Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) Groupe Telecom Yvelines a, par deux instances distinctes, demandé respectivement au tribunal administratif de Versailles, d'une part, de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 août 2012 et des amendes qui lui ont été infligées au titre des années 2010 et 2011 sur le fondement de l'article 1737 du code général des impôts et, d'autre part, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 août 2012 et des amendes qui lui ont été infligées au titre des années 2010 et 2011 sur le fondement de l'article 1737 du code général des impôts.
Par un jugement nos 1703766 et 1706237 du 11 juin 2019, le tribunal administratif de Versailles a fait droit à ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 8 août 2019, 23 novembre 2020 et 18 janvier 2021, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de remettre à la charge de la SARL Groupe Télecom Yvelines les impositions, en droits et pénalités, et les amendes dont le tribunal administratif de Versailles a prononcé la décharge.
Il soutient que les premiers juges ont, à tort, estimé que la société avait été privée, au cours des opérations de contrôle d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur alors que le moyen ainsi soulevé par la requérante n'était assorti d'aucune pièce utile et probante.
..........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Deroc,
- les conclusions de M. Huon, rapporteur public,
- et les observations de Me Halimi, substituant Me Zrari, avocate de la SARL Groupe Telecom Yvelines.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Groupe Telecom Yvelines, qui a pour activité le commerce de standards téléphoniques ainsi que l'achat et la vente de tous produits et services liés à la téléphonie et à la communication, a fait l'objet de deux vérifications de comptabilité au titre, respectivement, de la période du 1er janvier au 31 décembre 2009 et de celle du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, étendue en matière de taxe sur la valeur ajoutée au 31 août 2012, à l'issue desquelles elle a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et à des amendes sur le fondement de l'article 1737 du code général des impôts. Le ministre de l'action et des comptes publics fait appel du jugement du 11 juin 2009 par lequel le tribunal administratif de Versailles a prononcé la décharge de ces impositions supplémentaires et amendes et mis à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de général des impôts.
Sur le motif retenu par le tribunal :
2. Aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " I. - Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables. / (...) ". Dans le cas où la vérification de comptabilité d'une société a été effectuée, soit, comme il est de règle, dans ses propres locaux, soit, si son dirigeant ou représentant l'a expressément demandé, dans les locaux du comptable auprès duquel sont déposés les documents comptables, il appartient au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat avec les représentants de la société. Lorsqu'une entreprise, bien qu'invitée à le faire par l'administration, n'a pas désigné une personne chargée de la représenter pour suivre les opérations de contrôle, elle n'est pas fondée à soutenir qu'elle a été privée, du fait de l'absence d'une telle personne, d'un débat oral avec le vérificateur.
3. La circonstance, à la supposer même établie, que les opérations de vérification intervenues sur place auraient été essentiellement conduites avec l'une des salariées de la SARL Groupe Telecom Yvelines, simple assistante commerciale et non avec une personne qui aurait eu qualité pour la représenter, est en toute hypothèse inopérante dès lors qu'il n'est ni établi, ni même allégué, que la société requérante n'aurait pas été destinataire, conformément aux dispositions applicables, d'un avis de vérification accompagné de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié laquelle prévoyait, dans son millésime d'alors, la possibilité, pour le gérant, de se faire assister d'un conseil pouvant le représenter en cas de mandat à cet effet. Au demeurant, il résulte des pièces du dossier que ce gérant a été présent lors des interventions des 8 novembre 2012 et des réunions de synthèse des deux vérifications de comptabilité menées, qu'il a échangé par courriel avec le vérificateur et été porté en copie de courriels échangés entre son comptable et ce dernier, que la société n'établit, ni même n'allègue, qu'il n'aurait pas été mesure d'assister aux autres opérations de contrôle menées pendant les très nombreuses interventions sur place de l'agent vérificateur, ni que ce dernier se serait refusé à tout échange ou toute possibilité d'échange avec lui. Par suite, la SARL Groupe Telecom Yvelines, faute d'apporter la preuve qui lui incombe, n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait été privée d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur.
4. Par suite, le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a retenu ce moyen pour faire droit à la demande de décharge présentée par la SARL Groupe Telecom Yvelines.
5. Il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens présentés en première instance et en appel par la SARL Groupe Telecom Yvelines.
Sur les moyens des parties, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel :
En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :
S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée collectée :
6. D'une part, l'administration n'ayant pas procédé à une reconstitution de chiffre d'affaires mais s'étant bornée à rapprocher le chiffre d'affaires comptabilisé et celui mentionné sur les déclarations modèle CA3, le moyen tiré de ce qu'en l'absence de remise en cause du caractère régulier, sincère et probant de sa comptabilité, la reconstitution de chiffre d'affaires serait " principalement viciée " est inopérant.
7. D'autre part, aux termes de l'article 269 du code général des impôts : " 1. Le fait générateur de la taxe se produit : / a) Au moment où la livraison, l'acquisition intracommunautaire du bien ou la prestation de services est effectué ; / (...) / 2. La taxe est exigible : / a) Pour les livraisons et les achats visés au a du 1 et pour les opérations mentionnées aux b et d du même 1, lors de la réalisation du fait générateur ; / (...) / b bis) Pour les prestations de services pour lesquelles la taxe est due par le preneur en application du 2 de l'article 283, lors du fait générateur, ou lors de l'encaissement des acomptes ; / c) Pour les prestations de services autres que celles visées au b bis, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits. / (...) ".
8. La SARL Groupe Telecom Yvelines fait valoir que le service a, à tort, mis à sa charge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée en estimant que son activité relevait du régime des " ventes " prévu au a) du 2. de l'article 269 du code général des impôts et non de celui des prestations de services. Toutefois, en se bornant à faire valoir que son activité vise " l'achat et la vente de tous produits et services liés à la téléphonie et à la télécommunication ", que cet énoncé ne permet pas de déterminer si son activité prépondérante est constituée par des ventes ou des services et que le service ne se serait pas livré à une reconstitution de son chiffre d'affaires, elle n'apporte pas la preuve, qui lui incombe en application de l'article R.*194-1 du livre des procédures fiscales du fait de l'acceptation de ce chef de redressement, de ce que, pour déterminer l'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée collectée, seuls ses encaissements, tels que comptabilisés, auraient dû être pris en compte, alors que, d'une part, le ministre fait valoir que lors de la première intervention sur place le représentant de la société a indiqué déclarer la taxe au moment de la facturation et que, d'autre part, le service pouvait, pour faire application du a) du 2. de l'article 269, se borner à rapprocher les produits figurant au compte d'exploitation comptabilisés au poste " ventes de marchandises " des opérations imposables mentionnées sur les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée.
S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée déductible :
9. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. / 3. La déduction de la taxe ayant grevé les biens et les services est opérée par imputation sur la taxe due par le redevable au titre du mois pendant lequel le droit à déduction a pris naissance. / II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures (...) ".
10. En premier lieu, il résulte de l'instruction qu'à l'occasion des opérations de contrôle, le vérificateur a constaté l'existence d'une écriture de taxe sur la valeur ajoutée à régulariser, passée au compte 44564001 au 31 décembre 2011 pour un montant total de 82 451 euros. A l'issue de ces opérations, il a été convenu d'analyser les écarts comptabilité/CA3 et de " régulariser " ce qui s'avérait justifié, à savoir un montant total de 72 566 euros correspondant à l'écriture de 82 451 euros susmentionnée dont il est enlevé la somme de 9 885 euros comptabilisée à tort au débit du compte 44571 " TVA collectée " au lieu du compte 4456 " TVA déductible ". Le service a, par suite, procédé à des rappels d'un montant de 12 588 euros au titre de l'année 2010 et de 59 978 euros au titre de l'année 2011.
11. D'une part, pour contester le montant de 59 978 euros rappelé par le service, la SARL Groupe Telecom Yvelines ne peut utilement faire valoir, ainsi qu'elle l'a fait devant les premiers juges, qu'elle " relève du régime des prestations de services en ce qui concerne l'exigibilité de la TVA ", qu'il " convient de retenir la TVA déductible selon les décaissements réalisés " et que, sa taxe déductible s'élevant, pour l'année 2011, à 254 908,15 euros pour un montant porté sur les déclarations modèle CA3 est de 303 158 euros, l'excédent de déduction se serait que de 48 249,85 euros, alors au surplus et d'une part, qu'elle n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations et, d'autre part, qu'ainsi qu'il a été rappelé au point précédent, le service s'est borné à rappeler un montant de taxe à régulariser figurant dans les comptes de la société.
12. D'autre part, pour contester les rappels mis en conséquence à sa charge, la SARL Groupe Telecom Yvelines fait également valoir l'absence de taxe à régulariser, les opérations relevées par le service ne reflétant que leur mauvaise comptabilisation lors du contrôle et ces erreurs ayant été corrigées ainsi qu'en attesterait un audit de la société Business Consult. Toutefois et alors même qu'il aurait été réalisé en collaboration avec un expert-comptable soumis à des obligations particulières, il est constant que ce document, d'ailleurs non produit devant le juge, consiste en une simple attestation établie pour les besoins de la cause indiquant qu'aucune taxe n'était à régulariser à la clôture des exercices, la taxe sur la valeur ajoutée à décaisser étant soldée. Dès lors, en l'absence d'élément probant justifiant l'absence de taxe à régulariser, c'est à bon droit que le service a procédé aux rappels contestés.
13. En second lieu, à l'issue des opérations de vérification, l'administration a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à des factures émises au cours des années 2010 et 2011 par la SARL Ordinata compte tenu de leur caractère de complaisance ou fictif.
14. D'une part, en vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui n'est pas le fournisseur réel de la marchandise ou de la prestation effectivement livrée ou exécutée. Dans le cas où l'auteur de la facture est régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés, assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée et se présente comme tel à ses clients, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y est mentionnée, d'établir qu'il s'agit d'une facture de complaisance et que le contribuable le savait ou ne pouvait l'ignorer. Si l'administration apporte des éléments suffisants en ce sens, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur cette opération, sans qu'il ne puisse être exigé de lui des vérifications qui ne lui incombent pas.
15. Pour regarder certaines des factures Ordinata comptabilisées par la société comme étant de complaisance, l'administration, qui ne conteste pas l'inscription de la société Ordinata au registre du commerce et son assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée, a relevé qu'elles ne permettaient pas de connaître précisément le travail réalisé, que les documents prévus à l'article D. 8222-5 du code du travail n'ont pu être fournis au vérificateur, qu'aucun planning, correspondance commerciale ou décompte des heures payées au sous-traitant n'a été présenté, et que les paiements ont été effectués par chèques bancaires à des personnes autres que celle à l'origine des factures présentées. Elle a également relevé, à la suite de l'exercice de droits de communication, que la SARL Ordinata avait indiqué n'avoir réalisé aucune prestation, ni effectué aucune facturation pour la société requérante sur la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 de sorte que les factures à son en-tête comptabilisées ne peuvent correspondre à des prestations réalisées par celle-ci et que les chèques émis par l'intéressée ne sont pas la contrepartie d'opérations réalisées au nom du fournisseur inscrit en comptabilité. L'administration apporte ainsi des éléments suffisants permettant de penser que les factures en cause revêtaient le caractère de factures de complaisance. La société requérante, qui se borne à contester la valeur probante de la réponse apportée par la SARL Ordinata au moment même de sa liquidation, à faire valoir l'absence d'élément factuel venant la corroborer et, devant les premiers juges, à évoquer des délégations et cessions de créance, n'apporte aucune justification utile quant à l'auteur réel des opérations en litige. Dans ces conditions, l'administration établit que les factures en litige étaient des factures pour partie de complaisance, et que la société requérante ne pouvait l'ignorer pour avoir émis des chèques à l'ordre de bénéficiaires différents de l'entreprise mentionnée sur les factures présentées. Par suite, l'administration a pu régulièrement refuser d'admettre la déduction de taxe sur la valeur ajoutée correspondante et procéder aux rappels contestés.
16. D'autre part, il résulte également des dispositions mentionnées au point 14. qu'un assujetti n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations, la taxe portée sur des factures correspondant à des biens ou à des prestations de services qui ne lui ont pas été effectivement fournis.
17. Par les mêmes éléments que ceux rappelés au point 15., l'administration doit être regardée comme apportant des éléments suffisants permettant de penser que les factures émises au cours des années 2010 et 2011 par la SARL Ordinata et correspondant à des chèques émis par la société requérante au profit de l'ex-épouse de son gérant, Mme B..., ne correspondaient pas à des opérations réelles mais fictives, soit un montant de 3 344,48 euros. La SARL Groupe Télécom Yvelines, qui fait état des mêmes éléments que ceux précédemment mentionnés s'agissant des factures de complaisance, n'apporte pas de justification utile quant à la réalité des opérations en litige. Dans ces conditions, l'administration établit que les factures en litige étaient des factures fictives. Par suite, l'administration a pu régulièrement refuser d'admettre la déduction de taxe sur la valeur ajoutée correspondante et procéder aux rappels contestés.
En ce qui concerne les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés :
18. Aux termes du 1. de l'article 39 du code général des impôts, rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) ". Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du même code que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite à l'administration, si elle s'y croit fondée, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.
19. D'une part, le service a remis en cause la déduction de charges comptabilisées au titre des exercices clos en 2010 et 2011 à défaut de pièces justifiant ces écritures, pour des montants de 2 712 et 22 878 euros. La SARL Groupe Telecom Yvelines se bornant à faire valoir une présomption d'engagement des charges dans l'intérêt de l'entreprise, elle n'apporte devant le juge aucun élément de nature à justifier de la correction de telles écritures. Dans ces conditions, le service a pu, à bon droit, procéder à des rectifications à ce titre. Par ailleurs, faute d'apporter de tels éléments, la société requérante ne saurait utilement invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, la réponse ministérielle faite à M. A..., député, publiée le 8 juillet 1954 au Journal officiel des débats de l'Assemblée nationale, ni les commentaires administratifs publiés au BOFiP sous la référence BOI-BIC-CHG-10-20-20-20140519 § 50 qui ont trait à la déduction des frais de voyage, réception et représentation des chefs d'entreprise.
20. D'autre part, le service a également remis en cause la déduction de charges d'un montant total de 3 344,48 euros au titre de l'exercice clos en 2010 motif pris du caractère fictif des deux factures " Ordinata " correspondantes. Il a relevé en ce sens que la réalité des prestations afférentes n'avait pu être établie en renvoyant aux éléments rappelés ci-dessus, c'est-à-dire au fait que les factures ne permettaient pas de connaître précisément le travail réalisé, que les documents prévus à l'article D. 8222-5 du code du travail n'ont pu être fournis au vérificateur, qu'aucun planning, correspondance commerciale ou décompte des heures payées au sous-traitant n'a été présenté, que les paiements ont été effectués par chèques bancaires à l'ex-épouse de son gérant, Mme B..., et que la SARL Ordinata avait indiqué n'avoir réalisé aucune prestation, ni effectué aucune facturation pour la société requérante sur la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011. Dans ces conditions, alors que la SARL Groupe Telecom Yvelines se borne à faire valoir de nouveau l'insuffisance de la réponse de la SARL Ordinata et l'existence de paiements ainsi que de factures, et alors qu'elle se bornait à faire valoir devant les premiers juges l'absence de recherche par le service d'une éventuelle cession ou délégation de créance consentie par le sous-traitant, l'administration fiscale était fondée à réintégrer les montants afférents à ces deux factures dans les résultats imposables de la société requérante, au titre des exercices en litige.
S'agissant de l'amende prévue à l'article 1737 du code général des impôts :
21. Aux termes du I. de l'article 1737 du code général des impôts : " Entraîne l'application d'une amende égale à 50 % du montant : / 1. Des sommes versées ou reçues, le fait de travestir ou dissimuler l'identité ou l'adresse de ses fournisseurs ou de ses clients, les éléments d'identification mentionnés aux articles 289 et 289 B et aux textes pris pour l'application de ces articles ou de sciemment accepter l'utilisation d'une identité fictive ou d'un prête-nom. / 2. De la facture, le fait de délivrer une facture ne correspondant pas à une livraison ou à une prestation de service réelle / (...) ".
22. En premier lieu, il résulte de l'instruction que le service a appliqué l'amende prévue au 1. du I. de l'article 1737 du code général des impôts à raison des factures de complaisance comptabilisées par la société requérante. Il résulte de ces dispositions que l'administration peut mettre l'amende ainsi prévue à la charge de la personne qui a délivré la facture ou à la charge de la personne destinataire de la facture si elle établit que la personne concernée a soit travesti ou dissimulé l'identité, l'adresse ou les éléments d'identification de son client ou de son fournisseur, soit accepté l'utilisation, en toute connaissance de cause, d'une identité fictive ou d'un prête-nom.
23. Il résulte de ce qui précède que la SARL Groupe Telecom Yvelines n'est pas fondée à contester cette amende au motif qu'elle ne serait pas à l'origine de la facturation en cause. Elle n'est pas davantage fondée à la contester en remettant en cause le caractère complaisant de la facturation du fait de l'insuffisance de l'attestation de la SARL Ordinata alors qu'ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que les factures en cause ont été établies par une personne qui n'est pas le fournisseur réel de la marchandise ou de la prestation effectivement livrée ou exécutée. Enfin, en relevant que la SARL Groupe Telecom Yvelines, qui avait recours à ces prestations de sous-traitance, n'a pas procédé aux vérifications qui lui incombaient en vertu de l'article L. 8222-1 du code du travail et qu'elle réglait ces factures en émettant des chèques à l'ordre de bénéficiaires autres que son sous-traitant, le service établit qu'elle a sciemment accepté que ses fournisseurs utilisent, sur leurs factures, une identité fictive. L'intéressée ne peut sérieusement faire valoir, à cet égard, ne pas avoir dissimulé l'identité de son fournisseur, la SARL Ordinata, mais avoir seulement, en vertu d'un " mécanisme de délégation " dont elle ne justifie pas, ni ne précise d'ailleurs la nature, apuré la dette de son sous-traitant auprès de ses propres créanciers. Par suite, la SARL Groupe Telecom Yvelines n'est pas fondée à contester l'amende litigieuse.
24. En second lieu, il résulte de l'instruction que le service a appliqué l'amende prévue au 2. du I. de l'article 1737 du code général des impôts à raison des factures fictives comptabilisées par la société requérante. Toutefois, il résulte de ces dispositions qu'une telle amende ne peut être mise à la charge que de la personne qui a délivré la facture fictive. Dans ces conditions et dès lors qu'à aucun moment le ministre ne soutient que la société requérante serait en réalité à l'origine des facturations litigieuses, la SARL Groupe Telecom Yvelines est fondée à en demander la décharge, soit une somme totale de 2 000 euros.
25. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles a prononcé la décharge sollicitée, à l'exception de l'amende mise à la charge de la SARL Groupe Telecom Yvelines sur le fondement du 2. du I. de l'article 1737 du code général des impôts. Enfin, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie principalement perdante dans la présente instance, la somme que la SARL Groupe Telecom Yvelines demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens
DÉCIDE :
Article 1er : Les impositions et amendes dont le tribunal administratif de Versailles a prononcé la décharge sont remises à la charge de la SARL Groupe Telecom Yvelines, à l'exception de l'amende prononcée sur le fondement du 2. du I. de l'article 1737 du code général des impôts.
Article 2 : Le jugement nos 1703766 et 1706237 du 11 juin 2019 du tribunal administratif de Versailles est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions d'appel présentées par le ministre de l'action et des comptes publics ainsi que celles présentées par la SARL Groupe Telecom Yvelines au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
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N° 19VE02895