Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 16 octobre 2020 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.
Par un jugement no 2010655 du 30 novembre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 29 décembre 2020 et un mémoire en production de pièces enregistré le 30 mars 2022, M. D..., représenté par Me Albera, avocate, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- la compétence de son signataire n'est pas établie ;
- elle est entachée d'insuffisance de motivation et de défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- elle est entachée d'erreur de fait ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;
Sur le refus de lui accorder un délai de départ volontaire :
- la compétence de son signataire n'est pas établie ;
- il est insuffisamment motivé ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 6§5 de l'accord franco-algérien ;
- il méconnaît le II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le risque de fuite n'est pas établi ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle et salariée ;
Sur l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an :
- la compétence de son signataire n'est pas établie ;
- elle est insuffisamment motivée dès lors que le préfet n'a pas pris position sur les quatre critères énoncés au III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'erreur de fait ;
- elle méconnaît ces dispositions dès lors que le préfet n'a pas pris en compte les quatre critères énumérés à leur 8ème alinéa pour décider de prendre cette interdiction, mais ne les a pris en compte que pour fixer la durée de celle-ci ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 février 2022, le préfet des Hauts-de-Seine conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- les conclusions de Mme Bobko, rapporteure publique,
- et les observations de Me Albera, pour M. D....
Considérant ce qui suit :
1. M. B... D..., ressortissant algérien né le 6 mai 1988 à Boghni, a fait l'objet d'un arrêté du 16 octobre 2020 par lequel le préfet l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant un an. M. D... relève appel du jugement du 30 novembre 2020 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les moyens communs aux décisions mentionnées dans l'arrêté en litige :
2. En premier lieu, M. D... soulève le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 16 octobre 2020 du préfet des Hauts-de-Seine. Toutefois, Mme A... C..., adjointe au chef du bureau des examens spécialisés et de l'éloignement de la préfecture des Hauts-de-Seine, a signé cet arrêté en vertu d'une délégation de signature consentie par l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine n° 2020-37 du 6 juillet 2020 publié au recueil des actes administratifs spécial PCI de la préfecture le 6 juillet 2020 aux fins de signer, notamment, les décisions d'obligation de quitter le territoire français assorties ou non d'un délai de départ volontaire et les interdictions de retour sur le territoire français. Dès lors, ce moyen doit être écarté.
3. En deuxième lieu, M. D... reprend, à l'identique, le moyen déjà soulevé en première instance et tiré du défaut de motivation. Dans ces conditions, il n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause l'appréciation motivée du premier juge, dont il y a lieu d'adopter les motifs exposés aux points 2., 9., 10. et 11. du jugement attaqué. Le moyen tiré du défaut de motivation doit ainsi être écarté. Il en va de même, pour les mêmes motifs, du moyen tiré du défaut d'examen particulier.
4. En troisième lieu, M. D... reprend à l'identique, le moyen déjà soulevé en première instance et tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien. Dans ces conditions, il n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause l'appréciation motivée du premier juge, dont il y a lieu d'adopter les motifs exposés aux points 6., 7. et 8. du jugement attaqué. Le moyen susanalysé doit ainsi être écarté. Il en va de même, pour les mêmes motifs, du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de l'obligation de quitter le territoire français sur la situation personnelle, familiale et salariée de M. D....
Sur l'autre moyen soulevé contre l'obligation de quitter le territoire français :
5. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ".
6. M. D... soutient que le préfet aurait commis des erreurs de fait ayant une incidence sur la légalité de la base légale fondant la mesure d'obligation de quitter le territoire français. Toutefois s'agissant premièrement de la mention portée par le préfet sur l'absence de preuve de sa " présence continue sur le territoire ", elle est fondée sur l'examen des éléments produits par l'intéressé et de l'appréciation de l'autorité administrative. Deuxièmement, s'agissant de la mention de ce que M. D... " n'a pas accompli de démarches en vue de la régularisation de sa situation administrative ", si le requérant fait valoir qu'il a déclaré lors de son audition avoir sollicité et obtenu un rendez-vous en vue de régulariser sa situation le 23 février 2021, il ressort toutefois des pièces du dossier que le préfet aurait pris la même décision d'obligation de quitter le territoire français en se fondant sur les éléments caractérisant la situation de l'intéressé, en particulier le caractère irrégulier de son entrée sur le territoire français en février 2018 ainsi que l'a relevé le premier juge, et le fait qu'il s'y soit maintenu depuis cette date en situation irrégulière. Il suit de là que le moyen tiré des erreurs de fait doit être écarté dans toutes ses branches.
Sur l'autre moyen soulevé contre le refus de délai de départ volontaire :
7. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) / h) Si l'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français. / (...) ".
8. M. D... soutient que la décision portant refus de délai de départ volontaire de trente jours méconnaît le II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ressort des pièces du dossier que M. D..., qui s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa, a déclaré au cours de son audition par les services de police le 16 octobre 2020, son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français. Ainsi, il entrait dans le cas visé au h) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire, le risque de fuite étant dans cette hypothèse présumé. Si le requérant fait valoir notamment son insertion professionnelle et sa résidence en France, ces éléments au demeurant non établis ne suffisent pas à caractériser des circonstances particulières qui auraient justifié qu'un délai lui soit accordé. Dès lors, le moyen susanalysé doit être écarté.
Sur les autres moyens soulevés contre l'interdiction de retour sur le territoire français pendant un an :
9. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) III. - L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III (...) sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
10. En premier lieu, M. D..., en se prévalant d'une erreur de fait, peut être regardé comme contestant l'appréciation portée par le préfet sur sa situation personnelle et sur l'existence de circonstances humanitaires faisant obstacle à l'adoption de la mesure d'interdiction en litige. Toutefois, l'intéressé, qui se borne à faire état de la circonstance, non établie, d'une entrée régulière sur le territoire français en février 2018 ainsi que de la création d'une société de livraison de repas pendant la crise sanitaire et d'un rendez-vous en préfecture en février 2021, n'invoque pas d'éléments de nature à caractériser des circonstances humanitaires faisant obstacle à l'adoption d'une interdiction de retour sur le territoire français. Dès lors, le moyen susanalysé doit être écarté.
11. En second lieu, le moyen tiré par M. D..., de ce que l'interdiction de retour sur le territoire français méconnaîtrait les dispositions précitées en tant que le préfet se serait abstenu à tort de prendre en compte les quatre critères énumérés à leur 8ème alinéa pour décider de prendre cette interdiction, mais ne les a pris en compte que pour fixer la durée de cette interdiction, doit être écarté en raison de son inopérance, qui découle des termes mêmes dans lesquels ces dispositions législatives sont rédigées.
12. Il suit de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement n° 2010655 du 30 novembre 2020 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise rejetant sa demande à fin d'annulation de l'arrêté du 16 octobre 2020 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Dès lors, ses conclusions en annulation doivent être rejetées, ainsi, par voie de conséquence, que ses conclusions en injonction et, également, celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet des Hauts-de-Seine.
Délibéré après l'audience du 7 avril 2022 à laquelle siégeaient :
M. Albertini, président de chambre,
M. Mauny, président-assesseur,
Mme Moulin-Zys, première conseillère.
Lu en audience publique, le 19 mai 2022.
La rapporteure,
M.-C. E...Le président,
P.-L. ALBERTINILa greffière,
S. DIABOUGA
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 20VE03424