la protection de l'environnement soumises à déclaration sous la rubrique n° 2345 relative à l'utilisation de solvants pour le nettoyage à sec et le traitement des textiles ou des vêtements, à savoir l'absence de contrôle périodique, de document définissant le taux minimal de renouvellement d'air du local, de dispositif de rétention sous les solvants stockés, d'attestation de formation, de registre de gestion des solvants, de définition de la fréquence remplacement des filtres à charbon actif, de registre de gestion des filtres à charbon actif et de registre des déchets. Le préfet a, par un arrêté du 21 septembre 2016, assorti cette mise en demeure d'une astreinte de trente euros par jour de retard, et après une inspection intervenue le 19 mai 2017 relevant la persistance de trois non-conformités : l'absence de contrôle périodique, de document définissant le taux minimal de renouvellement d'air du local et de registre des déchets, a prononcé la liquidation partielle de cette astreinte par l'arrêté contesté du 26 septembre 2017. La SARL Besoco fait appel du jugement du 8 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments invoqués par les parties, a cité au point 1 les dispositions dont il a fait application et a précisé au point 2 les motifs de fait retenus pour rejeter comme inopérant le moyen unique invoqué devant lui par la SARL Besoco tiré de la circonstance qu'elle s'est livrée à des travaux de modernisation démontrant sa bonne foi, sans contester la persistance des non-conformités relevées par l'inspection du 19 mai 2017. Il a ainsi motivé son jugement de manière à permettre aux parties d'en critiquer le bien-fondé. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait insuffisamment motivé doit être écarté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Aux termes de l'article L. 171-8 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige : " I. Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, en cas d'inobservation des prescriptions applicables en vertu du présent code aux installations, ouvrages, travaux, aménagements, opérations, objets, dispositifs et activités, l'autorité administrative compétente met en demeure la personne à laquelle incombe l'obligation d'y satisfaire dans un délai qu'elle détermine. (...) II. Si, à l'expiration du délai imparti, il n'a pas été déféré à la mise en demeure, aux mesures d'urgence mentionnées à la dernière phrase du I du présent article ou aux mesures ordonnées sur le fondement du II de l'article L. 171-7, l'autorité administrative compétente peut arrêter une ou plusieurs des sanctions administratives suivantes : (...) 4° Ordonner le paiement d'une amende administrative au plus égale à 15 000 €, recouvrée comme en matière de créances de l'Etat étrangères à l'impôt et au domaine, et une astreinte journalière au plus égale à 1 500 € applicable à partir de la notification de la décision la fixant et jusqu'à satisfaction de la mise en demeure ou de la mesure ordonnée. Les deuxième et dernier alinéas du même 1° s'appliquent à l'astreinte. Les amendes et les astreintes sont proportionnées à la gravité des manquements constatés et tiennent compte notamment de l'importance du trouble causé à l'environnement. "

4. Il résulte des dispositions de l'article L. 171-11 du code de l'environnement que les décisions prises en application des articles L. 171-7, L. 171-8 et L. 171-10 de ce code, au titre des contrôles administratifs et mesures de police administrative en matière environnementale, sont soumises à un contentieux de pleine juridiction. Il appartient au juge de ce contentieux de pleine juridiction de se prononcer sur l'étendue des obligations mises à la charge des exploitants par l'autorité compétente au regard des circonstances de fait et de droit existant à la date à laquelle il statue.

5. En premier lieu, la SARL Besoco soutient, pour la première fois en appel, que le préfet des Hauts-de-Seine n'a pas accusé réception de son recours gracieux en méconnaissance des dispositions de l'article R. 112-3 du code des relations entre le public et l'administration, que la décision par laquelle il a rejeté ce recours ne comporte pas la mention des voies et délais de recours imposée par l'article R. 112-5 du code des relations entre le public et l'administration et que l'accusé de réception de son recours hiérarchique émis par le ministre de la transition écologique ne comportait pas les mentions exigées par l'article R. 112-5 du code des relations entre le public et l'administration. Toutefois, à les supposées établies, la méconnaissance de ces dispositions n'entraîne que l'inopposabilité des délais de recours mais est dépourvue d'incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué. Par suite, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de ces moyens, ils doivent être écartés comme inopérants.

6. En second lieu, la SARL Besoco doit être regardée comme soutenant que l'arrêté préfectoral contesté du 26 septembre 2017 est entaché d'une erreur de droit dès lors qu'il est fondé sur des dispositions visant à encadrer puis à interdire l'usage du perchloroéthylène alors qu'elle affirme avoir cessé d'utiliser ce solvant. Toutefois, l'arrêté du 31 août 2009 sur lequel se fondent les arrêtés successifs des 15 octobre 2014, 21 septembre 2016 et l'arrêté contesté du 26 septembre 2017, s'applique aux installations classées pour la protection de l'environnement soumises à déclaration sous la rubrique n° 2345 relative à l'utilisation de solvants pour le nettoyage à sec et le traitement des textiles ou des vêtements, et s'il contient des dispositions spécifiques en cas d'utilisation du perchloroéthylène, il ne se borne pas à encadrer l'emploi de ce seul solvant, ni même à interdire son utilisation. Par suite, le moyen tiré de l'existence d'une erreur de droit ne peut qu'être écarté.

7. En troisième lieu, il est constant que la mise en demeure du 15 octobre 2014 reposait sur le constat de huit non-conformités à l'arrêté du 31 août 2009. S'il résulte de l'instruction que la SARL Besoco a remédié à cinq de ces non-conformités, l'inspection du 19 mai 2017 a relevé la persistance de trois non-conformités tirées de l'absence de contrôle périodique et du document définissant le taux minimal de renouvellement d'air du local et de registre des déchets dangereux. En se bornant à soutenir qu'elle a cessé d'utiliser le solvant perchloroéthylène, la SARL Besoco ne justifie ni même n'allègue que ces non-conformités auraient cessé. Par suite, le moyen tiré de l'existence d'une erreur de fait sur ce point ne peut qu'être écarté.

8. En quatrième lieu, la SARL Besoco doit être regardée comme soutenant, pour la première fois en appel, que l'arrêté attaqué entraîne une rupture d'égalité devant les charges publiques en raison de l'impossibilité pour elle de remédier aux non-conformités constatées en raison de circonstances extérieures à sa volonté. Si la SARL Besoco affirme qu'elle n'a pu cesser d'utiliser le solvant perchloroéthylène du fait de l'impossibilité de procéder à la mise en service d'une nouvelle machine utilisant un autre solvant en raison des travaux réalisés sur la voirie desservant l'installation, ceci est sans incidence sur le respect des prescriptions qui demeurent non respectées, dès lors qu'elles ne sont pas liées à l'utilisation de ce solvant. En outre, à supposer que l'organisme chargé de réaliser le contrôle périodique n'ait réalisé ce dernier que huit mois après la commande de la SARL Besoco, ceci est sans incidence sur les deux autres non-conformités qui ont été relevées. Par suite, le moyen tiré du fait que l'arrêté entrainerait une rupture d'égalité devant les charges publiques ne peut qu'être écarté.

9. En dernier lieu, l'astreinte litigieuse partielle d'un montant de 7 860 euros qui a été liquidée à l'encontre de la SARL Besoco, après une mise en demeure notifiée près de trois années auparavant, dont il n'est pas établi qu'elle serait de nature à la mettre en état de liquidation, n'est pas disproportionnée au regard de la gravité des trois manquements constatés qui ne présentent pas un caractère mineur.

10. Il résulte de ce qui précède que la SARL Besoco n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Besoco est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Besoco et à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée au préfet des Hauts-de-Seine.

Délibéré après l'audience du 8 septembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Even, président de chambre,

M. Frémont, premier conseiller,

Mme Houllier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 septembre 2022.

Le président-rapporteur,

B. A...

L'assesseur le plus ancien,

M. B...

La greffière,

C. RICHARD

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N° 21VE00727 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE00727
Date de la décision : 22/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-02-02-01-03 Nature et environnement. - Installations classées pour la protection de l'environnement. - Régime juridique. - Pouvoirs du préfet. - Contrôle du fonctionnement de l'installation.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Bernard EVEN
Rapporteur public ?: Mme MARGERIT
Avocat(s) : PASQUIER DE SOLAN

Origine de la décision
Date de l'import : 25/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-09-22;21ve00727 ?
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