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21/04/2022 | FRANCE | N°19VE02738

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 21 avril 2022, 19VE02738


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Ineo Digital IDF a demandé au tribunal administratif de Versailles :

- de condamner le centre hospitalier Jean-Martin Charcot à lui verser la somme de 1 950 euros HT en règlement du solde du marché du lot n° 11 " électricité courants faibles " des travaux de construction du centre hospitalier de Plaisir ;

- de condamner le centre hospitalier Jean-Martin Charcot à lui verser la somme de 328 731,79 euros HT au titre de l'indemnisation des préjudices qu'elle a subis du fait des dif

ficultés rencontrées dans l'exécution de ce marché ;

- de majorer les sommes mention...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Ineo Digital IDF a demandé au tribunal administratif de Versailles :

- de condamner le centre hospitalier Jean-Martin Charcot à lui verser la somme de 1 950 euros HT en règlement du solde du marché du lot n° 11 " électricité courants faibles " des travaux de construction du centre hospitalier de Plaisir ;

- de condamner le centre hospitalier Jean-Martin Charcot à lui verser la somme de 328 731,79 euros HT au titre de l'indemnisation des préjudices qu'elle a subis du fait des difficultés rencontrées dans l'exécution de ce marché ;

- de majorer les sommes mentionnées ci-dessus de la taxe sur la valeur ajoutée, de la révision contractuelle des prix, et des intérêts moratoires au taux légal majoré de 2 points, à compter du 28 août 2013 et de la capitalisation de ces intérêts ;

- et de mettre à la charge du centre hospitalier Jean-Martin Charcot la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1404008 du 27 mai 2019, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement les 25 juillet 2019 et 5 octobre 2021, la société Ineo Infracom représentée par Me Forté, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de fixer le décompte du marché à la somme de 638 830,79 euros HT ;

3°) de condamner le centre hospitalier Jean-Martin Charcot à réintégrer dans ce décompte la somme de 154 147,12 euros HT et la somme de 1 950 euros HT ;

4°) de condamner le centre hospitalier Jean-Martin Charcot à lui verser la somme de 328 731,79 euros HT au titre du solde du marché ;

5°) de majorer les sommes mentionnées ci-dessus de la TVA, de la révision contractuelle des prix, des intérêts moratoires au taux légal majoré de 2 points, à compter du 28 août 2013 et de la capitalisation de ces intérêts ;

6°) de mettre à la charge du centre hospitalier Jean-Martin Charcot la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les retards dans l'exécution du marché sont imputables à plusieurs fautes du maître d'ouvrage ; il a tardé à mettre en œuvre une solution de réparation en ignorant à deux reprises le 15 juin 2006 et le 18 avril 2007, les télécopies du contrôleur technique transmettant, avec avis favorable, deux projets de réparation établis par l'entreprise titulaire du lot gros œuvre ; il n'a pas transmis un nouveau planning à la suite de la demande du titulaire du 15 février 2007 ; il n'a pas pris en compte les alertes de la société Ineo sur la nécessité d'actualiser le calendrier en fin de travaux et sur les retards concernant les décisions de remplacement des détecteurs ; le centre hospitalier a manqué de diligence dans le remplacement des titulaires des marchés résiliés ;

- la résiliation pour motif d'intérêt général sur le fondement des stipulations de l'article 46.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux (CCAG Travaux) lui ouvre droit à indemnisation de ses préjudices indépendamment de la faute du maître d'ouvrage ;

- en tout état de cause, si la cour ne retient pas l'existence d'un motif d'intérêt général, elle doit considérer que la décision de résiliation est irrégulière ;

- le surcoût en personnel d'encadrement d'affaires représente la somme de 62 377,60 euros HT au total ; le surcoût en personnel d'encadrement de chantier représente la somme de 131 999,65 euros HT ; les retards lui ont causé une perte de productivité des équipes s'élevant à la somme de 64 957,20 euros HT ; le surcoût en moyens d'outillage représente la somme de 6 111,27 euros HT ;

- elle doit être indemnisée pour les travaux supplémentaires indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art, soit 2 478,50 euros HT pour un devis présenté à la suite d'un ordre de service lui demandant de repérer les écarts constatés entre les reprises d'ouvrages portées sur les plans architecte et les reprises réellement exécutées ;

- l'état d'avancement des travaux constaté par le maître d'œuvre et le responsable de l'ordonnancement, du pilotage et de la coordination (OPC) en octobre 2007 dans l'état navette mensuel correspond à 76,675 % du montant des travaux, soit 276 372,49 euros HT, avec une révision de prix de 33 726,51 euros HT ; il y a lieu de réintégrer la somme de 154 147,12 euros HT dans le décompte, outre celle de 18 944,67 euros HT au titre de la révision ; elle doit être indemnisée du préjudice subi du fait de la résiliation, soit 30 645,71 euros HT au titre des matériels non installés ;

- ayant versé 6 934,59 euros TTC au compte prorata alors qu'elle n'était débitrice que de la somme de 3 944,78 euros TTC, elle doit être indemnisée de la somme de 2 989,81 euros TTC et le maître d'ouvrage ne saurait lui réclamer la somme de 2 045,93 euros TTC au titre de sa quote-part dans ce compte ;

- la pénalité de 1 950 euros pour absence à des réunions de chantier n'est pas justifiée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 août 2020, le centre hospitalier de Plaisir représenté par Me Cabanes, avocat, demande à la cour de rejeter la requête de la société Ineo Infracom et de mettre à sa charge le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens de la requête de la société Ineo Infracom ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux approuvé par le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de Mme Sauvageot, rapporteure publique,

- et les observations de Me Dailly, pour la société Ineo Infracom et celles de Me Couette, pour le centre hospitalier de Plaisir.

Considérant ce qui suit :

1. La société Ineo Infracom relève appel du jugement du 27 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier Jean-Martin Charcot à lui verser diverses sommes au titre du solde du lot n° 11 " électricité courants faibles " des travaux de construction du centre hospitalier de Plaisir.

Sur l'indemnisation des préjudices résultant des retards dans l'exécution des travaux et de la décision de résiliation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 46.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux (CCAG Travaux) applicable au marché litigieux : " Il peut être mis fin à l'exécution des travaux faisant l'objet du marché, avant l'achèvement de ceux-ci par une décision de résiliation du marché qui en fixe la date d'effet./ Le règlement du marché est fait alors selon les modalités prévues aux 3 et 4 de l'article 13, sous réserve des autres stipulations du présent article./ Sauf dans les cas de résiliation prévus aux articles 47 et 49, l'entrepreneur a droit à être indemnisé, s'il y a lieu, du préjudice qu'il subit du fait de cette décision. Il doit, à cet effet, présenter une demande écrite, dûment justifiée, dans le délai de quarante-cinq jours compté à partir de la notification du décompte général ".

3. Pour demander la condamnation du centre hospitalier Jean-Martin Charcot à l'indemniser des pertes et surcoûts qu'elle estime avoir subis dans l'exécution du marché la société Ineo invoque non seulement les fautes du maître d'ouvrage dans la direction du chantier mais aussi le droit à indemnisation résultant de l'existence d'une résiliation pour motif d'intérêt général, voire d'une résiliation irrégulière dans l'hypothèse où l'existence d'un motif d'intérêt général ne serait pas reconnue. Toutefois, il résulte de l'instruction que les pertes et surcoûts dont la société requérante demande réparation résultent de l'allongement de la durée d'exécution des travaux et sont dénués de tout lien avec la décision de résiliation du marché prise par le centre hospitalier en mars 2012. Par suite, les conclusions de la société Ineo tendant à la condamnation du centre hospitalier Jean-Martin Charcot sur le fondement des stipulations précitées de l'article 46.1 du CCAG Travaux ne peuvent qu'être rejetées.

4. En deuxième lieu, la société requérante soutient que le maître d'ouvrage a commis une faute en tardant à mettre en œuvre une solution de réparation à la suite de l'affaissement, en juillet 2006, des planchers réalisés par l'entreprise de gros œuvre et, en particulier, en s'abstenant de répondre aux propositions de réparation du titulaire du lot gros œuvre du 15 décembre 2006 et 23 mars 2007, qui avaient reçu l'avis favorable du contrôleur technique.

5. Toutefois, alors même que le rapport d'expertise sollicité par le centre hospitalier lui impute la responsabilité d'un retard de 10,5 mois dans l'exécution des travaux et que ce dernier aurait effectivement reçu les propositions de réparation établies par l'entreprise titulaire du lot gros œuvre, il résulte de l'instruction qu'il avait confié à l'Etat, représenté par la direction départementale de l'équipement des Yvelines, une mission de conduite d'opération et, notamment, de suivi des travaux et avait également confié à une entreprise spécialisée, par un marché conclu le 26 avril 2004, une mission d'ordonnancement, pilotage et coordination (OPC). Ce marché ayant été résilié, le centre hospitalier a dû assurer lui-même une mission partielle et provisoire d'OPC pour faire face à la situation d'urgence et dans l'attente de la désignation d'un nouveau titulaire conformément à la consultation engagée par le conducteur d'opération, ainsi qu'il résulte d'un courrier du 10 avril 2007. Le 23 mai 2007, le centre hospitalier a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Versailles afin qu'il prescrive une mesure d'expertise concernant notamment la nature et le coût des travaux nécessaires pour remédier aux désordres affectant les ouvrages de gros œuvre. Par ailleurs, un marché complémentaire de maîtrise d'œuvre, rendu nécessaire à la suite de l'apparition d'un fluage excessif de certains planchers, a été conclu par le centre hospitalier le 22 janvier 2008 et un nouvel architecte a été intégré à l'équipe de maîtrise d'œuvre par un avenant n° 1 du 20 octobre 2008. Eu égard à la nature des missions de conduite d'opération et d'OPC confiées à l'Etat et à une entreprise spécialisée par le centre hospitalier, à l'ampleur des désordres auxquels il a été confronté et à la circonstance qu'il a dû solliciter en mai 2007 la désignation d'un expert dont le rapport n'a été déposé qu'en mars 2010, l'absence de réponse du maître d'ouvrage aux propositions de réparation du titulaire du lot gros œuvre de décembre 2006 et mars 2007 ne peut être regardée comme ayant présenté un caractère fautif.

6. En outre, les travaux de reprise des désordres n'étant pas envisagés dans ce contexte, la société requérante n'est pas davantage fondée à soutenir que le centre hospitalier aurait commis une faute en s'abstenant de transmettre un nouveau planning à la suite de sa demande du 15 février 2007.

7. Par ailleurs, si la société Ineo a sollicité un planning précis de fin de travaux dans un courrier du 25 mai 2009 et si elle a réitéré cette demande dans un courrier du 7 août 2009, il ne résulte pas de l'instruction que ces courriers ont été communiqués au maître d'ouvrage et qu'il lui aurait été demandé d'intervenir en l'absence de réponse de l'entreprise chargée d'établir ces plannings.

8. Enfin, dans les circonstances précédemment rappelées, compte tenu de la mission confiée au conducteur d'opération et des procédures de consultation à mettre en œuvre, les délais de quatre ou même huit mois pour assurer le remplacement des titulaires des marchés résiliés ne peuvent être regardés comme ayant présenté un caractère fautif.

9. Au surplus et en tout état de cause, la société requérante n'apporte aucun élément de nature à établir l'existence de la perte de productivité évaluée par elle à 37 hommes par mois, soit la somme de 64 957,20 euros HT, dont elle demande réparation à raison de l'allongement de la durée des travaux. Elle n'apporte aucune justification quant au surcoût en moyen d'outillage, d'un montant de 6 111,27 euros HT, qu'elle aurait exposé en raison de la prolongation du chantier jusqu'en juin 2009. Enfin, elle n'apporte aucun commencement de preuve de l'existence et du montant des surcoûts en personnel d'encadrement d'affaires, évalués par elle à la somme de 62 377,60 euros HT, et en personnel d'encadrement de chantier, évalués par elle à la somme de 131 999,65 euros HT, qu'elle aurait exposé en raison de l'allongement de la durée du marché sur une période d'environ cinq ans.

10. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de la société Ineo tendant à l'indemnisation de préjudices qui résulteraient des retards dans l'exécution des travaux et de la décision de résiliation de son marché doivent être rejetées.

Sur l'état d'avancement des travaux à la date de résiliation du marché :

11. Aux termes de l'article 46.2 du CCAG Travaux : " En cas de résiliation, il est procédé, l'entrepreneur ou ses ayants droit, tuteur, curateur ou syndic, dûment convoqués, aux constatations relatives aux ouvrages et parties d'ouvrages exécutés, à l'inventaire des matériaux approvisionnés, ainsi qu'à l'inventaire descriptif du matériel et des installations de chantier. Il est dressé procès-verbal de ces opérations. / L'établissement de ce procès-verbal emporte réception des ouvrages et parties d'ouvrages exécutés, avec effet de la date d'effet de la résiliation, tant pour le point de départ du délai de garantie défini à l'article 44 que pour le point de départ du délai prévu pour le règlement final du marché au 32 de l'article 13 ".

12. Il résulte de l'instruction que, par un courrier du 19 mars 2012, le maître d'ouvrage a résilié le marché relatif au lot n° 11 des travaux de construction du centre hospitalier et a informé le titulaire qu'il serait procédé avec le maître d'œuvre au constat prévu par les stipulations précitées de l'article 46.2 du CCAG Travaux. Si des réunions de constat étaient prévues les 1er et 4 juin 2012, le centre hospitalier a informé le titulaire, par un courrier du 9 août 2012, qu'il avait été mis fin à la mission du maître d'œuvre et qu'un nouveau prestataire était en cours de désignation pour reprendre les constats engagés. Le titulaire a été convoqué à une nouvelle réunion de constat le 18 décembre 2012. La société Ineo a préalablement transmis au maître d'œuvre nouvellement désigné un CD Rom permettant de mesurer l'état d'avancement des travaux le 13 décembre 2012. A la suite de cette réunion, un procès-verbal de constat lui a été notifié par un courrier du 11 mars 2013. Certaines entreprises ayant contesté le caractère contradictoire de ce constat, une nouvelle réunion de constat a été organisée le 21 mai 2013. Le décompte général notifié au titulaire a été établi sur le fondement de ce constat.

13. En premier lieu, il résulte de l'instruction que le titulaire du lot n° 11 était représenté non seulement lors de la réunion de constat du 21 mai 2013 mais aussi lors de la réunion du 18 décembre 2012 au cours desquelles il a été procédé aux constatations relatives aux ouvrages et parties d'ouvrages exécutés, à l'inventaire des matériaux approvisionnés, ainsi qu'à l'inventaire descriptif du matériel et des installations de chantier conformément aux stipulations précitées de l'article 46.2 du CCAG Travaux. Ainsi, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que ce constat n'aurait pas été effectué de manière contradictoire.

14. En second lieu, aux termes de l'article 91 du code des marchés publics dans sa version applicable au marché en litige : " Les règlements d'avances et d'acomptes n'ont pas le caractère de paiements définitifs ; leur bénéficiaire en est débiteur jusqu'au règlement final du marché ou, lorsque le marché le prévoit, jusqu'au règlement partiel définitif ".

15. Si l'état navette mensuel n° 21 d'avril 2008 validé par le maître d'œuvre et le conducteur d'opération correspond à un avancement des travaux représentant 76,675 % du montant du marché, soit 276 372,49 euros HT, avec une révision de 33 726,51 euros, il résulte des dispositions précitées que cet état d'acompte ne faisait pas obstacle à la remise en cause des versements effectués jusqu'au règlement final du marché. En outre, le centre hospitalier ne peut être regardé comme ayant admis que les acomptes versés correspondaient aux travaux réellement réalisés par l'entreprise et ne pouvaient ultérieurement être remis en cause. Par ailleurs, le procès-verbal des opérations de constat effectuées le 18 décembre 2012 et le 21 mai 2013 constitue un élément de preuve de nature à établir que les acomptes versés ne correspondaient pas à l'état réel d'avancement des travaux. Le titulaire n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause le bien-fondé de ce constat contradictoire. Par suite, elle n'est pas fondée à demander la réintégration au décompte de la somme de 154 147,12 euros HT, ainsi que la somme de 18 944,67 euros au titre de la révision, correspondant à un état d'avancement des travaux de 76,675 % à la date de la résiliation.

Sur les matériaux approvisionnés :

16. Aux termes de l'article 46.4 du CCAG Travaux : " Le maître de l'ouvrage dispose du droit de racheter, en totalité ou en partie : - Les ouvrages provisoires utiles à l'exécution du marché ; - Les matériaux approvisionnés, dans la limite où il en a besoin pour le chantier (...) ".

17. La société requérante demande à être indemnisée de la somme de 30 645,71 euros HT correspondant au montant des fournitures livrées sur le chantier mais non installées en raison de son arrêt progressif. Toutefois, il résulte de l'inst ruction que cette dernière a été informée, dans le courrier du maître d'ouvrage du 11 mars 2013, que ce dernier n'entendait pas bénéficier du rachat des ouvrages provisoires et des matériaux approvisionnés. Elle a été invitée à effectuer la récupération de son matériel. Elle n'apporte aucun élément de nature à établir avoir été dans l'impossibilité de procéder à cette récupération et n'est, par suite, pas fondée à soutenir que le défaut de paiement de ces matériaux serait constitutif d'un préjudice résultant de la décision de résiliation au sens de l'article 46.1 du CCAG Travaux. Dans ces conditions, alors qu'en outre, elle n'apporte pas non plus d'éléments pour justifier la valeur des matériaux approvisionnés dont elle sollicite le paiement, la requérante n'est pas fondée à demander la condamnation du centre hospitalier à lui verser la somme de 30 645,71 euros HT à ce titre.

Sur les travaux supplémentaires :

18. Le titulaire d'un marché à prix forfaitaire n'a pas droit à la rémunération des travaux qui n'ont pas été commandés par le maître d'ouvrage même s'ils présentent un caractère utile. En revanche, il a droit au paiement, par le maître d'ouvrage, des prestations supplémentaires qui lui ont été réclamées par ordre de service ainsi qu'à l'indemnisation de travaux supplémentaires réalisés sans ordre de service, à la condition toutefois, qu'ils soient indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art.

19. La société requérante sollicite la condamnation du centre hospitalier de Plaisir à lui verser la somme de 2 478,50 euros HT correspondant à un devis de travaux présenté en réponse à un ordre de service n° 16 du 26 septembre 2007 sollicitant un dossier repérant les écarts constatés entre les reprises d'ouvrages portées aux plans d'architecte et les reprises d'ouvrage réellement exécutées. Toutefois, le centre hospitalier fait valoir, sans être contesté, que cet ordre de service a seulement sollicité la transmission de plans. Ainsi, il n'est pas établi que les travaux correspondant au devis litigieux ont été commandés par le maître d'ouvrage. En outre et en tout état de cause, la société requérante n'apporte aucun élément permettant d'établir que les travaux correspondant au devis litigieux ont été exécutés et qu'ils étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art. Par suite, elle n'est pas fondée à demander la condamnation du centre hospitalier à leur verser la somme en litige au titre des travaux supplémentaires du lot n° 11.

Sur les dépenses communes de chantier :

20. Aux termes du C de l'article 3-2.9 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) du marché litigieux relatif au compte prorata : " Les dépenses définies ci-après sont portées au débit du compte spécial dit " compte prorata " établi, géré et réglé par les entrepreneurs (...) L'entrepreneur titulaire du lot n° 1 procède au règlement des dépenses visées au premier alinéa ; mais il peut demander des avances aux autres entrepreneurs. Il effectue en fin de chantier la répartition desdites dépenses au prorata du montant des situations cumulées de chaque entrepreneur. / Dans cette réparation, l'action du maître d'œuvre se limite à jouer le rôle d'amiable compositeur, dans le cas où les entrepreneurs lui demanderaient de faciliter le règlement d'un différend qui se serait élevé entre eux ".

21. La société requérante sollicite, d'une part, la condamnation du centre hospitalier à lui verser la somme de 2 989,81 euros TTC correspondant au solde créditeur du compte prorata non réglé par l'entreprise titulaire du lot n° 1 en charge de la gestion de ce compte et, d'autre part, soutient que, dès lors que le solde de son compte est créditeur, le maître d'ouvrage ne saurait imputer sur le décompte du marché une somme de 2 045,93 euros TTC inscrite au débit de ce compte pour la période comprise entre le 1er janvier et le 30 juin 2011.

22. Toutefois si le tableau récapitulatif des paiements effectués par la société requérante au titre du compte prorata, annexé au courrier du 17 février 2009 de l'entreprise titulaire du lot n° 1 fait effectivement apparaître une créance de 2 989,81 euros TTC à son profit, elle n'invoque aucune stipulation du marché en vertu de laquelle une telle somme non réglée en fin de chantier pourrait être mise à la charge du maître d'ouvrage. Par ailleurs, ce dernier fait valoir, sans être contesté, qu'il s'est substitué à l'entreprise titulaire du lot n° 1 et a engagé des dépenses communes de chantier postérieurement au 17 février 2009. Ainsi et par les seuls moyens qu'elle invoque, la société requérante n'est pas fondée à demander la déduction de la somme de 2 045,93 euros TTC dans le décompte du marché et la condamnation du centre hospitalier à lui verser la somme de 2 989,81 euros TTC.

Sur les pénalités :

23. Aux termes de l'article 4-4.4 du CCAP du marché litigieux : " Les comptes-rendus de chantier valent convocation des entreprises dont la présence est requise./ Les rendez-vous de chantier sont fixés par le maître d'œuvre./ Des rendez-vous de coordination avec les entreprises sont organisés par le pilote, toute entreprise convoquée sera tenue d'y assister./ En cas d'absence à la réunion de chantier le titulaire encourt, sans mise en demeure préalable par dérogation à l'article 49.1 du CCAG, une pénalité fixée à 150 euros HT ".

24. La société requérante soutient que la pénalité pour absences aux réunions de chantier, d'un montant total de 1 950 euros, mise à sa charge dans le décompte général du marché n'est pas justifiée. Il résulte toutefois de l'examen du décompte général du lot n° 11 corrigé que cette pénalité a été annulée par le centre hospitalier. Par suite, les conclusions formées sur ce point par la requérante ne peuvent qu'être rejetées.

25. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société Ineo n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

26. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le centre hospitalier de Plaisir, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à la sociétés Ineo une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société Ineo le versement au centre hospitalier de Plaisir de la somme de 2 000 euros à ce titre.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Ineo Infracom est rejetée.

Article 2 : La société Ineo Infracom versera la somme de 2 000 euros au centre hospitalier de Plaisir au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Ineo Infracom et au centre hospitalier de Plaisir.

Délibéré après l'audience du 7 avril 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Signerin-Icre, présidente de chambre,

M. Camenen, président assesseur,

M. Toutain, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 avril 2022.

Le rapporteur,

G. A...La présidente,

C. Signerin-Icre

La greffière,

C. YardeLa République mande et ordonne au préfet des Yvelines en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 19VE02738


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE02738
Date de la décision : 21/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-02 Marchés et contrats administratifs. - Exécution financière du contrat. - Règlement des marchés.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Gildas CAMENEN
Rapporteur public ?: Mme SAUVAGEOT
Avocat(s) : SELARL DF ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-04-21;19ve02738 ?
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