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19/10/2021 | FRANCE | N°20VE01532

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 19 octobre 2021, 20VE01532


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui refusé un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1910682 du 19 juin 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la c

our :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 et 8 juillet 2020, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui refusé un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1910682 du 19 juin 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 et 8 juillet 2020, Mme C..., représentée par Me Apaydin, avocat, demande à la cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° d'annuler l'arrêté attaqué ;

3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté est entaché d'illégalité du fait de l'incompétence de son signataire ;

- il est insuffisamment motivé ;

- l'obligation de quitter le territoire français porte une atteinte excessive à sa vie privée et familiale et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que les dispositions des articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il procède d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;

- en lui refusant un délai de départ volontaire, le préfet a commis une erreur de droit ; l'obligation de quitter le territoire devait être assortie d'un délai de départ volontaire de trente jours ainsi qu'il ressort de la mention des voies et délais de recours ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle ne peut être éloignée à destination de la Turquie, en raison des risques qu'elle encourt du fait de ses origines kurdes ;

- l'interdiction de quitter le territoire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience en application des dispositions de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative.

Le rapport de Mme Dorion a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., ressortissante turque née le 15 janvier 1964, entrée en France le 16 mars 2014 via l'Autriche, déboutée de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 9 mars 2015, décision confirmée par la cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 20 octobre 2015, a présenté une demande de titre de séjour pour motif médical qui lui a été refusée par un arrêté du 7 avril 2017 assorti d'une obligation de quitter le territoire. Le tribunal administratif de Montreuil a rejeté le 13 juillet 2017 le recours qu'elle a formé contre cette décision. Suite à son mariage célébré le 31 mars 2018 à Clichy-sous-Bois, avec un compatriote, M. F... C..., père de ses trois enfants majeurs, A... C... a présenté le 17 mai 2019 une demande d'admission exceptionnelle au séjour que le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejetée par un arrêté du 25 septembre 2019 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français, refus de délai de départ volontaire, fixation du pays de destination et interdiction de retour d'une durée de deux ans. Mme E... épouse C... demande l'annulation du jugement 19 juin 2020 rejetant sa demande d'annulation de ces cinq décisions.

2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / (...) ". Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger (...). La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) ".

3. En premier lieu, Mme C... reprend, en appel, sans critique du jugement, les moyens de légalité externe déjà soulevés devant le tribunal, tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté et de son insuffisance de motivation. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs des premiers juges.

4. En deuxième lieu, si Mme C... justifie de son séjour en France depuis mars 2014, soit cinq ans et demi à la date de l'arrêté contesté, il est constant que la demande d'asile qu'elle a présentée a été définitivement rejetée et qu'elle n'a pas exécuté l'obligation de quitter le territoire français qui lui a été notifiée le 10 avril 2017, lors du rejet de sa demande de titre de séjour pour motif médical. Mme C... se prévaut également de la présence en France de son mari, de deux de ses enfants majeurs et de ses frères. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que son mari, dont elle a été séparée de 2005, date d'arrivée en France de celui-ci, à 2014, date à laquelle elle l'a rejoint avec sa fille B..., et cette dernière soient en situation régulière sur le territoire français. Par ailleurs, Mme C... ne justifie pas d'une insertion sociale ou professionnelle en France, tandis qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches en Turquie où réside sa fille aînée, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 50 ans et où rien ne s'oppose à ce qu'elle y poursuive sa vie familiale avec son mari et ses enfants majeurs de même nationalité, et y bénéficie d'une prise en charge adaptée à son état de santé. Dans ces circonstances, alors même que son fils, ses petits-enfants et ses frères seraient régulièrement présents en France, les décisions de refus d'admission exceptionnelle au séjour et d'éloignement contestées n'ont pas porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Il s'ensuit que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écarté, ainsi que, pour les mêmes motifs, le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle et familiale.

5. En troisième lieu, aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) ".

6. Ainsi qu'il a été dit, Mme C... s'est maintenue sur le territoire français malgré l'obligation de quitter le territoire français qui lui a été notifiée le 10 avril 2017. Le préfet de la Seine-Saint-Denis pouvait dès lors légalement lui refuser un délai de départ volontaire. La circonstance que la mention des voies et délais de recours serait erronée est en tout état de cause sans incidence sur la légalité de cette décision.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Les craintes alléguées par Mme C..., quant au risque de traitements inhumains et dégradants qu'elle encourrait en cas de retour dans son pays d'origine, du fait de ses origines kurdes, ne sont ni étayées ni justifiées, alors que sa demande d'asile a été rejetée par une décision du directeur général de l'OFPRA, confirmée par la CNDA. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations ne peut dès lors qu'être écarté.

8. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au litige : " (...) III. - L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. "

9. Pour demander l'annulation de la décision qui lui fait interdiction de retourner sur le territoire français, Mme C... se prévaut de la présence de sa famille en France et de ses garanties d'intégration. Toutefois, pour les motifs exposés au point 4, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en assortissant sa décision d'éloignement d'une interdiction de retour d'une durée de deux ans, le préfet de la Seine-Saint-Denis a entaché cette décision d'une erreur d'appréciation.

10. Il résulte de ce qui précède que la demande de M. C... doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

4

N° 20VE01532


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20VE01532
Date de la décision : 19/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02-01 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Autorisation de séjour. - Demande de titre de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Odile DORION
Rapporteur public ?: M. MET
Avocat(s) : APAYDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-10-19;20ve01532 ?
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