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10/02/2022 | FRANCE | N°20VE00232

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 10 février 2022, 20VE00232


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Sonepar Ile-de-France a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge partielle des cotisations à la cotisation foncière des entreprises, à la taxe spéciale d'équipement et à la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie, et des intérêts de retard correspondants, auxquelles elle reste assujettie au titre des années 2011 et 2012 pour un établissement situé 13 rue Clément Ader à Fleury-Mérogis (Essonne) et d'ordonner que

lui soit versée une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Sonepar Ile-de-France a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge partielle des cotisations à la cotisation foncière des entreprises, à la taxe spéciale d'équipement et à la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie, et des intérêts de retard correspondants, auxquelles elle reste assujettie au titre des années 2011 et 2012 pour un établissement situé 13 rue Clément Ader à Fleury-Mérogis (Essonne) et d'ordonner que lui soit versée une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1708588 du 22 novembre 2019, le tribunal administratif de Versailles a constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer à concurrence des dégrèvements intervenus en cours d'instance, a exclu, pour la détermination de l'assiette de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe spéciale d'équipement et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie assignée au titre des années 2011 et 2012 pour son établissement situé 13 rue Clément Ader à Fleury-Mérogis, les immobilisations possédées par la société propriétaire de l'ensemble immobilier, à hauteur de 39 934 euros, a prononcé la décharge correspondante et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 janvier 2020, la SAS Sonepar Ile-de-France, représentée par Me Ralkos, avocate, demande à la cour :

1° d'annuler l'article 4 de ce jugement ;

2° à titre principal, de prononcer la décharge des impositions contestées pour un montant de 237 161 euros au titre de l'année 2011 et de 246 547 euros au titre de l'année 2012, à raison de l'évaluation de son établissement de Fleury-Mérogis selon les dispositions de l'article 1498 du code général des impôts ;

3° à titre subsidiaire, de prononcer la décharge des impositions contestées pour un montant de 8 463 euros au titre de l'année 2011 et de 8 603 euros au titre de l'année 2012, résultant de l'exclusion, pour le calcul de la valeur locative des biens passibles de texte foncière, des changements de caractéristiques physiques figurant à son bilan ;

4° de mettre à la charge de l'État une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, le jugement est entaché d'une erreur de qualification juridique des faits et insuffisamment motivé au regard de la nature de l'activité exercée par l'établissement, faute d'expliquer en quoi les éléments de fait relevés devraient conduire à conclure que les moyens techniques sont importants et que le rôle de installations techniques, matériels et outillages est prépondérant ;

- à titre subsidiaire, le jugement est entaché de dénaturation et a inversé la charge de la preuve au regard des modalités d'évaluation selon la méthode comptable en ce qui concerne la qualification des immobilisations figurant à son bilan et le fait qu'elles ne dépasseraient pas le seuil de 10% prévu au 1. du I. de l'article 1517 du code général des impôts.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Deroc,

- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société par actions simplifiée (SAS) Sonepar Ile-de-France, qui exploite un établissement situé sur une plateforme de stockage appelée Alliance Logistics au 13, rue Clément Ader à Fleury-Mérogis (Essonne), est spécialisée dans le commerce de gros interentreprises de matériel électrique. A cette fin, elle y exerce une activité de stockage et distribution de matériels électriques à ses agences d'Ile-de-France et aux professionnels du secteur. La SAS Sonepar Ile-de-France fait appel du jugement du 22 novembre 2019 du tribunal administratif de Versailles, en tant qu'après avoir constaté un non-lieu partiel à statuer, exclu, pour la détermination de l'assiette de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe spéciale d'équipement et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie assignée au titre des années 2011 et 2012 pour son établissement, les immobilisations possédées par la société propriétaire, à hauteur de 39 934 euros et prononcé la décharge correspondante, il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge partielle des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises, de taxe spéciale d'équipement et de taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012, à l'issue d'une vérification de comptabilité, à raison du rehaussement de ses bases d'imposition par application de l'article 1499 du code général des impôts.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Contrairement à ce que soutient la SAS Sonepar Ile-de-France, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments avancés devant eux, ont suffisamment motivé leur jugement dès lors qu'ils explicitent, en son point 5., les éléments de fait au regard desquels ils ont estimé que les moyens techniques mis en œuvre sur son site de Fleury-Mérogis revêtaient un caractère important et prépondérant, sans qu'il y ait lieu, pour eux, de faire état d'un " raisonnement " ou de se référer à des éléments de comparaison.

3. D'autre part, les circonstances que les premiers juges auraient commis une erreur de qualification juridique des faits de l'espèce et dénaturé ceux-ci en se prononçant ainsi et, par ailleurs, inversé la charge de la preuve et dénaturé les pièces du dossier s'agissant de l'appréciation des modalités d'évaluation des bases taxables, ont trait au bien-fondé du raisonnement suivi par le tribunal et sont donc sans incidence sur la régularité du jugement attaqué.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la méthode d'évaluation :

4. La SAS Sonepar Ile-de-France fait valoir, à titre principal, que son établissement de Fleury-Mérogis ne devait pas être évalué selon les dispositions de l'article 1499 du code général des impôts mais selon celles de l'article 1498, par application de la méthode " par comparaison " et sollicite en ce sens la réduction de la valeur locative des biens passibles de taxe foncière à 379 325 euros pour la détermination des impositions supplémentaires dues au titre de l'année 2011 et la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt mises à sa charge au titre de l'année 2012.

5. En vertu de l'article 1467 du code général des impôts pour le calcul de la contribution foncière des entreprises, la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe. Les règles suivant lesquelles est déterminée la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties sont définies à l'article 1496 du code général des impôts pour les " locaux affectés à l'habitation ou servant à l'exercice d'une profession autre qu'agricole, commerciale, artisanale ou industrielle ", à l'article 1498 du même code pour " tous les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 " et à l'article 1499 du même code pour les " immobilisations industrielles ", qui énonce : " La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'Etat (...) ". Revêtent un caractère industriel, au sens de ces articles, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant.

6. Par ailleurs, au titre des années en litige, l'article 1600 du code général des impôts prévoit une taxe additionnelle à la taxe professionnelle, devenue cotisation foncière des entreprises, répartie entre tous les redevables de cette taxe proportionnellement à leur base d'imposition afin de pourvoir aux dépenses ordinaires des chambres de commerce et d'industrie, et il résulte des articles 1609 G et 1607 bis du même code que le montant de la taxe spéciale d'équipement dépend de celui de la cotisation foncière des entreprises.

7. D'une part, il est constant que l'activité de la SAS Sonepar Ile-de-France au sein de l'entrepôt de Fleury-Mérogis, qui consiste dans la réception et le déchargement des marchandises, leur stockage, la préparation de commandes, le dispatching des colis vers la zone d'expédition et leur expédition, afin d'assurer la livraison de matériels électriques à ses agences d'Ile-de-France et aux professionnels du secteur, ne constitue pas une activité de fabrication ou de transformation de biens corporels mobiliers.

8. D'autre part, il résulte de l'instruction que les moyens techniques mis en œuvre sur le site d'une surface près de 24 000 m² dont 19 436 m² d'entrepôt couvert, 1 715 m² de stockage extérieur, et une mezzanine à usage de stockage de 2 250 m², se composent, d'une part, de multiples matériels fixes et mobiles de stockage, de levage et d'adressage informatisé, tels que des racks sur six niveaux, casiers, palettiers d'un prix de revient de 940 000 euros et tourets, d'autre part, d'environ 18 quais de déchargement, 47 engins de manutention tels que des transpalettes, chariots élévateurs, gerbeurs et chariots frontaux d'un prix de revient de 118 000 euros, et d'un système de picking - adressage par ordinateur- soit 138 matériels de lecteurs de codes-barres et de voice picking, et enfin d'un convoyeur desservant plusieurs cellules de l'entrepôt. Il résulte, par ailleurs, des photographies produites par la requérante devant les premiers juges que ces matériels occupent la quasi-intégralité des surfaces et que certains équipements " lourds " tels que le convoyeur ou une machine à cercler supposent des installations techniques fixes d'une consistance significative comme des barrières. Si la société soutient qu'il convient de rapprocher la valeur des moyens techniques de celle de l'immeuble abritant l'activité, hors terrain, de 8 314 640 euros, elle se borne, en tout état de cause, à faire état de la somme de 1 058 000 euros correspondant aux seuls engins de manutentions et rayonnages, à l'exclusion des autres équipements susmentionnés dont elle n'indique pas la valeur. Dans ces conditions, les moyens techniques employés, qui visent tant la réception, préparation et répartition des commandes que le stockage, peuvent être regardés comme revêtant un caractère important. Sont sans incidence à cet égard la présence de 140 personnes sur le site et la faible autonomie des moyens techniques utilisés, qui obligerait à une rotation en vue de leur charge.

9. Enfin, la SAS Sonepar Ile-de-France fait valoir que le travail manuel est prépondérant dans son activité, dès lors qu'elle y employait 140 personnes en 2009 et 134 personnes en 2010 dont respectivement 111 et 106 affectées à la réception des marchandises, et la préparation, répartition et expédition des commandes, certaines étapes étant réalisées pour partie, voire essentiellement, de façon manuelle. Toutefois, il résulte de l'instruction que les moyens techniques qu'elle met en œuvre permettent à la société de traiter, avec le concours d'outils informatiques et automatisés, près de 5 600 colis par jour, soit une préparation d'un colis par personne toutes les cinq minutes et, ainsi, d'optimiser les différentes étapes du travail, le suivi des commandes, l'espace de stockage ou encore les délais de livraison. Le ministre fait valoir à cet égard et sans être contesté que la force physique n'est pas suffisante pour réaliser les opérations de stockage et déstockage, que la productivité du site dépend largement de cette sophistication et que le système de " voice picking " permet de réduire considérablement le temps de traitement des commandes. Dès lors, compte tenu de leur place dans ce processus, les éléments techniques susmentionnés doivent être regardés comme ayant un rôle prépondérant dans l'activité que la requérante exerce, alors même qu'elle aurait recours à une main d'œuvre également importante. Dans ces conditions, l'importance de ces moyens techniques et le rôle prépondérant que leur utilisation joue dans l'exercice par la société de son activité au sein de l'établissement de Fleury-Mérogis confèrent à celui-ci, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Versailles, un caractère industriel, au sens et pour l'application de l'article 1499 du code général des impôts.

En ce qui concerne les modalités d'évaluation selon la méthode comptable :

10. Aux termes du 1. du I. de l'article 1517 du code général des impôts, afférent notamment à la taxe foncière sur les propriétés bâties, dans sa version alors en vigueur : " Il est procédé, annuellement, à la constatation des constructions nouvelles et des changements de consistance ou d'affectation des propriétés bâties et non bâties. Il en va de même pour les changements de caractéristiques physiques ou d'environnement quand ils entraînent une modification de plus d'un dixième de la valeur locative ". Il résulte de ces dispositions que les changements de caractéristiques physiques ou les changements d'environnement des propriétés bâties doivent être pris en compte, pour la mise à jour de la valeur locative, dans le cas où ils entraînent, les uns ou les autres, à eux seuls, une modification de plus d'un dixième de cette valeur.

11. La SAS Sonepar Ile-de-France fait valoir, à titre subsidiaire, que le service a, à tort, inclus dans ses bases imposables des immobilisations présentant la nature de changements de caractéristiques physiques et entraînant des modifications qui ne dépassent pas le seuil de 10% prévu au 1. du I. de l'article 1517 du code général des impôts, de sorte qu'elle doit être déchargée de la somme de 8 463 euros au titre de l'année 2011 et de la somme de 8 603 euros au titre de l'année 2012. Toutefois, elle se borne à se prévaloir d'un tableau listant ces immobilisations avec pour seules références un " n° fiche ", un " libellé ", l'année correspondante et la " base comptable ", à l'exclusion de tout élément permettant d'identifier la nature des opérations correspondantes alors qu'elle est seule en mesure de produire de tels éléments de nature à établir qu'il s'agit de travaux entrainant des changements de caractéristiques physiques représentant moins de 10 % de la valeur locative de son établissement. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 1517 du code général des impôts ne peut, dès lors, qu'être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Sonepar Ile-de-France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Sonepar Ile-de-France est rejetée.

2

N° 20VE00232


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE00232
Date de la décision : 10/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-04 Contributions et taxes. - Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. - Taxe professionnelle.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Muriel DEROC
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : CABINET NICOROSI

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-02-10;20ve00232 ?
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