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12/04/2022 | FRANCE | N°21VE01495

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 12 avril 2022, 21VE01495


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 15 février 2021 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit à défaut de départ volontaire.

Par un jugement n° 2102770 du 12 avril 2021, le magistrat désigné du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par un

e requête, des mémoires complémentaires et des pièces, enregistrés les 11 mai et 1er septembre 2021 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 15 février 2021 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit à défaut de départ volontaire.

Par un jugement n° 2102770 du 12 avril 2021, le magistrat désigné du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, des mémoires complémentaires et des pièces, enregistrés les 11 mai et 1er septembre 2021 et le 6 janvier 2022, M. C..., représenté par Me Piquois, avocat, demande à la cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° d'annuler les décisions portant décisions obligation de quitter le territoire français, obligation de pointer tous les mardis, obligation de déposer son passeport, fixation du pays de destination, interdiction de retour d'une durée d'un an, signalement au Système d'information Schengen et abrogation de son attestation de demande d'asile ;

3° d'enjoindre au préfet de lui délivrer une attestation de demande d'asile jusqu'à la décision de la Cour nationale du droit d'asile ;

4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté comporte une erreur de fait sur sa date de naissance ;

- cette erreur révèle un défaut d'examen de sa situation ;

- il a été privé de la garantie d'un entretien préalable ;

- il ne peut être éloigné avant d'avoir été entendu par la Cour nationale du droit d'asile ;

- le préfet méconnaît les stipulations de l'article 1 A 2 de la convention de Genève, de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de la convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, eu égard aux risques encourus par les musiciens en Afghanistan.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 août 2021, le préfet des Hauts-de-Seine conclut au rejet de la requête.

Le préfet s'en remet à ses écritures de première instance.

Les parties ont été informées le 16 février 2022, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour était susceptible de relever d'office le moyen tiré de ce qu'il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. C... tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 février 2021 du préfet des Hauts-de-Seine lui faisant obligation de quitter le territoire, qui sont devenues sans objet du fait de la décision n° 20027507 du 15 décembre 2021 de la CNDA reconnaissant à l'intéressé la qualité de réfugié.

Par un mémoire, enregistré le 21 février 2022, M. C... maintient ses demandes et conclut en outre à ce que la mention de l'arrêté contesté soit supprimée des fichiers.

Il soutient que la reconnaissance du statut de réfugié entache rétroactivement d'illégalité la mesure d'éloignement dont il a fait l'objet.

Par une ordonnance du 1er mars 2022, l'instruction a été fixée au 15 mars 2022, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;

- le code d'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience en application des dispositions de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative.

Le rapport de Mme Dorion a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... C..., ressortissant afghan né le 25 mars 1997, entré en France le 29 juin 2018, a présenté une demande d'asile le 9 juillet 2018 rejetée par le directeur général de l'Office français des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 28 juin 2019, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 7 octobre 2019, par ordonnance, pour forclusion. Suite à la demande de réexamen présentée le 3 juillet 2020 par M. C..., rejetée par le directeur général de l'OFPRA le 12 août 2020 pour irrecevabilité au motif que l'intéressé ne présentait pas de faits nouveaux, le préfet des Hauts-de-Seine, constatant la fin du droit au maintien de l'intéressé sur le territoire français, lui a, par un arrêté du 15 février 2021, fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, de pointer tous les mardis, et de déposer son passeport, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit, lui a fait interdiction de retour d'une durée d'un an, a prescrit son signalement au Système d'information Schengen et a abrogé son attestation de demande d'asile. M. C... relève appel du jugement du 12 avril 2021 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions.

Sur l'étendue du litige :

2. Il ressort des pièces du dossier que la cour nationale du droit d'asile a, par une décision n° 20027507 du 15 décembre 2021, annulé la décision du 12 août 2020 du directeur général de l'OFPRA et reconnu à M. C... la qualité de réfugié. Par suite, les conclusions de la requête tendant à l'annulation de la décision d'abrogation de l'attestation de demande d'asile dont celui-ci bénéficiait et à ce qu'il soit fait injonction au préfet des Hauts-de-Seine de le remettre en possession de cette attestation jusqu'à ce que la CNDA ait statué sur son recours, sont devenues sans objet. Il n'y a plus lieu d'y statuer. En revanche, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet a délivré à M. C..., suite à la reconnaissance de sa qualité de réfugié, un titre de séjour ou un récépissé. Les autres conclusions de la requête ne sont, par suite, pas dépourvues d'objet.

Sur les autres conclusions à fin d'annulation :

3. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté contesté : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...), lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 , à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ". Aux termes de l'article L. 613-6 du même code, dans sa rédaction applicable depuis le 1er mai 2021 : " Lorsque la qualité de réfugié ou d'apatride est reconnue ou le bénéfice de la protection subsidiaire accordé à un étranger ayant antérieurement fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, l'autorité administrative abroge cette décision. Elle délivre au réfugié la carte de résident prévue à l'article L. 424-1, (...) ".

4. Par une décision du 15 décembre 2021, la CNDA a reconnu à M. C... la qualité de réfugié. Cette décision, qui a un caractère recognitif, est réputée rétroagir à la date de son entrée en France. Il s'ensuit que M. C... est fondé à s'en prévaloir pour contester la mesure d'éloignement prise à son encontre antérieurement à son intervention et que les décisions contenues dans l'arrêté du 15 février 2021, portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, obligation de pointage et de remise de son passeport, fixation du pays à destination duquel M. C... pourra être reconduit et interdiction de retour sur le territoire d'une durée d'un an, sont illégales et doivent être annulées.

5. Il résulte de ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Aux termes de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si la décision portant obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 721-6, L. 721-7, L. 731-1, L. 731-3, L. 741-1 et L. 743-13, et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. "

7. La qualité de réfugié reconnue à M. C... fait obstacle à ce que l'intéressé puisse faire légalement l'objet d'une mesure d'éloignement. Le présent arrêt implique nécessairement que le préfet restitue à l'intéressé son passeport, fasse procéder à l'effacement du signalement de M. C... dans le Système d'information Schengen et réexamine sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, en tirant les conséquences de la protection internationale dont l'intéressé bénéficie.

Sur les frais de l'instance :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 12 avril 2021 du magistrat désigné du tribunal administratif de Cergy -Pontoise et l'arrêté du 15 février 2021 du préfet des Hauts-de-Seine sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de Hauts-de-Seine de restituer à M. C... son passeport, de procéder à l'effacement de son signalement dans le Système d'information Schengen et de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet des Hauts-de-Seine.

Délibéré après l'audience du 29 mars 2022, à laquelle siégeaient :

M. Beaujard, président de chambre,

Mme Dorion, présidente-assesseure,

M. Bouzar, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 avril 2022.

La rapporteure,

O. DORION Le président,

P. BEAUJARD

La greffière,

M. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour exécution conforme,

La greffière,

N° 21VE01495 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21VE01495
Date de la décision : 12/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Odile DORION
Rapporteur public ?: M. MET
Avocat(s) : PIQUOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-04-12;21ve01495 ?
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