Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme C... A... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011, et des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1607410 du 15 novembre 2018, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 janvier et 12 juillet 2019, M. et Mme A..., représentés par Me Wenish, avocat, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté leurs conclusions afférentes au transfert de sommes en provenance de l'étranger ;
2°) de prononcer la réduction sollicitée à hauteur de 154 354 euros correspondant aux redressements afférents au transfert de sommes en provenance de l'étranger.
Ils soutiennent que :
- le service a irrégulièrement substitué, à l'occasion du rejet de leur réclamation préalable, à titre de base légale, l'article 1649 A du code général des impôts à l'article 1649 quater A, dans la mesure où ils ont été privés de la garantie découlant du troisième alinéa de l'article 1649 A telle que rappelée par le Conseil d'État dans sa décision nos 358520 et 358562 du 17 mars 2014 ; ils n'ont été destinataires d'aucune demande avant la réception de la proposition de rectification ;
- l'administration aurait dû taxer la somme transférée depuis le Luxembourg sur le fondement de l'article 1649 A du code général des impôts, à l'impôt sur les sociétés, entre les mains de la SCI Ukas ; si elle entendait taxer cette somme entre leurs mains, elle aurait dû procéder à une demande d'éclaircissements ou de justifications en application de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales puis, en l'absence de réponse ou en cas de réponse insuffisante, imposer la somme en tant de revenu d'origine indéterminée en application de l'article L. 69 du même livre.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Au cours de la vérification de comptabilité de la SCI Ukas, société dont Mme A... est la gérante de droit et dont M. A... a été reconnu comme étant le véritable maître de l'affaire, le service a constaté l'existence d'une somme de 154 354 euros portée au crédit du compte bancaire de la société, correspondant à un chèque de banque émis par un établissement bancaire situé au Luxembourg. La société n'a fourni aucune information sur la nature exacte de cette somme, aucun rapprochement n'a pu être effectué entre ce montant et les ventes immobilières réalisées par la société, et M. A... a déclaré, dans le cadre du débat oral et contradictoire, que cette somme constituait un apport de sa part dans le but de réaliser des acquisitions immobilières. Faute pour M. A... d'avoir rempli les obligations déclaratives prévues à l'article L. 152-1 du code monétaire et financier, le service a regardé ce transfert de fonds en provenance du Luxembourg comme un revenu imposable au titre de l'article 1649 quater A du code général des impôts. Les impositions supplémentaires correspondantes ont été mises en recouvrement les 31 mars et 30 juin 2014. En réponse aux réclamations préalables de M. et Mme A... datées des 14 mai et 27 août 2014, l'administration fiscale a substitué, en tant que base légale, l'article 1649 A à l'article 1649 quater A compte tenu des affirmations de M. A... et après avoir relevé que ce dernier n'avait déclaré aucun compte ouvert à l'étranger. M. et Mme A... font appel du jugement du 15 novembre 2018 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu'il a rejeté les conclusions de leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujetti, de ce chef, au titre de l'année 2010.
2. En premier lieu, si l'administration peut, à tout moment de la procédure, invoquer un nouveau motif de droit propre à justifier l'imposition, une telle substitution de base légale ne saurait avoir pour effet de priver le contribuable d'une garantie de procédure attachée à la nouvelle base légale invoquée.
3. Aux termes de l'article 1649 A du code général des impôts : " (...) / Les personnes physiques (...), domiciliées (...) en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus (...), les références des comptes ouverts, utilisés ou clos à l'étranger. (...) / Les sommes, titres ou valeurs transférés à l'étranger ou en provenance de l'étranger par l'intermédiaire de comptes non déclarés dans les conditions prévues au deuxième alinéa constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables. " et aux termes de l'article 1649 quater A du même code, dans sa rédaction applicable : " Les transferts des sommes, titres ou valeurs réalisés par des personnes physiques vers un Etat membre de l'Union européenne ou en provenance d'un Etat membre de l'Union européenne sont effectués conformément à l'article L. 152-1 du code monétaire et financier. / Les sommes, titres ou valeurs transférés vers l'étranger ou en provenance de l'étranger constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables lorsque le contribuable n'a pas rempli les obligations prévues à l'article L. 152-1 du code monétaire et financier et au règlement (CE) n° 1889/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 26 octobre 2005, relatif aux contrôles de l'argent liquide entrant ou sortant de la Communauté. ". Ces dispositions, qui instaurent respectivement l'obligation, pour tout contribuable domicilié en France, de déclarer à l'administration les références de tout compte bancaire dont il est titulaire à l'étranger et l'obligation, pour ces mêmes contribuables de déclarer les sommes d'un montant supérieur à 10 000 euros transférées en provenance d'un État membre de l'Union européenne, prévoient qu'à défaut de telles déclarations, les fonds ayant transité par ce compte ou provenant de l'étranger constituent des revenus imposables, sauf, pour le contribuable titulaire du compte ou bénéficiaire du transfert, à apporter la preuve que les sommes transférées n'entrent pas dans le champ d'application de l'impôt, en sont exonérées ou ont déjà été soumises à l'impôt. Ces dispositions impliquent que l'administration qui envisage d'imposer des sommes sur l'un ou l'autre de ces fondements mette au préalable le contribuable en mesure d'apporter cette preuve.
4. M. et Mme A... contestent la régularité de la substitution de base légale ainsi opérée à l'occasion de la décision d'admission partielle de leurs réclamations du 18 janvier 2016, en faisant valoir qu'elle a eu pour effet de les priver de la garantie tenant à ce qu'ils soient mis en mesure, avant le recouvrement des impositions supplémentaires, d'apporter la preuve que la somme transférée n'entre pas dans le champ d'application de l'impôt, en est exonérée ou a déjà été soumise à l'impôt. Toutefois, il résulte de l'instruction que les redressements litigieux ont été établis par la voie de la procédure de redressement contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales et qu'ainsi, M. et Mme A... ont été mis à même de présenter leurs observations sur l'origine et le caractère imposable du crédit en litige en réponse à la notification motivée des bases d'imposition figurant au sein de la proposition de rectification du 20 août 2013. La circonstance que ces redressements étaient fondés, dans cette proposition de rectification puis dans la réponse aux observations du contribuable, sur l'article 1649 quater A du code général des impôts et non sur l'article 1649 A est, sur ce point, sans incidence dès lors, ainsi qu'il est indiqué au point précédent, que les garanties prévues par ces deux articles sont identiques. M. et Mme A... ne sont pas fondés à opposer, à cet égard, le fait qu'aucun document, tel une mise en demeure, ne leur a été adressé avant la notification de la proposition de rectification, dès lors que la garantie prévue par les articles 1649 A et 1649 quater A doit nécessairement être offerte au contribuable entre la notification des bases d'imposition, qui cristallise les impositions en litige, et leur mise en recouvrement et que la voie de la procédure de redressement contradictoire de droit commun permet à la personne physique, l'association ou la société n'ayant pas la forme commerciale à laquelle l'administration oppose la présomption légale de revenus d'origine indéterminée posée par les articles 1649 A et 1649 quater A, d'apporter des informations justifiant que cette présomption soit écartée.
5. En second lieu, M. et Mme A... contestent les redressements ainsi opérés en faisant valoir que l'administration aurait dû taxer la somme litigieuse sur le fondement de l'article 1649 A du code général des impôts, à l'impôt sur les sociétés, entre les mains de la SCI Ukas et que, si elle entendait taxer cette somme entre leurs mains, elle aurait dû procéder à une demande d'éclaircissements ou de justifications en application de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales puis, en l'absence de réponse ou en cas de réponse insuffisante, imposer la somme en tant de revenu d'origine indéterminée en application de l'article L. 69 du même livre.
6. Toutefois et d'une part, il résulte de l'instruction qu'à l'occasion des opérations de contrôle, le vérificateur a relevé que M. A... devait être regardé comme le véritable maître de l'affaire et que la somme de 154 354 euros ne correspondait à aucune opération immobilière ou toute autre opération de la SCI Ukas. Il a, en conséquence, regardé cette somme comme un apport personnel de M. A.... Il résulte également de l'instruction que M. A... a, au cours des opérations de contrôle, confirmé ce point en indiquant que cet apport devait permettre de financer de nouvelles acquisitions immobilières dans le cadre de l'activité de marchand de biens de la société. M. et Mme A... ne contestent pas la réalité de ces constats et des propos tenus, ni d'ailleurs avoir recouru à un compte ouvert au Luxembourg non déclaré à l'administration fiscale française. Dans ces conditions, étant le destinataire réel de la somme litigieuse et n'ayant déclaré aucun compte ouvert à l'étranger, c'est à bon droit que M. A... a été imposé, à titre personnel, à raison de cette somme transférée de l'étranger, en application de l'article 1649 A du code général des impôts, à défaut d'avoir fait échec à la présomption qu'il édicte. La circonstance que cette somme a été utilisée en tant qu'apport à la SCI Ukas et encaissée sur le compte bancaire de la société, ce qui a constitué un acte de disposition de la somme par M. A..., est à cet égard sans incidence.
7. D'autre part, il résulte des termes de l'article 1649 A du code général des impôts, cités au point 3. du présent arrêt, qu'en l'absence de déclaration par un contribuable des références du compte bancaire dont il est titulaire à l'étranger, les fonds ayant transité par ce compte constituent des revenus imposables, sauf preuve contraire. Dès lors, l'administration pouvait, sur le fondement de cette seule présomption non renversée, imposer la somme de 154 354 euros entre les mains de M. A... en tant que revenus d'origine indéterminée, à l'issue d'une procédure de rectification contradictoire, sans avoir à effectuer de demande préalable au titre de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, ni à recourir, en l'absence de réponse ou en cas de réponse insuffisante, à la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 69 du même livre. Il résulte d'ailleurs des termes mêmes des dispositions de l'article 1649 A que le service ne peut recourir à une procédure de taxation d'office en la matière, mais doit mettre en oeuvre la procédure et la garantie susmentionnées.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande en tant qu'elle portait sur la somme de 154 354 euros transférée depuis le Luxembourg.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.
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N° 19VE00052