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23/11/2021 | FRANCE | N°19VE02623

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 23 novembre 2021, 19VE02623


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... B... et Mme J... B... agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité de représentants légaux de leurs enfants I..., D..., G... et C... B..., ont demandé au tribunal administratif de Montreuil de condamner l'Etat à leur verser une somme totale de 82 200 euros en réparation des préjudices consécutifs aux carences de l'Etat dans la prise en charge des troubles autistiques de I... B..., et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justi

ce administrative.

Par un jugement n° 1802619 du 6 juin 2019, le trib...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... B... et Mme J... B... agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité de représentants légaux de leurs enfants I..., D..., G... et C... B..., ont demandé au tribunal administratif de Montreuil de condamner l'Etat à leur verser une somme totale de 82 200 euros en réparation des préjudices consécutifs aux carences de l'Etat dans la prise en charge des troubles autistiques de I... B..., et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1802619 du 6 juin 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement les 19 juillet 2019 et 10 février 2021, M. F... B... et Mme J... B... agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité de représentants légaux de leurs enfants I..., D..., G... et C... B... représentés par Me Janois, avocat, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner l'Etat à leur verser la somme totale de 106 820 en réparation de leurs préjudices, assortie des intérêts au taux légal à compter de la présentation de leur demande indemnitaire préalable le 16 janvier 2018 ;

3°) à titre subsidiaire, d'ordonner, avant-dire-droit, la production des courriers de suivi d'orientation adressés à l'Agence régionale de santé en application de l'article L. 241-6 du code de l'action sociale et des familles, par les IME E..., Ladoucette, Autisme 93, Le Soleil, Excelsior, Lautrec, et les SESSAD de Rosny, E... et Wallon ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens.

Ils soutiennent que :

- une obligation de prise en charge adaptée des personnes atteintes de troubles autistiques pèse sur l'Etat en application des dispositions de l'article L. 246-1 du code de l'action sociale et des familles ;

- l'Etat n'a pas respecté cette obligation depuis le 15 mars 2016, date à laquelle la Maison départementale des personnes handicapées de la Seine-Saint-Denis a orienté leur fils I... vers un établissement médico-social adapté ;

- il a ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

- leur fils I... a subi une perte de chance de voir son état de santé s'améliorer et un préjudice moral qui doivent être réparés à hauteur de la somme de 49 120 euros ;

- en tant que parents, ils ont subi des troubles dans les conditions d'existence et un préjudice moral qui doivent être réparés par le versement, à chacun, de la somme de 20 990 euros ;

- leurs trois autres enfants ont également subi un préjudice moral qui doit être réparé par le versement, à chacun d'entre eux, d'une somme de 5 240 euros.

...............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Ablard,

- et les conclusions de Mme Grossholz, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par deux courriers datés du 16 janvier 2018, reçus le 19 janvier suivant, M. et Mme B..., agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité de représentants légaux de leurs enfants, I..., D..., G... et C... B..., ont demandé à la ministre des solidarités et de la santé, ainsi qu'au directeur général de l'agence régionale de santé d'Ile-de-France l'indemnisation des préjudices résultant selon eux d'un défaut de prise en charge adaptée de leur fils I..., né en 2003, souffrant d'autisme. Cette demande a fait l'objet d'une décision implicite de rejet le 19 mars 2018. M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 6 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande tendant à la réparation des préjudices résultant selon eux du défaut de prise en charge susmentionné.

Sur la responsabilité de l'Etat :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 246-1 du code de l'action sociale et des familles : " Toute personne atteinte du handicap résultant du syndrome autistique et des troubles qui lui sont apparentés bénéficie, quel que soit son âge, d'une prise en charge pluridisciplinaire qui tient compte de ses besoins et difficultés spécifiques. Adaptée à l'état et à l'âge de la personne, cette prise en charge peut être d'ordre éducatif, pédagogique, thérapeutique et social. (...) ". Aux termes de l'article L. 114-1 du même code : " Toute personne handicapée a droit à la solidarité de l'ensemble de la collectivité nationale, qui lui garantit, en vertu de cette obligation, l'accès aux droits fondamentaux reconnus à tous les citoyens ainsi que le plein exercice de sa citoyenneté. L'Etat est garant de l'égalité de traitement des personnes handicapées sur l'ensemble du territoire et définit des objectifs pluriannuels d'actions. ".

3. Il résulte de ces dispositions que le droit à une prise en charge pluridisciplinaire est garanti à toute personne atteinte du handicap résultant du syndrome autistique, quelles que soient les différences de situation. Si, eu égard à la variété des formes du syndrome autistique, le législateur a voulu que cette prise en charge, afin d'être adaptée aux besoins et difficultés spécifiques de la personne handicapée, puisse être mise en œuvre selon des modalités diversifiées, notamment par l'accueil dans un établissement spécialisé ou par l'intervention d'un service à domicile, c'est sous réserve que la prise en charge soit effective dans la durée, pluridisciplinaire, et adaptée à l'état et à l'âge de la personne atteinte de ce syndrome.

4. D'autre part, en vertu de l'article L. 241-6 du code de l'action sociale et des familles, il incombe à la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH), à la demande des parents, de se prononcer sur l'orientation des enfants atteints du syndrome autistique et de désigner les établissements ou les services correspondant aux besoins de ceux-ci et étant en mesure de les accueillir, ces structures étant tenues de se conformer à la décision de la commission. Ainsi, lorsqu'un enfant autiste ne peut être pris en charge par l'une des structures désignées par la CDAPH en raison du manque de places disponibles, l'absence de prise en charge pluridisciplinaire qui en résulte est, en principe, de nature à révéler une carence de l'État dans la mise en œuvre des moyens nécessaires pour que cet enfant bénéficie effectivement d'une telle prise en charge dans une structure adaptée.

5. Il résulte de l'instruction que, par une première décision du 15 mars 2016, la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de la Seine-Saint-Denis a orienté I... B..., pour la période du 15 mars 2016 au 31 août 2019, vers les établissements ou services médico-sociaux suivants : l'institut médico-éducatif (IME) Le Tremplin, l'IME de l'APAJH, l'IME Bernadette E..., l'IME Ladoucette, l'IME Autisme 93, le Centre pour autistes Le Soleil d'Or, le service d'éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD) de Rosny, H... Enfants B. E..., et H... H. Wallon. Par une seconde décision du 21 novembre 2017, la même commission a orienté I... B..., pour la période du 21 novembre 2017 au 3 novembre 2023, vers les établissements suivants : l'IME Edelweiss, l'IME Jean Richepin, l'IME Excelsior, l'institut médico-professionnel (IMPRO) Toulouse-Lautrec, l'institut médico-pédagogique (IMP) L'Espéranderie, et l'IME Soubiran.

6. M. et Mme B... soutiennent que tous les établissements susmentionnés ont refusé d'accueillir leur fils en raison de l'absence de places disponibles, et qu'ils ont été pour cette raison contraints de le confier à un établissement spécialisé situé en Belgique. Toutefois, si les requérants versent au dossier un courrier électronique du 28 novembre 2015 adressé à l'IME Centre Franchemont, un courrier adressé au centre médico-psychologique de Montreuil le 2 septembre 2016, un courrier adressé à la fédération des APAJH le 4 octobre 2016, ainsi que cinq courriers de refus de la fédération des APAJH (Centre pour autistes Le Soleil d'Or), de l'IME Le Tremplin, de l'IME Soubiran, de l'IME Edelweiss et de l'IME Jean Richepin, datés respectivement des 12 mai 2016, 27 juin 2016, 29 novembre 2017, 29 novembre 2017 et 3 janvier 2018, ils n'établissent pas avoir contacté la totalité des établissements désignés par les décisions de la CDAPH des 15 mars 2016 et 21 novembre 2017 afin d'obtenir l'accueil de leur fils. A... ne résulte ainsi pas de l'instruction qu'aucun de ces quinze établissements n'aurait été en mesure d'accueillir leur enfant. Dans ces conditions, M. et Mme B... n'établissent pas l'existence d'une carence de l'État dans la mise en œuvre des moyens nécessaires pour que leur enfant bénéficie d'une prise en charge effective dans une structure adaptée, en application des dispositions citées au point 3. Par suite, les conclusions indemnitaires présentées par les requérants ne peuvent qu'être rejetées.

7. Il résulte de tout ce qui précède, que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande.

En ce qui concerne les dépens :

8. Aucuns dépens n'ayant été exposés dans la présente instance, les conclusions des requérants tendant au remboursement des dépens sont sans objet et doivent, par suite, être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête des consorts B... est rejetée.

N° 19VE02623 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE02623
Date de la décision : 23/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme LE GARS
Rapporteur ?: Mme Hélène LEPETIT-COLLIN
Rapporteur public ?: Mme GROSSHOLZ
Avocat(s) : JANOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 30/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-11-23;19ve02623 ?
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