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25/01/2022 | FRANCE | N°20VE02677

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 25 janvier 2022, 20VE02677


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 16 octobre 2019 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit.

Par un jugement n° 1901525 du 22 septembre 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête

et un mémoire, enregistrés le 20 octobre 2020 et le 22 décembre 2021, M. C..., représenté par Me ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 16 octobre 2019 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit.

Par un jugement n° 1901525 du 22 septembre 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 20 octobre 2020 et le 22 décembre 2021, M. C..., représenté par Me Biju-Duval, avocat, demande à la cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° d'annuler l'arrêté contesté ;

3° d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans le délai de deux mois et de lui délivrer dans le délai de quinze jours une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il a omis de statuer sur le moyen relatif à l'insuffisance de motivation en droit de la décision portant obligation de quitter le territoire ;

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une erreur de droit ou à tout le moins d'une erreur manifeste d'appréciation eu égard au sérieux de ses études ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée en droit en ce qu'elle ne précise pas le motif de l'éloignement ;

- elle est illégale, par la voie de l'exception, du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale par la voie de l'exception, du fait de l'illégalité de la mesure d'éloignement ;

- le renvoi au Rwanda l'exposerait à un risque de traitements inhumains et dégradants en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu :

- le procès- verbal d'audience ;

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code d'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience en application des dispositions de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative.

Le rapport de Mme Dorion a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant rwandais né le 4 janvier 1991, entré en France le 18 septembre 2011 avec un visa "étudiant", a disposé de titres de séjour en cette qualité régulièrement renouvelés jusqu'au 23 décembre 2016, date à laquelle le préfet du Loiret lui en refusé le renouvellement pour absence de sérieux des études et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours. Cet arrêté n'ayant pas été exécuté, M. C... a poursuivi ses études en France et demandé le 10 juillet 2018 la délivrance d'un nouveau titre de séjour étudiant ou son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 16 octobre 2019, le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit à défaut de départ volontaire. M. C... relève appel du jugement du 22 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de ces trois décisions.

Sur la régularité du jugement :

2. Le tribunal a omis de statuer sur le moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de l'insuffisance de motivation en droit de la décision portant obligation de quitter le territoire français. M. C... est par suite fondé à soutenir que le jugement est irrégulier en tant qu'il statue sur la légalité de cette décision.

3. Il y lieu pour la cour de statuer, par la voie de l'évocation, sur la demande d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire et, par l'effet dévolutif de l'appel, sur les autres conclusions de la requête.

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

4. En premier lieu, aux termes du I de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant ". (...) ". Aux termes de l'article L. 313-2 de ce code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire et celle de la carte de séjour pluriannuelle (...) sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1 (...) ".

5. Il est constant que, le renouvellement du titre de séjour mention " étudiant " de M. C... ayant été refusé par une décision définitive du 23 décembre 2016, la demande d'admission au séjour qu'il a présentée le 10 juillet 2018 constituait une nouvelle demande de titre soumise à la condition de visa prévue par l'article L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile. M. C..., qui s'est maintenu en France malgré la mesure d'éloignement dont il a fait l'objet en 2016, ne justifie pas être en possession de ce visa. Le préfet du Val-d'Oise pouvait, pour ce seul motif, lui refuser ce titre de séjour.

6. En second lieu, aux termes de L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier que la demande de titre de séjour présentée par M. C... a également été examinée par le préfet du Val-d'Oise sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettent d'admettre au séjour à titre exceptionnel les étrangers qui justifient de motifs exceptionnels. Pour justifier de tels motifs, le requérant fait valoir que, s'il a mis plusieurs années à obtenir sa première année de licence, il a obtenu ses deuxième et troisième années de licence de mathématiques appliquées aux sciences économiques (MASE) à l'issue de l'année universitaire 2016-2017, la maîtrise " Innovation, entreprise et société " en 2017-2018 avec mention assez bien et un Master 2 " management des PME et mondialisation " au titre de l'année 2018-2019 avec mention bien. Toutefois, à la date de l'arrêté contesté pris par le préfet le 16 octobre 2019, M. C... avait en principe achevé ses études sanctionnées par un Bac + 5 et ne justifiait pas d'une inscription universitaire au titre de l'année 2019/2020, ni d'un projet professionnel en France. Il est par ailleurs célibataire sans enfant et ne se prévaut que de la présence en France de ses frères Shema Hervé C..., également étudiant en France depuis 2014 et titulaire d'un titre de séjour, Serge C... Rugero, présent en France depuis seulement deux mois et Hirwa Olivier A..., avec lequel il n'établit pas son lien de parenté, alors qu'il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résident ses parents et où lui-même a vécu jusqu'à l'âge de 20 ans. En outre, le préfet a constaté que l'intéressé avait produit de faux relevés de compte bancaire pour justifier de ses ressources. Dans ces conditions, en estimant qu'il ne pouvait être regardé comme justifiant de considérations humanitaires ou de circonstances exceptionnelles d'admission au séjour, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle et familiale de M. C....

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :

8. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I (...) ".

9. En premier lieu, Mme B..., adjointe au chef du bureau du contentieux des étrangers de la préfecture du Val-d'Oise, a reçu, par un arrêté n° 19-078 du 2 septembre 2019 du préfet du Val-d'Oise régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département du Val-d'Oise, délégation de signature à l'effet de signer, notamment, les obligations de quitter le territoire, assorties ou non d'un délai de départ volontaire. Le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque par conséquent en fait.

10. En deuxième lieu, si l'arrêté contesté ne précise pas que la mesure d'éloignement est prise sur le fondement du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce motif se déduit de l'objet de cet arrêté qui rejette la demande de délivrance d'un titre de séjour de M. C... et prescrit son éloignement. Il est par suite suffisamment motivé en droit comme en fait.

11. En troisième lieu, dès lors que les moyens dirigés contre la décision portant refus de séjour ne sont pas fondés, le moyen tiré de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire par exception d'illégalité du refus de séjour, ne peut être écarté.

12. En dernier lieu, il y a lieu d'écarter le moyen d'erreur manifeste d'appréciation soulevé à l'encontre de la mesure d'éloignement pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

13. La décision obligeant M. C... à quitter le territoire français n'étant pas entachée d'illégalité, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la mesure d'éloignement ne peut qu'être écarté.

14. Enfin, si le requérant fait valoir qu'il risque d'être exposés à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine au motif que les expatriés de retour au Rwanda sont suspectés de collusion avec l'opposition en exil, les termes généraux des rapports des organismes Amnesty international et Human rights watch ne permettent pas de tenir pour établie la réalité des craintes qu'il encourrait à titre personnel. La réalité de ces craintes ne peut pas davantage être déduite de la reconnaissance de la qualité de réfugié obtenue par M. D... A..., avec lequel son lien de parenté n'est au demeurant pas établi. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit dès lors être écarté.

15. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Il s'ensuit que sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1901525 du 22 septembre 2020 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé en tant qu'il statue sur la demande d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel et la demande de M. C... sont rejetés.

2

N° 20VE02677


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20VE02677
Date de la décision : 25/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Odile DORION
Rapporteur public ?: M. MET
Avocat(s) : BIJU-DUVAL

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-01-25;20ve02677 ?
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