La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/07/2022 | FRANCE | N°21VE02057

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 08 juillet 2022, 21VE02057


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 26 juin 2020 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai.

Par un jugement n° 2006103-2103206 du 3 juin 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 2 juillet 2021, M. B..., représenté par Me Dini, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce

jugement ;

2° d'annuler, cet arrêté ;

3° de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 26 juin 2020 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai.

Par un jugement n° 2006103-2103206 du 3 juin 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 2 juillet 2021, M. B..., représenté par Me Dini, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, cet arrêté ;

3° de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il justifie être entré en France à l'âge de trois ans, y avoir effectué sa scolarité et y travailler en qualité d'ouvrier polyvalent depuis 2019 ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision de refus de délai de départ volontaire méconnaît les dispositions de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne représente pas une menace pour l'ordre public et qu'il ne risque pas de fuir ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet des Hauts-de-Seine qui n'a pas présenté d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de Mme Margerit, rapporteure publique,

- et les observations de Me Giron Abarca, substituant Me Dini, pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant gabonais, fait appel du jugement du 3 juin 2021 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine l'obligeant à quitter sans délai le territoire français.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 2° l'étranger qui justifie par tous moyens résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans ; (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que le législateur a entendu protéger de l'éloignement les étrangers qui sont en France depuis l'enfance, à raison de leur âge d'entrée et d'établissement sur le territoire. Dans ce cadre, les éventuelles périodes d'incarcération en France, si elles ne peuvent être prises en compte dans le calcul d'une durée de résidence, ne sont pas de nature à remettre en cause la continuité de la résidence habituelle en France depuis au plus l'âge de treize ans, alors même qu'elles emportent, pour une partie de la période de présence sur le territoire, une obligation de résidence, pour l'intéressé, ne résultant pas d'un choix délibéré de sa part.

4. M. B... invoque les dispositions précitées et soutient résider en France depuis l'âge de trois ans. Il justifie sa présence sur le territoire français par des certificats de scolarité correspondants aux années scolaires de CP, CE1 en 1989 radié le 1er octobre 1990, CM1 1990-1991, CM2 1991-1992, 6ème 1992-1993, 5ème 1993-1994, 4ème 1994-1995, 3ème 1995-1996, Lycée Robert Doisneau du 1er septembre au 8 novembre 1997, ateliers pédagogiques personnalisés de remise à niveau du 2 février au 30 avril 1998. Toutefois, M. B... ne démontre pas avoir séjourné en France à compter de son exclusion du Lycée professionnel Nadar le 23 octobre 1998 au 12 septembre 2000, date à laquelle il a été reconnu avoir commis un viol en réunion. Par suite, il n'établit pas résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans en 1994 et le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit donc être écarté.

5. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. M. B..., célibataire et sans charge de famille, soutient que sa mère, de nationalité française, son frère et sa sœur vivent en France et qu'il n'a jamais eu de lien avec son pays d'origine. Toutefois, à supposer même que les membres précités de sa famille résident en France, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant soit dépourvu de tout lien dans son pays d'origine. Dans ces conditions, et eu égard aux condamnations répétées de M. B... à huit ans d'emprisonnement le 3 avril 2003 pour viol en réunion, à dix ans de réclusion criminelle le 4 décembre 2009 pour violence ayant entraîné la mort sans intention de la donner, à 400 euros d'amende le 27 mai 2014 pour conduite d'un véhicule sans permis en récidive et à deux mois d'emprisonnement le 25 février 2014 pour outrage à personne dépositaire de l'autorité publique, l'obligation de quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

Sur la légalité de la décision de refus d'un délai de départ volontaire :

7. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible. (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2. ".

8. M. B... soutient qu'il ne représente pas une menace pour l'ordre public ni un risque de fuite. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'il a déjà fait l'objet d'une précédente obligation de quitter le territoire français le 11 décembre 2014 par le préfet de l'Essonne et d'une décision de refus de titre de séjour le 14 juin 2011 prise par le préfet de l'Aube. Il ressort également des pièces du dossier, qu'ainsi qu'il a été dit au point 6 ci-dessus, M. B... a plusieurs condamnations pour des faits d'une particulière gravité et qu'ainsi, le préfet des Hauts-de-Seine a pu, à bon droit, estimer qu'il constituait une menace pour l'ordre public. Par suite, M. B... ne peut valablement soutenir que le préfet aurait méconnu les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en l'obligeant à quitter le territoire français sans délai.

9. Enfin, les pièces du dossier ne sont pas davantage de nature à établir que le préfet des Hauts-de-Seine aurait, en refusant d'accorder un délai de départ volontaire à l'intéressé, commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de M. B....

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Hauts-de-Seine.

Délibéré après l'audience du 23 juin 2022, à laquelle siégeaient :

M. Even, président de chambre,

Mme Colrat, première conseillère,

M. Frémont, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2022.

La rapporteure,

S. A...Le président,

B. EVENLa greffière,

A. GAUTHIER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

3

2

N° 21VE02057


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE02057
Date de la décision : 08/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Sophie COLRAT
Rapporteur public ?: Mme MARGERIT
Avocat(s) : SELARL LEVY AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-07-08;21ve02057 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award