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04/06/2021 | FRANCE | N°19VE01989

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 04 juin 2021, 19VE01989


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme O... E..., M. B... M..., Mme L... I..., M. K... J..., Mme H... G... et M. K... P... ont demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la délibération n° 1871 du 28 février 2017 du conseil municipal de Bièvres prononçant la vente d'une allée privative de l'immeuble appartenant au domaine privé de la commune sis 1 A, rue Léon Mignotte et 9, rue de la Terrasse.

Par un jugement n° 1701792 du 29 mars 2019, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande et a mis à leur

charge une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Bièvres sur le fondement...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme O... E..., M. B... M..., Mme L... I..., M. K... J..., Mme H... G... et M. K... P... ont demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la délibération n° 1871 du 28 février 2017 du conseil municipal de Bièvres prononçant la vente d'une allée privative de l'immeuble appartenant au domaine privé de la commune sis 1 A, rue Léon Mignotte et 9, rue de la Terrasse.

Par un jugement n° 1701792 du 29 mars 2019, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande et a mis à leur charge une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Bièvres sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 29 mai 2019 et le 7 mai 2021, Mme E..., M. P..., Mme G..., M. J..., Mme I... et M. M..., représentés par Me Béguin, avocat, demandent à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler cette délibération ;

3° de mettre à la charge de la commune de Bièvres le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le tribunal a commis une erreur de droit en s'abstenant de relever d'office l'incompétence de la commune pour consentir une cession immobilière à une entreprise ;

- il a commis une erreur de fait en considérant que la parcelle n° 5 présentait un usage exclusivement fonctionnel ;

- il a commis une autre erreur de fait en considérant que la parcelle n'avait pas été cédée à vil prix ;

- il a commis une erreur de qualification juridique des faits en considérant que l'absence de consultation préalable du directeur départemental des finances publiques n'a pas été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision ;

- il a commis une erreur de droit en considérant comme inopérant le moyen tiré du défaut d'information des conseillers municipaux lors de l'adoption de la délibération du 31 mai 2016 procédant au déclassement des parcelles ;

- la commune n'était pas compétente pour consentir une cession immobilière à une entreprise ;

- la parcelle a été cédée au terme d'une procédure irrégulière à défaut de consultation du service des domaines conformément au 3ème alinéa de l'article L. 2241-1 du code général des collectivités territoriales ;

- la parcelle a été cédée à vil prix sans que cette cession soit justifiée par des motifs d'intérêt général et sans contrepartie suffisante.

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- les conclusions de M. Bouzar, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., substituant Me A..., pour Mme E... et autres et de Me F..., substituant Me N..., pour la commune de Bièvres.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., M. P..., Mme G..., M. J..., Mme I... et M. M..., conseillers municipaux de la commune de Bièvres, relèvent appel du jugement du 29 mars 2019 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération n° 1871 du 28 février 2017 décidant la vente d'une allée privative de l'immeuble appartenant au domaine privé de la commune de Bièvre sis 1 A, rue Léon Mignotte et 9, rue de la Terrasse.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, un moyen d'ordre public tiré de l'incompétence de l'auteur d'un acte administratif ne doit être soulevé d'office que s'il ressort manifestement des pièces du dossier au vu duquel le juge statue.

3. Contrairement aux allégations de Mme E... et autres, il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune de Bièvres a, en cédant un élément de son domaine privé, entendu accorder à la SCI Patrimoine Salameh une aide à l'immobilier d'entreprise dont les requérants soutiennent qu'elle relevait de la compétence de la communauté d'agglomération Versailles Grand Parc et échappait à celle de la commune, à l'aune des dispositions de l'article L. 1511-3 du code général des collectivités territoriales. Par suite, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges n'ont pas relevé d'office le moyen tiré de l'incompétence de la commune de Bièvres pour adopter la délibération contestée du 28 février 2017.

4. En second lieu, si les requérants soutiennent que le Tribunal administratif de Versailles a commis plusieurs erreurs de fait, une erreur de qualification juridique des faits et une erreur de droit, de tels moyens, qui relèvent du bien-fondé du jugement, ne sont pas de nature à affecter sa régularité.

Sur le bien-fondé du jugement contesté :

5. Aux termes de l'article L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'adoption de la délibération litigieuse : " I - La communauté d'agglomération exerce de plein droit au lieu et place des communes membres les compétences suivantes : / 1° En matière de développement économique : actions de développement économique dans les conditions prévues à l'article L. 4251-17 (...) ". Et aux termes de l'article L. 1511-3 du même code : " Dans le respect de l'article L. 4251-17, les communes, la métropole de Lyon et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre sont seuls compétents pour définir les aides ou les régimes d'aides et décider de l'octroi de ces aides sur leur territoire en matière d'investissement immobilier des entreprises et de location de terrains ou d'immeubles. (...) ".

6. Comme il est dit au point 3, il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune de Bièvres, en procédant à la cession de l'allée privative constituant le lot n° 5 de 49,30 m² de l'ensemble immobilier cadastré section F n° 494 et 573, aurait entendu attribuer à la SCI Salameh Patrimoine une aide en matière d'investissement immobilier. En tout état de cause, cette cession consentie au prix de 500 euros ne saurait sérieusement s'analyser en une telle aide, dans la mesure où le terrain ainsi vendu qui n'est ni bâti ni constructible et correspond à une allée privative qui n'est pas indispensable à l'accès aux lots n° 2, 3 et 4 composant le reste de l'ensemble immobilier et disposant de leurs propres accès. Par ailleurs, il n'est pas contesté qu'un refus de vendre le lot n°5 à l'acheteur du lot n° 1 était de nature à compromettre la vente du lot n° 1, ces deux lots étant fonctionnellement liés. Enfin, la SCI Salameh Patrimoine a acquis le lot n° 1 de l'ensemble immobilier pour une somme de 750 000 euros alors que la valeur de l'ensemble immobilier avait été estimée à 600 000 euros par le service des domaines, et l'estimation immobilière produite par les requérants en appel présente un caractère trop général. Dès lors il n'est pas établi que le prix de vente de 500 euros était inférieur au prix du marché à la date de la délibération contestée. Par suite, le moyen tiré de ce que la commune de Bièvres était incompétente pour verser une aide économique à une entreprise, que seule la communauté d'agglomération Versailles Grand Parc, dont elle est membre, pouvait attribuer, doit être écarté.

7. Si Mme E... et autres soutiennent que la vente du lot n° 5 de 49,30 m² à un prix de 500 euros constitue une cession à vil prix, il n'est pas établi, par la production d'un document à caractère général sur les prix de l'immobilier au sein de la commune de Bièvres au mois de mai 2019, et compte tenu des motifs mentionnés au point 6, que cette vente aurait été faite à un prix inférieur à celui du marché. Par suite, le moyen doit être écarté.

8. Aux termes de l'article L. 2241-1 du code général des collectivités territoriales : " (...) Toute cession d'immeubles ou de droits réels immobiliers par une commune de plus de 2 000 habitants donne lieu à délibération motivée du conseil municipal portant sur les conditions de la vente et ses caractéristiques essentielles. Le conseil municipal délibère au vu de l'avis émis de l'autorité compétente de l'Etat. Cet avis est réputé donné à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la saisine de cette autorité. ". La consultation du service des domaines prévue par ces dispositions ne présente pas le caractère d'une garantie. Il appartient en revanche au juge saisi d'une délibération prise en méconnaissance de cette obligation de rechercher si cette méconnaissance a eu une incidence sur le sens de la délibération attaquée.

9. Il ressort des pièces du dossier que la directrice départementale des finances publiques de l'Essonne a rendu, le 8 décembre 2015, un avis fixant à 600 000 euros la valeur estimée de l'ensemble immobilier cadastré section F n° 494 et n° 573. Cet avis précisait qu'une nouvelle consultation serait nécessaire si une opération de vente n'était pas réalisée dans le délai d'un an à compter de l'avis. Si la vente du lot n° 1 à la SCI Salameh Patrimoine a bien été effectuée dans ce délai, la vente du lot n° 5 à ce même acheteur n'a été autorisée que par la délibération attaquée du 28 février 2017, sans que le service des domaines ait été de nouveau saisi préalablement à cette délibération. Toutefois, en l'espèce, l'avis émis treize mois avant la cession litigieuse par le service des domaines ne peut être regardé, en l'absence de dispositions contraires, comme caduc, ni, en l'absence d'évolution significative du marché immobilier, comme privé de pertinence. En outre, la cession litigieuse porte sur une parcelle de 49,30 m² vendue pour la somme de 500 euros, alors que, comme il est dit au point 6 du présent arrêt, la SCI Salameh Patrimoine a acquis le lot n° 1 de l'ensemble immobilier pour la somme de 750 000 euros, soit pour un montant supérieur de 150 000 euros à la valeur estimée de cet ensemble par le service des domaines. Par suite, le moyen doit être écarté.

10. En outre, du fait de la succession des différentes délibérations adoptées comme de la teneur de l'avis rendu par le service des domaines, le conseil municipal de la commune de Bièvres a délibéré en connaissance de cause et a pu adopter une délibération motivée sur les conditions et caractéristiques essentielles de la cession du lot n° 5 au prix de 500 euros, en particulier sur la valeur estimée de l'ensemble immobilier et l'identité de l'acquéreur, la SCI Salameh Patrimoine, qui est désigné dans la délibération contestée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance d'information des conseillers municipaux doit être écarté.

11. Mme E... et autres ne peuvent utilement exciper, à l'encontre de la délibération n° 1871 du 28 février 2017 contestée portant sur l'aliénation du lot n° 5, de l'illégalité de la délibération n° 1789 du 31 mai 2016 approuvant le déclassement de ce lot, les deux délibérations ne constituant pas une opération complexe, et la seconde n'étant pas une mesure d'application de la première.

12. Eu égard, notamment, à la consistance et la configuration des lots n° 1 et 5, il n'est pas établi que la vente du lot n° 5, qui est certes liée à la nécessité pour la SCI Salameh Patrimoine, acquéreur du lot n°1 de 295 m², de disposer d'un accès à sa propriété distinct de l'accès public et d'un emplacement pour déposer ses déchets médicaux, aurait modifié substantiellement l'objet de la vente consentie à la société, justifiant que soit organisée, exclusivement pour la cession de du lot n° 5 de 49,30 m², une nouvelle procédure de publicité et de mise en concurrence. Au surplus, ainsi que l'a relevé le Tribunal administratif de Versailles, en dépit de la publication de l'offre de vente du lot n°1 dans le journal Le Parisien, seule la SCI Salameh Patrimoine avait soumis une offre d'achat à la commune pour ce lot. Par suite, le moyen doit être écarté.

13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande.

Sur les frais liés à l'instance :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que les requérants demandent à ce titre. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants le versement de la somme que la commune de Bièvres demande sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme E..., M. P..., Mme G..., M. J..., Mme I... et M. M... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Bièvres présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

2

N° 19VE01989


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE01989
Date de la décision : 04/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

24-02-02-01 Domaine. Domaine privé. Régime. Aliénation.


Composition du Tribunal
Président : M. BRUMEAUX
Rapporteur ?: M. Benoist GUÉVEL
Rapporteur public ?: M. BOUZAR
Avocat(s) : BEGUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-06-04;19ve01989 ?
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