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14/12/2021 | FRANCE | N°19VE03129

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 14 décembre 2021, 19VE03129


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, à titre principal, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010, ainsi que des intérêts de retard, amendes et pénalités correspondant à ces impositions, à titre subsidiaire, de prononcer, d'une part, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mises à sa charge

au titre de revenus d'origine indéterminée des années 2009 et 2010 et qui relèvent e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, à titre principal, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010, ainsi que des intérêts de retard, amendes et pénalités correspondant à ces impositions, à titre subsidiaire, de prononcer, d'une part, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mises à sa charge au titre de revenus d'origine indéterminée des années 2009 et 2010 et qui relèvent en réalité de la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ou des bénéfices non commerciaux, et, d'autre part, la décharge des majorations et amendes ou, à tout le moins, la décharge de la majoration de 10 % prévue par l'article 1758 A du code général des impôts.

Par un jugement n° 1802381 du 11 juillet 2019, le tribunal administratif de Montreuil l'a déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010, ainsi que des pénalités correspondantes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 septembre 2019 et le 19 novembre 2020, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rétablir M. et Mme C... aux rôles d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des années 2009 et 2010 à concurrence des montants dont ils ont été déchargés en première instance ;

3°) à titre subsidiaire, de rétablir M. et Mme C... aux rôles d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des années 2009 et 2010 à hauteur des droits et pénalités correspondants aux rehaussements liés aux crédits d'impôt pour l'habitation principale et au quotient familial, et en conséquence de réformer le jugement.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'erreur de droit en ce que l'agent qui a exercé le droit de communication en application des articles L. 81, L. 85 et R.* 81-1 du livre des procédures fiscales était compétent pour ce faire ; en outre, le champ des dispositions de l'article L. 83 du livre des procédures fiscales a été respecté ;

- en tout état de cause, c'est à tort que les premiers juges ont prononcé une décharge totale des impositions dès lors que l'irrégularité de procédure relevée ne concernait que les crédits bancaires imposés en tant que revenus d'origine indéterminée, à l'exclusion de la remise en cause de plusieurs crédits d'impôt et de la rectification du quotient familial ;

- le moyen tiré du détournement de procédure quant à la mise en œuvre de la procédure de demande de justifications doit être écarté dès lors que le service ne disposait pas de justificatifs ni d'éléments suffisants pour rattacher avec certitude les crédits bancaires à une catégorie de revenus particulière ; en effet, d'une part, les sommes imposées comme revenus d'origine indéterminée ne provenaient pas d'un compte courant d'associé ; et d'autre part, les sommes perçues en qualité de prête-nom de son frère, et dont il a été justifié à hauteur de 84 500 euros, n'ont pas été imposées ; il n'est pas justifié de l'origine et de la nature du surplus des sommes en litige permettant de les rattacher à une catégorie de revenus ;

- la preuve de l'exagération des bases d'imposition reste à la charge du contribuable en application des articles L. 193 et R.* 193-1 du livre des procédures fiscales ;

- en l'absence de justificatifs sur la nature et les motifs des versements bancaires, la somme de 50 200 euros perçue en 2009 doit être taxée dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée ; à titre subsidiaire, si la cour estimait que cette somme constituait des revenus de capitaux mobiliers, il sollicite une substitution de base légale d'imposition, sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts, et une substitution de la procédure contradictoire à celle suivie, dans la mesure où l'ensemble des garanties afférentes à cette procédure ont été respectées ;

- en l'absence de justificatifs permettant de rattacher les sommes de 97 729 euros perçue en 2009 et 5 014 euros perçue en 2010 à l'activité d'intermédiaire financier du frère du contribuable, et de preuve du reversement de ces sommes, ces crédits relèvent de revenus d'origine indéterminée ; à titre subsidiaire, si la cour estimait que ces sommes ont effectivement été perçues en qualité de prête-nom, l'administration sollicite leur imposition, par voie de substitution de base légale, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux sur le fondement du 1 de l'article 92 du code général des impôts ; faute de déclaration de revenu catégorielle et de s'être fait connaître d'un centre de formalité des entreprises, il peut être procédé à l'évaluation d'office de ses bénéfices non commerciaux en application des dispositions des articles L. 73 et L. 68 du livre des procédures fiscales, en les fixant à 97 729 euros pour l'année 2009 et 5 014 euros pour 2010, en l'absence de tout justificatif de dépenses résultant de l'activité de prête-nom ;

- dans le cadre de l'effet dévolutif, il se réfère à ses écritures de première instance.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonfils,

- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C... ont fait l'objet d'un examen contradictoire de situation fiscale personnelle, au terme duquel ils se sont vu notifier, par proposition de rectification du 10 mai 2012, des rehaussements d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2009 et 2010, à raison d'une part, de crédits bancaires demeurés injustifiés taxés d'office dans la catégorie de revenus d'origine indéterminée en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, et d'autre part de crédits d'impôts pour dépenses environnementales et des intérêts d'emprunt de l'habitation principale non justifiés et de la rectification du quotient familial. Le ministre de l'action et des comptes publics fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Montreuil a déchargé M. C..., en droits et pénalités, de l'intégralité des impositions supplémentaires mises à sa charge.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :

2. Aux termes de l'article R.* 81-1 du livre des procédures fiscales : " I.- Le droit de communication défini à l'article L. 81 est exercé par les fonctionnaires titulaires ou stagiaires appartenant à des corps de catégorie A ou B ou par des fonctionnaires titulaires appartenant à des corps de catégorie C agissant soit dans l'ensemble de la région où est situé le service auquel ils sont affectés, soit, lorsqu'il est plus étendu, dans le ressort territorial de ce service. (...) ".

3. Pour prononcer la décharge des impositions en litige, le tribunal administratif de Montreuil a estimé que le droit de communication qu'avait exercé le service auprès des banques dans lesquelles M. et Mme C... disposaient d'un compte, était entaché d'irrégularité dès lors que l'administration ne justifiait pas du grade de l'agent ayant exercé ce droit de communication. Par de nouveaux documents produits pour la première fois en appel, le ministre de l'action et des comptes publics établit que ce droit de communication a été exercé, conformément aux dispositions précitées de l'article R.* 81-1 du livre des procédures fiscales, par un fonctionnaire de catégorie B, contrôleur exerçant à la brigade de recherche systématique de la direction nationale d'enquêtes fiscales.

4. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a retenu ce motif pour prononcer la décharge intégrale des impositions contestées.

5. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... en première instance et en appel.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable : " Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette et le contrôle des impôts, d'avoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées. / Le droit prévu au premier alinéa s'exerce quel que soit le support utilisé pour la conservation des documents. / Le droit de communication est étendu, en ce qui concerne les documents mentionnés aux articles L. 83 à L. 95, au profit des agents des administrations chargés du recouvrement des impôts, droits et taxes prévus par le code général des impôts. ". L'article L. 83 du même livre dispose : " Les administrations de l'Etat, des départements et des communes, les entreprises concédées ou contrôlées par l'Etat, les départements et les communes, ainsi que les établissements ou organismes de toute nature soumis au contrôle de l'autorité administrative, doivent communiquer à l'administration, sur sa demande, les documents de service qu'ils détiennent sans pouvoir opposer le secret professionnel, y compris les données conservées et traitées par les opérateurs de communications électroniques dans le cadre de l'article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques et les prestataires mentionnés aux articles aux 1 et 2 du I de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique. ".

7. Il résulte de ces dispositions que le droit de communication reconnu à l'administration fiscale par les articles L. 81 et suivants du livre des procédures fiscales a seulement pour objet de lui permettre, pour l'établissement et le contrôle de l'imposition d'un contribuable, de demander à un tiers ou, éventuellement, au contribuable lui-même, sur place ou par correspondance, de manière ponctuelle, des renseignements disponibles sans que cela ne nécessite d'investigations particulières ou, dans les mêmes conditions, de prendre connaissance et, le cas échéant, copie de certains documents existants qui se rapportent à l'activité professionnelle de la personne auprès de laquelle ce droit est exercé. Ce droit de communication ne s'exerce que sur des documents de service que les personnes destinataires des demandes de l'administration fiscale détiennent du fait de leur activité. Un document de service au sens des dispositions précitées de l'article L. 83 du livre des procédures fiscales s'entend de tout document ou donnée élaboré dans le cadre des missions de l'organisme à raison desquelles celui-ci est regardé comme soumis au contrôle de l'autorité administrative.

8. Il résulte de l'instruction, en particulier des demandes adressées par l'administration les 26 juillet et 1er août 2011 et de son courrier du 20 décembre 2011, que le service a saisi les différents établissements dans lesquels M. ou Mme C... disposait d'un compte bancaire afin de se voir communiquer les relevés de ceux-ci sur la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010. Ainsi, les pièces dont la communication a été demandée constituaient des documents détenus par les banques dans le cadre de leurs obligations de service. Par suite, ils relèvent de la catégorie des documents de service au sens de l'article L. 83 du livre des procédures fiscales et le moyen tiré de la méconnaissance du champ d'application des dispositions précitées de cet article doit être écarté.

9. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. Elle peut, en outre, lui demander des justifications au sujet de sa situation et de ses charges de famille, des charges retranchées du revenu net global ou ouvrant droit à une réduction d'impôt sur le revenu en application des articles 156 et 199 septies du code général des impôts (...). / Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés. (...) / Les demandes visées aux alinéas précédents doivent indiquer explicitement les points sur lesquels elles portent et mentionner à l'intéressé le délai de réponse dont il dispose en fonction des textes en vigueur. ". L'article L. 16 A du même livre dispose : " " Les demandes d'éclaircissements et de justifications fixent au contribuable un délai de réponse qui ne peut être inférieur à deux mois. Lorsque le contribuable a répondu de manière insuffisante aux demandes d'éclaircissements et de justification, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite ". Selon l'article L. 69 de ce livre : " (...) Sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 ".

10. D'une part, si l'administration ne peut régulièrement taxer d'office, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, les sommes dont elle n'ignore pas qu'elles relèvent d'une catégorie précise de revenus, elle peut en revanche procéder à cette taxation d'office si, au vu des renseignements dont elle disposait avant l'envoi de la demande de justifications fondée sur l'article L. 16 du livre des procédures fiscales et des réponses apportées par le contribuable à cette demande, la nature des sommes en cause, et donc la catégorie de revenus à laquelle elles seraient susceptibles de se rattacher, demeure inconnue. Il est toutefois loisible au contribuable régulièrement taxé d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales d'apporter devant le juge de l'impôt la preuve que ces sommes, soit ne constituent pas des revenus imposables, soit se rattachent à une catégorie précise de revenus. Dans cette dernière situation, le contribuable peut obtenir, le cas échéant, une réduction de l'imposition d'office régulièrement établie au titre du revenu global, à raison de la différence entre les bases imposées d'office et les bases résultant de l'application des règles d'assiette propres à la catégorie de revenus à laquelle se rattachent, en définitive, les sommes en cause.

11. M. C... soutient que l'administration fiscale ne pouvait recourir à la procédure prévue aux articles L. 16 et L. 16. A du livre des procédures fiscales puis taxer d'office en application de l'article L. 69 du même livre les crédits bancaires injustifiés, dès lors qu'avant la demande de justifications et la mise en demeure de compléter la réponse, intervenues respectivement les 24 janvier et 5 avril 2012, elle connaissait l'origine et la nature de crédits en cause, et, partant, leur rattachement catégoriel. D'une part, si M. B... soutient que les crédits bancaires correspondant aux virements en provenance de la société Stef TP ne pouvaient être taxés en revenus d'origine indéterminée compte tenu de sa qualité d'associé, cette seule circonstance, dont il n'est au demeurant pas clairement établi qu'elle ait été portée à la connaissance du vérificateur, ne permettait pas, à elle seule et en l'absence de tout autre élément apporté par l'intéressé, de préjuger de la nature des versements en cause, en l'absence, au surplus, de toute précision quant à la forme juridique et au régime fiscal de la société. D'autre part, la circonstance que certains crédits bancaires ont été admis comme ayant été perçus par M. C... en tant que prête-nom de son frère et ont finalement été imposés au nom de ce dernier, ne préjuge pas de ce que les autres crédits bancaires auraient la même nature et se rattacheraient nécessairement à une activité d'intermédiaire financier.

12. D'autre part, il résulte des dispositions précitées que, lorsque l'administration a demandé des justifications à un contribuable sur le fondement de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, elle est fondée à l'imposer d'office, sans mise en demeure préalable, à raison des sommes au sujet desquelles il s'est abstenu de répondre dans le délai requis ou n'a apporté que des réponses imprécises ou invérifiables, sans les assortir d'éléments de justification. Pour les sommes au sujet desquelles il a apporté des éléments de réponse jugés insuffisants, l'administration est en revanche tenue de lui adresser, préalablement, la mise en demeure prévue par l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales, dont l'objet principal est d'informer le contribuable sur la nature exacte des précisions qui sont exigées de lui, sur le délai complémentaire de trente jours qui lui est imparti pour apporter ces précisions et sur les conséquences qui s'attacheraient à un défaut de réponse de sa part. Il en va ainsi quelle que soit la teneur des indications mentionnées par l'administration dans la demande de justifications notifiée au contribuable, dès lors que les garanties prévues par l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales complètent, sans se confondre avec elles, celles que le contribuable tire des dispositions de l'article L. 16 du même livre.

13. Il résulte de l'instruction que l'administration a adressé à M. C... le 24 janvier 2012, une demande d'éclaircissements et justifications concernant l'ensemble des crédits figurants sur ses comptes bancaires au titre des années 2009 et 2010. Lors d'un entretien du 8 mars 2012, M. B... a partiellement répondu à la demande de justifications. Pour le surplus, le service lui a adressé, par un courrier du 5 avril 2012 reçu le 7 avril, une mise en demeure de compléter les réponses qu'il avait apportées, à laquelle aucune suite n'a été donnée. M. B..., qui supporte sur ce point la charge de la preuve, n'établit pas que lors de l'entretien précité qui ne s'est accompagné d'aucune réponse écrite, il aurait apporté des explications satisfaisantes, ne s'apparentant pas à une absence de réponse, sur les crédits restant en litige et, en particulier, sur ceux présentés comme issus d'une activité non commerciale. Le service était donc en droit de le mettre en demeure de compléter sa réponse puis de le taxer d'office en l'absence de toute nouvelle production.

14. Il résulte de ce qui précède que l'administration a pu, à bon droit, recourir à la procédure prévue aux articles L. 16 et L. 16. A du livre des procédures fiscales puis taxer d'office l'ensemble des crédits bancaires demeurés injustifiés, en application de l'article L. 69 du même livre.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

15. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ", et aux termes de l'article R.* 193-1 du même livre : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré. ".

16. En premier lieu, M. C..., qui supporte la charge de la preuve, n'apporte aucun élément de nature à contester sérieusement qu'il ne serait pas, ainsi que son épouse, le redevable légal des impositions en litige dans la mesure où les sommes réintégrées dans leurs revenus ont été directement virées sur leurs comptes bancaires. L'intimé ne conteste pas davantage l'ensemble des éléments caractérisés par l'administration, laquelle au demeurant n'avait pas à démontrer la libre disposition des sommes en litige, et détaillés notamment dans la proposition de rectification du 10 mai 2012, pour justifier de l'imposition du revenu au titre des revenus d'origine indéterminée, de la CSG, de la CRDS et des prélèvements sociaux, dont chaque montant est précisé. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'administration ne démontre pas, ainsi qu'il lui incombe, le redevable légal des impositions en litige, la libre disposition des sommes et crédits en litige, et la nature et le caractère imposable des sommes et crédits en litige, le principe et le montant des différentes rectifications d'imposition en matière d'impôt sur le revenu, de cotisations sociales et de prélèvements sociaux,

17. En deuxième lieu, M. C... soutient que les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée auraient dû être imposées dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers s'agissant des versements effectués par la société Stef TP et dans la catégorie des bénéfices non commerciaux pour le surplus qui correspondrait effectivement à sa qualité de prête-nom pour les activités financières de son frère. Toutefois, d'une part, il n'apporte aucun justificatif quant à la nature des crédits réintégrés au titre des sommes versées sur ses comptes par la société Stef TP. En particulier, il n'établit ni la forme juridique et le régime fiscal de cette société, ni les fonctions qu'il y aurait exercées, ni la contrepartie des versements intervenus. D'autre part, si en dépit de l'absence d'élément produit par le contribuable, le service a pu identifier comme versés sur les comptes bancaires du frère de M. C..., différents montants pour un total de 84 500 euros, lesquels n'ont pas été réintégrés dans l'impôt sur les revenus de l'intéressé, l'intimé n'apporte aucun élément de nature à établir que le surplus des sommes en litige correspondrait également à la même activité de prête nom. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de rattachement catégoriel des sommes imposées à titre de revenus d'origine indéterminée, doit être écarté. Par voie de conséquence, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la méthode de calcul mise en œuvre par l'administration n'aurait pas pris en compte des charges déductibles du résultat non commercial.

18. En dernier lieu, M. C..., qui est seul en mesure de pouvoir le faire, ne justifie par aucun document du bien-fondé des réductions et crédits d'impôts dont il a bénéficié au titre de l'année 2010 et que l'administration a remis en cause dans la proposition de rectification, en l'absence de justificatifs des intérêts acquittés pour l'acquisition de sa résidence principale et de dépenses exposées en faveur de la qualité environnementale de son habitation. De même, si l'intimé a déclaré au titre de ses revenus 2009 et 2010 avoir trois enfants à charge permanente et trois enfants à charge en résidence alternée, la production de son livret de famille n'a permis de constater que l'existence de trois enfants à charge. Si l'intéressé soutient que c'est par erreur qu'il a mentionné avoir à charge trois enfants en résidence alternée, cette allégation ne remet pas en cause le bien-fondé de la rectification opérée par le service au titre du quotient familial du foyer fiscal.

Sur les pénalités :

19. En premier lieu, aux termes de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales : " La juridiction saisie peut, lorsqu'une erreur non substantielle a été commise dans la procédure d'imposition, prononcer, sur ce seul motif, la décharge des majorations et amendes, à l'exclusion des droits dus en principal et des intérêts de retard. (...) ".

20. En l'absence d'erreur commise par l'administration dans la procédure de taxation d'office, M. C... n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions de l'article L. 80 CA précité à l'appui de sa demande de décharge des amendes, pénalités et majorations fiscales qui ont été mises à sa charge.

21. En second lieu, aux termes de l'article 1758 A du code général des impôts : " I. - Le retard ou le défaut de souscription des déclarations qui doivent être déposées en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu ainsi que les inexactitudes ou les omissions relevées dans ces déclarations, qui ont pour effet de minorer l'impôt dû par le contribuable ou de majorer une créance à son profit, donnent lieu au versement d'une majoration égale à 10 % des droits supplémentaires ou de la créance indue. (...) ".

22. Si M. C... est fondé à soutenir que l'application de la majoration de l'article 1758 A du code général des impôts, qui est une sanction, doit être motivée, il résulte des termes de la proposition de rectification du 10 mai 2012 qui lui notifie cette majoration au titre des années 2009 et 2010, qu'en précisant son fondement légal, la base retenue qui correspond aux " droits supplémentaires ", le taux appliqué et le montant en résultant pour chacune de ces années, le service, qui n'était pas tenu de réitérer à ce stade les motifs de fait des rectifications, a suffisamment motivé l'application de la pénalité de 10 % prévues par l'article 1758 A du code général des impôts, à raison des inexactitudes ou omissions relevées dans les déclarations d'impôt sur le revenu.

23. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a déchargé M. C... des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010, ainsi que des pénalités correspondantes, et a mis à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des frais liés à l'instance. Par suite, les conclusions présentées à titre subsidiaire par M. C... doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1802381 rendu par le tribunal administratif de Montreuil le 11 juillet 2019 est annulé.

Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des années 2009 et 2010, ainsi que les pénalités correspondantes, dont le tribunal administratif de Montreuil a prononcé la décharge par le jugement visé à l'article 1er de l'arrêt, sont remises à la charge de M. C....

Article 3 : Les conclusions présentées par M. C... sont rejetées.

4

N° 19VE03129


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE03129
Date de la décision : 14/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-05-02-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Règles générales. - Impôt sur le revenu. - Établissement de l'impôt. - Taxation d'office. - Pour défaut de réponse à une demande de justifications (art. L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales).


Composition du Tribunal
Président : Mme DANIELIAN
Rapporteur ?: Mme Marie-Gaëlle BONFILS
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : SELARL MATTEI

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-12-14;19ve03129 ?
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