Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... C... a demandé au tribunal administratif de Versailles, d'une part, d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2019 par lequel le préfet des Yvelines a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination en cas d'exécution d'office, et, d'autre part, d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer une attestation provisoire de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1907601 du 27 décembre 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Versailles a admis M. B... C..., à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle, et a rejeté le surplus de sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des pièces, enregistrées le 29 janvier 2020, le 1er juin et le 30 juillet 2021, M. B... C..., représenté par Me Emessiene, avocate, demande à la cour :
1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et de désigner Me Emessiene comme avocat ;
2°) d'annuler ce jugement ;
3°) d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2019 ;
4°) d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer une attestation provisoire de séjour conformément aux dispositions de l'article L. 741-1 de la loi du 10 septembre 2018, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que son recours devant la cour nationale du droit d'asile (CNDA) n'était pas tardif dès lors qu'il a valablement saisi le bureau d'aide juridictionnelle de la CNDA par télécopie dès le 29 mai 2019, soit dans le délai de recours prévu, ce qui suspendait ce délai.
Des pièces, enregistrées le 7 janvier 2022, ont été produites par le préfet des Yvelines.
M. A... B... C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 juin 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Bonfils a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... C..., ressortissant soudanais né le 1er janvier 1994 et entré sur le territoire français le 11 juillet 2017 selon ses déclarations, a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile. Cette demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) notifiée à l'intéressé le 28 mai 2019. Par une ordonnance du 20 septembre 2020, le président de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) a rejeté, comme étant irrecevable pour cause de tardiveté, le recours formé par M. B... C.... Par un arrêté du 3 octobre 2019, le préfet des Yvelines a, pour ce motif, refusé de délivrer à M. B... C... un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait susceptible d'être renvoyé en cas d'exécution d'office. M. B... C... fait appel du jugement du 27 décembre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la demande d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire :
2. Par une décision du 19 juin 2020, le président du bureau de l'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Versailles a admis M. B... C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, les conclusions présentées par l'intéressé aux fins d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire sont devenues sans objet.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
3. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...) : (...) / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. (...) ". Aux termes de l'article L. 743-1 du même code : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent ". L'article L. 731-2 dudit code dispose : " La Cour nationale du droit d'asile statue sur les recours formés contre les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (...). A peine d'irrecevabilité, ces recours doivent être exercés dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision de l'office (...). ".
4. Pour rejeter la demande présentée par M. B... C... contre l'arrêté du préfet des Yvelines du 3 octobre 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur la circonstance que le recours intenté par M. B... C... devant la CNDA était tardif en l'état de l'instruction au regard du délai d'un mois prévu par les dispositions de l'article L. 731-2 précitées. Toutefois, par une décision du 31 mai 2021, le Conseil d'Etat a annulé, pour dénaturation des pièces du dossier, l'ordonnance du président de la CNDA du 20 septembre 2019 qui rejetait, comme étant irrecevable pour cause de tardiveté, le recours formé par M. B... C.... Dès lors, l'appelant est fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet des Yvelines s'est fondé sur le caractère tardif du recours qu'il avait intenté devant la CNDA, et a considéré qu'il ne remplissait pas les conditions prévues par l'article L. 313-25 et le 8° de L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour prendre à son encontre l'arrêté du 3 octobre 2019 alors que le rejet de sa demande d'asile n'était pas définitif.
5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. B... C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
6. Aux termes de l'article L. 521-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'enregistrement de sa demande d'asile a été effectué, l'étranger se voit remettre une attestation de demande d'asile dont les conditions de délivrance et de renouvellement sont fixées par décret en Conseil d'Etat. (...) ".
7. Par sa décision du 31 mai 2021, le Conseil d'Etat a renvoyé l'affaire de M. B... C... devant la CNDA. Toutefois, il ressort des pièces produites par le préfet des Yvelines que la CNDA a rejeté la demande d'asile de l'intéressé par une décision du 7 octobre 2021. Si ce dernier a formé une demande de réexamen, l'appelant n'a pas le droit, en application des dispositions de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité, de se voir délivrer l'attestation prévue par l'article L. 521-7 du même code, pour la durée de la procédure de ce réexamen. Par suite, il n'y a pas lieu d'enjoindre au préfet des Yvelines de délivrer sans délai à M. B... C... l'attestation qu'il demande, dans l'attente du réexamen de sa situation par la CNDA.
Sur l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
8. M. B... C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Emessiene, avocate de M. B... C..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État le versement à Me Emessiene de la somme de 1 500 euros.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a plus lieu de se prononcer sur les conclusions de M. B... C... tendant à obtenir le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.
Article 2 : Le jugement n° 1907601 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Versailles du 27 décembre 2019 et l'arrêté du 3 octobre 2019 du préfet des Yvelines sont annulés.
Article 3 : L'État versera à Me Emessiene, avocate de M. B... C..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Emessiene renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... C... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... C..., au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise au préfet des Yvelines.
Délibéré après l'audience du 15 mars 2022, à laquelle siégeaient :
M. Bresse, président de chambre,
Mme Bonfils, première conseillère,
Mme Deroc, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 mars 2022.
La rapporteure,
M.-G. BonfilsLe président,
P. BresseLa greffière,
A. Audrain-Foulon
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour exécution conforme
Le greffier,
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N° 20VE00316