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31/05/2022 | FRANCE | N°20VE01872

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 31 mai 2022, 20VE01872


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Elidis Boissons Services a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la restitution, d'une part, de cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie dans les rôles de la commune de Poissy (Yvelines) au titre des années 2012, 2013, 2014, 2015 et 2016 à raison de propriétés situées, dans cette commune, au 17, rue Saint-Sébastien, d'autre part, de cotisations de taxe annuelle sur les locaux à usage de bu

reaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de station...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Elidis Boissons Services a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la restitution, d'une part, de cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie dans les rôles de la commune de Poissy (Yvelines) au titre des années 2012, 2013, 2014, 2015 et 2016 à raison de propriétés situées, dans cette commune, au 17, rue Saint-Sébastien, d'autre part, de cotisations de taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement perçue dans la région Ile-de-France auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015 à raison de locaux situés à la même adresse.

Par un jugement n° 1701844 du 25 octobre 2019, le tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.

Par une décision n° 437151 du 29 juillet 2020, le Conseil d'État a attribué à la cour administrative d'appel de Versailles le jugement de la requête de la SAS Elidis Boissons Services, dirigée contre le jugement du 25 octobre 2019 du tribunal administratif de Versailles en tant qu'il a statué en matière de taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux et les locaux de stockage en Ile-de-France, et n'a pas admis le pourvoi de la société Elidis Boissons Services, dirigé contre ce même jugement en tant qu'il a statué en matière de taxe foncière sur les propriétés bâties.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés respectivement, au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, les 26 décembre 2019 et 4 mai 2020 et, au greffe de la cour administrative d'appel de Versailles, le 23 octobre 2020, la SAS Elidis Boissons Services, représentée par la SCP d'avocats Piwnica et Molinié, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, demande, dans le dernier état de ses écritures, à la cour :

1°) d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a statué en matière de taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux et les locaux de stockage en Ile-de-France ;

2°) de prononcer la restitution des cotisations de taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux et les locaux de stockage en Ile-de-France auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015 à concurrence de la somme totale de 3 576 euros, à raison de locaux situés, dans la commune de Poissy, au 17, rue Saint-Sébastien.

Elle soutient que :

- contrairement à ce que les premiers juges ont estimé, les clauses de la convention en vertu de laquelle elle occupait une dépendance du domaine public et qui l'autorisait à y maintenir des immeubles, ne faisaient pas légalement obstacle à ce que la personne publique propriétaire accède à la propriété de ces immeubles à la date de sa résiliation ;

- elle n'était plus redevable de la taxe foncière sur les propriétés bâties due à raison de ces immeubles après cette résiliation, conformément au I. de l'article 1400 du code général des impôts ;

- l'attribution de compétence opérée par le Conseil d'État dans sa décision du 29 juillet 2020 ne peut être remise en cause ;

- le Conseil d'État n'a pas pris parti sur la qualité de redevable de la taxe sur les locaux à usage de bureaux ; à la date de référence, elle n'était ni propriétaire des locaux imposables, ni titulaire d'un droit réel portant sur de tels locaux de sorte que, simple occupant précaire, elle n'était pas légalement assujettie à la taxe sur les bureaux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 octobre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que la requête de la SAS Elidis Boissons Services est irrecevable, faute d'avoir été présentée devant la cour administrative d'appel de Versailles dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement prévu à l'article R. 811-2 du code de justice administrative et que le jugement est devenu définitif en ce qu'il juge de la qualité de redevable de la taxe foncière sur les propriétés bâties et, par conséquent, de la qualité de redevable au titre de la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement perçue dans la région Ile-de-France.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société anonyme (SA) Ets. J. Robert et ses fils, dont l'activité était l'entreposage de boissons, a conclu avec la société nationale des chemins de fer (SNCF), les 30 octobre 1967, 15 avril 1980 et 19 janvier 1990, trois conventions pour l'occupation continue d'une dépendance du domaine public, située 17 rue Saint-Sébastien à Poissy (Yvelines), dans l'emprise de la gare. La société par actions simplifiée (SAS) Elidis Boissons Services a, le 1er janvier 2007, absorbé la SA Ets. J. Robert et ses fils, et est devenue titulaire de la convention conclue le 19 janvier 1990. Par courrier du 25 mai 2010, la SNCF a informé la SAS Elidis Boissons Services de ce que la convention d'occupation ne serait pas reconduite après le 31 décembre 2010. Cette dernière a occupé les locaux de la gare de Poissy de manière précaire, sans titre, jusqu'au 31 mars 2015, date de son départ. Elle a été imposée à la taxe foncière sur les propriétés bâties au titre des années 2012 à 2016 dans les rôles de la commune de Poissy à raison de ces locaux pour un montant total de 225 785 euros, ainsi qu'à la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement perçue dans la région Ile-de-France au titre des années 2014 et 2015, pour un montant total de 3 576 euros. Par jugement du 25 octobre 2019, le tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de la SAS Elidis Boissons Services tendant à la décharge de ces impositions. Par décision n° 437151, le Conseil d'État a, d'une part, refusé d'admettre le pourvoi de la société Elidis Boissons Services, dirigé contre le jugement du 25 octobre 2019 du tribunal administratif de Versailles en tant qu'il a statué en matière de taxe foncière sur les propriétés bâties et, d'autre part, attribué à la cour administrative d'appel de Versailles le jugement de la requête de la société Elidis Boissons Services, dirigée contre ce même jugement du 25 octobre 2019 en tant qu'il a statué en matière de taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux et les locaux de stockage en Ile-de-France, où elle a été enregistrée sous le n° 20VE01872.

2. Aux termes de l'article 231 ter du code général des impôts, dans ses rédactions applicables : " I.- Une taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement annexées à ces catégories de locaux est perçue, dans les limites territoriales de la région d'Ile-de-France, (...) / II.- Sont soumises à la taxe les personnes privées ou publiques qui sont propriétaires de locaux imposables ou titulaires d'un droit réel portant sur de tels locaux. / La taxe est acquittée par le propriétaire, l'usufruitier, le preneur à bail à construction, l'emphytéote ou le titulaire d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public constitutive d'un droit réel qui dispose, au 1er janvier de l'année d'imposition, d'un local taxable. / (...) ".

3. Il résulte de la déclaration modèle C relative à la révision des évaluations servant de base à certains impôts directs locaux, afférente à l'emplacement en cause situé rue

Saint-Sébastien et souscrite le 11 janvier 1971 par la SA Ets. J. Robert et ses fils, que celle-ci y est désignée comme propriétaire d'un entrepôt de 3 228 m² et de bureaux et locaux sociaux de 89 m², construits en 1967, ainsi que d'aires de stockage de 3 312 m². Le ministre a fait valoir, devant les premiers juges et sans être contesté, que conformément au cahier des conditions générales d'occupation des emplacements affectés au dépôt des marchandises (CCO) de 1982, l'emplacement loué nu pouvait être aménagé par le concessionnaire. L'article 2 de la convention n° 30.17.0800.4 du 19 janvier 1990, qui se réfère à l'article 3 dudit CCO, prévoyait d'ailleurs que " Le concessionnaire est autorisé à maintenir sur l'emplacement : / - un bâtiment de

3 245 m² dont 90 m² de bureaux, un bâtiment de 1 645 m² et un bâtiment de 6 300 m² dont 300 m² de bureaux. " et cet article 3 reconnaissait explicitement la propriété du concessionnaire sur les " constructions, installations et aménagements réalisés " sur l'emplacement concédé " pendant la validité de la convention ". Dans ces conditions, et en admettant même que la SAS Elidis Boissons Services, qui fait valoir que les conventions conclues en 1980 et 1990, pas plus que le CCO, " ne précisent quelle personne a réalisé les bâtiments en cause, leur origine n'étant pas mentionnée ", conteste ce point, elle doit être regardée comme ayant acquis la propriété des constructions réalisées par la SA Ets. J. Robert et ses fils - lors de l'absorption de cette dernière - sur l'emplacement situé rue Saint-Sébastien à Poissy et utilisées - ainsi que l'ont relevé les premiers juges sans être contestés - pour répondre aux seuls besoins de l'activité de l'entreprise et non à ceux du service public auquel le domaine était, le cas échéant, affecté.

4. La SAS Elidis Boissons Services fait également valoir que les clauses de cette convention d'occupation du 19 janvier 1990 en vertu de laquelle elle occupait une dépendance du domaine public et qui l'autorisait à y maintenir des immeubles, ne pouvaient faire légalement obstacle à ce que la personne publique propriétaire accède à la propriété de ces immeubles à la date de sa résiliation. Toutefois, il est constant qu'aux termes du a) du 3 de l'article 10 du cahier des conditions générales d'occupation des emplacements affectés au dépôt de marchandises, " A l'expiration de la convention, (...), la SNCF accède, sans indemnité pour le concessionnaire, à la propriété des constructions, installations et aménagements réalisés sur l'emplacement concédé à moins qu'elle n'ait exigé, antérieurement à cette date, par lettre recommandée AR, la remise des lieux dans leur état primitif ", que, par lettre recommandée du 25 mai 2010, la SNCF a indiqué à la SAS Elidis Boissons Services que, " conformément à l'article 8 point 3 " Durée de la convention " des conditions générales d'occupation Fret de 1982, cette convention sera résiliée à la prochaine échéance annuelle, à savoir le 31 décembre 2010 " et que, " conformément à l'article 10.3 des conditions générales d'occupation d'emplacement Fret (édition 1928), (...) si nous n'arrivons pas à nous entendre sur la signature d'une nouvelle convention avant le 31 décembre prochain, tous les bâtiments édifiés par vos soins sur le terrain en question devront être démolis à votre charge exclusive et sous votre entière responsabilité " et que la société requérante n'a ni signé de nouvelle convention d'occupation avec la SNCF, ni procédé à la remise en état ainsi exigée, de sorte que la SNCF n'a pu, en application du a) du 3 de l'article 10 précité, accéder à la propriété des immeubles en cause. Est sans incidence à cet égard, le principe d'inaliénabilité du domaine public dès lors que, comme indiqué au point 3. du présent arrêt, les constructions réalisées ne l'ont pas été en vue de répondre aux besoins d'un service public auquel le domaine aurait été affecté. N'a pas davantage d'incidence la circonstance qu'à compter du 1er janvier 2011 et jusqu'à son départ effectif en 2015, la SAS Elidis Boissons Services s'est retrouvée dans une situation d'occupante sans titre du domaine public. Dès lors, cette dernière, propriétaire des locaux, n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'était pas soumise à la taxe prévue à l'article 231 ter du code général des impôts.

5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de

non-recevoir opposée par le ministre de l'économie, des finances et de la relance, ni sur la recevabilité des conclusions présentées, que la SAS Elidis Boissons Services n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en tant qu'il a statué en matière de taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux et les locaux de stockage en Ile-de-France.

DÉCIDE :

Article 1er : Les conclusions de la requête de la SAS Elidis Boissons Services, dirigées contre le jugement du 25 octobre 2019 du tribunal administratif de Versailles en tant qu'il a statué en matière de taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux et les locaux de stockage en Ile-de-France, sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée (SAS) Elidis Boissons Services et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 10 mai 2022, à laquelle siégeaient :

M. Bresse, président de chambre,

Mme Bonfils, première conseillère,

Mme Deroc, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 mai 2022.

La rapporteure,

M. DerocLe président,

P. BresseLa greffière,

C. Fourteau

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier,

2

N° 20VE01872


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE01872
Date de la décision : 31/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-03-01 Contributions et taxes. - Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. - Taxes foncières. - Taxe foncière sur les propriétés bâties.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Muriel DEROC
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : SELAS ORATIO AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 07/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-05-31;20ve01872 ?
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