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31/03/2022 | FRANCE | N°20VE01613

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 31 mars 2022, 20VE01613


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Helaba Invest Kapitalanlagengesellschaft GmbH, agissant pour le compte du fonds Hi-Euro-Corporates 1-Fonds, a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, de prononcer le remboursement des retenues à la source d'un montant total de 1 302 637, 30 euros prélevées sur les dividendes de source française distribués au cours des années 2004, 2005, 2006 et 2008, et, d'autre part, de condamner l'État au versement des intérêts moratoires sur le fondement de l'article L. 208 du livre des

procédures fiscales.

Par un jugement n° 1010452 du 24 mars 2020, le trib...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Helaba Invest Kapitalanlagengesellschaft GmbH, agissant pour le compte du fonds Hi-Euro-Corporates 1-Fonds, a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, de prononcer le remboursement des retenues à la source d'un montant total de 1 302 637, 30 euros prélevées sur les dividendes de source française distribués au cours des années 2004, 2005, 2006 et 2008, et, d'autre part, de condamner l'État au versement des intérêts moratoires sur le fondement de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n° 1010452 du 24 mars 2020, le tribunal administratif de Montreuil, après avoir constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société Helaba Invest Kapitalanlagengesellschaft GmbH à concurrence du dégrèvement prononcé, d'un montant de 1 082 356,49 euros, a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, des mémoires et des pièces, enregistrés le 16 juillet 2020, les 31 mai, 9 août, 5 et 16 novembre 2021, la société Helaba Invest Kapitalanlagengesellschaft GmbH, agissant pour le compte du fonds Hi-Euro-Corporates 1-Fonds, représentée par Me Robert, avocat, demande à la cour :

1°) d'ordonner le remboursement complémentaire des retenues à la source prélevées au titre des dividendes versés au cours des années 2006 et 2008, pour un montant de 220 280,81 euros ;

2°) de mettre à la charge de l'État le versement d'intérêts moratoires sur cette somme, en application de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les frais exposés dans la présente procédure.

Elle soutient que :

- elle établit la comparabilité du fonds Hi-Euro-Corporates 1-Fonds avec un OPCVM français, laquelle est admise par l'administration fiscale ;

- elle justifie de la chaîne de paiement des dividendes pour la somme globale de 98 875 euros au titre des années 2006 et 2008.

Par un mémoire, enregistré le 9 août 2021, la société Helaba Invest Kapitalanlagengesellschaft GmbH a déclaré se désister de ses conclusions à hauteur de la somme de 121 405,91 euros.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 19 janvier, 7 septembre et 16 novembre 2021, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à hauteur de la restitution intervenue en cours d'instance et au rejet du surplus des conclusions de la requête.

Il fait valoir que :

- au vu des justificatifs produits en cours d'instance, la chaîne de paiement est établie à hauteur d'une somme globale de 87 102,75 euros ;

- le différentiel avec la somme réclamée s'explique par les crédits d'impôts étrangers qui ont réduit le taux de retenue à la source effectivement appliqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention entre la République française et la République fédérale d'Allemagne du 21 juillet 1959 en vue d'éviter les doubles impositions et d'établir des règles d'assistance administrative et juridique réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune ;

- l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 10 mai 2012, Santander Asset Management SGIIC SA et autres (C 338/11 à C 347/11) ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonfils,

- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le fonds d'investissement Hi-Euro-Corporates 1-Fonds a perçu des dividendes de source française au cours des années 2004, 2005, 2006 et 2008, lesquels ont été soumis à la retenue à la source. La société Helaba Invest Kapitalanlagengesellschaft GmbH, agissant pour le compte du fonds d'investissement Hi-Euro-Corporates 1-Fonds, fait appel du jugement du 24 mars 2020 en tant que le tribunal administratif de Montreuil a refusé d'ordonner le remboursement de la retenue à la source d'un montant de 220 280,81 euros restant à sa charge au titre des années 2006 et 2008.

Sur le désistement partiel :

2. Par son mémoire enregistré le 9 août 2021, la société Helaba Invest Kapitalanlagengesellschaft GmbH déclare se désister de ses conclusions à concurrence de la somme de 121 405,81 euros. Son désistement partiel d'instance étant pur et simple, rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte.

Sur le non-lieu partiel :

3. Par une décision du 16 novembre 2021, postérieure à l'introduction de la requête, l'administration a prononcé une restitution, assortie des intérêts moratoires, d'un montant de 87 102,75 euros. Il suit de là que les conclusions à fin de restitution sont, dans cette mesure, devenues sans objet, de sorte qu'il n'y a plus lieu d'y statuer.

Sur le bien-fondé de la demande de restitution de la retenue à la source restant en litige :

4. Aux termes du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " Sous réserve des dispositions de l'article 239 bis B, les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187-1 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France. (...) ". Les dividendes figurent au nombre des produits visés aux articles 108 à 117 bis de ce code. En application de l'article 187 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur, le taux de la retenue à la source est fixé à 25 % du montant de ces revenus. Il est réduit à 15 % par l'article 9 de la convention fiscale conclue le 21 juillet 1959 entre la France et l'Allemagne.

5. En premier lieu, dans l'arrêt du 10 mai 2012 par lequel elle s'est prononcée sur les questions dont le tribunal administratif de Montreuil l'avait saisie, à titre préjudiciel, le 1er juillet2011, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que les articles 63 et 65 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation d'un État membre qui prévoit l'imposition, au moyen d'une retenue à la source, des dividendes d'origine nationale lorsqu'ils sont perçus par des organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) résidents d'un autre État, alors que de tels dividendes sont exonérés d'impôts dans le chef des organismes de placement collectif en valeurs mobilières résidents du premier État.

6. En l'espèce, il n'est pas contesté que le fonds d'investissement Hi-Euro-Corporates 1-Fonds, pour le compte duquel agit la société Helaba Invest Kapitalanlagengesellschaft GmbH, est comparable à un OPCVM français.

7. En second lieu, aux termes de l'article R. 197-3 du livre des procédures fiscales : " Toute réclamation doit à peine d'irrecevabilité : a) Mentionner l'imposition contestée (...) / d) Etre accompagnée (...) dans le cas où l'impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou d'un avis de mise en recouvrement, d'une pièce justifiant le montant de la retenue ou du versement (...). " Ni ces dispositions, qui s'imposent indistinctement à toutes les actions tendant à la restitution d'une imposition qui n'a pas donné lieu à l'émission d'un rôle ou d'un avis de mise en recouvrement, quel que soit le fondement juridique sur lequel elles sont introduites, ni aucune autre ne précisent, pour ce qui concerne les réclamations tendant à la restitution d'un impôt recouvré par la voie de retenue à la source opérée par un tiers, la nature des pièces justifiant cette retenue qui doivent, à peine d'irrecevabilité, accompagner la réclamation. Un contribuable non résident formant une réclamation tendant à la restitution de la retenue à la source qui a été prélevée sur ses revenus tirés de produits visés aux articles 108 à 117 du code général des impôts en vertu du premier alinéa du 2 de l'article 119 bis de ce code peut donc satisfaire aux prescriptions de l'article R. 197-3 précité en produisant toutes pièces établissant l'application de cette retenue, pour peu qu'elles précisent la date à laquelle elle a été opérée et l'identité de l'établissement payeur au sens des dispositions des articles 1672 du code général des impôts, 75 de l'annexe II à ce code et 381 A de l'annexe III à ce code.

8. Il résulte de l'instruction que la différence entre le montant résiduel de la restitution demandée par la société Helaba Invest Kapitalanlagengesellschaft GmbH et la somme restituée à la société requérante en cours d'instance par l'administration fiscale, soit 11 772,25 euros, correspond à la différence entre le taux de retenue à la source de 15 % applicable aux fonds d'investissement en vertu de l'article 9 de la convention franco-allemande du 21 juillet 1959 et le taux qui a été effectivement acquitté par le fonds d'investissement Hi-Euro-Corporates 1-Fonds en raison du bénéfice de crédits d'impôts étrangers, ainsi que cela ressort des relevés de paiement de l'établissement payeur français. Dans ces conditions, la société requérante n'est pas fondée à obtenir la restitution de la somme de 11 772,25 euros, dont elle n'a pas au final effectivement supporté le paiement.

Sur les intérêts moratoires :

9. Les conclusions de la société requérante tendant au versement d'intérêts moratoires sur le fondement de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales sont irrecevables faute de litige né et actuel avec le comptable public, la lettre de restitution du 16 novembre 2021 précisant, au contraire, qu'ils seront appliqués. Dans ces conditions, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la société Helaba Invest Kapitalanlagengesellschaft GmbH n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté le surplus de sa demande s'agissant des sommes restant en litige. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'État la somme dont la société requérante demande le versement au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que, et en tout état de cause, celles au titre des dépens, en l'absence de dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Il est donné acte du désistement partiel d'instance des conclusions de la société Helaba Invest Kapitalanlagengesellschaft GmbH en restitution des retenues à la source prélevées au titre des dividendes à concurrence de la somme de 121 405,81 euros.

Article 2 : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société Helaba Invest Kapitalanlagengesellschaft GmbH, à concurrence de la restitution prononcée d'un montant de 87 102,75 euros.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Helaba Invest Kapitalanlagengesellschaft GmbH et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 15 mars 2022, à laquelle siégeaient :

M. Bresse, président de chambre,

Mme Bonfils, première conseillère,

Mme Deroc, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 mars 2022.

La rapporteure,

M.-G. BonfilsLe président,

P. BresseLa rapporteure,

M.-G. BonfilsLa présidente,

I. I. Danielian

La greffière,

A. Audrain-Foulon

La greffière,

A. Audrain FoulonLa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 20VE01613


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE01613
Date de la décision : 31/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-06-01 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Règles générales. - Impôt sur le revenu. - Cotisations d`IR mises à la charge de personnes morales ou de tiers. - Retenues à la source.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Marie-Gaëlle BONFILS
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : CABINET FIDAL DIRECTION INTERNATIONALE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-03-31;20ve01613 ?
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