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08/07/2022 | FRANCE | N°20VE00969

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 08 juillet 2022, 20VE00969


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 11 janvier 2019 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de regroupement familial.

Par un jugement n° 1902713 du 27 février 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 mars 2020, Mme A... épouse F..., représentée par Me Pusung, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugeme

nt du 27 février 2020 ;

2°) d'annuler la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis du 11 janvier 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 11 janvier 2019 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de regroupement familial.

Par un jugement n° 1902713 du 27 février 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 mars 2020, Mme A... épouse F..., représentée par Me Pusung, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 février 2020 ;

2°) d'annuler la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis du 11 janvier 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis d'autoriser le regroupement familial dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou à défaut de procéder au réexamen de la demande de regroupement familial dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision est signée par une autorité incompétente ;

- elle n'est pas dument motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux ;

- elle méconnaît l'article L. 411-5 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention de New-York.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 octobre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- Mme B... bénéficie d'une délégation de signature par arrêté du 1er octobre 2018 ;

- la décision est suffisamment motivée ;

- la décision examine précisément la demande de l'intéressée et explique que la superficie du logement est insuffisante et qu'il ne dispose pas de chambre pour l'enfant.

- la superficie du logement ne répond pas à celle minimum exigée par les textes en vigueur ;

- la requérante vit en France depuis de nombreuses années sans la présence de son fils ;

- la décision ne méconnaît pas l'intérêt de l'enfant dès lors que le logement ne permet pas de l'accueillir.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Une note en délibéré présentée pour Mme A... épouse F... a été enregistrée le 6 juillet 2022.

Considérant ce qui suit :

1. Mme G... A..., ressortissante philippine née le 1er juillet 1975, a demandé, le 30 octobre 2017, l'admission au séjour de son fils, M. E... A... F... né le 23 avril 2002, dans le cadre de la procédure du regroupement familial. Par décision du 11 janvier 2019, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté la demande de regroupement familial au motif que l'intéressée ne justifiait pas d'un logement conforme à la réglementation en vigueur. La requérante relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation de cette décision.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". Mme A... épouse F... soutient que le jugement n'a pas répondu au moyen tiré du défaut de motivation en fait de la décision du 11 janvier 2019. Il ressort toutefois de l'examen du jugement attaqué qu'il mentionne que la décision du préfet rejette explicitement la demande de regroupement familial sur la base des conditions minimales de confort et d'habitabilité qui ne sont pas celles requises et qui ne permettent ainsi pas de considérer que le logement est normal au sens du 2° de l'article L. 411-5 de ce code, relevant ainsi que le refus du préfet d'autoriser le regroupement familial est fondé sur les caractéristiques du logement de la requérante. Par suite, le jugement est suffisamment motivé pour écarter le moyen tiré du défaut de motivation en fait de la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En premier lieu, par un arrêté du 1er octobre 2018, le préfet de la Seine-Saint-Denis a donné délégation à Mme B... pour signer les décisions relatives au regroupement familial en cas d'absence ou d'empêchement de Mme H... C.... Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée doit être écarté.

4. En deuxième lieu, la décision attaquée vise le livre IV du code de l'entrée et du séjour des étrangers lequel est intégralement consacré au regroupement familial. Elle mentionne en outre que le logement ne remplit pas les conditions exigées, et précise notamment que la superficie du logement de 40 m² est inférieure à la norme règlementaire de 42 m² pour quatre personnes et qu'il n'y a pas de chambre pour l'enfant pour lequel la demande de regroupement familial a été présentée. Elle mentionne également que la requérante vit en France depuis 2003, éloignée de son fils et qu'elle n'établit pas l'impossibilité d'aller le rejoindre régulièrement. La décision est ainsi suffisamment motivée en fait et en droit contrairement à ce que soutient la requérante. Il ressort également des motifs de la décision attaquée que le préfet de la Seine-Saint-Denis a procédé à un examen sérieux de la demande présentée par Mme A... épouse F....

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable: " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : [...] le demandeur ne dispose pas ou ne disposera pas à la date de l'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant dans la même région géographique. " Aux termes de l'article R. 411-5 du même code: " Pour l'application du 2° de l'article L. 411-5, est considéré comme normal un logement qui :1° Présente une superficie habitable totale au moins égale à : - en zones A bis et A : 22 m² pour un ménage sans enfant ou deux personnes, augmentée de 10 m² par personne jusqu'à huit personnes et de 5 m² par personne supplémentaire au-delà de huit personnes ;... "

6. Si Mme A... épouse F... soutient que l'appartement qu'elle occupe avec son mari et sa fille âgée de cinq ans constitue un logement considéré comme normal pour une famille vivant dans la même zone géographique compte tenu du nombre de pièces, de la surface, qu'il est parfaitement habitable, il n'est toutefois pas contesté que sa superficie est de 40 m², soit inférieure à celle de 42 m² requise par les dispositions précitées pour héberger quatre personnes. La circonstance postérieure à la décision attaquée que les époux F... ont acquis un logement plus spacieux, est sans incidence sur sa légalité. Par suite, et alors même que la chambre actuelle de la fille de la requérante a été aménagée avec des lits superposés pour accueillir son fils, le préfet de la Seine-Saint-Denis a pu valablement refuser d'autoriser le regroupement familial sollicité sans méconnaître les dispositions de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni entacher sa décision d'erreur manifeste d'appréciation.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elle soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".

8. Mme A... épouse F... fait valoir que son fils E... est resté seul aux Philippines avec sa grand-mère qui est âgée de 71 ans et ne peut s'occuper de lui dès lors qu'elle est également gravement malade, atteinte d'hypertension, de diabète mellitus de type 2 et de polyarthrite rhumatoïde, qu'ils ne peuvent se rendre régulièrement aux Philippines compte tenu de l'éloignement et du coût du voyage, que sa sœur âgée de 5 ans vit en France éloignée de son frère, que les parents de l'enfant n'ont pas délégué l'autorité parentale. Il ressort toutefois des pièces du dossier que la requérante est entrée en France en 2003, sans son fils né en 2002 et laissé auprès de sa grand-mère aux Philippines. Dès lors que la requérante a vécu avec son mari et leur fille née en 2013, loin de leur fils durant 16 années, le préfet n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de leur vie privée et familiale ni à l'intérêt supérieur de l'enfant. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés. De même, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de Mme A....

9. Il résulte de ce qui précède que Mme A... épouse F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées aux fins d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent par conséquent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... épouse F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... A... épouse F... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressé au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 5 juillet 2022, à laquelle siégeaient :

M. Brotons, président,

Mme Le Gars, présidente assesseure,

M. Coudert, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2022.

La rapporteure,

A-C. D...Le président,

S. BROTONS

La greffière,

V. MALAGOLILa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 20VE00969


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE00969
Date de la décision : 08/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Anne-Catherine LE GARS
Rapporteur public ?: Mme GROSSHOLZ
Avocat(s) : PUSUNG

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-07-08;20ve00969 ?
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