Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision implicite du recteur de l'académie de Créteil rejetant sa demande, en date du 13 juillet 2018, tendant au versement de l'indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves (ISAE) et d'enjoindre au recteur de lui attribuer cette indemnité à compter du 1er septembre 2017.
Par une ordonnance du 22 novembre 2018, le dossier de la demande de Mme B... a été transmise au tribunal administratif de Montreuil.
Par un jugement n° 1811707 du 14 février 2020, le tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision implicite du recteur de l'académie de Créteil et lui a enjoint d'attribuer à Mme B... l'ISAE pour la période comprise entre le 1er septembre 2017 et le 31 août 2019, dans un délai de deux mois à compter de sa notification.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement les 23 décembre 2020 et 10 mars 2022, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif.
Il soutient que :
- sa requête est recevable ;
- les fonctions de directeur adjoint d'une section d'enseignement général et professionnel adapté des collèges (SEGPA) n'ouvrent pas droit au versement de l'ISAE conformément aux dispositions de l'article 2 du décret du 30 août 2013 dès lors qu'elles ne peuvent être assimilées ni à des fonctions enseignantes ni à des fonctions de direction, en l'absence de fonctions de représentation de l'institution, de fonctions liées à la répartition des moyens financiers ou encore d'encadrement des personnels ;
- les textes en vigueur à la date de la décision attaquée faisaient obstacle à l'attribution de l'ISAE aux directeurs adjoints de SEGPA, les dispositions du décret du 17 septembre 2019 modifiant l'article 2 du décret du 30 août 2013 ayant eu pour seul objet de clarifier la portée de cet article 2.
Par des mémoires en défense, enregistrés respectivement les 13 juillet 2021 et 21 mars 2022, Mme B..., représentée par Me Keller, avocat, conclut au rejet de la requête et au versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'appel du ministre n'ayant pas été signé par un agent ayant reçu délégation régulière, est irrecevable ;
- les moyens du ministre ne sont pas fondés ;
- le ministre ne peut lui refuser le bénéfice de l'ISAE sans créer une rupture d'égalité
entre des agents placés dans une même situation.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;
- le décret n° 2013-790 du 30 août 2013 ;
- la circulaire n° 2015-176 du 28 octobre 2015 relative aux sections d'enseignement général et professionnel adapté ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les conclusions de Mme Sauvageot, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Le ministre de l'éducation nationale relève appel du jugement du tribunal administratif de Montreuil du 14 février 2020 annulant la décision implicite du recteur de l'académie de Créteil refusant d'attribuer à Mme B... l'indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves et lui enjoignant de lui attribuer cette indemnité pour la période comprise entre le 1er septembre 2017 et le 31 août 2019.
Sur la fin de non-recevoir tirée de l'absence de qualité du signataire de la requête :
2. Par une décision du 10 octobre 2018, publiée au Journal officiel de la République française du 28 octobre 2018, M. D... C..., chef du bureau des consultations et du contentieux relatifs aux personnels enseignants titulaires, a reçu délégation de la directrice des affaires juridiques du ministère de l'éducation nationale et du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, à l'effet de signer, au nom du ministre chargé de l'éducation nationale, tous actes, arrêtés et décisions, à l'exclusion des décrets, dans la limite des attributions de ce bureau. Par suite, la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité du signataire de la requête en appel du ministre de l'éducation nationale doit être écartée.
Sur la légalité de la décision implicite rejetant la demande d'attribution de l'indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves :
3. Aux termes de l'article 1er du décret du 30 août 2013 instituant une indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves au bénéfice des personnels enseignants du premier degré : " Une indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves est allouée aux personnels enseignants du premier degré exerçant dans les écoles maternelles et élémentaires. / Bénéficient dans les mêmes conditions de l'indemnité prévue par le présent décret, les enseignants du premier degré exerçant dans les établissements ou services de santé ou médico-sociaux, mentionnés aux articles L. 351-1 et D. 351-17 du code de l'éducation, dans les établissements régionaux d'enseignement adapté, dans les sections d'enseignement général et professionnel adapté des collèges et dans les unités localisées pour l'inclusion scolaire des collèges et des lycées ". Aux termes de l'article 2 du même décret dans sa rédaction applicable au litige : " L'attribution de cette indemnité est liée à l'exercice effectif des fonctions enseignantes et de direction y ouvrant droit, en particulier au suivi individuel et à l'évaluation pédagogique des élèves, au travail en équipe et au dialogue avec les familles ".
4. Il ressort des pièces du dossier, en particulier de la circulaire du 28 octobre 2015 relative aux sections d'enseignement général et professionnel adapté (SEGPA), que sous l'autorité du chef d'établissement, le directeur adjoint chargé de la section d'enseignement général et professionnel adapté assure l'organisation et la coordination des actions pédagogiques mises en œuvre au sein de la structure, la cohérence de l'ensemble de son projet de fonctionnement, le suivi et la coordination des actions mises en place par les enseignants spécialisés et les professeurs des classes concernées, l'organisation et la planification des stages en milieu professionnel et la liaison avec les autres établissements. Ainsi, le directeur adjoint de SEGPA, qui, comme le relève le ministre, n'est pas chargé de fonctions de représentation de la section, de fonctions liées à la répartition des moyens ou encore de fonctions d'encadrement de son personnel, ne peut être regardé comme exerçant effectivement des fonctions de direction. En l'espèce, il n'est pas établi ni même allégué que Mme B... exerçait d'autres fonctions que celles prévues par cette circulaire. Par ailleurs, il est constant que Mme B... n'exerçait pas de fonctions enseignantes ouvrant droit à l'attribution de l'indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves. Dans ces conditions, Mme B... n'exerçant ni des fonctions de direction ni des fonctions enseignantes au sens des dispositions précitées du décret du 30 août 2013, ne remplissait pas les conditions d'attribution de cette indemnité.
5. Il résulte de qui précède que le ministre de l'éducation nationale est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision implicite du recteur de l'académie de Créteil au motif que Mme B... remplissait les conditions d'attribution de l'indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves.
6. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par Mme B... devant elle.
7. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que Mme B... ne remplissait pas les conditions fixées par les dispositions précitées du décret du 30 août 2013 pour se voir attribuer l'ISAE. Par suite, l'administration était tenue de rejeter sa demande tendant à l'attribution de cette indemnité. La circonstance, au demeurant non établie, que cette indemnité aurait été attribuée à certains directeurs adjoints de SEGPA est sans incidence sur la légalité de la décision du recteur refusant d'en accorder le bénéfice à Mme B.... Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité doit être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'éducation nationale est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision implicite du recteur de l'académie de Créteil.
Sur les frais liés à l'instance :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, verse à Mme B... la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1811707 du tribunal administratif de Montreuil du 14 février 2020 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Montreuil et ses conclusions en appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et à Mme E... B....
Délibéré après l'audience du 2 septembre 2022, à laquelle siégeaient :
Mme Signerin-Icre, présidente de chambre,
M. Camenen, président assesseur,
M. Mauny, président assesseur.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 septembre 2022.
Le rapporteur,
G. A... La présidente,
C. Signerin-Icre La greffière,
C. Yarde
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
N° 20VE03363 2