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24/06/2021 | FRANCE | N°19VE00729

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 24 juin 2021, 19VE00729


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009, 2010 et 2011 et, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1704572 du 3 janvier 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009, 2010 et 2011 et, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1704572 du 3 janvier 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 février 2019 et 7 juillet 2020, M. C..., représenté par Me Tournoud, avocat, demande à la cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge sollicitée ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4° de condamner l'Etat aux entiers dépens.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier, en ce qu'il appartenait aux premiers juges de soulever le moyen d'ordre public tiré d'une erreur dans la cédule retenue par le service ;

- le service ne pouvait, sur le fondement de l'article 155 A du code général des impôts, imposer dans la cédule des bénéfices industriels et commerciaux les sommes versées par la société Herbs International Services mais dans celle des traitements et salaires.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.

Une note en délibéré présentée pour M. C..., par Me Tournoud, avocat, a été enregistrée le 8 juin 2021.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., résident fiscal suisse, domicilié à Saviese 1965A, est administrateur et actionnaire majoritaire de la société Phyto Concept Conseil (PCC), dont le siège social est situé en Suisse. Il a fait l'objet d'une vérification de comptabilité de l'activité industrielle qu'il exerce en France, au titre des prestations facturées par la société PCC à la société Herb's International Service (HIS) implantée à Lozanne (France, 69580), au cours des exercices clos les

31 décembre 2009, 2010 et 2011. Faisant application des dispositions de l'article 155 A du code général des impôts, l'administration, selon la procédure de taxation d'office prévue aux articles L. 66-1° et L. 68-3° du livre des procédures fiscales, a réintégré au revenu imposable de M. C... dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux pour les années 2009, 2010 et 2011 des sommes perçues par la société PCC au titre des prestations ainsi facturées, respectivement pour des montants de 369 000, 315 000 et 152 000 euros, a admis en déduction les frais comptabilisés par la société PCC en Suisse, ainsi qu'un forfait supplémentaire de charges fixé à 10 % du montant des produits d'exploitation, a appliqué une majoration de

1,25 conformément au 7. de l'article 158 du code général des impôts, et a appliqué la majoration de 80 % pour activité occulte prévue à l'article 1728 du même code. M. C... fait appel du jugement du 3 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ainsi mises à sa charge au titre des années 2009 à 2011 et des pénalités correspondantes. Devant le juge d'appel, M. C... se borne à faire valoir que le service a, à tort, imposé les sommes litigieuses dans la cédule des bénéfices industriels et commerciaux et non dans celle des traitements et salaires, et qu'en s'abstenant de relever d'office une telle erreur, les premiers juges ont entaché d'irrégularité leur jugement.

2. Aux termes du I de l'article 155 A du code général des impôts : " Les sommes perçues par une personne domiciliée ou établie hors de France en rémunération de services rendus par une ou plusieurs personnes domiciliées ou établies en France sont imposables au nom de ces dernières : / - soit, lorsque celles-ci contrôlent directement ou indirectement la personne qui perçoit la rémunération des services ; / - soit, lorsqu'elles n'établissent pas que cette personne exerce, de manière prépondérante, une activité industrielle ou commerciale, autre que la prestation de services ; / - soit, en tout état de cause, lorsque la personne qui perçoit la rémunération des services est domiciliée ou établie dans un Etat étranger ou un territoire situé hors de France où elle est soumise à un régime fiscal privilégié au sens mentionné à l'article 238 A. / (...) ". Il résulte de ces dispositions que les prestations dont la rémunération est susceptible d'être imposée, en application de ces dispositions, entre les mains de la personne qui les a effectuées correspondent à un service rendu pour l'essentiel par elle et pour lequel la facturation par une personne domiciliée ou établie hors de France ne trouve aucune contrepartie réelle dans une intervention propre de cette dernière, permettant de regarder ce service comme ayant été rendu pour son compte. Ces dispositions ne dispensent pas l'administration, pour soumettre cette rémunération à l'impôt sur le revenu entre les mains de la personne ayant rendu les services, de faire application des règles de taxation relatives à la catégorie de revenus dont elle relève. La détermination de cette catégorie ne saurait dépendre que de l'analyse des relations existant entre la personne domiciliée ou établie en France qui a rendu pour l'essentiel les services facturés et le bénéficiaire de ces services.

3. Le II de l'article 155 du code général des impôts précise que " II. Les règles prévues au I ci-dessus sont également applicables aux personnes domiciliées hors de France pour les services rendus en France. / (...) ".

4. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 110-1 du code de commerce : " La loi répute actes de commerce : / (...) / 6° Toute entreprise de (...) bureaux d'affaires, (...) ; / (...) " et en vertu du premier alinéa de l'article 34 du code général des impôts : " Sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par des personnes physiques et provenant de l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale. ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'accomplissement habituel d'opérations ayant le caractère d'actes de commerce caractérise l'exercice d'une profession commerciale dont les bénéfices sont, sauf disposition législative spécifique, soumis à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux en application de l'article 34 du code général des impôts.

5. Il résulte de l'instruction que les sommes réintégrées aux revenus de M. C... ont été perçues à raison de prestations de services réalisées par l'intéressé dans le cadre d'une convention conclue le 31 juillet 2006 entre les sociétés PCC et HIS et facturées par la première à la seconde. Si une nouvelle convention, remplaçant la précédente, a été conclue le

11 janvier 2010 entre ces mêmes sociétés, elle a été regardée comme non " opposable " par le vérificateur en l'absence notamment de date certaine, sans que la position de l'administration fiscale soit contestée sur ce point. La convention du 31 juillet 2006, qualifiée par le vérificateur de convention d'assistance, de conseil et de représentation, prévoit que la société PCC s'engage à fournir son assistance et à réaliser des prestations de services dans sept domaines tels que le marketing et les appuis commerciaux pour la mise en place d'une stratégie commerciale, le " contact avec les fournisseurs ", la conception/création de nouveaux produits, la " représentation extérieure au siège ", l'aide au " développement de la clientèle (...) en apportant tous les soins nécessaires pour introduire la société [HIS] auprès de tout client éventuel, et promouvoir son activité ", ou encore la négociation de la " vente de produits pour le compte et au nom " de la société HIS. Il résulte des déclarations de l'intéressé, recueillies au cours des opérations de contrôle, qu'il s'agissait d'une activité d'intermédiaire en achat de marchandises à l'international. Il incombait à M. C... de prospecter personnellement des " cibles " à l'étranger et de présenter au " service achat " de la société HIS des marchandises conformes au cahier des charges remis, la société demeurant toujours libre de décider de formuler ou non l'ordre d'achat.

6. M. C... conteste, ainsi qu'il a été rappelé au point 1., l'imposition des sommes ainsi perçues dans la cédule des bénéfices industriels et commerciaux et non dans celle des traitements et salaires, en faisant valoir qu'il aurait été dans un lien de subordination à l'égard de la société HIS. Il fait état, à cet égard, de ce que l'ensemble des moyens matériels nécessaires à l'activité étaient fournis par la société HIS (bureau, lignes téléphoniques, cartes de visite, prise en charge de frais de déplacements, fourniture de badge d'autoroute, messagerie internet...), qu'il ne disposait d'aucun moyen propre lui permettant d'exercer une activité indépendante à titre personnel, qu'il travaillait exclusivement et à temps plein pour la société HIS et se trouvait donc en situation de dépendance économique, que sa rémunération était constituée d'une part fixe par jour de travail et d'une part proportionnelle au chiffre d'affaires, c'est-à-dire comportait une rémunération au temps passé et la garantie d'un revenu minimal et, enfin, qu'il figurait dans l'organigramme de la société HIS dans un poste d'autorité.

7. Toutefois et d'une part, la portée ainsi conférée à ces constats est contredite par les résultats de l'instruction. Il résulte en effet des déclarations effectuées par Mme C..., présidente et actionnaire majoritaire de la société HIS, que la ligne téléphonique ouverte à M. C... " n'était destinée qu'à assurer une permanence téléphonique pour le compte de son prestataire, particulièrement utile lorsqu'il se trouve à l'étranger " et que la société HIS " rembourse les frais engagés par son prestataire lorsque M. C... est accompagné, pour la mission, par un membre du personnel salarié de la société HIS ". Il résulte des propos de M. C... lui-même, recueillis au cours des opérations de contrôle, que l'exercice de son activité pour le compte d'un client unique était justifié par l'absence de temps pour prospecter d'autres clients potentiels et que, nonobstant son intégration dans l'organigramme de la société, il ne disposait d'aucun pouvoir d'engagement à l'égard de cette dernière. Il résulte des stipulations de la convention du 31 juillet 2006 que, si la rémunération des prestations comportait une part fixe elle-même fonction du nombre de jours d'intervention, elle comportait également une part variable égale à 7 % du chiffre d'affaires réalisé et encaissé par la société HIS, aucun élément n'étant avancé pour établir l'importance respective de ces parts.

8. D'autre part et au surplus, les seuls éléments avancés par M. C... ne permettent pas de caractériser l'exercice d'un pouvoir de direction, de contrôle et de sanction de la société HIS à son endroit, alors qu'il résulte tant des stipulations de la convention du 31 juillet 2006 que de la présentation des modalités d'exercice de l'activité de la société PCC par Mme C... et M. C... que ce dernier disposait d'une totale liberté d'organisation et de gestion de son activité (prestations et prospection), sans consigne ni immixtion de la société HIS, qu'il était autonome dans ses méthodes de travail, son fonctionnement et ses dépenses, et que d'ailleurs, compte tenu des liens particuliers - commerciaux, historiques et familiaux - unissant les deux sociétés et leurs dirigeants, celles-ci " se sont affranchies de nombreuses obligations réciproques d'encadrement, de contrôle et de justification ". L'article 4 de la convention stipule en outre que la société PCC " assurera les risques inhérents à son activité ".

9. Dans ces conditions, il résulte de l'instruction que, contrairement à ce que soutient M. C..., compte tenu de la nature et des caractéristiques de son activité, ainsi que de ses modalités de rémunération, c'est à bon droit que l'administration fiscale a regardé l'intéressé comme exerçant une activité d'agent d'affaires, commerciale par nature, qui entre dans le champ d'application des dispositions précitées de l'article 34 du code général des impôts.

10. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que les sommes litigieuses auraient dû être imposées dans la cédule des " traitements et salaires ", que le service aurait commis une erreur de catégorie d'imposition et, en tout état de cause, que les premiers juges auraient entaché d'irrégularité leur jugement en ne relevant pas l'existence d'une telle erreur.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ainsi qu'en tout état de cause, celles tendant à la condamnation de l'Etat aux entiers dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

5

N° 19VE00729


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE00729
Date de la décision : 24/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières.


Composition du Tribunal
Président : M. OLSON
Rapporteur ?: Mme Muriel DEROC
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : SCP ARBOR TOURNOUD et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-06-24;19ve00729 ?
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