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24/03/2022 | FRANCE | N°19VE00474

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 24 mars 2022, 19VE00474


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Entreprise L. Bouget a demandé au tribunal administratif de Versailles de condamner la commune de Brétigny-sur-Orge à lui verser la somme de 339 095,36 euros au titre du solde du lot n° 6 du marché de construction du groupe scolaire Aimé Césaire, de condamner la commune de Brétigny à lui verser la somme de 638 182,83 euros au titre de ce même marché et de mettre à sa charge le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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n jugement n° 1506298 du 10 décembre 2018, le tribunal administratif de Versailles...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Entreprise L. Bouget a demandé au tribunal administratif de Versailles de condamner la commune de Brétigny-sur-Orge à lui verser la somme de 339 095,36 euros au titre du solde du lot n° 6 du marché de construction du groupe scolaire Aimé Césaire, de condamner la commune de Brétigny à lui verser la somme de 638 182,83 euros au titre de ce même marché et de mettre à sa charge le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1506298 du 10 décembre 2018, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande et a mis à sa charge le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés respectivement les 8 février 2019, 3 mai 2019 et 27 mai 2020, la société Entreprise L. Bouget, représentée par Me Pouilhe, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la commune de Brétigny-sur-Orge à lui verser la somme de 977 218,19 euros avec intérêts à compter du 15 mai 2015 et capitalisation de ces intérêts ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Brétigny-sur-Orge le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif n'a pas statué sur ses conclusions relatives à la révision de prix et aux intérêts moratoires ;

- il n'a pas visé ses conclusions concernant les intérêts moratoires ;

- les pénalités de retard de 107 500 euros n'ont pas été motivées ;

- elles ne sont pas justifiées ; la prolongation des délais d'exécution ne pouvait résulter que d'un avenant ; les retards ne lui sont pas imputables ;

- un trop versé de 147 367,43 euros a été déduit des sommes qui lui sont dues en violation de l'article 13.5 du cahier des clauses administratives générales (CCAG), la commune ayant versé des sommes non dues à la société Sogefi à laquelle l'exposante s'est substituée en cours de chantier ;

- la commune a refusé de prendre en compte certaines prestations en violation de l'article 14 du CCAG ; elle a appliqué les termes d'un avenant n° 2 non accepté ; aucun élément ne permet d'établir que les ordres de service comportant les prix retenus par la commune ont été régulièrement notifiés ; ses devis ont ainsi fait l'objet d'une moins-value de 26 247,65 euros opérée sans justification ; l'état de solde ne retient pas les ordres de service acceptés mais non payés pour 2 508,62 euros ; des travaux supplémentaires s'élevant à la somme de 14 333,78 euros ont été écartés alors qu'ils avaient été réalisés ; la commune n'a fourni aucune précision concernant les devis qu'elle a retenus et ceux qu'elle a écartés ;

- une revalorisation du marché pour 28 745,99 euros est due, l'état de solde mentionnant une revalorisation erronée de 67 026,23 euros alors que seules des revalorisations de 6 043,29 euros ont été effectuées ;

- elle est fondée à demander une révision de prix de 116 526,03 euros en application des articles 10.44 et suivants du CCAG conformément au tableau annexé à son mémoire de réclamation ;

- la retenue pour non livraison de mobilier de 16 018,73 euros a été effectuée tardivement après la réception en violation de l'article 41.5 du CCAG ;

- le chantier a connu un retard imputable à l'absence de direction des opérations de construction ; il en résulte pour elle un préjudice de 518 048 euros imputable à la commune ;

- les intérêts de retard de 3 572,32 euros sont dus, des pénalités de retard ayant été indûment retenues.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 novembre 2019, la commune de Brétigny-sur-Orge, représentée par Me Caston, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, demande à la cour de rejeter la requête et de mettre à la charge de la société Entreprise L. Bouget la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête de la société L. Bouget ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics ;

- l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de Mme Sauvageot, rapporteure publique,

- et les observations de Me Pouilhe, pour la société Entreprise L. Bouget.

Considérant ce qui suit :

1. La société Entreprise L. Bouget relève appel du jugement du tribunal administratif de Versailles du 10 décembre 2018 qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Brétigny-sur-Orge à lui verser la somme totale de 977 278,19 euros au titre du solde du macro-lot n° 6 (aménagements intérieurs - finitions) du marché de construction du groupe scolaire Aimé Césaire à Brétigny-sur-Orge.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance que la société Entreprise L. Bouget a demandé au tribunal administratif de condamner la commune de Brétigny-sur-Orge à lui verser non seulement la somme de 28 745,99 euros au titre de " la revalorisation du marché " mais aussi la somme de 116 526,03 euros au titre de la " révision des prix ". Il ressort de l'examen du jugement attaqué que si le tribunal a jugé que la société requérante n'apportait aucun élément de nature à justifier sa réclamation de la somme de 28 745,99, il a omis de se prononcer sur les conclusions tendant au versement de la somme de 116 526,03 et ne peut être regardé comme les ayant implicitement examinées au point 11 du jugement attaqué. Il y a lieu, dès lors, d'annuler son jugement en tant qu'il n'a pas statué sur ces conclusions.

3. En second lieu, les conclusions de la société Entreprise L. Bouget tendant au versement d'intérêts moratoires sur les pénalités de retard ont été visées par le tribunal, qui y a implicitement mais nécessairement statué en rejetant les conclusions relatives aux pénalités de retard.

4. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu pour la cour de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur les conclusions de la société Entreprise L. Bouget tendant au versement de la somme de 116 526,03 euros au titre de la révision des prix et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur le surplus des conclusions de la requête.

Au fond :

En ce qui concerne les pénalités de retard et les intérêts moratoires y afférents :

5. Aux termes de l'article 20.1 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) du marché litigieux, une pénalité de 500 euros a été stipulée par jour de retard sur l'exécution des travaux du macro-lot n° 6.

6. Lorsque le cocontractant n'est que partiellement responsable d'un retard dans l'exécution du contrat, les pénalités applicables doivent être calculées seulement d'après le nombre de jours de retard imputables au cocontractant lui-même.

7. Il résulte de l'instruction que l'état de solde adressé à la société Entreprise L. Bouget mentionne une pénalité de retard d'exécution d'un montant de 107 500 euros en application des stipulations précitées de l'article 20.1 du CCAP. La commune de Brétigny-sur-Orge soutient qu'elle était fondée à appliquer une pénalité d'un montant de 165 000 euros correspondant à 11 mois de retard et que l'entreprise avait accumulé les retards ainsi qu'il ressortait du compte rendu de chantier du 20 mars 2013.

8. Toutefois, il résulte de l'instruction, notamment des comptes rendus n° 80 et n° 111 établis par l'entreprise en charge de l'ordonnancement, du pilotage et de la coordination les 22 mars 2012 et 29 novembre 2012, qu'une part au moins du retard dans l'exécution des travaux est imputable au titulaire du macro-lot n° 1 et non à la société requérante. La société Entreprise L. Bouget n'étant que partiellement responsable de ce retard, les pénalités applicables doivent être calculées seulement d'après le nombre de jours de retard imputables au cocontractant lui-même. Si la commune soutient qu'elle a fait une application très modérée des pénalités de retard, elle n'apporte aucune précision et justification quant au retard imputable à la société Entreprise L. Bouget. Par ailleurs, si le compte rendu de chantier fait état de retards dans la transmission de documents, ceux-ci sont sans incidence sur le calcul et le bien-fondé des pénalités de retard dans l'exécution des travaux mises à la charge de la société Entreprise L. Bouget. Par suite, cette dernière est fondée à demander la décharge des pénalités de retard d'un montant de 107 500 euros inscrites au débit du décompte du marché. En outre, la société requérante est fondée à demander le versement de la somme de 3 572,32 euros au titre des intérêts moratoires sur pénalités de retard retenues à tort par la commune de Brétigny-sur-Orge, dont celle-ci ne conteste pas le calcul.

En ce qui concerne l'état des acomptes de la société Sogefi :

9. La société Entreprise L. Bouget soutient que l'écart de 146 367,53 euros existant entre le bon d'acompte n° 10 du 6 juillet 2012 et le bon d'acompte n° 11 du 25 juillet 2012, relatifs à la situation de la société Sogefi, n'est pas justifié, cet écart devant lui être reversé, la défaillance de la société Sogefi ayant conduit la société requérante à la remplacer pour l'achèvement des travaux.

10. Toutefois, il ne résulte nullement de l'instruction que l'écart ainsi constaté sur ces bons d'acomptes, à le supposer même erroné, correspond en tout ou partie à des prestations effectuées par la société Entreprise L. Bouget, dont le paiement devrait lui revenir. Les conclusions présentées à ce titre doivent, par suite, être rejetées.

En ce qui concerne les prestations liées à l'avenant n° 2 :

11. Aux termes de l'article 14 du CCAG Travaux applicable au marché litigieux : " 14.1. Le présent article concerne les prestations supplémentaires ou modificatives, dont la réalisation est nécessaire au bon achèvement de l'ouvrage, qui sont notifiées par ordre de service et pour lesquelles le marché n'a pas prévu de prix. (...) 14.4. L'ordre de service mentionné à l'article 14.1, ou un autre ordre de service intervenant au plus tard quinze jours après, notifie au titulaire les prix proposés pour le règlement des travaux nouveaux ou modificatifs. / Ces prix, qui ne sont pas fixés définitivement, sont arrêtés par le maître d'œuvre après consultation du titulaire. Ils sont obligatoirement assortis d'un sous-détail, s'il s'agit de prix unitaires, ou d'une décomposition, s'il s'agit de prix forfaitaires, cette décomposition ne comprenant aucun prix d'unité nouveau dans le cas d'un prix forfaitaire pour lequel les changements présents ne portent que sur les quantités de natures d'ouvrage ou d'éléments d'ouvrage. 14.5. Pour l'établissement des décomptes concernés, le titulaire est réputé avoir accepté les prix qui ont été fixés par l'ordre de service prévu aux articles 14.1 et 14.4, si, dans le délai de trente jours suivant l'ordre de service qui lui a notifié ces prix, il n'a pas présenté d'observation au maître d'œuvre en indiquant, avec toutes justifications utiles, les prix qu'il propose ".

12. La société Entreprise L. Bouget sollicite la condamnation de la commune de Brétigny-sur-Orge à lui verser la somme totale de 26 247,65 euros au titre des travaux supplémentaires nécessaires au bon achèvement de l'ouvrage, notifiés par ordres de service et pour lesquels le marché n'a pas prévu de prix. Elle soutient que les prix mentionnés dans ses devis ont fait l'objet de moins-values injustifiées. En réponse à ce moyen, la commune de Brétigny-sur-Orge indique que les ordres de service notifiés à l'entreprise n'ont fait l'objet d'aucune contestation dans le délai de trente jours prévu par les stipulations précitées de l'article 14.5 du CCAG Travaux et qu'elle a eu connaissance des prix fixés au plus tard le 1er octobre 2012 lorsque l'avenant n° 2 au marché lui a été communiqué.

13. Toutefois, la commune de Brétigny-sur-Orge n'apporte pas la preuve de la date de notification des différents ordres de service au titulaire du marché. En outre, en refusant de signer l'avenant n° 2 au marché, la société Entreprise L. Bouget doit être regardée comme ayant contesté les prix fixés par l'administration. Par suite, la commune ne peut se prévaloir de son acceptation tacite des prix fixés par ordres de service résultant de son absence d'observation dans le délai de trente jours prévu par les stipulations précitées de l'article 14.5 du CCAG Travaux.

14. Il résulte de l'instruction, en particulier des mentions du projet d'avenant n° 2, que la somme sollicitée par la société Entreprise L. Bouget concerne des travaux supplémentaires ou des moins-values demandés par la maîtrise d'œuvre et ayant fait l'objet d'ordres de service notifiés au titulaire du marché. En l'absence de toute justification des réductions de prix ou moins-values résultant de ces ordres de service par rapport aux devis du titulaire, ce dernier est fondé à demander la condamnation de la commune de Brétigny-sur-Orge à lui verser la somme de 26 247,65 euros.

En ce qui concerne un ordre de service non payé :

15. La société Entreprise L. Bouget sollicite la condamnation de la commune de Brétigny-sur-Orge à lui verser la somme de 2 506,82 euros au titre de l'ordre de service n° 113 relatif à la pose d'un vitrage et de menuiserie en aluminium.

16. Toutefois, elle n'établit pas que les travaux correspondant à ce devis ont été effectués, ce que conteste la commune, en se bornant à invoquer l'existence d'une décision de réception partielle de la salle à manger en date du 14 mars 2013 avec effet au 18 mars 2013, l'ordre de service ayant été signé postérieurement le 22 mars 2013. Dans ces conditions, la société Entreprise L. Bouget n'est pas fondée à solliciter la condamnation de la commune à lui verser la somme de 2 506,82 euros à ce titre.

En ce qui concerne les travaux supplémentaires réalisés sans ordre de service :

17. Le caractère global et forfaitaire du prix du marché ne fait pas obstacle à ce que l'entreprise cocontractante sollicite une indemnisation au titre de travaux supplémentaires effectués, même sans ordre de service, dès lors que ces travaux étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art.

18. La société Entreprise L. Bouget fait valoir qu'en ce qui concerne les travaux supplémentaires réalisés sans ordre de service, elle a présenté des devis d'un montant total de 57 050,55 euros et n'a obtenu qu'une somme de 42 716,77 euros sans explication concernant les devis retenus et les devis rejetés et le motif de ce rejet. Toutefois, alors même que le titulaire aurait réalisé les travaux correspondant aux devis rejetés, il ne résulte pas de l'instruction que ceux-ci étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art. Par suite, les conclusions de la société Entreprise L. Bouget tendant au versement de la somme de 14 333,78 euros au titre des travaux supplémentaires réalisés sans ordre de service doivent être rejetées.

En ce qui concerne la revalorisation du marché et la révision des prix :

19. La société Entreprise L. Bouget sollicite, d'une part, le versement de la somme de 28 745,99 euros au titre de la " revalorisation du marché " conformément aux stipulations des articles 10.44 à 10.46 du CCAP et, d'autre part, la somme de 116 526,03 euros au titre de la " révision des prix ". La commune de Brétigny-sur-Orge soutient que ces demandes sont fondées sur les mêmes stipulations du CCAP et qu'elles ne sont pas justifiées.

20. Toutefois, si ces demandes doivent être regardées comme faisant double emploi entre elles, la commune de Brétigny-sur-Orge ne conteste pas le bien-fondé du tableau de calcul des révisions joint à la réclamation de la société Entreprise L. Bouget selon lequel celles-ci s'établissent à la somme totale de 116 526,03 euros. Ainsi, cette somme doit être substituée à celle de 67 026,23 euros mentionnée dans l'état de solde au titre de la revalorisation du marché pour les travaux effectués par la société requérante. Par suite, la société Entreprise L. Bouget est fondée à demander la condamnation de la commune de Brétigny-sur-Orge à lui verser la somme de 49 499,80 euros correspondant à la différence entre 116 526,03 euros et 67 026,23 euros.

En ce qui concerne la retenue pour non livraison de mobilier :

21. Aux termes de l'article 41.5 du CCAG Travaux applicable au marché litigieux : " S'il apparaît que certaines prestations prévues par les documents particuliers du marché et devant encore donner lieu à règlement n'ont pas été exécutées, le maître de l'ouvrage peut décider de prononcer la réception, sous réserve que le titulaire s'engage à exécuter ces prestations dans un délai qui n'excède pas trois mois. La constatation de l'exécution de ces prestations doit donner lieu à un procès-verbal dressé dans les mêmes conditions que le procès-verbal des opérations préalables à la réception prévu à l'article 41. 2 ".

22. La réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserve et qu'elle met fin aux rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage. Si elle interdit, par conséquent, au maître de l'ouvrage d'invoquer, après qu'elle a été prononcée, et sous réserve de la garantie de parfait achèvement, des désordres apparents causés à l'ouvrage ou des désordres causés aux tiers, dont il est alors réputé avoir renoncé à demander la réparation, elle ne met fin aux obligations contractuelles des constructeurs que dans cette seule mesure. Ainsi la réception demeure, par elle-même, sans effet sur les droits et obligations financiers nés de l'exécution du marché, à raison notamment de retards ou de travaux supplémentaires, dont la détermination intervient définitivement lors de l'établissement du solde du décompte définitif. Seule l'intervention du décompte général et définitif du marché a pour conséquence d'interdire au maître de l'ouvrage toute réclamation à cet égard.

23. Il résulte de l'instruction qu'une retenue d'un montant de 16 018,73 euros a été effectuée par la commune de Brétigny-sur-Orge sur le solde du marché, une partie du mobilier n'ayant pas été livrée. Toutefois, la réception a été prononcée le 25 avril 2013, sans réserve en ce qui concerne le mobilier. Cette réception a mis fin aux rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage. Elle interdit, par conséquent, au maître de l'ouvrage d'invoquer, après qu'elle a été prononcée, et sous réserve de la garantie de parfait achèvement, des désordres apparents causés à l'ouvrage ou des désordres causés aux tiers, dont il est alors réputé avoir renoncé à demander la réparation. La réception a mis fin dans cette mesure aux obligations contractuelles des constructeurs. Par suite, en l'absence de toute réserve lors de la réception en ce qui concerne la livraison du mobilier, la société Entreprise L. Bouget est fondée à soutenir que c'est à tort qu'une retenue d'un montant de 16 018,73 euros a été effectuée concernant une partie du mobilier non livrée.

En ce qui concerne le retard dans la direction du chantier :

24. Les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat, soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l'estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en œuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics.

25. Si une part du retard dans l'exécution des travaux est imputable au titulaire du macro-lot n° 1 ainsi qu'il est dit ci-dessus et si ce retard a entraîné l'application de son encontre de pénalités de retard, ces circonstances ne suffisent nullement à établir l'existence d'une faute de la commune de Brétigny-sur-Orge dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché de nature à engager sa responsabilité à l'égard de la société requérante.

26. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société Entreprise L. Bouget est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Il y a lieu de condamner la commune de Brétigny-sur-Orge à lui verser la somme totale de 202 838,5 euros au titre du solde du macro-lot n° 6 du marché de construction du groupe scolaire Aimé Césaire.

Sur les frais liés à l'instance :

27. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la société Entreprise L. Bouget, qui n'est pas la partie perdante. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Brétigny-sur-Orge le versement à cette dernière de la somme de 2 000 euros sur ce fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1506298 du tribunal administratif de Versailles du 10 décembre 2018 est annulé.

Article 2 : La commune de Brétigny-sur-Orge est condamnée à verser à la société Entreprise L. Bouget la somme de de 202 838,5 euros au titre du solde du macro-lot n° 6 du marché de construction du groupe scolaire Aimé Césaire.

Article 3 : La commune de Brétigny-sur-Orge versera la somme de 2 000 euros à la société Entreprise L. Bouget au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Entreprise L. Bouget et à la commune de Brétigny-sur-Orge.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Signerin-Icre, présidente de chambre,

M. Camenen, président assesseur,

M. Toutain, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 mars 2022.

Le rapporteur,

G. A...La présidente,

C. SIGNERIN-ICRE

La greffière,

C. YARDE

La République mande et ordonne au préfet de l'Essonne, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 19VE00474


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE00474
Date de la décision : 24/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-02 Marchés et contrats administratifs. - Exécution financière du contrat. - Règlement des marchés.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Gildas CAMENEN
Rapporteur public ?: Mme SAUVAGEOT
Avocat(s) : POUILHE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-03-24;19ve00474 ?
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