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14/04/2022 | FRANCE | N°19VE01254

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 14 avril 2022, 19VE01254


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 4 février 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 20 euros

par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 4 février 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 20 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.

Par un jugement du 13 mars 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 11 avril 2019 et le 25 février 2022, M. B..., représenté par Me Dodier, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 4 février 2019 en tant qu'il l'oblige à quitter le territoire français, lui refuse un délai de départ volontaire et lui interdit le retour sur le territoire pour une durée de deux ans ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 20 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- il a ses attaches privées et familiales en France, où il réside depuis 2012, chez une de ses sœurs en situation régulière, et où il travaille depuis 2018 ; il y a un défaut d'examen sérieux de sa situation ;

- la décision méconnait l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- son activité est déclarée car il dispose d'un contrat de travail, de feuilles de paie ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est méconnu ; il n'a plus d'attaches en Algérie ;

S'agissant de l'interdiction de retour sur le territoire pour une durée de 2 ans :

- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est méconnu ; il ne pourra plus former de demande de régularisation, notamment sur le fondement de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

L'instruction a été close le 4 mars 2022 par une ordonnance du 18 février 2022.

M. B... a été admis le 22 novembre 2019 au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du tribunal judiciaire de Versailles.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 27 décembre 1968 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Mauny a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien né le 23 mars 1985, a été interpellé le 4 février 2019. Il a déclaré lors de son audition être de nationalité tunisienne et être entré en France le 26 juin 2011 et n'a été en mesure de justifier ni d'une entrée régulière, ni d'un séjour régulier sur le territoire. Par un arrêté du 4 février 2019, le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil l'annulation de ces décisions. Par un jugement du 13 mars 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation. M. B... relève appel de ce jugement rejetant sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis l'obligeant à quitter le territoire français, lui refusant un délai de départ volontaire et lui interdisant le retour sur le territoire pour une durée de deux ans.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

2. Si M. B... soutient qu'il a désormais ses seules attaches privées et familiales en France, où il résiderait selon ses déclarations depuis 2012 chez une de ses sœurs en situation régulière et où il travaille depuis 2018, il ressort des pièces du dossier qu'il ne serait entré sur le territoire qu'à l'âge de 26 ans. Il ne justifie pas qu'il serait dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine et ne justifie pas non plus, par les pièces qu'il produit, des conditions de son hébergement en France depuis son entrée sur le territoire, qu'il a fixée au 26 juin 2011 lors de son interpellation et au 26 juin 2012 dans sa requête. S'il a indiqué par ailleurs avoir deux frères et une sœur résidant en France au moment de son interpellation, il ne justifie toujours pas de l'intensité et de la stabilité des liens entretenus avec les membres de sa famille et des conditions du séjour de l'ensemble de sa fratrie. Il ne justifie pas, en outre, des liens personnels qu'il a tissés sur le territoire. Par ailleurs, s'il a travaillé en qualité d'ouvrier dans le secteur du bâtiment, sous couvert de deux contrats à durée déterminée signés le 29 mars 2018 et le 1er février 2019, cette circonstance est récente à la date de la décision en litige. Il est au surplus célibataire et sans charge de famille. En outre, s'il a indiqué qu'il était en cours de constitution d'un dossier pour sa régularisation, il est constant qu'il n'a effectué aucune démarche pour obtenir un certificat de résidence depuis son entrée sur le territoire, avant le prononcé de la décision en litige. Enfin, s'il se prévaut de contrats de travail et de feuilles de paie, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait respecté les conditions prévues par l'accord franco-algérien susvisé pour exercer une activité salariée. Ainsi, au regard des conditions du séjour de M. B... en France et des attaches dont il dispose en France et en Algérie, l'arrêté du 4 février 2019 n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris. L'arrêté n'a donc méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé. Pour les mêmes motifs, la décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B....

3. Si M. B... soutient par ailleurs que la décision serait entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation au regard de sa situation familiale et professionnelle, l'arrêté litigieux s'appuie sur les éléments déclarés par M. B... lors de son interpellation, faisant état d'une entrée en France en 2011, de sa nationalité tunisienne et de son absence de démarche aux fins de régularisation, et se borne à relever qu'il ne justifie pas de l'intensité, de l'ancienneté et de la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France à la date de sa signature. Au regard des pièces du dossier, le moyen doit être écarté.

Sur l'interdiction de retour sur le territoire :

4. Il résulte de ce qui a été exposé au point 2 que M. B..., qui a déclaré lors de son interpellation être de nationalité tunisienne et entré en France le 26 juin 2011, a occupé un emploi salarié depuis 2018 sans bénéficier d'un certificat de résidence prévu par l'accord franco-algérien et n'a effectué aucune démarche pour régulariser sa situation. Il ressort également des pièces du dossier que, s'il soutient avoir deux sœurs et un frère sur le territoire français et ne plus disposer d'attache familiale en Algérie, il n'établit pas cette circonstance par les pièces qu'il produit, alors qu'il n'a quitté son pays d'origine qu'à l'âge de 26 ans selon ses déclarations. Il ne justifie pas en outre des conditions de sa résidence en France depuis 2012, et notamment des conditions de son logement. Il est enfin célibataire et sans charge de famille. Eu égard aux conditions de son séjour en France et de ses attaches familiales, la décision l'interdisant de retour en France pour une durée de deux ans n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur d'appréciation.

5. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 4 février 2019. Il y a donc lieu de rejeter ses conclusions à fin d'annulation dudit arrêté ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2022, à laquelle siégeaient :

M. Albertini, président de chambre,

M. Mauny, président assesseur,

Mme Moulin-Zys, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 avril 2022.

Le rapporteur,

O. MAUNYLe président,

P.-L. ALBERTINILa greffière,

S. DIABOUGA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N° 19VE01254002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE01254
Date de la décision : 14/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Olivier MAUNY
Rapporteur public ?: Mme BOBKO
Avocat(s) : DODIER

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-04-14;19ve01254 ?
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