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24/02/2022 | FRANCE | N°20VE00230

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 24 février 2022, 20VE00230


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) Red Bend Software a demandé au tribunal administratif de Versailles, dans le dernier état de ses écritures, de prononcer, au besoin après expertise, le remboursement du crédit d'impôt pour dépenses de recherche qu'elle a déclaré au titre de l'année 2011 à raison des dépenses de recherche qu'elle a engagées, à hauteur de 159 843 euros, et de mettre à la charge de l'Etat une somme, à définir en cours d'instance, au titre de l'article L. 761-1

du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1606551 du 19 novembre 201...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) Red Bend Software a demandé au tribunal administratif de Versailles, dans le dernier état de ses écritures, de prononcer, au besoin après expertise, le remboursement du crédit d'impôt pour dépenses de recherche qu'elle a déclaré au titre de l'année 2011 à raison des dépenses de recherche qu'elle a engagées, à hauteur de 159 843 euros, et de mettre à la charge de l'Etat une somme, à définir en cours d'instance, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1606551 du 19 novembre 2019, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 janvier 2020 et, après clôture de l'instruction, le 9 décembre 2021, la SASU Red Bend Software, représentée par Me Nas, avocat, demande à la cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer le remboursement du crédit d'impôt pour dépenses de recherche sollicité ou, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise visant à confirmer le caractère innovant des travaux au regard de l'état de l'art ;

3° de mettre à la charge de l'État une somme de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont entaché de contradiction le jugement contesté, ne pouvaient lui opposer une absence d'analyse et de synthèse alors que la pièce n° 4 produite comportait une présentation analytique et synthétique des travaux de recherche en cause, ont à tort retenu comme grief le fait que des justifications complémentaires ont été apportées postérieurement à l'année 2011, ont à tort retenu une lecture très formaliste de sa requête et ont également à tort estimé que le développement de virtualisation avant 2011 ferait par principe obstacle au caractère innovant des travaux menés au cours de cette même année ;

- ils ont, à tort, refusé de faire droit à sa demande d'expertise alors qu'il ressort du jugement qu'ils s'estimaient insuffisamment éclairés sur les faits en cause ;

- le service a, à tort, refusé de faire droit à sa demande au titre de l'année 2011, alors que, sur son site de RetD Redbend dédié à la virtualisation, 21 ingénieurs en développement, architectes logiciels et intégrateurs sur 24 salariés effectuent des recherches pour appliquer ce concept dans le monde de l'informatique embarquée et que, dans la continuité des années précédentes, ils travaillent sur le projet vLX et son évolution laquelle implique des recherches de RetD et le développement de maquettes de faisabilité ; elle entend, en effet, anticiper la croissance du recours à la virtualisation dans le monde de l'embarqué, en particulier, dans les infrastructures et terminaux mobiles, et, à cette fin, prolonger le concept et développer le projet vLX, et investir en France en augmentant significativement sa masse salariale dédiée à ce projet ; c'est plus spécifiquement le projet " Virtualogix VLX for Mobile Handsets " également appelé " Jaluna/Osware on ARM " qui a été développé au cours de l'année 2011 selon les axes suivants : 1. Axes RetD " fonctionnalités nouvelles " et 2. Axes RetD " optimisation des performances ".

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Deroc,

- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SA SASU Red Bend Software, société ayant au titre de l'année 2011 pour activité l'édition de logiciels, systèmes et réseaux, fait appel du jugement du 19 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à ce que lui soit restitué un crédit d'impôt pour dépenses de recherche d'un montant de 159 843 euros dont elle s'estime bénéficiaire au titre de l'année 2011 à raison de dépenses engagées la même année. Elle fait valoir, devant le juge d'appel, que ces dépenses auraient trait à un projet d'application de la solution vLX au domaine du téléphone mobile.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, la SASU Red Bend Software fait valoir que les premiers juges ne pouvaient lui opposer une absence d'explication alors que la pièce n° 4 produite " Rapport complémentaire de justification CIR 2012 " comportait une présentation analytique et synthétique des travaux de recherche en cause, qu'ils ont à tort retenu comme grief le fait que des justifications complémentaires ont été apportées postérieurement à l'année 2011, qu'ils ont à tort retenu une lecture très formaliste de sa requête et, enfin, qu'ils ont à tort estimé que le développement de la virtualisation avant 2011 ferait par principe obstacle au caractère innovant des travaux menés au cours de cette même année. Toutefois, l'ensemble de ces arguments, qui ont trait au raisonnement tenu par les premiers juges, procède d'une critique du bien-fondé du jugement et non de sa régularité. Par suite, le jugement, qui est d'ailleurs suffisamment motivé sur ces points, n'est, à cet égard, pas entaché d'irrégularité.

3. En second lieu, lorsqu'il est suffisamment informé en l'état du dossier pour trancher le litige, le tribunal administratif n'est jamais tenu d'ordonner une expertise. En l'espèce, il ressort des motifs de fond retenus par le tribunal que celui-ci, eu égard à ces motifs, a entendu, par voie de conséquence, écarter la demande d'expertise présentée par la SASU Red Bend Software comme sans intérêt pour la solution du litige. D'une part, il ne résulte pas du jugement, et notamment du fait qu'ils ont pu opposer à l'intéressée l'absence de précisions suffisantes d'un rapport produit, que les premiers juges ne se seraient pas estimés suffisamment informés pour pouvoir se prononcer en connaissance de cause sur le litige qui leur était soumis, ce qu'ils ont d'ailleurs fait. D'autre part, la circonstance invoquée que ces juges se seraient fondés sur des motifs de droit et de fait erronés est sans incidence sur la régularité de ce jugement. Par suite, le moyen soulevé par la société requérante sur ce point ne peut qu'être écarté dans ses deux branches.

Sur le bien-fondé des impositions :

4. Aux termes du I de l'article 244 quater B du code général des impôts : " Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...) ". Aux termes de l'article 49 septies F de l'annexe III à ce code : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : / a. Les activités ayant un caractère de recherche fondamentale, (...) / b. Les activités ayant le caractère de recherche appliquée (...) / (...) / c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté ". Ne peuvent être prises en compte pour le bénéfice du crédit d'impôt recherche que les dépenses exposées pour le développement ou l'amélioration substantielle de matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services, dont la conception ne pouvait être envisagée, eu égard à l'état des connaissances techniques à l'époque considérée, par un professionnel averti, par simple développement ou adaptation de ces techniques.

5. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si les opérations réalisées par le contribuable entrent dans le champ d'application du crédit d'impôt recherche eu égard aux conditions dans lesquelles sont effectuées ces opérations, et, notamment, d'examiner si les opérations de développement expérimental en cause présentent un caractère de nouveauté au sens de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts.

6. Pour soutenir qu'elle a mené en 2011 des opérations de recherches scientifiques et techniques lui ouvrant droit au crédit d'impôt pour dépenses de recherche, en application des dispositions précitées, la SASU Red Bend Software fait état d'un projet de virtualisation vLX, initié par la société Jaluna dans les années 2003/2004, rachetée par VirtualLogix, elle-même rachetée par la société requérante en 2010, devant être, en l'espèce, appliqué dans le monde de l'informatique embarquée qui comporte de fortes contraintes. Elle fait état de deux axes de recherche et développement portant sur les " fonctionnalités nouvelles " et sur " l'optimisation des performances ", et se traduisant par six sous-projets.

7. Toutefois, contrairement à ce que soutient la SASU Red Bend Software, il ne résulte pas de l'instruction, notamment des documents produits par elle avant la clôture de l'instruction, que les dépenses avancées puissent être regardées comme ayant été engagées en vue de la production, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, de nouveaux procédés, systèmes ou services, ou pour une amélioration de ceux-ci pouvant être qualifiée de substantielle, c'est-à-dire excédant la mise en œuvre, la combinaison, ou le perfectionnement de techniques existantes.

8. En effet et d'une part, les documents produits à l'appui de ses écritures par la SASU Red Bend Software sont sans lien avec les six sous-projets dont elle fait état mais portent essentiellement sur une " architecture OSware sur Intel IA-32 VT-x " et un projet " VirtualLOgix VLX pour appareils mobiles v3.0 ".

9. D'autre part, si la société requérante produit un " Rapport complémentaire de justification CIR 2011 ", faisant état de difficultés et contraintes rencontrées par le développement de la virtualisation en général et dans le secteur automobile, il ne résulte pas de l'instruction, en l'absence de tout élément explicite en ce sens et de toute précision sur ce point, que les démarches effectuées en vue de leur résolution ou dépassement, d'ailleurs peu explicitées, permettraient une amélioration substantielle d'un état de l'art, au demeurant très sommairement résumé, ou le dépassement d'un réel verrou technologique identifié, et non un simple développement ou une adaptation des connaissances et techniques existantes, alors que le ministre oppose l'absence de nouveauté ou d'amélioration par rapport aux logiciels existants. Par suite, les opérations déclarées par la SASU Red Bend Software ne peuvent être regardées comme des opérations de développement expérimental présentant un caractère de nouveauté et susceptibles d'ouvrir droit au crédit d'impôt recherche, pour l'application des dispositions précitées de l'article 244 quater B du code général des impôts et de l'article 49 septies F de l'annexe III à ce code. Par suite, elle n'est pas fondée à demander la restitution du crédit d'impôt pour dépenses de recherche au titre de ce projet pour l'année 2011.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la SASU Red Bend Software n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SASU Red Bend Software est rejetée.

2

N° 20VE00230


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE00230
Date de la décision : 24/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-08 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Bénéfices industriels et commerciaux. - Calcul de l'impôt.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Muriel DEROC
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : NAS

Origine de la décision
Date de l'import : 01/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-02-24;20ve00230 ?
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