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04/06/2021 | FRANCE | N°17VE02262

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 04 juin 2021, 17VE02262


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société AB Consultant, la société France Copter et M. A... C... ont demandé au Tribunal administratif de Versailles de condamner solidairement M. F..., le lycée Yves-Thépot, en qualité d'établissement support du groupement d'établissements (Greta) de Bretagne occidentale venu aux droits du Greta d'Armorique, la Mutuelle d'assurance des instituteurs de France et l'agent judiciaire du Trésor à verser à la société AB Consultant la somme de 509 665,52 euros au titre de son préjudice matériel, aux so

ciétés AB Consultant et France Copter la somme de 33 350 euros au titre de leur...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société AB Consultant, la société France Copter et M. A... C... ont demandé au Tribunal administratif de Versailles de condamner solidairement M. F..., le lycée Yves-Thépot, en qualité d'établissement support du groupement d'établissements (Greta) de Bretagne occidentale venu aux droits du Greta d'Armorique, la Mutuelle d'assurance des instituteurs de France et l'agent judiciaire du Trésor à verser à la société AB Consultant la somme de 509 665,52 euros au titre de son préjudice matériel, aux sociétés AB Consultant et France Copter la somme de 33 350 euros au titre de leur préjudice d'exploitation et la somme de 25 000 euros au titre de l'atteinte portée à leur image de marque, à M. C... la somme de 28 106 euros au titre de son préjudice matériel et la somme de 20 000 euros au titre de son préjudice d'agrément.

Par un jugement n° 1202948 du 30 mai 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 13 juillet 2017, le 30 mars 2019, le 18 décembre 2019, le 20 janvier 2020 et le 2 septembre 2020, la société AB Consultant, la société France Copter et M. A... C..., représentés par Me Conti, avocat, demandent à la Cour dans leurs dernières écritures :

1° de surseoir à statuer dans l'attente du jugement du Tribunal de grande instance d'Evry saisi en vue de statuer sur la responsabilité extracontractuelle de M. F... et du lycée Yves-Thépot ;

2° d'annuler le jugement du 30 mai 2017 ;

3° de condamner la Mutuelle d'assurance des instituteurs de France à verser à la société AB Consultant la somme de 509 665,52 euros au titre de son préjudice matériel, aux sociétés AB Consultant et France Copter la somme de 33 350 euros au titre de leur préjudice d'exploitation et la somme de 25 000 euros au titre de l'atteinte portée à leur image de marque, à M. C... la somme de 28 106 euros au titre de son préjudice matériel et la somme de 20 000 euros au titre de son préjudice d'agrément.

4° d'assortir ces sommes des intérêts et de leur capitalisation ;

5° de mettre à la charge de la Mutuelle d'assurance des instituteurs de France le versement à la société AB Consultant, à la société France Copter et à M. A... C... de la somme de 5 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que le jugement est infondé :

- le stagiaire et le lycée ont commis des fautes de nature à engager leur responsabilité ;

- la MAIF doit les indemniser, en application de l'assurance responsabilité civile et de l'extension de garantie souscrites, des préjudices qu'ils ont subis ;

- la clause d'exclusion de garantie invoquée par la MAIF n'est pas applicable.

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'éducation ;

- le code des assurances ;

- la loi n° 57-1424 du 31 décembre 1957 attribuant compétence aux tribunaux judiciaires pour statuer sur les actions en responsabilité des dommages causés par tout véhicule et dirigés contre une personne de droit public ;

- la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (MURCEF) ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- les conclusions de M. Bouzar, rapporteur public,

- et les observations de Me B... pour la Mutuelle d'assurance des instituteurs de France (MAIF).

Considérant ce qui suit :

1. La société AB Consultant, la société France Copter et M. A... C... relèvent régulièrement appel du jugement n° 1202948 du 30 mai 2017 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur requête tendant à la condamnation de l'Etat (agence judiciaire du Trésor), du lycée Yves-Thépot de Quimper, établissement public local d'enseignement support du Greta de Bretagne occidentale venant aux droits du lycée de Morlaix, établissement support du Greta d'Armorique, de M. E... F..., stagiaire en milieu professionnel, et de la Mutuelle d'assurance des instituteurs de France (MAIF), assureur de l'établissement support ci-dessus, à les indemniser de leur préjudice matériel, de leur préjudice d'exploitation, de l'atteinte portée à leur image de marque et de leur préjudice d'agrément qu'ils estiment avoir subis du fait des dommages causés par ce stagiaire à des hélicoptères leur appartenant.

Sur les conclusions à fins de sursis à statuer :

2. Dans la mesure où, par un jugement en date du 8 novembre 2019, devenu définitif, le Tribunal de grande instance d'Evry s'est prononcé sur les conclusions de M. C..., la société France Copter et la société AB Consultant tendant à la mise en cause de la responsabilité du lycée Yves-Thépot de Quimper, leurs conclusions à fins de sursis à statuer présentées devant la Cour sont devenues sans objet. Il n'y a pas lieu d'y statuer.

Sur les conclusions dirigées à l'encontre de la MAIF :

3. Aux termes de l'article L. 124-3 du code des assurances : " Le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable. L'assureur ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui, tant que ce tiers n'a pas été désintéressé, jusqu'à concurrence de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité de l'assuré. ".

4. Si l'action directe ouverte par ces dispositions à la victime d'un dommage ou à l'assureur de celle-ci subrogé dans ses droits, contre l'assureur de l'auteur responsable du sinistre, tend à la réparation du préjudice subi par la victime, elle se distingue de l'action en responsabilité contre l'auteur du dommage en ce qu'elle poursuit l'exécution de l'obligation de réparer qui pèse sur l'assureur en vertu du contrat d'assurance.

En ce qui concerne la détermination des responsabilités :

5. Il résulte de l'instruction que M. E... F..., qui est élève du Greta d'Armorique dont l'établissement support est le lycée de Morlaix, effectuait un stage d'application en entreprise au sein de la société AB Consultant, implantée à l'aérodrome de Cerny situé à la Ferté-Alais (91), dans le cadre d'une convention signée les 5 et 17 octobre 2006. Le 6 avril 2007, alors qu'il était au volant d'un véhicule tractant une plateforme supportant un hélicoptère de type Alouette II et réalisait une marche arrière, il heurta un ou deux hélicoptères au sol de type Bell (47 et 206).

6. En premier lieu, le stagiaire, M. F..., s'il est resté durant son stage d'application en milieu professionnel sous statut scolaire et sous l'autorité et la responsabilité du chef d'établissement de formation, en l'occurrence le lycée de Morlaix, établissement support du Greta d'Armorique, où il préparait un baccalauréat professionnel Aéronautique, ce stagiaire pouvait procéder à des manoeuvres ou manipulations sur les machines, produits ou appareils de production. Dans ces conditions, il n'était pas placé sous la surveillance des membres de l'enseignement public au sens de l'article L. 911-4 du code de l'éducation, en vertu duquel, dans sa rédaction applicable, dans tous les cas où la responsabilité de ces membres se trouve engagée à la suite ou à l'occasion d'un fait dommageable commis, soit par les élèves ou les étudiants qui leur sont confiés à raison de leurs fonctions, soit au détriment de ces élèves ou de ces étudiants dans les mêmes conditions, la responsabilité de l'Etat est substituée à celle desdits membres de l'enseignement qui ne peuvent jamais être mis en cause devant les tribunaux civils par la victime ou ses représentants. Par suite, ainsi que le demande le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, l'Etat doit, en tout état de cause, être mis hors de cause.

7. En deuxième lieu, si les requérants soutiennent que le stagiaire, M. E... F..., a commis une faute d'imprudence, la loi n° 57-1424 du 31 décembre 1957 susvisée interdit à Cour, à l'instar de toute juridiction administrative, de statuer sur toute action en responsabilité tendant à la réparation des dommages causés par un véhicule. En outre, par un jugement en date du 8 novembre 2019, devenu définitif, versé à l'instance, le Tribunal de grande instance d'Evry a rejeté les conclusions présentées par M. C..., la société France Copter et la société AB Consultant tendant à la mise en cause de la responsabilité extracontractuelle tant de M. F..., stagiaire, que du lycée de Morlaix, aux droits duquel vient le lycée Yves-Thépot de Quimper, à raison des faits survenus le 6 avril 2007. Ainsi, la juridiction judiciaire n'a pas retenu la responsabilité quasi-délictuelle de M. F... ni celle du lycée Yves-Thépot.

8. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 7 de la convention de stage : " En cas d'accident causé à des tiers ou à d'autres ouvriers de l'entreprise par le fait des stagiaires, à l'occasion de leur présence sur les lieux de travail, la responsabilité civile du chef d'entreprise ne peut être engagée, du fait de la souscription d'une assurance par le chef d'établissement support couvrant cette responsabilité ".

9. Dans la mesure où ils n'étaient pas parties à la convention de stage d'application signée les 5 et 17 octobre 2006 entre la société AB Consultant et le lycée de Morlaix, établissement support du Greta d'Armorique, la société France Copter et M. C... ne sont pas recevables à rechercher devant la Cour l'engagement de la responsabilité contractuelle du lycée Yves-Thépot de Quimper venant aux droits du lycée morlaisien à raison des agissements dommageables attribués au stagiaire. Par ailleurs, la société AB Consultant n'établit ni même n'allègue que sa responsabilité aurait été engagée, en particulier par la société France Copter ou M. C..., à défaut pour le lycée support du Greta d'avoir souscrit une assurance couvrant cette responsabilité. Enfin, comme l'a jugé à bon droit le Tribunal administratif de Versailles, les stipulations de l'article 7 de la convention ci-dessus n'ont ni pour objet ni pour effet de rendre ce lycée responsable des fautes commises par le stagiaire à l'égard de la société AB Consultant qui, accueillant M. F... en stage, n'avait pas la qualité de tiers au sens de ces stipulations.

En ce qui concerne l'action directe contre la MAIF :

10. En l'absence de responsabilité établie du lycée Yves-Thépot de Quimper, établissement support du Greta de Bretagne occidentale, venant aux droits du lycée de Morlaix, établissement support du Greta d'Armorique, à raison des agissements de M. F... le 6 avril 2007, l'action directe présentée conjointement par la société AB Consultant, la société France Copter et M. C... à l'encontre de la MAIF, assureur de ce lycée, sur le fondement de l'article L. 124-3 du code des assurances, doit être rejetée sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées en défense et sur les appels incident et provoqué du lycée Yves-Thépot.

Sur les frais liés à l'instance :

11. Par voie de conséquence du rejet de leur action directe, les conclusions présentées par la société AB Consultant, la société France Copter et M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge in solidum de la société AB Consultant, de la société France Copter et de M. C... le versement à la MAIF de la somme globale de 2 000 euros et au lycée Yves-Thépot de la même somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fins de sursis à statuer présentées par M. C..., la société France Copter et la société AB Consultant.

Article 2 : L'Etat est mis hors de cause.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par la société AB Consultant, la société France Copter et M. C... est rejeté.

Article 4 : Il est mis à la charge solidaire de la société AB Consultant, de la société France Copter et de M. C... le versement d'une somme globale de 2 000 euros à la MAIF et d'une somme totale de 2 000 euros au lycée Yves-Thépot de Quimper au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 17VE02262


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-015 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de l'enseignement.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. BRUMEAUX
Rapporteur ?: M. Benoist GUÉVEL
Rapporteur public ?: M. BOUZAR
Avocat(s) : SELAS ARCO-LEGAL

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Date de la décision : 04/06/2021
Date de l'import : 15/06/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 17VE02262
Numéro NOR : CETATEXT000043639398 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-06-04;17ve02262 ?
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