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04/06/2021 | FRANCE | N°20VE00603

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 04 juin 2021, 20VE00603


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté en date du 2 juillet 2018 par lequel le préfet du Val-d'Oise a prononcé son expulsion du territoire français.

Par un jugement n° 1807598 du 18 décembre 2019, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 février 2020, M. C..., représenté par Me D..., avocat, demande à la cour :

1° d'annuler ce jugement ;<

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2° d'annuler cet arrêté ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté en date du 2 juillet 2018 par lequel le préfet du Val-d'Oise a prononcé son expulsion du territoire français.

Par un jugement n° 1807598 du 18 décembre 2019, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 février 2020, M. C..., représenté par Me D..., avocat, demande à la cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler cet arrêté ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à Me D... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

M. C... soutient que :

- l'arrêté d'expulsion est insuffisamment motivé ;

- cet arrêté est illégal dans la mesure où sa présence sur le territoire français ne constitue pas une menace grave pour l'ordre public ;

- il porte une atteinte manifestement excessive au respect de sa vie familiale.

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Bouzar, rapporteur public,

- et les observations de Me D... pour M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C... relève régulièrement appel du jugement n° 1807598 du 18 décembre 2019 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 2 juillet 2018 par lequel le préfet du Val-d'Oise a prononcé son expulsion du territoire français au motif que la présence de l'intéressé en France constitue une menace grave pour l'ordre public.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué et la légalité de la mesure d'expulsion :

En ce qui concerne la légalité externe de l'arrêté d'expulsion :

2. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; /(...). ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".

3. L'arrêté en date du 2 juillet 2018 par lequel le préfet du Val-d'Oise a prononcé l'expulsion du territoire français de M. C... comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Il est donc suffisamment motivé même si cet arrêté ne mentionne pas l'ensemble des arguments dont l'intéressé entend se prévaloir, en particulier son comportement durant sa détention. Si le requérant entend critiquer l'appréciation portée par le préfet du Val-d'Oise sur son comportement, une telle critique relève du bien-fondé du jugement attaqué et n'en affecte pas la régularité. Par suite, le moyen doit être écarté.

4. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-d'Oise n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. C..., en particulier de son comportement d'ensemble. Par suite, le moyen doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne de l'arrêté d'expulsion :

5. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Sous réserve des dispositions des articles L. 521-2, L. 521-3 et L. 521-4, l'expulsion peut être prononcée si la présence en France d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public. ". Aux termes de l'article R. 522-1 du même code, alors applicable : " L'autorité administrative compétente pour prononcer l'expulsion d'un étranger en application de l'article L. 521-1, après accomplissement des formalités prévues à l'article L. 522-1, est le préfet de département et, à Paris, le préfet de police. " :

6. L'autorité compétente pour prononcer une mesure d'expulsion d'un étranger en application de l'article L. 521-1 du code d'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile, qui a pour objet de prévenir les atteintes à l'ordre public qui pourraient résulter du maintien d'un étranger sur le territoire français, doit caractériser l'existence d'une menace grave au vu du comportement de l'intéressé et des risques objectifs que celui-ci fait peser sur l'ordre public. Les infractions pénales commises par un étranger ne sauraient, à elles seules, justifier légalement une mesure d'expulsion et ne dispensent pas l'autorité compétente d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace grave pour l'ordre public. L'autorité ci-dessus peut légalement prendre en compte l'état de santé mental de l'intéressé comme un élément de nature à caractériser l'existence d'une telle menace à l'ordre public, alors même que cet état n'atteindrait pas un degré de gravité suffisant pour justifier son hospitalisation d'office. Lorsque l'administration se fonde sur l'existence d'une telle menace pour prononcer l'expulsion d'un étranger, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les faits qu'elle invoque à cet égard sont de nature à justifier légalement sa décision.

7. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a été condamné le 25 mars 2016 à une peine d'emprisonnement de huit ans par la cour d'assises du Val-de-Marne pour avoir le 2 juillet 2005 volontairement exercé des violences sur la personne de sa concubine ayant entraîné la mort sans intention de la donner. L'intéressé a également été l'auteur le 17 mai 2011 des infractions de faux ou usage de faux et de conduite d'un véhicule sans être titulaire du permis de conduire. Le requérant se prévaut de l'ancienneté de ces infractions à la date de la mesure d'expulsion litigeuse et des circonstances que la commission d'expulsion a émis un avis défavorable à son expulsion lors de sa séance du 29 juin 2018 et qu'il a été admis au bénéfice du régime de la libération conditionnelle à compter du 23 décembre 2018 jusqu'à la fin de sa peine le 8 février 2020 par un jugement du 7 février 2018 du juge de l'application des peines à la Cour d'appel de Rouen. Toutefois, compte tenu de la nature et de la gravité des infractions que M. C... a commises en 2005, de la réitération de son comportement délictuel en 2011 alors qu'il était placé sous contrôle judiciaire, de sa personnalité regardée par les experts comme étant de type " dyssocial " et à raison de laquelle l'intéressé ne justifie pas d'une prise en charge médicale continue adaptée, le préfet du Val-d'Oise établit l'existence d'une menace grave au vu du comportement de l'intéressé et des risques objectifs que sa présence sur le territoire français fait peser sur l'ordre public. Dès lors, les faits invoqués par le préfet du Val-d'Oise sont de nature à justifier légalement la décision d'expulsion prise le 2 juillet 2018 à l'encontre de M. C....

8. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

9. M. C... se prévaut de l'ancienneté de sa présence sur le territoire français, de sa vie commune avec une ressortissante de la République du Congo, régulièrement installée, qu'il a épousée le 17 septembre 2011 et dont il a eu un enfant né le 11 octobre 2020 en France, des formations qu'il a acquises et d'une activité professionnelle. Toutefois, l'intéressé, qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de dix ans et qui y a exercé plusieurs emplois précaires, ne justifie pas d'une insertion durable dans la société française, en particulier sur les plans professionnel et privé, nonobstant l'ancienneté de sa présence en France grevée par plus de quatre années de détention et d'incarcération. En outre, l'intéressé n'établit pas que la vie familiale avec son épouse et leur enfant et la scolarisation de celui-ci ne pourraient se poursuivre en République démocratique du Congo où vivent ses quatre frère et soeurs et l'une de ses filles, la seconde résidant en Angola, ou alors en République du Congo dont elle est originaire, le droit au respect de la vie privée et familiale ne pouvant d'ailleurs s'interpréter comme comportant pour un État l'obligation générale de respecter le choix, par les couples mariés, de leur pays de résidence. Pour ces raisons et eu égard au comportement de M. C... mentionné au point 7, la mesure d'expulsion prise à son encontre par le préfet du Val-d'Oise n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excédant ce qui est nécessaire à la défense de l'ordre public. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

2

N° 20VE00603


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE00603
Date de la décision : 04/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-02 Étrangers. Expulsion.


Composition du Tribunal
Président : M. BRUMEAUX
Rapporteur ?: M. Benoist GUÉVEL
Rapporteur public ?: M. BOUZAR
Avocat(s) : MBOMBO MULUMBA

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-06-04;20ve00603 ?
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