Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Versailles de condamner le centre hospitalier de Rambouillet à lui verser la somme totale de 116 497,5 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis à la suite de l'intervention chirurgicale du 17 janvier 2014.
Par un jugement n° 1404108 du 23 mars 2018, le tribunal administratif de Versailles a condamné le centre hospitalier de Rambouillet à verser à la requérante le somme de 32 396 euros et au Régime social des travailleurs indépendants centre celles de 15 580,30 euros au titre des débours exposés et de 1 066 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les enregistrés les 17 mai et 26 novembre 2018, Mme D..., représentée par Me Bizard, avocat, demande à la cour :
1°) de réformer le jugement ;
2°) de condamner le centre hospitalier de Rambouillet à lui verser, en réparation de ses préjudices, un montant de 116 497,5 euros ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Rambouillet la somme de 4 000 euros en application du L. 716-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Mme D... soutient que les sommes qui lui ont été accordées par les premiers juges sont insuffisantes à réparer les préjudices subis.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de Mme Grossholz, rapporteur public,
- et les observations de Me C... pour Mme D....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... D..., née le 20 juin 1970, s'est présentée le 1er janvier 2014 aux urgences du centre hospitalier de Rambouillet pour des douleurs épigastriques. Une lithiase vésiculaire est diagnostiquée en raison de laquelle l'intéressée a subi une cholécystectomie le 17 janvier suivant à la suite de laquelle apparaissent des nausées et des difficultés à s'alimenter puis un ictère. Le 28 janvier 2014, une interruption complète de la voie biliaire principale est diagnostiquée dont l'intéressée est opérée le lendemain. Par jugement n° 1404108 du 23 mars 2018, dont Mme D... relève appel, le tribunal administratif de Versailles a, sur le fondement de la responsabilité pour faute, condamné le centre hospitalier à verser à la requérante la somme de 32 396 euros et au Régime social des indépendants centre la somme de 15 580,30 euros et celle de 1 066 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :
2. Mme D... conteste l'évaluation des frais d'assistance d'une tierce personne effectuée par le tribunal en raison du déficit fonctionnel temporaire dont elle a souffert et dont elle estime qu'ils doivent être évalués à 2 heures par jour pendant 77 jours sur la base d'une rémunération horaire de 15 euros. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que l'état de l'intéressée aurait nécessité de recourir à l'assistance d'une tierce personne à domicile pour les actes de la vie courante au-delà de la période allant du 8 février au 3 mars 2014, mentionnée dans l'attestation en date du 8 avril 2014 rédigée par la mère de la requérante et produite par cette dernière. Eu égard au niveau de technicité requis et compte tenu du salaire minimal moyen pour la période en cause le taux horaire moyen de rémunération à retenir doit être fixé à 13 euros, Afin de tenir compte des congés payés et des jours fériés, il y a lieu de calculer l'indemnisation sur la base d'une année de 412 jours. En allouant au titre de ce chef de préjudice un montant de 696 euros, les premiers juges ont fait une juste évaluation de ce chef de préjudice.
3. Mme D... soutient que l'incidence professionnelle du dommage qu'elle a subi n'a pas été suffisamment indemnisée par les premiers juges. Il résulte toutefois de l'instruction que si le rapport d'expertise déposé le 20 mai 2017 indique que l'intéressée a cessé le 17 janvier 2014 une activité d'auto-entrepreneur de vente d'articles de maroquinerie qu'elle avait débutée le 9 janvier 2014, soit quelques jours avant la survenue de son dommage, elle est en mesure de reprendre une activité comparable en dépit des troubles digestifs dont elle souffre et qui correspondent à un déficit fonctionnel permanent de 5 %. Les premiers juges ont ainsi suffisamment indemnisé le préjudice lié à la perte d'une chance de succès de son activité commerciale, à la pénibilité accrue du travail et à la relative réduction des perspectives professionnelles de l'intéressée en lui allouant à ce titre un montant de 7 000 euros.
En ce qui concerne les préjudices extrapatrimoniaux :
4. Si Mme D... soutient que le déficit fonctionnel temporaire qu'elle a subi n'a pas été suffisamment indemnisé par les premiers juges, il résulte de l'instruction et plus précisément du rapport d'expertise déposé le 20 mai 2017 que ce déficit a été de 50 % pendant un mois, de 25 % pendant deux mois puis de 10 % pendant près de neuf mois. En fixant l'indemnité réparatrice à la somme de 1 100 euros, les premiers juges n'ont pas sous-évalué ce chef de préjudice.
5. Si Mme D... soutient que les souffrances endurées n'ont pas été suffisamment indemnisées par les premiers juges, il résulte de l'instruction et plus précisément du rapport d'expertise déposé le 20 mai 2017 que l'ensemble des souffrances de toutes sortes ressenties peuvent être évaluées à 4 sur une échelle de 7. En allouant à ce titre une somme de 8 000 euros, les premiers juges ont suffisamment réparé ce chef de préjudice.
6. Si Mme D... soutient que son déficit fonctionnel permanent n'a pas été suffisamment indemnisé par les premiers juges, il résulte de l'instruction et plus précisément du rapport d'expertise déposé le 20 mai 2017 que ce déficit peut être évalué à 5 %. Compte tenu de l'âge de la requérante, 44 ans en janvier 2015, date de la consolidation, les premiers juges, en l'évaluant à 5 600 euros, en ont fait une juste appréciation.
7. Mme D... soutient que les premiers juges auraient insuffisamment indemnisé son préjudice d'agrément résultant de l'impossibilité de poursuivre la pratique de certaines activités, dont les promenades, les sorties au cinéma et l'équitation. Toutefois, il résulte de l'instruction, plus précisément du rapport d'expertise déposé le 20 mai 2017, que l'intéressée " peut reprendre ses activités d'agrément, mais avec une intensité moindre ". En allouant une somme de 3 000 euros à ce titre, les premiers juges ont ainsi entièrement indemnisé ce chef de préjudice.
8. Il ne résulte pas de l'instruction qu'en évaluant le préjudice sexuel de l'intéressée à 5 000 euros en raison de l'absence qu'elle allègue de libido et d'activité sexuelle depuis la survenue du dommage, les premiers juges auraient insuffisamment indemnisé ce chef de préjudice.
9. Les premiers juges ont alloué 2 000 euros au titre d'un préjudice esthétique de 2/7 " représenté par une cicatrice de laparotomie sous costale droite et une cicatrice d'orifice de drainage ", comme il résulte du rapport d'expertise. La requérante soutient en premier lieu que cette évaluation serait insuffisante dès lors qu'elle ne tient pas compte de son préjudice esthétique temporaire résultant d'une cicatrice sur le ventre. La réalité de ce préjudice n'est toutefois pas établie dès lors qu'il n'en résulte pas d'altération majeure de l'apparence physique visible par des tiers. Ainsi comme le fait valoir le centre hospitalier, ce préjudice n'est pas établi en l'espèce. Mme D... soutient en second lieu que l'évaluation ne tient pas compte d'une troisième cicatrice. Toutefois, l'existence de celle-ci n'est pas établie par la seule production de photographies ne permettant pas de distinguer trois cicatrices différentes. Il en résulte qu'en allouant un montant de 2 000 euros, les premiers juges ont suffisamment indemnisé ce chef de préjudice.
10. Aux termes de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique : " Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus (...) ". Indépendamment de la perte d'une chance de refuser l'intervention, le manquement des médecins à leur obligation d'informer le patient des risques courus ouvre pour l'intéressé, lorsque ces risques se réalisent, le droit d'obtenir réparation des troubles qu'il a subis du fait qu'il n'a pas pu se préparer à cette éventualité. S'il appartient au patient d'établir la réalité et l'ampleur des préjudices qui résultent du fait qu'il n'a pas pu prendre certaines dispositions personnelles dans l'éventualité d'un accident, la souffrance morale qu'il a endurée lorsqu'il a découvert, sans y avoir été préparé, les conséquences de l'intervention doit, quant à elle, être présumée. Mme D... soutient que c'est à tort que les premiers juges ont refusé d'indemniser ce chef de préjudice au motif qu'elle n'en aurait pas établi la réalité, inversant la charge de la preuve.
11. Il résulte de l'instruction, plus précisément du rapport d'expertise enregistré le 20 mai 2017, que la requérante n'a pas été dûment informée des risques inhérents à la cholécystectomie qui, dans environ deux cas sur mille, se solde par un traumatisme des voies biliaires. Toutefois l'intéressée n'établit aucun préjudice propre lié à cette omission d'information des risques, son dommage ne résultant pas de la survenue d'un tel risque mais d'une faute technique commise par le chirurgien lors de sa réalisation. La souffrance morale endurée lors de la découverte des conséquences de l'intervention a été prise en compte et réparée dans le cadre du préjudice de souffrances au point 5 du présent arrêt.
12. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions indemnitaires présentées par Mme D... en appel doivent être rejetées.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ". Ces dispositions font obstacle à ce que la somme demandée par Mme D... soit mise à la charge du centre hospitalier de Rambouillet, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
N° 18VE01717 2
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