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11/03/2022 | FRANCE | N°20VE02501

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 11 mars 2022, 20VE02501


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 18 octobre 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français, dans le délai de trente jours, et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1912926 du 23 juillet 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregist

rés respectivement le 25 septembre et le 14 octobre 2020, M. C..., représenté par Me Walther, avo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 18 octobre 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français, dans le délai de trente jours, et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1912926 du 23 juillet 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés respectivement le 25 septembre et le 14 octobre 2020, M. C..., représenté par Me Walther, avocate, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les premiers juges ont commis une erreur de droit en créant une équivalence entre l'absence de bénéfice effectif d'un traitement approprié et l'existence de circonstances exceptionnelles empêchant l'accès aux soins ;

- la décision de refus de séjour est entachée d'une erreur de droit car le préfet a appliqué les dispositions de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en recherchant l'existence de circonstances exceptionnelles empêchant l'accès à son traitement, alors que les dispositions applicables au litige imposaient au préfet de se prononcer sur le bénéfice effectif d'un traitement approprié eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays d'origine ;

- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale dès lors qu'elle se fonde sur la décision de refus de séjour qui est elle-même illégale ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de destination -est illégale dès lors qu'elle se fonde sur l'obligation de quitter le territoire français qui est elle-même illégale ;

- elle est entachée d'insuffisance de motivation ;

- elle méconnaît l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Fremont a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant congolais (RDC), né le 7 mai 1972, qui a déclaré être entré en France le 29 septembre 2012, a sollicité le 18 février 2019 le renouvellement de son titre de séjour en invoquant le bénéfice des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 18 octobre 2019, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français, dans le délai de trente jours, et a fixé le pays de destination. M. C... fait appel du jugement du 23 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. M. C... soutient que les premiers juges auraient commis une erreur de droit en créant une équivalence entre l'absence de bénéfice effectif d'un traitement approprié et l'existence de circonstances exceptionnelles empêchant l'accès aux soins. Toutefois, ce moyen qui se rattache au bien-fondé de la décision juridictionnelle est sans incidence sur la régularité du jugement.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision de refus de séjour :

3. En premier lieu, aux termes du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est, sous réserve d'une menace pour l'ordre public, délivrée de plein droit à " l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ". L'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ".

4. Si M. C... soutient que la décision est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet a appliqué les dispositions de l'article L.313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version antérieure à loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 en recherchant l'existence de circonstances exceptionnelles empêchant l'accès à son traitement, alors qu'il aurait dû se prononcer sur le bénéfice effectif d'un traitement approprié eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays d'origine conformément aux dispositions de cet article applicables au présent litige. Toutefois, il ressort des termes de l'arrêté en litige qu'en rejetant la demande de titre de séjour aux motifs que le traitement approprié existe dans son pays d'origine et qu'il ne justifie pas de circonstances exceptionnelles empêchant son accès aux soins appropriés au Congo, le préfet a ainsi examiné si l'intéressé pouvait bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine eu égard aux caractéristiques du système de santé de ce pays, conformément aux dispositions applicables du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précitées. Par suite, le moyen tiré de l'existence de cette erreur de droit doit être écarté.

5. En second lieu, M. C... soutient que l'arrêté en litige méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les dispositions de l'arrêté du 5 janvier 2017 susmentionné, dès lors que souffrant d'un diabète de type 2 depuis 2013 traité par Metformine, sitaglipine, gliclazide et insuline glargine et d'un état de stress post traumatique aggravé par des troubles anxio-dépressifs récurrents attesté par deux certificats médicaux du 22 novembre 2019 et 5 octobre 2020, et traité par les médicaments Lysansia, Tercian, et Cymbalta, les médecins du collège de l'OFII auraient inexactement apprécié son impossibilité d'accéder effectivement aux soins appropriées dans son pays d'origine. Il fait valoir, en outre, que le système de santé en République démocratique de Congo est particulièrement défaillant notamment en matière de soins psychiatriques et souffre également de la pénurie de médicaments . Toutefois, d'une part, les deux certificats médicaux peu circonstanciés précités qu'il produit, qui se bornent à indiquer que M. C... est suivi depuis plusieurs années pour un état de stress post traumatique aggravé par des troubles anxio-dépressifs récurrents, qui seraient en rapport avec des sévices dont il aurait été victime au Congo lors d'emprisonnement, sont insuffisamment probants pour établir qu'un retour dans son pays représenterait un facteur majeur d'aggravation de ces troubles. En outre, sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et des apatrides du 28 janvier 2013, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 17 octobre 2013, de même que sa demande de réexamen, rejetée par une décision de l'OFPRA du 19 mai 2014, confirmée par une décision de la CNDA le 22 mai 2015. D'autre part, les éléments produits par l'intéressé relatif au système de santé au Congo, et en particulier l'étude du 19 juin 2018 de l'OSAR, est par trop générale pour démontrer l'impossibilité pour l'intéressé d'accéder à un traitement approprié à son état de santé au Congo. Enfin, l'intéressé ne démontre pas que la liste nationale des médicaments essentiels en RDC qui mentionne, notamment, l'accès à la Metformine, l'insuline et certains psychotropes et médicaments stabilisant l'humeur, traitant la dépression et le désordre de panique, ne comporterait pas de médicaments basés sur des molécules analogues à celles contenus dans les médicaments qui lui ont été prescrits en France. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers doit être écarté.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. M. C... fait valoir qu'il réside en France depuis 2012 et qu'il y exerce une activité professionnelle. Il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est célibataire et sans charge de famille sur le territoire français, et n'allègue pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, où résident son ancienne compagne, une de ses filles et ses trois autres enfants. A... outre, s'il produit un contrat de travail à durée indéterminée conclu le 30 janvier 2019 afin d'occuper un emploi de préparateur de commande, ainsi que des bulletins de salaire d'août à octobre 2019, cette circonstance ne suffit pas à démontrer une insertion suffisamment ancienne et pérenne sur le territoire national. Il suit de là que la décision de refus de titre de séjour contestée n'a pas porté au droit de M. C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celui tiré de l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation sur ce point doivent être écartés.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

8. Il résulte de ce qui a été précédemment exposé que M. C... n'établit pas que la décision de refus de séjour serait entachée d'illégalité. Par suite, il n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision d'obligation de quitter le territoire français à raison de cette prétendue illégalité.

9. Le moyen tiré de l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

10. Il résulte de ce qui a été précédemment exposé que M. C... n'établit pas que la décision d'obligation de quitter le territoire français serait entachée d'illégalité. Par suite, il n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision fixant le pays de destination à raison de cette prétendue illégalité.

11. Enfin, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". L'article 3 de cette convention stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

12. M. C... ne produit aucun élément probant de nature à démontrer qu'il serait exposé à des risques actuels, personnels et réels de peines ou traitements inhumains ou dégradants en cas de retour au Congo (RDC), alors que tant sa demande d'asile que sa demande de réexamen ont été rejetées par décisions de l'office français de protection des réfugiés et apatrides des 28 janvier 2013 et 19 mai 2014, confirmées par des décisions de la Cour nationale du droit d'asile des 17 octobre 2013 et 22 mai 2015. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que le moyen tiré de l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation sur ce point doivent être écartés.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées à titre accessoire à fin d'injonction et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

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N° 20VE02501


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE02501
Date de la décision : 11/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Marc FREMONT
Rapporteur public ?: Mme MARGERIT
Avocat(s) : WALTHER

Origine de la décision
Date de l'import : 22/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-03-11;20ve02501 ?
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