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08/02/2022 | FRANCE | N°20VE00907

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 08 février 2022, 20VE00907


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Deka Investment GmbH, agissant pour le compte du fonds A-DEG-DIM-Fonds, a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer le remboursement des retenues à la source prélevées sur les dividendes de source française reçus par ce fonds au cours des années 2002 et 2003 à hauteur respectivement de 12 986,86 et de 32 538,30 euros.

Par un jugement n° 1007125 du 19 novembre 2019, le tribunal administratif de Montreuil, après avoir donné acte du désistement partiel des conclusions

aux fins de remboursement des retenues à la source prélevées sur les dividendes d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Deka Investment GmbH, agissant pour le compte du fonds A-DEG-DIM-Fonds, a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer le remboursement des retenues à la source prélevées sur les dividendes de source française reçus par ce fonds au cours des années 2002 et 2003 à hauteur respectivement de 12 986,86 et de 32 538,30 euros.

Par un jugement n° 1007125 du 19 novembre 2019, le tribunal administratif de Montreuil, après avoir donné acte du désistement partiel des conclusions aux fins de remboursement des retenues à la source prélevées sur les dividendes de source française reçus au cours de l'année 2002, a rejeté le surplus de la requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 mars 2020 et le 23 septembre 2020, la société Deka Investment GmbH, représentée par Me Robert, avocat, demande à la cour :

1° d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il rejette le surplus des conclusions de sa demande ;

2° de prononcer le remboursement des retenues à la source d'un montant total de 32 538,30 euros prélevées sur les dividendes de source française reçus au cours de l'année 2003 ;

3° d'ordonner le versement d'intérêts moratoires afférents à ce montant en application de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ;

4° de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que le remboursement des autres frais de procédure.

Elle soutient que :

- les premiers juges n'ont pas tenu compte des justificatifs produits dans son mémoire du 12 septembre 2019 ;

- elle est fondée à obtenir la restitution de la retenue à la source qu'elle a acquittée en 2003 sur le fondement de l'article 119 bis du code général des impôts alors en vigueur, dès lors que la Cour de justice de l'Union européenne et le Conseil d'Etat ont reconnu que ces dispositions étaient contraires à la libre circulation des capitaux ; elle a produit les pièces permettant de justifier que le fonds A-DEG-DIM-Fonds était comparable à un organisme de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) de droit français.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 85/611/CE du Conseil du 20 décembre 1985 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) alors en vigueur, dite directive " UCITS " ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne C-338/11 à C-347/11 du 10 mai 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Beaujard, président,

- et les conclusions de M. Met, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Deka Investment GmbH, agissant pour le compte du fonds A-DEG-DIM-Fonds, établi en Allemagne, a demandé, en vain, à l'administration fiscale la restitution de la retenue à la source prélevée sur les dividendes de source française qui lui ont été versés en 2003 pour un montant de 32 538,30 euros. Elle relève appel du jugement du 19 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Montreuil, a rejeté sa demande tendant à la restitution de cette somme.

Sur la régularité du jugement :

2. La société Deka Investment GmbH soutient que le tribunal n'a pas tenu compte des justificatifs apportés dans son mémoire produit devant lui le 12 septembre 2019. Il ressort toutefois du jugement attaqué que ce mémoire a été visé et que les éléments produits ont été analysés par le tribunal. Le moyen doit par suite être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

3. D'une part, en vertu des dispositions combinées du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige, et de l'article 187 du même code, les revenus distribués par des sociétés françaises aux OPCVM non-résidents de France sont imposés au taux de 25 %, par application d'une retenue à la source, alors que de tels revenus ne sont pas imposés lorsqu'ils sont versés à des OPCVM résidents de France.

4. D'autre part, le 1 de l'article 56 du traité instituant la Communauté européenne, devenu article 63 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, stipule que : " 1. Dans le cadre des dispositions du présent chapitre, toutes les restrictions aux mouvements de capitaux entre les États membres et entre les États membres et les pays tiers sont interdites ". Aux termes de l'article 58 du traité instituant la Communauté européenne, devenu article 65 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " 1. L'article 56 ne porte pas atteinte au droit qu'ont les États membres : / a) d'appliquer les dispositions pertinentes de leur législation fiscale qui établissent une distinction entre les contribuables qui ne se trouvent pas dans la même situation en ce qui concerne leur résidence ou le lieu où leurs capitaux sont investis / (...) 3. Les mesures et procédures visées aux paragraphes 1 et 2 ne doivent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée à la libre circulation des capitaux et des paiements telle que définie à l'article 56. ". Aux termes de l'article 4 de la directive 85/611/CEE du Conseil du 20 décembre 1985 dispose que : " 1. Un OPCVM doit, pour exercer son activité, être agréé par les autorités de l'État membre où l'OPCVM est situé, ci-après dénommées " autorités compétentes ". / Cet agrément vaut pour tous les États membres (...) ".

5. Il résulte des stipulations précitées du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, telles qu'elles ont été interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne, notamment par ses décisions C-338/11 à C-347/11 du 10 mai 2012, que l'imposition, sur le fondement du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts, de fonds étrangers qui sont dans une situation comparable à un organisme de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) français constitue une entrave à la libre circulation des capitaux.

6. Pour établir que le fonds A-DEG-DIM-Fonds était dans une situation comparable à un OPCVM français, la société Deka Investment GmbH produit, pour la première fois en appel une attestation de l'autorité fédérale de supervision financière allemande (BaFin) du 11 septembre 2020 permettant d'établir que le fonds A-DEG-DIM-Fonds avait été renommé DEG-I-Fonds après une fusion intervenue le 1er avril 2006, et que ce fonds était comparable à un OPCVM français. Toutefois, il est constant que les pièces produites ne justifient les montants en litige qu'à hauteur de la somme de 31 682,87 euros.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Deka Investment GmbH est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande de remboursement des retenues à la source prélevées sur les dividendes de source française reçus au cours de l'année 2003 à concurrence de la somme de 31 682,87 euros, le surplus de la requête devant être rejeté.

Sur la demande tendant au versement d'intérêts moratoires :

8. Les conclusions de la société Deka Investment GmbH tendant au paiement de ces intérêts sont sans objet et, par suite, irrecevables en l'absence de litige né et actuel relatif à un refus de paiement des intérêts moratoires dus aux contribuables au titre de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Sur les frais liés au litige :

9. Dans les circonstances de l'espèce, compte-tenu de la production tardive par la requérante des pièces nécessaires à la solution du litige, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la société Deka Investment GmbH présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Il est accordé à la société Deka Investment GmbH la restitution de la somme de 31 682,87 euros prélevée sur les dividendes de source française reçus par le fonds A-DEG-IM-Fonds au cours de l'année 2003.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

2

N°20VE00907


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20VE00907
Date de la décision : 08/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-06-01 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Règles générales. - Impôt sur le revenu. - Cotisations d`IR mises à la charge de personnes morales ou de tiers. - Retenues à la source.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Patrice BEAUJARD
Rapporteur public ?: M. MET
Avocat(s) : CABINET FIDAL DIRECTION INTERNATIONALE

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-02-08;20ve00907 ?
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