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24/06/2022 | FRANCE | N°21VE02927

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 24 juin 2022, 21VE02927


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 16 avril 2021 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination à destination duquel il pourrait être reconduit.

Par un jugement n° 2104258 du 16 septembre 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de M. A....

Procédure devant la Cour :

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r une requête enregistrée le 29 octobre 2021, M. A..., représenté par Me Semak, avocate, demande...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 16 avril 2021 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination à destination duquel il pourrait être reconduit.

Par un jugement n° 2104258 du 16 septembre 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de M. A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 29 octobre 2021, M. A..., représenté par Me Semak, avocate, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Essonne ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de renouveler sa carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, d'enjoindre au préfet de l'Essonne de réexaminer sa situation de M. A..., dans le délai de quinze jours à compter de la notification du l'arrêt à intervenir, et de lui délivrer, durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivé ;

- elle n'a pas été précédée d'un examen de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît son droit à bénéficier d'une information lui permettant de régulariser ses demandes auprès de l'administration sur le fondement de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet s'est cru lié par l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ;

- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article L. 313-14 ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mars 2022, le préfet de l'Essonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant ivoirien est, selon ses déclarations, entré sur le territoire français le 3 novembre 2011. Il a bénéficié d'un titre de séjour valable du 13 octobre 2017 au 12 avril 2018 et a ensuite été placé sous récépissé de demande de titre de séjour. Il a déposé le 9 mars 2020 une demande de renouvellement de son titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auprès des services du préfet de l'Essonne. Par un arrêté du 16 avril 2021, le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il était susceptible d'être éloigné à l'issue de ce délai. M. A... fait appel du jugement du 16 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Aux termes des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : [...] 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée. Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent 11° par le service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ainsi que les données générales en matière de santé publique recueillies dans ce cadre. "

3. Il ressort des pièces du dossier, en particulier de l'avis du collège de médecins de l'OFII du 20 juillet 2020, que M. A... souffre d'une hépatite B chronique asymptomatique justifiant un suivi régulier afin de s'assurer de la stabilisation de sa maladie et que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut serait susceptible d'entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Pour rejeter la demande de M. A..., le tribunal administratif s'est fondé sur l'avis du collège de médecins de l'OFII du 20 juillet 2020, dont le préfet de l'Essonne a repris la substance dans l'arrêté litigieux, rendu dans le cadre de la procédure prévue par les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 précité et se prononçant sur l'état de santé de M. A... et sur la possibilité pour lui de bénéficier effectivement d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine. Cet avis a notamment été rendu au regard des analyses du 23 juin 2020 produites par le requérant et au vu d'analyses, de certificats et d'examens médicaux datant de la période comprise entre 2014 et 2019. Les analyses médicales du 23 juin 2020 corrélées aux autres documents médicaux fournis, faisaient alors état d'une stabilisation de l'état de santé de M. A..., notamment un taux de transaminases de 52 U/L pour les ALAT et de 50 U/L pour les ASAT, c'est-à-dire à un niveau normal pour les ALAT et légèrement supérieur à la fourchette haute pour les ASAT, sans évolution défavorable sur le plan hépatique et ne nécessitant qu'une surveillance clinique et biologique deux fois par an.

4. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, notamment des analyses du 26 mars 2021 fournies par M. A... à l'appui de sa requête, postérieures de plus de huit mois à l'avis du collège de médecins de l'OFII du 20 juillet 2020 mais antérieures à la décision litigieuse du préfet de l'Essonne, que le taux de transaminases à 186 U/L ASAT et 103 U/L ALAT s'est élevé dans une proportion importante et que son état de santé s'est dégradé. Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. A... est fondé à soutenir que le préfet de l'Essonne a pris la décision contestée sur la base d'un avis du collège des médecins de l'OFII qui ne correspondait plus aux données relatives à son état de santé à la date à laquelle il a décidé de lui refuser le titre de séjour sollicité et de l'obliger à quitter le territoire. Cette décision est donc entachée d'une erreur de fait.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande et à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Essonne du 16 avril 2021.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

6. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué, l'exécution du présent arrêt implique seulement que l'administration statue à nouveau sur la demande de M. A.... Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Essonne, en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, de réexaminer cette demande, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Il y a lieu de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles n° 2104258 du 16 septembre 2021 et l'arrêté du préfet de l'Essonne du 16 avril 2021 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Yvelines de réexaminer la demande de M. A... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., au ministre de l'Intérieur, et au préfet de l'Essonne.

Délibéré après l'audience du 9 juin 2022, à laquelle siégeaient :

M. Even, président de chambre,

Mme Colrat, première conseillère,

M. Frémont, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 juin 2022.

La rapporteure,

S. B...Le président,

B. EVENLa greffière,

C. RICHARD

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N° 21VE02927 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE02927
Date de la décision : 24/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Sophie COLRAT
Rapporteur public ?: Mme MARGERIT
Avocat(s) : SEMAK

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-06-24;21ve02927 ?
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