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29/06/2021 | FRANCE | N°20VE02345

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 29 juin 2021, 20VE02345


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil l'annulation de la décision du 18 décembre 2018 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer une carte de résident et de renouveler sa carte de séjour temporaire et d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de résident ou de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.


Par un jugement n° 1901762 en date du 21 juillet 2020, le tribunal administrati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil l'annulation de la décision du 18 décembre 2018 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer une carte de résident et de renouveler sa carte de séjour temporaire et d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de résident ou de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1901762 en date du 21 juillet 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 septembre 2020, Mme C... A..., représentée par Me Fakih, avocat, demande à la cour :

1° d'annuler le jugement n° 191762 du 21 juillet 2020 du tribunal administratif de Montreuil ;

2° d'annuler la décision du 18 décembre 2018 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer une carte de résident ;

3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis, à titre principal, de lui délivrer une carte de résident ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'application de la condition de ressources ne doit pas aboutir à la mise en oeuvre d'une discrimination à raison de l'état de santé du demandeur ;

- elle justifie du caractère suffisant de ses ressources dès lors qu'elle bénéficie de l'allocation aux adultes handicapés ;

- elle est prise en charge par sa soeur et son beau-frère dont les revenus nets permettent cette prise en charge financière ;

- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation

Par ordonnance du 16 mars 2021, le clôture d'instruction a été fixée au 6 avril 2021, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

En application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative, le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... A..., ressortissante cambodgienne née le 15 juin 1939, qui soutient être entrée en France le 29 octobre 2000 munie d'un visa de Schengen de type C, était titulaire d'une carte de séjour " visiteur " régulièrement renouvelée depuis le 13 septembre 2010 lorsqu'elle a sollicité, antérieurement à l'expiration de ce titre, la délivrance d'une carte de résident longue durée-UE en application des dispositions de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par une décision du 18 décembre 2018, le préfet de la Seine-Saint-Denis a fait droit à la demande de renouvellement du titre de séjour " visiteur ", mais a rejeté la demande de délivrance d'une carte de résident en opposant à l'intéressée qu'elle ne justifiait pas des ressources suffisantes pour la période de référence. Mme A... a demandé l'annulation de cette décision au tribunal administratif de Montreuil qui, par un jugement n°1901762 en date du 21 juillet 2020, a rejeté sa demande. Mme A... relève appel de ce jugement.

2. Aux termes, d'une part, de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE " est délivrée de plein droit à l'étranger qui justifie : (...) 2° De ressources stables, régulières et suffisantes pour subvenir à ses besoins. Ces ressources doivent atteindre un montant au moins égal au salaire minimum de croissance. Sont prises en compte toutes les ressources propres du demandeur, indépendamment des prestations familiales et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles ainsi qu'aux articles L. 5423-1, L. 5423-2 et L. 5423-3 du code du travail. La condition prévue au présent 2° n'est pas applicable lorsque la personne qui demande la carte de résident est titulaire de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée à l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale ou de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du même code (...) ". L'article R. 314-1-1 du même code dispose : " L'étranger qui sollicite la délivrance de la carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE " doit justifier qu'il remplit les conditions prévues aux articles L. 314-8, L. 314-8-1 ou L. 314-8-2 en présentant, outre les pièces mentionnées aux articles R. 311-2-2 et R. 314-1, les pièces suivantes : (...) 2° La justification qu'il dispose de ressources propres, stables et régulières, suffisant à son entretien, indépendamment des prestations et des allocations mentionnées au 2° de l'article L. 314-8, appréciées sur la période des cinq années précédant sa demande, par référence au montant du salaire minimum de croissance ; lorsque les ressources du demandeur ne sont pas suffisantes ou ne sont pas stables et régulières pour la période des cinq années précédant la demande, une décision favorable peut être prise, soit si le demandeur justifie être propriétaire de son logement ou en jouir à titre gratuit, soit en tenant compte de l'évolution favorable de sa situation quant à la stabilité et à la régularité de ses revenus, y compris après le dépôt de la demande. (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale : " Toute personne résidant sur le territoire métropolitain ou dans les départements mentionnés à l'article L. 751-1 ou à Saint-Pierre-et-Miquelon ayant dépassé l'âge d'ouverture du droit à l'allocation prévue à l'article L. 541-1 et dont l'incapacité permanente est au moins égale à un pourcentage fixé par décret perçoit, dans les conditions prévues au présent titre, une allocation aux adultes handicapés. / Les personnes de nationalité étrangère, hors les ressortissants des Etats membres de l'Union européenne ou parties à l'accord sur l'Espace économique européen, ne peuvent bénéficier de l'allocation aux adultes handicapés que si elles sont en situation régulière au regard de la législation sur le séjour ou si elles sont titulaires d'un récépissé de demande de renouvellement de titre de séjour. Un décret fixe la liste des titres ou documents attestant la régularité de leur situation. / Le droit à l'allocation aux adultes handicapés est ouvert lorsque la personne ne peut prétendre, au titre d'un régime de sécurité sociale, d'un régime de pension de retraite ou d'une législation particulière, à un avantage de vieillesse ou d'invalidité, à l'exclusion de la majoration pour aide constante d'une tierce personne visée à l'article L. 355-1, ou à une rente d'accident du travail, à l'exclusion de la majoration pour aide d'une tierce personne mentionnée à l'article L. 434-2, d'un montant au moins égal à cette allocation. (...) ". Aux termes de l'article L. 821-2 du même code : " L'allocation aux adultes handicapés est également versée à toute personne qui remplit l'ensemble des conditions suivantes : /1° Son incapacité permanente, sans atteindre le pourcentage fixé par le décret prévu au premier alinéa de l'article L. 821-1, est supérieure ou égale à un pourcentage fixé par décret ; (...) ". Aux termes de l'article L. 821-3 du même code : " L'allocation aux adultes handicapés peut se cumuler avec les ressources personnelles de l'intéressé et, s'il y a lieu, de son conjoint, concubin ou partenaire d'un pacte civil de solidarité dans la limite d'un plafond fixé par décret, qui varie selon qu'il est marié, concubin ou partenaire d'un pacte civil de solidarité et a une ou plusieurs personnes à sa charge. (...) "

4. Mme A... soutient, en premier lieu, que la condition de ressources prévue au 2° de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité ne lui était pas opposable dès lors qu'elle s'est vue reconnaitre, par une décision de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de la Seine-Saint-Denis en date du 7 décembre 2016, un taux d'incapacité compris entre 50 et 80% et allouer, en conséquence, le bénéfice de l'allocation aux adultes handicapés. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, et notamment des écritures de première instance de la requérante elle-même, que, dans la mesure où elle était titulaire d'une carte de séjour portant ma mention " visiteur " délivrée, en vertu des dispositions de l'article L. 313-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile aux ressortissants étrangers apportant la preuve de ce qu'ils peuvent vive de leurs propres ressources, " indépendamment des prestations et allocations mentionnées à la troisième phrase du 2° de l'article L. 314-8 ", elle n'a jamais perçu effectivement cette aide. Mme A... n'est donc pas fondée à soutenir qu'elle devrait être regardée comme titulaire de cette aide au sens du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu' elle ne pouvait se voir appliquer la condition de ressources prévue par le 2° de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et devait bénéficier de l'exception prévue par ces mêmes dispositions au bénéfice des ressortissants étrangers bénéficiant de l'allocation aux adultes handicapés. Le moyen doit donc être écarté.

5. Aux termes de l'article R. 314-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui sollicite la délivrance de la carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE " doit justifier qu'il remplit les conditions prévues aux articles L. 314-8, L. 314-8-1 ou L. 314-8-2 en présentant, outre les pièces mentionnées aux articles R. 311-2-2 et R. 314-1, les pièces suivantes : (...) 2° La justification qu'il dispose de ressources propres, stables et régulières, suffisant à son entretien, indépendamment des prestations et des allocations mentionnées au 2° de l'article L. 314-8, appréciées sur la période des cinq années précédant sa demande, par référence au montant du salaire minimum de croissance ; lorsque les ressources du demandeur ne sont pas suffisantes ou ne sont pas stables et régulières pour la période des cinq années précédant la demande, une décision favorable peut être prise, soit si le demandeur justifie être propriétaire de son logement ou en jouir à titre gratuit, soit en tenant compte de l'évolution favorable de sa situation quant à la stabilité et à la régularité de ses revenus, y compris après le dépôt de la demande. (...) ".

6. En deuxième lieu, le 2° l'article L. 314-8 de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité au point 2, qui constitue la transposition en droit français de l'article 5, paragraphe 1, sous a), de la directive 2003/109/CE du Conseil, du 25 novembre 2003, relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée, doit être interprété en ce sens que la notion de " ressources " visée à cette disposition ne concerne pas uniquement les ressources du demandeur du statut de résident de longue durée, mais peut également couvrir les ressources mises à la disposition de ce demandeur par un tiers pour autant que, compte tenu de la situation individuelle du demandeur concerné, elles sont considérées comme étant stables, régulières et suffisantes. Il en résulte que les revenus de la soeur et du beau-frère de Mme A... peuvent être prises en compte pour apprécier le caractère suffisant de ses ressources au sens des dispositions précitées. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que si les revenus nets pour les années antérieures à la décision attaquée de M. et Mme B... s'élevaient respectivement à 41 499 euros au titre de l'année 2011, 42 348 euros au titre de l'année 2012, 31 941 euros au titre de l'année 2013, 28 025 euros au titre de l'année 2014, 28 025 euros au titre de l'année 2015 et 28 101 euros au titre de l'année 2016, ainsi que les premiers juges le lui ont déjà opposé, la requérante ne produit aucun document plus récent permettant d'établir la stabilité de ces ressources pour les deux années ayant précédé sa demande de titre de séjour soit les années 2017 et 2018. Le moyen doit donc être écarté.

7. En troisième lieu, contrairement à ce que soutient la requérante, il résulte de ce qui précède que l'application de la condition de ressources n'aboutit pas, en l'espèce, à la mise en oeuvre d'une discrimination à raison de l'état de santé de Mme A....

8. En dernier lieu, le refus de délivrance du titre de séjour de résident de longue durée, à un bénéficiaire de l'allocation pour adultes handicapés, ne fait pas obstacle à la délivrance d'un autre titre de séjour, et n'emporte, par lui-même, aucune conséquence sur le droit au séjour de l'intéressé. Ainsi, si Mme A..., qui a bénéficié d'un renouvellement de son titre de séjour " visiteur ", se prévaut des conséquences sur sa situation personnelle de la décision attaquée eu égard à sa durée de séjour en France et à la circonstance qu'elle ne dispose plus d'aucune attache familiale dans son pays d'origine, il résulte de ce qui vient d'être dit que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont la décision attaquée serait entachée doit être écarté. Une telle erreur manifeste d'appréciation ne résulte pas davantage de la nécessité dans laquelle elle se trouve de présenter régulièrement une demande de renouvellement de son titre de séjour.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. La requête d'appel de Mme A... doit donc être rejetée dans toutes ses conclusions y compris celles à fin d'injonction, d'astreinte et celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'ayant pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 15 juin 2021 à laquelle siégeaient :

M. Brotons, président,

M. Coudert, premier conseiller,

Mme D..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la juridiction le 29 juin 2021.

La rapporteure,

H. D...Le président,

S. BROTONSLa greffière,

S. de SOUSA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N°20VE02345 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE02345
Date de la décision : 29/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Hélène LEPETIT-COLLIN
Rapporteur public ?: Mme GROSSHOLZ
Avocat(s) : FAKIH

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-06-29;20ve02345 ?
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