Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler l'arrêté du 8 février 2019 par lequel le préfet du Val-d'Oise a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, d'autre part, à titre principal, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 20 euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de réexaminer sa situation administrative et de saisir la commission du titre de séjour sous les mêmes délais et conditions d'astreinte.
Par un jugement n° 1905407 du 30 janvier 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 18 décembre 2020, M. D..., représenté par Me Lamine, avocat, demande à la cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler cet arrêté ;
3° d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 20 euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de réexaminer sa situation administrative et de saisir la commission du titre de séjour sous les mêmes délais et conditions d'astreinte ;
4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Lamine, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
M. D... soutient que :
- le jugement en litige est insuffisamment motivé ;
- l'arrêté attaqué est entaché d'un défaut d'examen approfondi de sa situation personnelle ;
- il est entaché d'un autre vice de procédure en ce que le préfet du Val-d'Oise était tenu de saisir la commission du titre de séjour ;
- il est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'une erreur de droit dès lors que le refus se fonde sur l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il est entaché d'une erreur de droit au regard des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnait les stipulations de l'article 2-2 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- il méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Orio a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 8 février 2019, le préfet du Val-d'Oise a rejeté la demande de titre de séjour présentée par M. D..., ressortissant ivoirien, sur le fondement des dispositions figurant au 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. D... fait régulièrement appel du jugement du 30 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté contesté :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
3. M. D... soutient qu'il réside en France depuis 2014, où il dispose désormais du centre de ses intérêts privé et familial. Il produit pour établir sa présence en France trois pièces médicales afférentes à l'année 2014, et quelques documents médicaux, une lettre solidarité transport, et une carte d'étudiant pour l'année 2015. En outre, il n'est pas contesté qu'il vit en concubinage avec Mme B... A... depuis juin 2016, laquelle est une compatriote titulaire d'une carte de résident valable jusqu'en 2022, et il justifie avoir eu deux enfants avec cette dernière, respectivement nés le 17 septembre 2017 et le 29 août 2019. Les factures qu'il produit depuis avril 2019 révèlent qu'il contribue à leur entretien et à leur éducation. Quand bien même il disposerait encore d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses parents et une partie de sa fratrie et où il a résidé jusqu'à l'âge de trente-et-un ans, M. D... est fondé à soutenir que le préfet du Val-d'Oise a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions figurant au 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par suite, le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise doit être annulé. Et au regard du motif d'annulation retenu, il y a lieu d'enjoindre au préfet de délivrer un titre de séjour à M. D..., dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
5. M. D... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Lamine, avocat de M. D..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Lamine de la somme de 1 500 euros.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 1905407 et l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 8 février 2019 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-d'Oise de délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à M. D..., dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir.
Article 3 : L'Etat versera à Me Lamine, avocat de M. D..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Lamine renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
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N° 2003289