Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme F... A... C... épouse E... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 14 août 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement et sous astreinte de 100 euros par jour de retard en application de l'article L. 911-3 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1909945 du 11 mars 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 31 mars 2020, Mme A... C... épouse E..., représentée par Me B..., avocate, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement attaqué ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 14 août 2019 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que l'arrêté litigieux :
- est entaché d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les dispositions de l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de 1'Office français de 1'immigration et de 1'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en portant une atteinte caractérisée et disproportionnée à son droit à sa vie privée et familiale.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de 1'Office français de 1'immigration et de 1'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... C... épouse E..., ressortissante malienne née le 6 octobre 1940, a sollicité le renouvellement de son titre de séjour pour raisons médicales le 6 juin 2017. Par un arrêté du 14 août 2019, dont la requérante demande l'annulation, le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé le renouvellement de ce titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme A... C... épouse E... relève appel du jugement n° 1909945 du 11 mars 2020, par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, Mme A... C... épouse E... reprend en appel, en des termes identiques, les moyens de légalité externe soulevés en première instance, à l'encontre de l'arrêté litigieux. Dans ces conditions, ces moyens, relatifs à l'insuffisance de motivation et au défaut d'examen particulier, doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif au point 3. du jugement attaqué.
3. En deuxième lieu, en vertu du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est, sous réserve d'une menace pour l'ordre public, délivrée de plein droit à " l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ". L'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ".
4. L'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays (...) ".
5. L'article 3 de l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de 1'Office français de 1'immigration et de 1'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que : " L'avis du collège de médecins de l 'OFII est établi sur la base du rapport médical élaboré par un médecin de l'office selon le modèle figurant dans l'arrêté du 27 décembre 2016 mentionné à l'article 2 ainsi que des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays dont le demandeur d'un titre de séjour pour raison de santé est originaire. Les possibilités de prise en charge dans ce pays des pathologies graves sont évaluées, comme pour toute maladie, individuellement, en s'appuyant sur une combinaison de sources d'informations sanitaires. L'offre de soins s'apprécie notamment au regard de l'existence de structures, d'équipements, de médicaments et de dispositifs médicaux, ainsi que de personnels compétents nécessaires pour assurer une prise en charge appropriée de 1'affection en cause. L'appréciation des caractéristiques du système de santé doit permettre de déterminer la possibilité ou non d'accéder effectivement à l'offre de soins et donc au traitement approprié. Afin de contribuer à 1'harmonisation des pratiques suivies au plan national, des outils d'aide à 1'émission des avis et des références documentaires présentés en annexe II et III sont mis à disposition des médecins de l'office ". Enfin, selon 1'annexe II à cet arrêté : " C. - Points particuliers concernant les pathologies les plus fréquemment concernées : a) Les troubles psychiques et les pathologies psychiatriques. Les informations suivantes doivent en principe être recueillies : description du tableau clinique, critères diagnostiques, en référence à des classifications reconnues (classification internationale des maladies : CIMJO, ou manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux : DSM 5). Il est également important que soient précisés, lorsque ces éléments sont disponibles, la gravité des troubles, son suivi et les modalités de prise en charge mises en place. L'importance dans ce domaine de la continuité du lien thérapeutique (lien patient-médecin) et du besoin d'un environnement/entourage psycho social familial stable (eu égard notamment à la vulnérabilité particulière du patient) doit être soulignée. Le problème des états de stress post-traumatique (ESPT) est fréquemment soulevé, notamment pour des personnes relatant des violences, tortures, persécutions, traitements inhumains ou dégradants subis dans le pays d'origine. La réactivation d'un ESPT, notamment par le retour dans le pays d'origine, doit être évaluée au cas par cas (...) ".
6. En vertu des dispositions précitées, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dont l'avis est requis préalablement à la décision du préfet relative à la délivrance de la carte de séjour prévue au 11° de l'article L. 313-11, doit accomplir sa mission dans le respect des orientations générales définies par l'arrêté du ministre chargé de la santé du 5 janvier 2017 et émettre son avis dans les conditions fixées par l'arrêté du 27 décembre 2016 des ministres chargés de l'immigration et de la santé. S'il est saisi, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus, d'un moyen relatif à l'état de santé du demandeur, il appartient au juge administratif, lorsque le demandeur lève le secret relatif aux informations médicales qui le concernent en faisant état de la pathologie qui l'affecte, de se prononcer sur ce moyen au vu de l'ensemble des éléments produits dans le cadre du débat contradictoire et en tenant compte, le cas échéant, des orientations générales fixées par l'arrêté du 5 janvier 2017.
7. Mme A... C... épouse E... soutient que l'arrêté en litige méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les dispositions de l'arrêté du 5 janvier 2017 susmentionné, dès lors que souffrant d'un diabète de type 2 qui a été tardivement diagnostiqué, les médecins du collège de l'OFII auraient inexactement apprécié son impossibilité d'accéder effectivement aux soins appropriées dans son pays d'origine. Elle fait valoir, en outre, que son état de santé s'est dégradé, en raison d'une démence vasculaire dégénérative, ainsi que plusieurs pathologies ophtalmiques, qui la rendent vulnérable, alors qu'elle a 80 ans et qu'elle ne pourrait bénéficier de soins au Mali. Toutefois, les nombreuses ordonnances, ainsi que les certificats médicaux, notamment ceux des 3 et 21 juillet 2017 et du 28 mai 2019, versés au débat et qui se bornent, tout au plus, à mentionner que pour des raisons économiques le traitement approprié ne serait pas accessible à la requérante dans son pays d'origine, ne permettent pas de faire présumer son impossibilité d'accéder effectivement à des soins appropriés pour ses pathologies au Mali. En particulier, elle n'établit pas que son impécuniosité ou celle de sa famille résidant au Mali l'empêcherait d'y accéder. Enfin, si elle soutient qu'elle serait vulnérable à la Covid-19, d'une part, cette circonstance n'a d'incidence que sur l'exécution de l'arrêté litigieux et, d'autre part, la pandémie a débuté postérieurement à la date de cet arrêté. Par suite, ces moyens doivent être écartés.
8. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Mme A... C... épouse E... soutient qu'elle est entrée en France le 27 juillet 2015, à l'âge de 75 ans et qu'étant veuve, elle est venue rejoindre deux de ses filles, dont une qui la prend en charge, et ses petits-enfants, de nationalité française. Toutefois, Mme A... C... épouse E... ne justifiait que de quatre ans environ de durée de séjour à la date de la décision attaquée, alors qu'elle ne conteste pas que deux de ses enfants résident dans son pays d'origine, auprès desquels elle ne démontre pas qu'elle ne pourrait pas vivre. En outre, elle ne démontre ni l'intensité de ses attaches familiales en France, ni une insertion suffisamment pérenne dans la société française. Par suite, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Elle n'a donc pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... C... épouse E... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 14 août 2019 du préfet de la Seine-Saint-Denis. Ses conclusions à fin d'annulation doivent être rejetées, de même, par voie de conséquence, que les conclusions aux fins d'injonction et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... C... épouse E... est rejetée.
N° 20VE01080 5