La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/03/2022 | FRANCE | N°20VE01123

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 31 mars 2022, 20VE01123


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société SGSS Deutschland Kag GmbH a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, de prononcer le remboursement des retenues à la source d'un montant total de 64 637 euros prélevées sur les dividendes de source française distribués au cours des années 2003 à 2005, et, d'autre part, de condamner l'État au versement des intérêts moratoires sur le fondement de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n° 1007924 du 3 décembre 2019, le tribunal administra

tif de Montreuil a accordé à la société SGSS Deutschland Kag GmbH agissant pour le c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société SGSS Deutschland Kag GmbH a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, de prononcer le remboursement des retenues à la source d'un montant total de 64 637 euros prélevées sur les dividendes de source française distribués au cours des années 2003 à 2005, et, d'autre part, de condamner l'État au versement des intérêts moratoires sur le fondement de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n° 1007924 du 3 décembre 2019, le tribunal administratif de Montreuil a accordé à la société SGSS Deutschland Kag GmbH agissant pour le compte du fonds Südinvest 76 le remboursement des retenues à la source prélevées sur les dividendes de source française distribués au cours des années 2003 à 2005 à concurrence d'un montant total de 42 695,46 euros, et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 3 avril, 23 juin et 3 août 2020, et le 1er juin 2021, la SGSS Deutschland Kag GmbH, représentée par Me Robert, avocat, demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'ordonner le remboursement complémentaire des retenues à la source prélevées au titre des dividendes versés au cours des années 2003 à 2005, pour un montant de 16 529,35 euros ;

2°) de mettre à la charge de l'État le versement d'intérêts moratoires sur cette somme, en application de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, outre les dépens.

Elle soutient que :

- elle établit la comparabilité du fonds Südinvest 76 avec un OPCVM français et justifie de la chaîne de paiement des dividendes pour chacune des années en litige ;

- le montant dont le remboursement a été ordonné en première instance est erroné, et elle a droit au remboursement complémentaire de la somme de 16 529,35 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juillet 2020, le ministre de l'action et des comptes publics s'en remet à la sagesse de la cour.

Il fait valoir qu'en exécution du jugement, il a été procédé, le 16 décembre 2019, à la restitution de la somme de 42 695,46 euros qui y est mentionnée et des intérêts moratoires correspondants.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention entre la République française et la République fédérale d'Allemagne du 21 juillet 1959 en vue d'éviter les doubles impositions et d'établir des règles d'assistance administrative et juridique réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune ;

- l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 10 mai 2012, Santander Asset Management SGIIC SA et autres (C 338/11 à C 347/11) ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonfils,

- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le fonds d'investissement Südinvest 76 a perçu des dividendes de source française au cours des années 2003 à 2005, lesquels ont été soumis à la retenue à la source. La SGSS Deutschland Kag GmbH, agissant pour le compte du fonds d'investissement Südinvest 76, fait appel du jugement du 3 décembre 2019 en tant que le tribunal administratif de Montreuil a refusé d'ordonner le remboursement de la retenue à la source d'un montant de 16 529,35 euros restant à sa charge au titre des années 2003 à 2005.

Sur le bien-fondé de la demande de restitution de la retenue à la source restant en litige :

2. Aux termes du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " Sous réserve des dispositions de l'article 239 bis B, les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187-1 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France. (...) ". Les dividendes figurent au nombre des produits visés aux articles 108 à 117 bis de ce code. En application de l'article 187 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur, le taux de la retenue à la source est fixé à 25 % du montant de ces revenus. Il est réduit à 15 % par l'article 9 de la convention fiscale conclue le 21 juillet 1959 entre la France et l'Allemagne.

3. En premier lieu, dans l'arrêt du 10 mai 2012 par lequel elle s'est prononcée sur les questions dont le tribunal administratif de Montreuil l'avait saisie, à titre préjudiciel, le 1er juillet 2011, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que les articles 63 et 65 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation d'un État membre qui prévoit l'imposition, au moyen d'une retenue à la source, des dividendes d'origine nationale lorsqu'ils sont perçus par des organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) résidents d'un autre État, alors que de tels dividendes sont exonérés d'impôts dans le chef des organismes de placement collectif en valeurs mobilières résidents du premier État.

4. En l'espèce, il n'est pas contesté que le fonds d'investissement Südinvest 76, pour le compte duquel agit la SGSS Deutschland Kag GmbH, est comparable à un OPCVM français.

5. En second lieu, aux termes de l'article R. 197-3 du livre des procédures fiscales : " Toute réclamation doit à peine d'irrecevabilité : a) Mentionner l'imposition contestée (...) / d) Etre accompagnée (...) dans le cas où l'impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou d'un avis de mise en recouvrement, d'une pièce justifiant le montant de la retenue ou du versement (...). " Ni ces dispositions, qui s'imposent indistinctement à toutes les actions tendant à la restitution d'une imposition qui n'a pas donné lieu à l'émission d'un rôle ou d'un avis de mise en recouvrement, quel que soit le fondement juridique sur lequel elles sont introduites, ni aucune autre ne précisent, pour ce qui concerne les réclamations tendant à la restitution d'un impôt recouvré par la voie de retenue à la source opérée par un tiers, la nature des pièces justifiant cette retenue qui doivent, à peine d'irrecevabilité, accompagner la réclamation. Un contribuable non résident formant une réclamation tendant à la restitution de la retenue à la source qui a été prélevée sur ses revenus tirés de produits visés aux articles 108 à 117 du code général des impôts en vertu du premier alinéa du 2 de l'article 119 bis de ce code peut donc satisfaire aux prescriptions de l'article R. 197-3 précité en produisant toutes pièces établissant l'application de cette retenue, pour peu qu'elles précisent la date à laquelle elle a été opérée et l'identité de l'établissement payeur au sens des dispositions des articles 1672 du code général des impôts, 75 de l'annexe II à ce code et 381 A de l'annexe III à ce code.

6. Il résulte de l'instruction que la société SGSS Deutschland Kag GmbH produit les justificatifs permettant d'établir la chaîne de paiement au titre des années 2003 à 2005 à hauteur, respectivement pour chacune des années concernées, des sommes de 18 512,64 euros, 16 545,90 euros et 24 166,27 euros. Par suite, la société requérante a droit à la restitution de la somme de 16 529,35 euros qu'elle demande, en complément de la restitution ordonnée par le tribunal administratif de Montreuil à hauteur de la somme de 42 695,46 euros.

Sur les intérêts moratoires :

7. Les conclusions de la société requérante tendant au versement d'intérêts moratoires sur le fondement de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales sont irrecevables faute de litige né et actuel avec le comptable public, et ne peuvent qu'être rejetées.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la société SGSS Deutschland Kag GmbH est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande à hauteur de la somme de 16 529,35 euros.

Sur les frais liés au litige :

9. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'État le versement à la société SGSS Deutschland KAG GmbH de la somme de 1 500 euros qu'elle demande sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, en l'absence de dépens, il n'y a pas lieu de faire droit à ses conclusions sur ce point.

DÉCIDE :

Article 1er : Il est accordé à la société SGSS Deutschland KAG GmbH agissant pour le compte du fonds Südinvest 76 un remboursement complémentaire des retenues à la source prélevées sur les dividendes de source française distribués au cours des années 2003 à 2005 à concurrence d'un montant total de 16 529,35 euros.

Article 2 : Le jugement n° 1007924 du tribunal administratif de Montreuil du 3 décembre 2019 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à la société SGSS Deutschland KAG GmbH la somme de 1 500 euros qu'elle demande au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société SGSS Deutschland KAG GmbH et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 15 mars 2022, à laquelle siégeaient :

M. Bresse, président de chambre,

Mme Bonfils, première conseillère,

Mme Deroc, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 mars 2022.

La rapporteure,

M.-G. BonfilsLe président,

P. BresseLa rapporteure,

M.-G. BonfilsLa présidente,

I. I. Danielian

La greffière,

A. Audrain-Foulon

La greffière,

A. Audrain FoulonLa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 20VE01123


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE01123
Date de la décision : 31/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-06-01 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Règles générales. - Impôt sur le revenu. - Cotisations d`IR mises à la charge de personnes morales ou de tiers. - Retenues à la source.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Marie-Gaëlle BONFILS
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : CABINET FIDAL DIRECTION INTERNATIONALE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-03-31;20ve01123 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award